Nous allons vous proposer de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 105, et de la mission, mais non pas parce que les chiffres sont extraordinaires puisque globalement les chiffres sont stables par rapport à l'année 2017. Le budget de la mission défense augmente de 5,2 %, le budget du ministère de l'Europe et des affaires étrangères augmente globalement de 2 % et le budget de la mission action extérieure de l'État diminue de 0,17 %. Ce ne sont donc pas les chiffres qui nous font adopter cette position favorable mais le fait que le Sénat a été entendu. Les recommandations émises par celui qui était rapporteur du budget l'année dernière, Christian Cambon, ont été, en partie, suivies d'effet. Il me semble qu'il faut retenir 5 points principaux sur ce budget, et je ne présenterai pas de façon détaillée les chiffres du programme qui figurent dans le rapport.
Je vais tout d'abord vous parler des deux lignes budgétaires les plus importantes qui représentent 40 % du programme 105, soit 757,6 millions d'euros en 2018. Les crédits dédiés aux contributions internationales obligatoires atteignent 372,7 millions d'euros en 2018 sont en légère diminution de 2,7 %. Je vous rappelle que ce n'est pas la France qui décide de ces contributions mais qu'elles sont déterminées en fonction de quotes-parts définies par le règlement des organisations internationales et en fonction de la croissance économique d'un pays. Cette évolution comporte de bonnes et de mauvaises surprises : par exemple la contribution à l'ONU augmente de 3,9 millions d'euros, la contribution à l'OTAN diminue de 3 millions d'euros. D'une manière générale ces contributions sont diminuées, que ce soit celle à l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), à l'agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), à l'organisation de coopération et de développement économique(OCDE), à l'organisation mondiale de la santé(OMS), ou à l'organisation internationale du travail (OIT).
Deuxième point retenir, les opérations de maintien de la paix (OMP), sont stables, pour atteindre 384,86 millions d'euros en 2018. Je vous rappelle que la France le 5e contributeur aux OMP. Ce sont 840 militaires et policiers français qui participent aux différentes opérations et -cela ne vous aura pas échappé, vous vous en souvenez-, lorsque nous avons auditionné M. Jean-Yves Le Drian avant la période budgétaire, il a consacré l'essentiel de son intervention à ces opérations et plus largement à la situation du Sahel. Il avait raison puisque, dans cette région, l'action se partage entre le ministère des armées et le ministère de l'Europe et des affaires étrangères : 4 000 hommes au titre de la défense et la participation des affaires étrangères au titre des contributions aux OMP dont je viens de vous parler. D'ailleurs, la ministre des armées était à Dakar en début de semaine pour convaincre les pays africains de relayer la France et d'amener 9000 hommes de manière à ce que nous réduisions notre présence militaire. Dans le même temps le ministre de l'Europe et des affaires étrangères était à Bruxelles pour trouver les moyens de financer les troupes africaines.
Le 3e point concerne le modèle de gestion immobilière du Quai d'Orsay, sur lequel nos précédents rapporteurs avaient exprimé plusieurs observations qui ont été au moins pour partie entendues. Je vous rappelle que le patrimoine du ministère de l'Europe et des affaires étrangères est évalué à plus de 4 milliards d'euros. Un tel patrimoine doit être entretenu au risque de se dévaloriser. Ce qui est inscrit au budget pour entretenir ce patrimoine consiste en 12 millions d'euros, on pourrait trouver ça ridicule ! En dehors de ces crédits, pour réaliser les grandes restructurations, on utilise le produit des cessions. On vend l'argenterie de la famille, et à force de vendre il n'en reste presque rien. Vous vous souvenez de la vente du campus de Kuala Lumpur, qui représentait une recette d'un niveau exceptionnel. Le ministère s'était toutefois vu appliquer une surcontribution au désendettement de l'État et n'avait pas perçu l'intégralité de la recette enregistrée. On avait déjà dû constater une perte liée au risque de change qui a ramené la recette attendue de 223 millions à 203 millions d'euros, mais de plus Bercy en a gardé presque la moitié et il est ainsi revenu au ministère beaucoup moins d'argent pour entretenir son patrimoine. Ce sont ainsi 207 millions d'euros en 4 ans qui ont abondé le compte d'affectation spéciale au titre du désendettement. Il a été réformé. Et cette année nous avons, lors de nos auditions, reçu l'assurance qu'aucune contribution sur le produit des cessions n'était prévue. En cela, notre commission a été entendue.
Un certain nombre de ventes est prévu en 2017 et en 2018. Le produit espéré pour chacune de ces deux années est de l'ordre de 20 millions d'euros. Les ventes ne sont toutefois pas encore toutes réalisées au titre de 2017 et incertaines au titre de 2018, alors que les crédits qu'elles représentent sont indispensables à la restructuration et à l'entretien du réseau diplomatique.
La question de ces cessions soulève de nouveau, - et vous vous y étiez particulièrement intéressé Monsieur le Président-, la problématique des dépenses des recettes en devises étrangères du programme 105. Les recommandations de notre commission ont été entendues, partiellement. En 2018 l'Agence France Trésor couvre enfin 80 % des contributions internationales payables en devises. Il reste 20 % non couverts. Il me semble qu'il faut aller plus loin et que la couverture du risque de change doit s'appliquer aux frais locatifs, au paiement des travaux d'entretien et paies des agents du réseau en devises étrangères et aux opérations de cession.
J'en viens maintenant à la modernisation de notre réseau diplomatique que nous recalibrons de différentes façons. Nous mettons en place des partenariats, notamment avec l'Allemagne et les services de l'Union européenne. Nous sommes assez avancés dans notre collaboration avec l'Allemagne qui prend la forme de constructions d'ambassades en commun, de colocalisation de services consulaires ou services culturels. De même avec Bruxelles, plusieurs dossiers de colocalisation ont abouti. En revanche je regrette que nous n'arrivions pas encore à mettre en oeuvre les complémentarités qui nous seraient très favorables avec le réseau britannique en Asie. Nous pourrions également avoir de nombreux partenariats avec un pays comme l'Espagne, très bien implanté en Amérique du Sud, et avec lequel nous entretenons d'excellentes relations diplomatiques.
Enfin, je voudrais revenir sur les postes de présence diplomatique, les fameux PPD, qui nous permettent de rester présents dans certains pays avec un format plus économique : un ambassadeur et un cadre B plutôt qu'un cadre C, plus deux à six contrats de droit local. L'extension du dispositif prévu en 2017 a bien eu lieu et 25 PPD ont donc été créés en tout. Ces postes me semblent bien fonctionner, même si toutes les économies attendues n'ont pas été réalisées. Dans les postes concernés qui étaient autrefois vus comme le lieu tranquille d'une fin de carrière honorable, on privilégiera désormais des ambassadeurs, souvent plus jeunes, en début de carrière, motivés par le défi qui consiste à faire bien avec peu de moyens sur un petit nombre de priorités. De ce point de vue-là, il me semble que l'expérience a bien fonctionné. Je sais bien que le programme est pour l'instant arrêté à 25 PPD, je pense qu'il faut faire preuve de pragmatisme dans ce domaine et ne pas se priver de cet outil. Il vaut mieux rester présents en plus petit format que de quitter un pays. J'avais questionné le ministre lors de son audition devant notre commission sur notre place au niveau international. Il est vrai que nous ne sommes plus que le 3e réseau derrière les États-Unis et la Chine et il est indéniable que la puissance de notre réseau renforce notre poids en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Pour ma part j'ai été frappé en lisant un compte rendu du Conseil de sécurité il y a 10 jours de constater qu'on ne parlait presque plus jamais des 5 membres permanents du Conseil. On parle des 5 plus 1, incluant ainsi l'Allemagne. Cela donne l'impression que les décisions importantes sont prises à 6. Notre position en tant que membre permanent n'est peut-être pas inscrite dans le marbre à vie.
