Commission des affaires sociales

Réunion du 4 avril 2018 à 18h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Nous accueillons cet après-midi M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

Après la communication, le 15 mars dernier, des résultats du régime général de sécurité sociale et la publication par l'INSEE, le 26 mars, des premiers résultats des comptes nationaux pour 2017, j'ai souhaité que notre commission des affaires sociales fasse un point sur la situation et les perspectives des comptes sociaux.

Ces résultats ne sont en effet que très partiellement disponibles et ne permettent pas, en l'état, de comprendre, par exemple, pourquoi le solde de l'assurance maladie enregistre une dégradation par rapport à la prévision, alors que les résultats globaux s'améliorent et que les recettes sont meilleures que prévu grâce à une progression soutenue de la masse salariale.

Nous souhaitons également faire le lien entre les régimes obligatoires de base, qui forment le champ du projet de loi de financement de la sécurité sociale et les administrations de sécurité sociale (ASSO) dont la contribution à la dette publique augmente alors qu'elles sont en excédent pour la première fois depuis 2008.

Nous avons également souhaité vous entendre, alors que le programme de stabilité devrait être présenté la semaine prochaine, sur les conséquences de ces résultats sur la période à venir, mais aussi sur les intentions du Gouvernement pour ce qui concerne les textes financiers. Ce sera l'occasion pour notre commission de vous exposer ses propositions dans ce domaine.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Je vous remercie de votre invitation pour évoquer les résultats des comptes sociaux et répondre à vos questions en cours d'année, alors que nous sommes en train de préparer l'avenir.

La situation des finances sociales s'est améliorée, comme l'ont montré les résultats du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) publiés mi-mars.

Le régime général reste certes déficitaire, mais connaît une amélioration patente, avec un déficit ramené à 5,1 milliards d'euros, soit le plus faible depuis quinze ans. Ce résultat est conforme aux prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

La situation financière de la plupart des branches s'améliore sensiblement. À 1,1 milliard d'euros, le déficit cumulé de la branche retraite et du FSV se réduit de 1,6 milliard d'euros par rapport à 2016, sous l'effet du dynamisme des recettes assises sur les revenus du capital, dont bénéficie le FSV. Celui-ci connaît un recul de son déficit, inférieur à 3 milliards d'euros pour la première fois depuis cinq ans.

La branche famille est proche de l'équilibre, avec un solde de moins 200 millions d'euros, dans un contexte d'accélération importante de créations de places d'accueil de jeunes enfants en 2017.

La branche maladie stabilise son déficit à hauteur de 4,9 milliards d'euros, malgré la perte du produit de la TVA. En tenant compte de l'évolution des recettes, sa situation s'améliore de 1 milliard d'euros sur l'année.

Enfin, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) enregistre un excédent de 1,1 milliard d'euros.

Les administrations de sécurité sociale, soit la sécurité sociale, les régimes complémentaires des salariés, AGIRC et ARRCO, l'Unédic, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et la Caisse d'amortissement de la dette sociale sont en excédent de plus de 5 milliards d'euros, alors qu'elles étaient encore en déficit l'an dernier. Cette situation est plus favorable que ne le prévoyait la loi de programmation des finances publiques, construite sur des hypothèses prudentes en termes de contexte macro-économique.

Cette amélioration découle d'une reprise économique marquée. La masse salariale sur laquelle une large part des recettes sociales reste assise est en augmentation de 3,5 %. L'amélioration de la conjoncture a profité aux recettes de la fiscalité du capital affectées au FSV. De même, les recettes assises sur les revenus des travailleurs indépendants ont été plus dynamiques que prévu. À l'inverse, les cotisations dans le secteur agricole et au titre des agents publics sont inférieures aux prévisions.

Cette amélioration s'explique par la reprise économique, mais traduit également la maîtrise des dépenses. L'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) est tenu à 2,2 %, les prestations vieillesse n'accélèrent pas et l'accord Agirc-Arrco de 2015 porte ses fruits, de même que l'on note un ralentissement des dépenses d'indemnisation chômage.

Cette amélioration touche la majeure partie du champ des administrations de sécurité sociale. Ainsi, les régimes complémentaires vieillesse pris dans leur intégralité sont à l'équilibre, avec un léger excédent de 300 millions d'euros, alors qu'ils étaient en déficit l'année dernière. L'AGIRC, l'ARRCO et l'Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF) connaissent, quant à eux, un déficit bien moins important qu'en 2016. Cette amélioration s'explique par le rebond des recettes mais elle reflète également la maîtrise des dépenses, notamment la sous-indexation d'un point de la revalorisation des pensions inscrite dans l'accord sur les retraites complémentaires de 2015. Enfin, l'Unédic réduit son déficit de 1 milliard d'euros par rapport à l'année précédente.