C'est exact, mais elles diminuent en même temps que notre poids économique diminue face à la montée des pays dit émergents.
rapporteur. - L'évolution des moyens de fonctionnement des ambassades appelle une première remarque de ma part. Ils sont essentiels pour garantir la réussite des différentes priorités définies en 2018. Après avoir diminué de 4,6 % en 2017, ils sont stabilisés et s'établissent à 83,6 millions d'euros. Les efforts d'économie déjà réalisés depuis plusieurs années laissaient à penser que la marge d'action était désormais très réduite dans ce domaine. Cette stabilisation me semble donc appréciable.
Pour leur part, les crédits du titre 2 de la mission, c'est-à-dire la masse salariale, diminuent cette année de 15 millions d'euros, soit une baisse de 1,7 % par rapport à 2016. La réduction propre au programme 105 est de 9,4 millions d'euros et 50 équivalents temps plein travaillés (ETPT) sur les 100 ETPT supprimés dans le périmètre de la mission en 2018. Pour le programme 105, la diminution des crédits de personnel s'effectue au profit des dépenses d'investissement qui progressent de 12,35 millions d'euros et dans une moindre mesure des dépenses de fonctionnement qui augmentent de 3,97 millions d'euros. Toutefois, les emplois supprimés épargnent les secteurs propres au renforcement de la sécurité qui est l'une des grandes priorités du ministère.
Ainsi, les 25 emplois supplémentaires créés l'année dernière pour renforcer la coopération de défense et de sécurité devraient être maintenus, sous réserve que les crédits afférents soient bien prévus.
La sécurisation est d'une manière générale l'un des grands axes prioritaires du ministère depuis trois ans, et en 2018. Elle repose sur plusieurs piliers.
Le plan de renforcement des moyens de lutte antiterroriste et de protection des communautés et intérêts français à l'étranger bénéficiera de 52 millions d'euros de crédits hors personnel et 67 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2018.
Ce sont ainsi 37,23 millions d'euros qui sont consacrés au renforcement de la sécurisation du parc immobilier du ministère à l'étranger. Il s'agit là d'un effort nécessaire, urgent et sans doute de long terme ! Il est certain que nous ne pouvons plus nous contenter de renforcer les postes dits exposés, l'action terroriste aujourd'hui peut frapper n'importe quelle emprise. Nous avons tous en mémoire les récentes atteintes à notre réseau en Grèce, à Kaboul, et encore récemment au Liban. Ces crédits seront ainsi répartis : soit 22,16 millions d'euros pour la sécurité des ambassades, consulats et instituts français, 14,7 millions d'euros pour les établissements d'enseignement à l'étranger et 1 million d'euros pour les Alliances françaises.
Enfin, la coopération internationale en matière de lutte antiterroriste se traduit par le renforcement des crédits d'intervention de la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD), dont nous avons auditionné le Directeur. Il bénéficiera de 2 millions d'euros supplémentaires, sous réserve des remarques déjà formulées sur le manque de crédits inscrits en titre 2, qui devrait être résolu.
La coopération de sécurité et de défense dite coopération structurelle, ligne de dépenses dite « pilotable » du programme 105, par opposition aux lignes « contraintes » que sont les contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix et les dépenses de personnel, a souvent été la variable d'ajustement du programme 105. Ses crédits sont passés, en une dizaine d'années, de 106,41 à 62,90 millions d'euros. Nous l'avons regretté et dénoncé. Cette politique au fort effet de levier a vu enfin ses crédits augmenter en 2017. En 2018, les moyens sont stabilisés et il faut s'en féliciter puisque ces actions constituent ce que l'on appelle notre « premier bouclier au loin ».
Cette coopération interministérielle est devenue très réactive, loin des actions figées, elle est orientée par un comité d'orientation stratégique qui peut infléchir notablement, en cours d'année, lorsque la situation internationale l'exige, les priorités géographiques et thématiques de cette politique. Elle fait preuve de la réactivité attendue, comme en témoigne la liste de ses priorités pour la fin 2017 et 2018, décidées au plus haut niveau, qui comprend :
- l'appui à la force conjointe du G5 Sahel qui s'est vu dotée d'un poste de commandement,
- l'anticipation de la sortie de crise au Levant avec le Liban comme point focal. En 2018, 1,22 million d'euros devrait être consacré aux actions en faveur des forces de sécurité intérieure, sous réserve bien sûr de l'évolution de la situation,
- enfin, la dernière priorité est la participation aux feuilles de routes migratoires.
Outre la création de deux nouvelles écoles nationales à vocation régionale dans les domaines de la cybersécurité pour l'une et de la formation des forces spéciales pour l'autre, la coopération sait s'adapter aux besoins. Ainsi, la fragilisation de la situation en Côte d'Ivoire a immédiatement donné lieu au renforcement des actions de formation en direction des sous-officiers. Le Mali bénéficie aussi d'un suivi particulier avec, en 2017, des efforts centrés sur le renforcement de la mobilité terrestre des forces maliennes avec notamment le financement de véhicules pour les unités de police anti-terroriste et l'achat d'équipements individuels d'optique permettant la vision nocturne. Ces investissements, parfois relativement modestes, peuvent changer un rapport de force, donner un avantage décisif et appuyer ainsi considérablement la stabilisation d'une situation de crise.
Le réseau de coopérants français, sans équivalent chez nos alliés, se trouve ainsi renforcé d'une politique interministérielle, associant le Quai d'Orsay, le ministère de l'intérieur et le ministère des armées pour garantir la réalisation des objectifs de notre pays en faveur de la paix. Il faudra veiller année après année à la préservation des moyens de ce formidable outil, souple, réactif, réorientable, qui a été malheureusement laminé ces dernières années.
Merci beaucoup pour cette présentation. Le programme 105 est passionnant puisqu'il est la photographie de l'action internationale menée par la France. Je me félicite de voir que le travail accompli en tant que rapporteur a eu quelques effets et que plusieurs des recommandations formulées par notre commission ont été au moins partiellement entendues. Je partage d'ailleurs les regrets exprimés par notre rapporteur sur la captation par Bercy d'une part trop importante du produit des cessions réalisées alors que le besoin de financement des travaux de restructuration et d'entretien de notre réseau diplomatique est très important.
De même, s'agissant de la vente de nos emprises à l'étranger, il est très important de les considérer au regard de la solution qui sera mise en place après la vente, qui peut être un moyen d'augmenter le rayonnement de la France. À Hanoi nous disposons d'implantations superbes à différents endroits de la ville. Les Allemands ont fait dans cette ville le choix de regrouper tous leurs services, y compris la résidence, dans un immeuble moderne et fonctionnel qui assoit leur rayonnement. De la même manière, lors de la mission de la commission en Australie l'année dernière, nous avons eu l'occasion de voir comment avaient été réorganisés nos services à Sydney. La résidence du consul général a été vendue au profit d'une résidence tout à fait convenable et fonctionnelle, et les services sont désormais localisés dans un immeuble moderne, au coeur du quartier d'affaires de la ville. L'idée n'est donc pas de vendre pour vendre, surtout pour voir les produits de cession accaparés par Bercy au profit du désendettement de l'État. En revanche si la vente permet une redynamisation de l'image de la France grâce à une meilleure localisation et au regroupement de nos services dispersés, elle se justifie pleinement.
Bien sûr nous avons également en tête la regrettable vente de lieux symboliques tels que le palais Clam-Gallas à Vienne dans lequel le Qatar a installé son ambassade. Il faut s'assurer que la perte de tels lieux ne réduise pas le rayonnement de la France et favorise la bonne gestion de ses emprises.
Il y a une question que je voulais poser au rapporteur sur l'augmentation de la contribution obligatoire à l'Unesco. Depuis quelques années, des efforts constants ont permis de réduire le budget de l'Unesco, décision prise pour faire face à la sortie annoncée des États-Unis, comment expliquer que notre contribution obligatoire augmente dans ce contexte ?
Traditionnellement à l'ONU, le poste de secrétaire général adjoint chargé des opérations de maintien de la paix est occupé par un Français, que nous avions rencontré. Après l'élection de Donald Trump, la participation des États-Unis au financement des OMP, qui est extrêmement conséquente, semblait pouvoir être remise en cause. Qu'en est-il ? Les équilibres entre les pays contributeurs ont-ils été modifiés ? Les États-Unis ont-ils réduit leur contribution pendant que la Chine augmentait la sienne ?
Je suis extrêmement heureux d'avoir entendu notre rapporteur soutenir la mutualisation des moyens car, à l'assemblée des Français de l'étranger, j'avais présenté un rapport en ce sens. L'ambassade franco-allemande à Dacca au Bangladesh est un succès. Je voudrais vous faire part d'un entretien que j'ai eu au service européen pour l'action extérieure au sujet de la mutualisation des moyens. J'ai interrogé les services pour savoir si les délégations européennes pouvaient réaliser les prestations consulaires là où les Etats de l'Union européenne n'ont plus de présence diplomatique propre. Je rappelle, par exemple, que nous avons un PPD au cap Vert, qui n'assure pas les services consulaires, alors que le Portugal est encore présent naturellement et pourrait probablement rendre des services à la communauté française. La question de la mutualisation, notamment des services consulaires, avec l'Union européenne et entre pays européens doit être approfondie.
Sur les PDD, je suis plus réservé que notre rapporteur. Au Paraguay la communauté française est importante et la mise en place du PDD contraint nos ressortissants à attendre la tournée consulaire d'un consul basé dans un autre pays d'Amérique latine pour avoir accès aux prestations consulaires normales. Il ne me semble pas que ce soit une bonne politique.
Notre collègue vient de revenir sur le recalibrage du réseau diplomatique. Le poids diplomatique de la France n'est plus suffisant aujourd'hui pour avoir une présence mondiale comme les gens s'y attendent. Un exemple, a contrario, le poste diplomatique chinois en Nouvelle-Zélande comprend 350 personnes. Dans cette perspective, mutualiser avec l'Union européenne, comme c'est le cas au Honduras avec succès, semble satisfaisant. Existe-t-il un plan de mutualisation à long terme ?
Sur les PDD, j'aimerais savoir où l'on en est des approches plus économiques. Par exemple, en Croatie pour la première fois nous avons un couple d'ambassadeurs nommé. C'est une pratique qui existe dans le réseau diplomatique britannique ou un couple d'ambassadeurs peut être nommé sur un même poste, chacun exerçant à mi-temps, l'un pour le Honduras, l'autre pour le Guatemala, en étant tous les deux basés au Guatemala. A-t-on un retour d'expérience sur ce type de pratique ?
Sur la gestion immobilière, je remercie notre rapporteur de ces éclairages. Pour ma part je suis partagé entre deux visions : celle du lieu de prestige et celle du lieu fonctionnel. Pour les ambassades ou les consulats, il est évident que des lieux fonctionnels qui sont propres à permettre un travail efficace et à recevoir le public dans de bonnes conditions de sécurité sont indispensables. Je pense aux emprises à Abu Dhabi ou au consulat à Barcelone où la modernisation en ce sens de nos emprises me semble être un succès. Par contre, il est certain que ces emprises véhiculent notre image et que dans cette perspective la préservation de lieux de prestige peut s'entendre : nous avons cédé le consulat à Hong Kong et notre image s'en est trouvée ternie. De même j'entends parler de la vente de la résidence au Chili, il s'agit d'un monument historique hautement symbolique pour les Chiliens qui y ont trouvé refuge lors du coup d'état de Pinochet. Comment pouvait-on s'en dessaisir ? C'est l'image de la France qui est en jeu ! J'aimerais savoir s'il existe un plan des cessions envisagées à moyen et long termes pour que nous puissions agir en amont et non pas lorsque toutes les procédures seront engagées.
Je ne suis pas hostile à la modernisation des ambassades : prévoir un étage dans un bel immeuble de centre-ville me semble plus moderne que l'image parfois associée aux vieilles demeures et leur grand jardin. On voit bien que le modèle de gestion immobilière est en train de s'éteindre. La dotation budgétaire immobilière est insuffisante puisque le ministère est supposé se financer sur les cessions des emprises à l'étranger. On est arrivés à la fin de ce modèle, la prévision de recettes de 20 millions sur 2017 et 2018 est peu élevée par rapport aux besoins. Les cessions sont de plus difficiles à réaliser. Je pose la question : que se passera-t-il lorsque l'on aura fini de vendre les « rogatons de l'empire » ? J'ai quelques inquiétudes sur les discussions qui se tiendront alors avec Bercy.
Sur la mutualisation, je propose depuis des années, sans succès, d'établir des bureaux de délivrance des visas Schengen communs. Cela me paraît une idée de bon sens. Je me heurte depuis 15 ans maintenant à une réponse négative obstinée du quai d'Orsay, qui pourtant sous-traite déjà l'examen des demandes de visas, ce qui ne semble d'ailleurs pas fonctionner puisque les consulats en général réexaminent les dossiers qui leur sont présentés par les sociétés extérieures qu'ils financent. Notre politique des visas ne me semble pas efficace.