Ces bons résultats nous confortent dans la volonté de redressement des comptes publics. L'amélioration des comptes des administrations de sécurité sociale est un signal favorable, qui ne doit pas être mal interprété. La situation économique devrait continuer à porter ses fruits, mais les administrations de sécurité sociale n'ont pas de marges de manoeuvre. Nos engagements européens seront jugés sur notre capacité à poursuivre nos efforts en matière de maîtrise de la dépense. Chaque secteur des administrations publiques prend sa part dans cet effort. C'est dans ce contexte que le Gouvernement construit le programme de stabilité budgétaire 2018-2022, qui sera présenté dans quelques jours.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Nous avons demandé à tous les ministres successifs de disposer d'une vision claire des comptes sociaux à la mi-avril. Nous avons le programme de stabilité financière mais nous ne disposons pas des données complètes chiffrées, qui doivent pourtant être disponibles.

Les risques maladie et famille sont connus, ils pèsent 250 milliards d'euros, ce qui impacte considérablement le budget de la France. De ce point de vue, une avancée du calendrier de publication des chiffres est souhaitable, mais est-elle possible ?

Comment la résorption de la dette qui n'est pas portée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) est-elle intégrée dans le scénario de plafonnement de l'excédent des ASSO prévu par la loi de programmation des finances publiques ?

Les résultats de l'assurance maladie pour 2017 sont déficitaires de 4,9 milliards d'euros. Notre commission avait mis l'accent sur la mobilisation exceptionnelle des recettes en faveur de cette branche. Comment expliquer, dès lors, un tel déficit, alors que la loi de financement pour 2017 prévoyait 2,6 milliards d'euros et la loi de financement pour 2018 une prévision rectifiée de 4 milliards d'euros ?

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

S'agissant des comptes publics, nous entendons votre demande. Vous savez que la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) procède à cette analyse détaillée en juin. Nous devons préparer le débat du programme de stabilité budgétaire en y intégrant un réajustement des prévisions. Or ce sont les mêmes équipes qui travaillent sur ces sujets et il leur est difficile de mener deux tâches de front dans les mêmes délais. Il existe sans doute des pistes d'amélioration afin de nous permettre d'être plus précis devant le Parlement.

En ce qui concerne l'assurance maladie, elle a subi une opération comptable. En 2017, 7,03 % du produit de la TVA était affecté, contre 0,34 % en 2018, à quoi il faut ajouter 5,5 % affecté à l'ACCOS. Ce changement d'affectation a joué un rôle dès 2017 sur les comptes de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts), entraînant une perte de 1 milliard d'euros.

Comme je l'ai dit, compte tenu de cette opération comptable, qui a conduit à dégrader son déficit, l'assurance maladie a connu une amélioration de ses conditions financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Votre réponse n'est pas tout à fait satisfaisante : vous affirmez manquer de moyens humains pour nous présenter une vision claire et complète, alors que vous la préparez pour le programme de stabilité. Au vu du poids des comptes sociaux dans le programme de stabilité budgétaire, nous devrions disposer d'une information complète. Je ne comprends pas que l'on puisse dire que cela attendra !

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

Je n'ai pas la certitude que nous disposions de la capacité d'être aussi précis que vous le souhaitez, mais nous pouvons certainement faire mieux.

J'ajoute, au sujet de l'affectation de la TVA, qu'il s'agit d'une opération comptable ponctuelle. Elle a un effet sur le déficit mais elle ne se reproduira pas les années suivantes.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Ma question porte sur les retraites, alors que la réforme systémique annoncée est en cours d'élaboration. Avec 330 milliards d'euros, soit 14 % du PIB en dépense, celles-ci pèsent plus lourd en France que dans les autres pays européens. Les recettes correspondantes représentent 13,8 % du PIB, entraînant un déficit annuel de 4,4 milliards d'euros. Comment prenez-vous en compte ce déficit dans la réforme à venir ? Faites-vous une priorité de sa réduction ? Avez-vous des discussions à l'échelle européenne sur ces besoins de financement qui influent sur l'équilibre des comptes sociaux ? L'Europe a-t-elle émis un avis sur cette réforme ?