C'est plus une réflexion qu'une question à nos rapporteurs que je souhaiterais vous faire partager. Je pense qu'il ne faut pas se crisper sur une position de principe mais adapter notre politique immobilière en fonction des contextes locaux ou de l'histoire à laquelle a fait référence notre collègue sur le Chili. Je partage l'opinion de notre président, l'évolution de notre implantation à Sydney est assez remarquable. L'efficacité de la politique immobilière menée tient sans doute à la qualité du personnel diplomatique sur place. D'ailleurs si notre diplomatie d'influence donne d'aussi bons résultats en Australie, je crois que nous en sommes tous convaincus, c'est essentiellement dû aux personnalités qui ont animé l'équipe France sur place. La mission qui nous avait été confiée par notre commission, l'initiative de notre président d'alors, Jean-Pierre Raffarin, qui nous a amenés à étudier le nouveau rôle de l'ambassadeur, semble pertinente : son action peut avoir des répercussions jusque dans l'aboutissement d'une politique immobilière intelligente. Il me semble que Laurent Fabius avait été bien inspiré lorsqu'il avait dit que nos ambassadeurs devaient d'abord et avant tout avoir une mission de diplomatie économique.
Sur la place de l'Allemagne au sein du conseil de sécurité des Nations unies, j'ai bien compris la position de notre rapporteur, mais je voudrais nuancer un peu l'appréciation portée sur le conseil de sécurité. Son fonctionnement peut paraître un peu obsolète par rapport à la réalité du monde aujourd'hui. Mais la position d'un pays de taille moyenne comme la France depuis plusieurs années est de considérer que nous avons à assumer notre statut de membre permanent par notre engagement dans des missions de défense et dans des OPEX notamment. Or, la caractéristique de l'Allemagne d'aujourd'hui, et vous connaissez mon tropisme en faveur de la relation franco-allemande, c'est de ne pas encore assumer peut-être toutes les responsabilités liées à sa puissance économique. Nous souhaitons que l'Allemagne, au rythme d'une démocratie, évolue et se rapproche de nous. Il me semble que non, l'Allemagne n'est pas encore considérée comme un quasi membre du Conseil de sécurité, elle est consultée comme tout grand pays sur les questions importantes.
La question de la gestion immobilière est centrale en réponse à certaines remarques qui ont été faites, il me semble que lorsque nous possédons un bâtiment, cela nous revient à long terme moins cher qu'une location. En raison du manque d'entretien et d'investissement sur le long terme, nous nous retrouvons à vendre parfois très mal les propriétés en mauvais état pour ensuite louer à un coût très cher. Je crains que nous nous nous retrouvions souvent hors les murs en banlieue faute de moyens.
Je me demande s'il ne serait pas temps que notre commission mène un travail de fond sur ces questions d'immobilier. Il existe une direction de l'immobilier du ministère qui essaie de gérer au mieux l'insuffisance chronique de crédits. Je me demande si elle ne souffre pas d'un manque de vision de moyens et longs termes.
Nous avons plutôt assisté à un débat très intéressant et très riche entre nous que posé des questions aux rapporteurs du budget.
Sur le programme immobilier, vous savez qu'il existe des échecs, mais parfois les relocalisations ont permis de grandes réussites, vous en citez plusieurs exemples. Mais j'ai en tête l'exemple de la vente de la résidence de l'ambassadeur de France auprès de l'ONU située sur la 5e avenue qui nous a fait perdre indéniablement énormément de prestige. La relocalisation ne me semble pas être à la hauteur.
Cette résidence avait pour particularité d'être en très mauvais état et de présenter des charges mensuelles extrêmement élevées.
Je vais revenir justement sur les crédits d'entretien. Ils s'élèvent en 2018 à 12 millions d'euros alors que les besoins immédiats et urgents sont déjà évalués à 25 millions, hors urgence.
En réponse à vos questions, non, nous n'avons pas obtenu communication, malgré nos demandes pendant nos auditions budgétaires, ni d'un plan de programmation des cessions ni d'un plan pluriannuel de réalisation des travaux lourds et des opérations de restructuration. Ces documents n'existent pas ou ne sont pas à jour. Il est dans ce domaine des ambassadeurs plus « performants » que d'autres, parfois poussés par la visite de parlementaires d'ailleurs, à demander les travaux nécessaires, d'autres en revanche paraissent moins impliqués dans ces problématiques.
Ces documents de programmation n'existent pas pour une raison logique, il n'y a pas d'argent et à quoi servirait de programmer lorsque les crédits nécessaires à la réalisation d'un plan dépendent de cessions incertaines ?
Sur les PPD, on voit bien que notre commission est partagée entre ceux qui sont favorables et ceux qui sont plus réservés. Je ne sais pas pourquoi les PPD ont été localisés dans les 25 pays concernés. En tout cas, il me semble qu'il vaut mieux avoir une présence réduite universelle que de fermer des implantations, il en va du prestige et de l'efficacité de la France. Les Anglais qui ont choisi de fermer totalement certains postes semblent aujourd'hui le regretter.
Sur les perspectives de colocalisation, il n'y a pas encore de plan adopté au niveau européen, mais on voit bien que les pays européens discutent entre eux et avec les services de l'Union européenne pour mettre en place une mutualisation et des colocalisations. Il serait bon qu'on aboutisse à un plan commun au moins sur le territoire européen.
S'agissant des cessions attendues pour 2018, il n'y a aucune certitude que le montant de cessions espéré de 20 millions d'euros soit bien réalisé. Nous avons demandé des précisions que nous attendons sur ces opérations de cessions prévues en 2018. Nous exercerons notre fonction de rapporteurs tout au long de l'année et interrogerons constamment les services sur les sujets qui nous intéressent, notamment les rémunérations des personnels.
Sur l'Allemagne et le Conseil de sécurité, l'information je vous ai communiquée date d'il y a 10 jours. Cette présentation faite dans la presse m'a interpellé. L'Allemagne a d'ores et déjà un rôle particulier aux côtés des cinq membres permanents du Conseil de sécurité.
Pour compléter simplement, vous avez parlé des moyens des ambassadeurs, il est important de souligner que les crédits dédiés au fonctionnement des ambassades ont beaucoup diminué, depuis plusieurs années et notamment en 2017.
Sur les opérations immobilières, je partage les interrogations que certains d'entre vous ont exprimées sur la vente de la résidence à New York. Toutefois, le montant des charges est tel que dans cette ville en particulier on peut se demander s'il est plus intéressant d'acheter que de louer.
Il faut aussi rappeler que le ministère subit encore une réduction de personnel : répartie sur les différents programmes de la mission, elle s'élève à 100 ETPT, avec la préservation toutefois des personnels dédiés à la sécurisation. Les moyens destinés à cette politique bénéficient également d'un effort pour répondre aux menaces terroristes qui concernent toutes nos emprises.
Sur l'augmentation de notre contribution à l'Unesco, nous avons demandé des précisions. La précédente directrice générale avait réussi à diminuer au cours de ses trois dernières années de mandat le budget de son institution, notamment en prévision du retrait annoncé des États-Unis. En 2018, notre contribution passe de 13,9 à 14,8 millions d'euros, c'est une augmentation de 6 % par rapport à 2017 sur laquelle nous avons demandé des explications. Le budget a été établi avant l'élection de la nouvelle directrice générale française, qui ne peut donc pas être tenue comptable de cette évolution.
Nous vous transmettrons les informations que nous recevrons sur ce sujet.
Nous voyons bien qu'il est important de réaliser des économies dans tous ces domaines sans nuire au rayonnement de notre pays. Je vous invite à être attentifs lorsque vous vous déplacez à l'étranger aux moyens de fonctionnement et aux emprises immobilières du réseau français. À ce sujet avez-vous eu des précisions sur les projets de cessions à Londres ?
Lors de son audition devant notre commission, le ministre de l'Europe des affaires étrangères, M. Jean-Yves Le Drian, nous a annoncé la suspension des projets de cessions. Il semble qu'une réflexion soit en cours sur la possibilité de regrouper différentes implantations dispersées dans Londres. La vente de la résidence qui est si symbolique et si bien située dans Londres serait une erreur !
De plus l'un des bâtiments concernés a été reçu par la France par le biais d'une succession d'une personne privée. Il serait mal venu de le vendre. Pourtant des travaux sont nécessaires notamment pour améliorer son accessibilité.
Les crédits du programme 185, « diplomatie culturelle et d'influence » s'élèvent à 718 millions d'euros, au sein d'une mission « Action extérieure de l'État » qui représente, au total, un peu plus de trois milliards d'euros.
Les crédits de ce programme progressent de 0,3 %, après un recul important pendant deux ans d'affilée. Ce recul avait été dénoncé avec vigueur l'an dernier, par nos collègues Jacques Legendre et Gaëtan Gorce, co-rapporteurs du programme.
La stabilisation des crédits du programme en 2018 est donc notable, c'est une bonne nouvelle, dans le contexte budgétaire actuel. Mais, dans le détail, nous verrons que la situation est très nuancée.
La dotation de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) s'élève à 399 millions d'euros, en augmentation de + 0,5 %. Mais, vous le savez, cette légère augmentation masque une annulation de crédits d'un montant de 33 millions d'euros, en cours d'exercice 2017. Cette annulation, rappelons-le, est intervenue dans le cadre plus large des mesures d'économie prises par le gouvernement en juillet pour maintenir le déficit budgétaire en dessous de 3 %. Ces mesures ont porté, au total, sur 4,5 milliards d'euros.
Concernant l'AEFE, la mesure correspond à 9 % de la dotation de l'agence, hors crédits de sécurisation du réseau. Pour y faire face, l'agence joue sur sa trésorerie au détriment des établissements. Elle a, par ailleurs, décidé d'augmenter le taux de la participation financière complémentaire que lui versent les établissements sur les frais de scolarité. Ce taux passera de 6 % à 9 % l'an prochain, avec la promesse de redescendre à 7,5 % en 2019. Nous devrons suivre de très près l'évolution de ce taux au cours des prochaines années.
Pour les établissements disposant de peu de réserves, la diminution des subventions de l'État signifie une augmentation des frais de scolarité. Or ceux-ci ont déjà augmenté régulièrement depuis dix ans, l'État ayant déjà puisé dans les réserves constituées par les parents d'élèves.
Le risque de remise en cause, à terme, du modèle de l'enseignement français à l'étranger est réel.
Nous estimons donc, d'une part, que le ministère doit s'efforcer de trouver des solutions de lissage dans le temps des conséquences de l'annulation de crédits pour les établissements, qui sont d'autant plus en difficulté que leurs réserves ont déjà, par le passé, été ponctionnées. D'autre part, pour l'avenir, les crédits de l'enseignement français à l'étranger doivent être sanctuarisés, et ne plus constituer un outil de régulation budgétaire. Compte tenu de la structure du programme 185, dans lequel l'AEFE représente 55 % des crédits et où la plupart des autres lignes du programme sont engagées en début d'année par des délégations faites aux postes ou pour les bourses, il serait un peu facile de faire systématiquement porter l'effort sur les crédits encore disponibles de l'AEFE. Cette pratique doit cesser.
Enfin, une réflexion de fond doit être engagée sur l'avenir de l'AEFE, son développement et son financement, afin de préserver le modèle de l'enseignement français à l'étranger, qui est le fleuron de notre diplomatie d'influence.
Les crédits de l'action culturelle extérieure diminuent de 1,6 % avec des évolutions contrastées. En effet, les crédits de l'Institut français sont stables, tandis que ceux du réseau continuent à diminuer.
Les moyens de l'Institut français, qui avaient baissé de 25 % depuis sa création en 2011, sont, pour la première fois, en légère augmentation. L'État semble ainsi marquer sa volonté de continuer à s'appuyer sur cet opérateur pivot de l'action culturelle extérieure. La subvention de l'Institut français s'élève à 29 millions d'euros, auxquels il faut ajouter une petite dotation, très insuffisante, du ministère de la culture, d'un montant de 1,4 million d'euros.
Toutefois, depuis l'échec du rattachement du réseau culturel à l'Institut français, la question de la place et du rôle de cet opérateur n'est pas totalement résolue.
Le Président de la République a indiqué, lors de la semaine des ambassadeurs, qu'il souhaitait mener à bien un rapprochement entre l'Institut français et la Fondation Alliance française. Celle-ci est elle-même en très grande difficulté financière et peu soutenue par l'État. La subvention à la Fondation Alliance française a diminué de près de 20 % depuis 2013. La somme totale des subventions aux alliances françaises s'élève pour 2018 à 7,8 millions d'euros, en baisse de 11 %, auxquels il faut ajouter environ 30 millions d'euros correspondant à 280 agents mis à disposition, pour 813 alliances françaises.
Le rapprochement Institut-Fondation est souhaitable, s'il est l'occasion d'impulser une nouvelle dynamique, et non pas un moyen de gérer la pénurie de ressources. Nous aurons un débat en séance publique le 21 novembre sur l'avenir de l'Institut français, qui permettra de faire un point sur ces questions.
Enfin, s'agissant des crédits de la culture, les moyens d'intervention du réseau continuent de diminuer. Ils subissent un rabot de 5,2 %, toutes actions confondues. Le réseau fait preuve d'inventivité, pour trouver des ressources propres de plus en plus diversifiées. Mais il est menacé par une incertitude juridique, puisque le statut d'autonomie des établissements du réseau, indispensable à leur fonctionnement, n'est pas conforme aux principes de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Ce problème demeure non résolu.
La situation de l'AEFE est préoccupante, en raison des mesures d'annulation de crédits prises au cours de l'exercice 2017. Ce budget pour 2018 est néanmoins le premier depuis longtemps dans lequel les crédits de l'Institut français, et ceux de l'attractivité de l'enseignement supérieur et de la recherche, sont stabilisés. C'est pourquoi, malgré mes réserves personnelles, s'agissant notamment du budget de l'AEFE, mon avis pour la commission sur l'ensemble de la mission est néanmoins favorable.
Depuis l'élargissement des compétences du ministère des affaires étrangères au commerce extérieur et au tourisme, le programme 185 comporte des objectifs de diplomatie économique. En dehors des crédits du tourisme, ces objectifs ne correspondent toutefois pas à des crédits budgétaires du programme 185.
La diplomatie économique est en effet portée, d'une part, par l'ensemble du réseau diplomatique, et, d'autre part, par les services du ministère de l'économie et des finances à l'étranger. L'opérateur Business France en est aussi un acteur important, placé sous une triple tutelle (Affaires étrangères, Économie et Finances, Cohésion des territoires).
Une mission a été confiée à M. Christophe Lecourtier, directeur général de Business France, sur la politique d'encouragement aux exportations et les évolutions possibles de l'agence Business France.
Nous suivrons avec attention les suites de cette mission - peut-être pourrions-nous d'ailleurs, Monsieur le président, auditionner Christophe Lecourtier à l'issue de sa mission ?
À notre sens, trois champs d'action sont prioritaires :
- l'amélioration de la lisibilité et de l'accessibilité des dispositifs pour les PME, qui sont insuffisamment informées de ce qu'elles pourraient faire à l'international ;
- la rénovation des outils financiers de soutien à l'export ;
- et l'implication des territoires, en particulier des régions, indispensables au succès des actions menées.
S'agissant de la promotion du tourisme, la subvention de l'agence Atout France, d'un montant de 33 millions d'euros, diminue de 1,2 %. Le secteur touristique a connu un repli en 2016. Or ce secteur est crucial pour notre économie : il représente 8 % du PIB, 2 millions d'emplois et 40 milliards d'euros de recettes annuelles.
Plusieurs plans de relance ont été mis en oeuvre, dont deux comités d'urgence pour le tourisme en 2016, qui ont permis de dégager 10 millions d'euros. La situation s'améliore en 2017. Les Japonais reviennent en France, de même sur les Chinois et les Américains.
Atout France bénéficie par ailleurs de produits des recettes additionnelles des droits de visa. Ce mécanisme n'a pas pu jouer en 2017, en raison des difficultés du secteur, mais il devrait rapporter 4,6 millions d'euros en 2018.
Un Conseil interministériel a dévoilé la feuille de route du gouvernement pour le tourisme en juillet dernier. Ce plan nécessitera des financements importants pour son volet « investissement ».
En tout état de cause, l'État devra mettre de l'argent sur la table pour attirer des cofinancements supplémentaires des régions et du secteur privé.
Une réflexion est en cours concernant les plateformes internet, telles que Tripadvisor, Booking ou Air BnB, dont certaines seraient prêtes à contribuer à la promotion du tourisme, mais à condition de ne pas être immatriculées en France comme opérateur de tourisme. Par ailleurs, les sociétés d'autoroutes, dont les bénéfices s'élèvent à près de deux milliards d'euros, devraient être incitées à contribuer, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Elles doivent être mobilisées.
Une clarification du financement de la politique du tourisme est plus que jamais nécessaire. Une mission a été constituée sur ce sujet par le gouvernement, qui remettra prochainement ses conclusions, peut-être pourrons-nous là aussi en débattre au sein de notre commission.
Les crédits accordés aux bourses étudiantes sont stables, et la subvention à Campus France augmente de 0,7 %. Cette stabilisation est toutefois tardive. Le nombre d'étudiants boursiers du gouvernement français a baissé de 24 % entre 2010 et 2016, tandis que le montant total des bourses diminuait de 30 %. La France a récemment reculé d'une place dans le classement des pays d'accueil de la mobilité étudiante internationale.
À titre de comparaison, les programmes de bourses à l'intention d'étudiants étrangers représentent en France 65 millions d'euros, tandis que l'organisme allemand en charge de la mobilité étudiante, le DAAD, consacre 191 millions d'euros à la mobilité entrante, soit trois fois plus.
Les Allemands, soit dit en passant, ne paient pas le coût des OPEX et je ne comprends pas que ce coût ne soit pas sorti du budget français, au regard des normes européennes de déficit budgétaire.
Les crédits de la diplomatie scientifique sont en forte augmentation (+ 21 %). Pourtant, les instruments traditionnels de la diplomatie scientifique reculent, qu'il s'agisse des dotations pour opérations au réseau ou des programmes d'échanges scientifiques destinés à faciliter la mobilité des jeunes chercheurs.
La hausse des crédits de la diplomatie scientifique s'explique en fait par l'imputation sur cette enveloppe de la contribution du Quai d'Orsay à l'Alliance internationale pour la protection du patrimoine dans les zones en conflit. Cette fondation a été créée fin 2016 avec l'objectif de réunir 100 millions de dollars d'ici à 2019. Le ministère contribue à la constitution de ce fonds à hauteur de 6,5 millions d'euros en 2018. Deux opérations pilotes ont été lancées en Irak et au Mali.
Je terminerai en évoquant l'invitation récente, lancée par le président de la République à l'intention des chercheurs, enseignants, étudiants, ONG et entrepreneurs américains, à la suite de la sortie des États-Unis de l'accord de Paris.
Les premiers retours sont très positifs. 1 822 candidats étudiants ou chercheurs ont fait parvenir à Campus France un projet détaillé. Deux tiers de ces candidats sont américains, dont 100 proviennent d'universités prestigieuses.
Ce programme sera financé par le 3e programme d'investissements d'avenir (PIA3), à hauteur de 30 millions d'euros, selon le principe « 1 euro de moyens additionnels pour 1 euro dépensé par les établissements ». Les établissements doivent donc trouver 30 millions d'euros, et ouvrir à des chercheurs étrangers des postes très concurrentiels. Pour ces établissements, les difficultés sont loin d'être levées. L'Allemagne a lancé un programme similaire.
Les incertitudes sont très fortes sur ce budget, s'agissant notamment du budget de l'AEFE. Les moyens de la diplomatie culturelle sont globalement insuffisants. C'est pourquoi j'émets un avis négatif sur ce programme.
Je voterai contre ce budget. L'annulation de crédits subie par l'AEFE entraîne une augmentation du taux de la participation financière des établissements, qui passe de 6 % à 9 %. C'est une catastrophe dont on ne mesure pas toute l'amplitude. Nous recevons tous les jours des alertes d'établissements, par exemple de Lomé, Manille ou Hong Kong. Le lycée français de Zurich, aujourd'hui conventionné, débat d'un éventuel dé-conventionnement. Nous allons perdre des établissements du fait de cette décision.
Je voterai également contre ce budget. Au-delà des 33 millions d'euros de crédits annulés, il y a aussi suppression de 500 postes sur trois ans dont 80 postes d'expatriés et 100 postes de résidents en 2018, ce qui aura aussi une incidence immédiate sur les frais de scolarité. Les familles sont inquiètes car elles n'ont aucune visibilité sur l'évolution de ces frais. Le maintien de la qualité de l'enseignement est également en question.
Une éventuelle réforme de l'AEFE devrait être fondée sur une concertation nationale. Les élèves français représentent un tiers des effectifs. Il faut avoir une vision globale de ce qu'est la mission de l'agence. Il y a à ce sujet un excellent rapport parlementaire, celui de Mme Claudine Lepage et de M. Philip Cordery. Nous ne partons pas de rien dans cette réflexion sur le modèle de l'agence, qu'il faut envisager au-delà de notre tropisme franco-français.
Je précise qu'en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), nous voterons sur la totalité de la mission « Action extérieure de l'Etat », et non sur chaque programme.
Nous ne disposons pas de comparatif avec les systèmes éducatifs concurrents. Les Américains, les Britanniques ne mettent pas d'argent public sur des dispositifs comparables. Nous dépensons un demi-milliard d'euros pour l'enseignement français à l'étranger, ce qui correspond à un tiers du coût de cet enseignement. Cela a-t-il un sens, pour le contribuable, de financer un tiers du coût de scolarité des élèves étrangers ?
Les enfants français à l'étranger n'ont pas toujours accès à notre langue. Seuls 25 % d'entre eux sont scolarisés dans le réseau. Les deux tiers des enfants français en Amérique latine ne parlent pas français. Ne devrions-nous pas nous fixer l'objectif que tous les enfants français à l'étranger puissent parler français ? Avec le même budget, nous pourrions proposer un chèque-éducation fléché pour que chacun de ces enfants puisse apprendre le français, avec un contrôle régulier grâce au passage du DELF (diplôme d'études en langue française).
Nous pourrions faire d'une pierre trois coups en offrant ainsi un soutien à tous les enfants français à l'étranger, en reconfigurant le réseau pour lui permettre de se développer plus rapidement et en augmentant les moyens des alliances françaises et des instituts français.
C'est pourquoi je partage la suggestion du rapporteur qu'une réflexion de fond soit engagée sur l'avenir de l'AEFE et, au-delà, du financement de ce réseau.
La diminution globale des moyens est très alarmante. Les instituts français font un travail considérable pour l'enseignement du français à nos compatriotes et aux étrangers. Or leurs budgets sont très réduits. C'est l'image de la France qui en pâtit.
Les frais de scolarité des établissements d'enseignement français à l'étranger sont parfois prohibitifs, jusqu'à 7 000 euros par an, avec des cautions non remboursables de montants très élevés, auxquelles s'ajoutent des frais de transport et des frais annexes. L'image de la France est mise sur la sellette. Je crains que nous ne perdions notre notoriété à l'étranger.
L'un des rapporteurs a évoqué l'impossibilité de retirer le coût des OPEX du calcul du déficit budgétaire de la France. Vingt-trois pays de l'Union européenne ont récemment décidé de s'engager dans une coopération structurée permanente dans le domaine de la défense. Ne pourrait-on pas leur demander une contribution financière ?
Je suis, moi aussi, opposé à l'évolution du budget de l'AEFE. C'est l'aspect négatif de ce budget. Mais je voterai positivement sur l'ensemble de la mission, afin de donner un signe d'encouragement.
Il faut actualiser le rapport de Mme Claudine Lepage et de M. Philip Cordery. Je propose une réflexion globale sur le financement, le développement et les objectifs de l'AEFE. Ne faudrait-il pas essayer, par exemple, d'obtenir des financements, ou des locaux, de la part des pays d'accueil ?
Les instituts français donnent une excellente image de la France, de même que les alliances françaises, qui enseignent le français à un nombre très importants d'étrangers, par exemple en Amérique du sud, en particulier au Mexique.
Les instituts français font en effet un travail remarquable. Le rapprochement préconisé par le président de la République, lors de la semaine des ambassadeurs, entre l'Institut français et la Fondation alliance française, est souhaitable. Ce type de rapprochement suscite toujours des résistances. Rappelons-nous de l'épisode du rapprochement souhaité entre l'Agence française de développement (AFD) et la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Cette initiative va dans le bon sens mais sa réalisation prendra du temps. Il faut créer une synergie entre les deux entités et éviter les concurrences stériles et coûteuses. En caricaturant quelque peu, les alliances françaises pourraient se concentrer sur l'enseignement du français et les instituts sur la diffusion culturelle. Nous aurons l'occasion d'en débattre en séance publique le 21 novembre.
Oui, l'Europe de la défense doit permettre d'alléger le fardeau français en matière militaire, mais elle avance lentement.
Un débat sur l'avenir de l'Institut français aura en effet lieu en séance publique le 21 novembre prochain, à notre demande, conjointe avec celle de la commission de la culture.
Nous allons maintenant procéder à un vote unique sur les trois programmes de la mission « Action extérieure de l'État ».
La commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'État » (26 voix pour, 13 contre et 2 abstentions).
La commission a été saisie le 17 octobre 2017 du contrat d'objectifs et de moyens de Campus France, sur lequel nous devons nous prononcer avant le 28 novembre, en application de la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État.
Je commencerai par rappeler les missions de Campus France, établissement public industriel et commercial, sous la double tutelle des ministères respectivement en charge des affaires étrangères et de l'enseignement supérieur et la recherche.
Campus France est chargé depuis 2012 de la gestion des bourses de mobilité, de l'accueil des étudiants étrangers et de la valorisation et la promotion à l'étranger de l'enseignement supérieur français.
À la différence de son homologue allemand, Campus France ne gère donc que la mobilité entrante sur le territoire, et pas la mobilité sortante, les deux étant pourtant liées, nous y reviendrons.
En 2016, Campus France a géré 31 000 mobilités, dont 22 600 pour le compte du ministère des Affaires étrangères, en baisse de 4 %, et 4 700 pour le compte de partenaires étrangers, en hausse de 5 %.
Le nombre de boursiers du gouvernement français était de 11 800. 21 % de ces boursiers viennent d'Asie et autant d'Afrique (hors Maghreb), 20 % d'Europe, 15 % du Maghreb, 14 % du Moyen-Orient et seulement 8 % d'Amérique.
S'agissant de la promotion de l'enseignement supérieur français à l'international, Campus France a organisé 51 événements en 2016, avec un accent particulier mis sur l'Asie et les Amériques.
L'opérateur contribue à l'animation du réseau des Espaces Campus France, qui n'ont toutefois pas de lien hiérarchique avec lui. Ces Espaces sont au nombre de 252 dans 122 pays, où ils constituent une composante à part entière du réseau culturel des ambassades.
Les recettes issues de la procédure dite « Études en France », de transmission des dossiers vers les établissements, sont intégralement reversées aux établissements à autonomie financière, et non à Campus France.
Le budget de l'opérateur s'élève, en 2017, à 26 millions d'euros, dont 3,8 millions d'euros de subvention du ministère des affaires étrangères et 1,8 million d'euros de subvention du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. 11,2 millions d'euros de ressources propres correspondent, pour l'essentiel, à des frais de gestion prélevés sur les enveloppes de bourses.
Quels sont les enjeux auxquels Campus France est aujourd'hui confronté ?
Alors que la mobilité internationale a augmenté de 46 % entre 2009 et 2016, la France n'a accueilli que 13 % d'étudiants étrangers supplémentaires. Nous perdons donc des parts de marché.
En 2014, avec 235 000 étudiants internationaux, la France a reculé du 3e au 4e rang des pays d'accueil des étudiants en mobilité, après les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie. Elle reste le premier pays non anglophone, mais talonnée de près par la Russie et l'Allemagne, qui devraient, sauf coup de théâtre, passer devant nous.
Les chiffres révèlent que l'accueil d'étudiants étrangers est conçu par plusieurs pays émergents comme une composante essentielle de leur politique d'influence régionale ou mondiale.
Ainsi, entre 2010 et 2015, les effectifs d'étudiants internationaux ont augmenté de 75 % en Russie, de 72 % en Chine, de 172 % en Arabie saoudite et de 179 % en Turquie.
Parmi les pays qui ont beaucoup progressé (+ 208 %), je mentionnerai aussi les Pays-Bas, car leur ascension dans le classement résulte de la diffusion très large de la langue anglaise dans leur système d'enseignement supérieur où 60 % des cours sont dispensés en anglais. Faut-il accepter de telles concessions à l'usage du français pour être plus attractif ? C'est une question que l'on peut se poser.
En Afrique, si la France reste la destination préférée des étudiants, une proportion croissante se tourne vers d'autres destinations : Canada, Italie, Ukraine, Émirats arabes unis et Arabie saoudite, avec notamment le développement de bourses d'études islamiques.
Cette situation est inquiétante.
La situation fragile de la France sur le marché mondial de l'enseignement supérieur et de la recherche est d'autant plus dommageable que l'attractivité de l'enseignement supérieur est un facteur majeur d'influence, les anciens étudiants étant ensuite prescripteurs dans leurs pays d'origines, où ils concourent aux liens économiques avec la France et à la diffusion de nos valeurs.
Que propose le contrat d'objectifs et de moyens de Campus France pour répondre à ces enjeux ? Trois objectifs sont assignés à Campus France, s'agissant de la promotion et de la valorisation de l'enseignement supérieur, de son positionnement comme acteur central de la mobilité à l'international, et de l'amélioration de l'efficience de sa gestion. L'accent est mis sur l'amélioration des outils existants, sur le développement de la communication numérique et sur la dématérialisation des procédures, ainsi que sur divers instruments de gestion des ressources humaines et de pilotage de l'établissement.
Ces objectifs et les indicateurs qui leur sont associés, sont bien sûr tout à fait louables. La recherche d'une efficience accrue, l'amélioration des outils existants pour mieux répondre aux besoins, et l'adaptation à l'ère numérique sont bien sûr souhaitables, et de nature à conforter la place de la France dans la concurrence internationale.
Mais ce COM aurait pu être beaucoup plus ambitieux.
Pour cela, encore faudrait-il pouvoir donner une certaine visibilité à Campus France sur ses moyens, ce que ne fait pas le COM, qui mentionne simplement « à titre indicatif » le montant des subventions allouées à Campus France « en PLF 2017 ».
Le texte du COM porte d'ailleurs tantôt sur la période 2017-2020, tantôt sur 2018-2020... ce qui n'aide pas à la lisibilité du document.
Surtout, on aurait pu espérer lire dans ce COM l'expression d'une véritable politique d'attractivité, que le ministère souhaiterait voir Campus France mettre en oeuvre.
Or le COM ne fait aucune mention des objectifs poursuivis par le gouvernement en matière de mobilité et de bourses, qu'il s'agisse de favoriser la mobilité au niveau master et doctorat, de privilégier l'excellence académique, de promouvoir certaines disciplines notamment scientifiques, et d'accueillir davantage d'étudiants issus des pays émergents, en particulier, l'Inde, le Brésil et la Chine. Il nous semble, plus largement, que les échanges avec l'Amérique latine, pourraient être accrus, pour y encourager la francophonie.
Une plus grande synergie avec le réseau AEFE est par ailleurs recherchée, afin d'attirer davantage d'élèves des lycées français vers notre système d'enseignement supérieur. Là encore, on ne trouve rien dans le COM. Or cette synergie doit être accrue. C'est notamment la vocation du programme de bourses « Excellence Major », qui doit être développé.
En juillet 2017, une note commune de Campus France, de la Conférence des présidents d'université (CPU) et de deux Conférences de grandes Écoles, a par ailleurs proposé des mesures pour accroître l'attractivité des établissements français d'enseignement supérieur. Ces orientations sont les suivantes :
- Renforcer les bourses et augmenter les moyens alloués à l'accueil des étudiants et chercheurs ;
- Simplifier les procédures, adapter les formations, simplifier les modalités de séjour des étudiants, notamment l'accès au statut d'étudiant entrepreneur ;
- Organiser une campagne mondiale de communication et un véritable marketing de la destination France, car notre système d'enseignement supérieur et de recherche n'est pas très lisible à l'étranger. Cette orientation aurait dû être reprise dans le COM, à condition de donner à Campus France les moyens nécessaires à une telle campagne.
- Enfin, développer la mobilité sortante des étudiants français, qui est directement liée à la mobilité entrante. Or de fortes inégalités demeurent entre étudiants des universités (qui sont 26 % à connaître une expérience internationale) et étudiants des écoles (qui sont 81 % à faire cette expérience).
Sur ce point, le ministère pourrait par exemple demander à Campus France une concertation accrue avec l'agence « Erasmus plus France ». Plus largement, une réflexion sur le partage des compétences entre ces agences, et avec le Centre National des OEuvres Universitaires et Scolaires (CNOUS), serait nécessaire.
En conclusion, nous ne sommes donc pas défavorables à ce COM. Mais il nous semble qu'il aurait pu être plus ambitieux, et qu'il aurait dû donner à Campus France des perspectives plus claires en termes de moyens. C'est pourquoi notre avis est très réservé. Nous vous proposons donc de faire figurer ces remarques dans un rapport d'information de notre commission, Monsieur le président, que nous enverrons aux deux ministres de tutelle et aux membres du conseil d'administration de Campus France.
Merci pour cette vision d'ensemble des enjeux. La problématique est celle de la compétitivité de notre enseignement supérieur à l'international. Vous avez mentionné l'usage de l'anglais dans les universités aux Pays-Bas. C'est un des facteurs de compétitivité. S'agissant de Campus France, y-a-t-il des études de satisfaction auprès des universités et grandes écoles françaises, sur le fonctionnement de Campus France, qui pourraient comporter des pistes d'amélioration ?
L'usage de l'anglais est un facteur important, mais on ne peut pas faire abstraction de la langue française.
S'il y a moins d'étudiants étrangers c'est aussi qu'il y a aussi moins de places disponibles. Communiquer à l'étranger ne suffit pas. Il est nécessaire que l'offre soit suffisante.
La Commission adopte l'avis présenté par les rapporteurs sur le contrat d'objectifs et de moyens 2017-2020 de Campus France et autorise sa publication sous forme d'un rapport d'information.
- Présidence de M. Christian Cambon, président puis Cédric Perrin, vice-président-
Le compte rendu sera publié ultérieurement.
La réunion est close à 13 h 20.