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Puissat

La dette de l'Unédic représente onze mois de cotisations. À l'aube de la réforme de l'assurance chômage, quelle vision le Gouvernement a-t-il de cette dette, de ses échéances et des modalités de son apurement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

L'amélioration des comptes sociaux, en particulier de la sécurité sociale, est une bonne nouvelle mais il ne faudrait pas qu'elle s'accompagne d'une dégradation de notre système de santé. Nous nous félicitons de voir l'Ondam rester équilibré mais, en parallèle, la situation de l'hôpital est très dégradée et demande que l'on y consacre des moyens.

Cette trajectoire de rétablissement des comptes a été initiée, et réussie, par le gouvernement précédent.

L'amélioration du FSV était inattendue ; en revanche, le maintien du déficit de la branche maladie est une mauvaise nouvelle. L'amélioration est due à l'augmentation de la masse salariale et des recettes tirées des revenus du capital. La réforme de la fiscalité du capital en cours ne risque-t-elle pas de provoquer une diminution de cette partie des recettes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Je me félicite également de cette amélioration et de la reprise économique qu'elle traduit. Il faut maintenant poursuivre les efforts pour la sécurité sociale et l'Unédic.

En 2019, il sera nécessaire de prévoir des crédits supplémentaires pour les hôpitaux et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), qui souffrent d'un manque d'investissements et de personnel.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

Monsieur Savary, vous aurez l'occasion de travailler sur les retraites, vous connaissez le calendrier, la réforme doit aboutir en 2019. L'objectif qui a été fixé est de mener une réforme juste du système de répartition, permettant à tous ceux qui cotisent de bénéficier du même rendement. Nous sommes animés d'une volonté de protection, d'égalité et de simplification des systèmes articulés aujourd'hui autour de presque quarante régimes. Il ne s'agit pas de les faire tous disparaître mais la convergence est une nécessité. Le Haut-Commissaire Delevoye mène les concertations, il est à la disposition des assemblées pour évoquer le sujet, mais le Premier ministre n'ayant pas rendu ses arbitrages, vous imaginez bien que je ne vais pas les préempter.

Le sujet est important, au vu du poids qu'il représente et de la dette, mais la question n'est pas communautaire car les discussions avec les autorités européennes portent sur le solde et non sur la nature des dépenses. Je peux donc vous assurer que notre réflexion est libre de toute interférence communautaire.

Madame Frédérique Puissat, s'agissant de la dette de l'Unédic, la réforme de l'assurance chômage est conduite avec un objectif comptable clair : stabiliser la dette et ne pas l'alourdir. À ce stade, il n'est pas encore question d'apurement car nous devons construire la réforme avant d'étudier cette question. Dans un premier temps, nous veillons à ne pas aggraver la situation.

Messieurs Daudigny et Chasseing, l'Ondam a été fixé à 2,3 %, c'est-à-dire à un niveau élevé au regard des années précédentes. La trajectoire budgétaire prévoit que ce niveau sera maintenu jusqu'en 2022. Il faut ajouter à cela les réformes engagées : nous avons ainsi affecté 250 millions d'euros aux hôpitaux en février pour leur permettre de répondre à leurs besoins. Parmi les cinq chantiers qui font l'objet de concertation figurent la question de la tarification et celle de l'offre de soins, avec l'objectif de lutter contre la saturation des urgences. Nous réformons, nous revoyons l'offre de soins et nous maintenons le niveau de l'Ondam afin de garantir que les moyens nécessaires seront disponibles.

S'agissant de la réforme de la fiscalité, monsieur Daudigny, le risque que vous évoquez n'existe pas puisqu'elle permet de maintenir le même niveau de recettes pour le FSV.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je peine à comprendre comment on peut se satisfaire d'un retour à l'équilibre des comptes sociaux alors qu'il s'est fait au détriment de l'humain, des hôpitaux et des Ehpad. On peut, certes, se féliciter d'un retour de l'activité économique, mais l'Ondam est insuffisant, car la progression tendancielle des dépenses est aux environs de 4 %.

Comment peut-on se satisfaire de donner 250 millions d'euros aux hôpitaux alors que leur déficit atteignait 500 millions d'euros en 2016 et 1 milliard d'euros l'année suivante ?

Le message positif, c'est la réussite économique et l'émergence de nouvelles ressources. Il faudrait plutôt communiquer sur ce sujet et annoncer qu'un jour l'activité économique permettra de fixer l'Ondam à un niveau suffisant pour que le personnel médical puisse enfin respirer.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

J'accueille toujours vos conseils avec plaisir, monsieur le président. Vos propos sont de bon sens, il faut encourager la reprise. Nous savons les efforts demandés et nous connaissons la situation des hôpitaux et des Ehpad, qui est née de l'accumulation des difficultés et de l'évolution des besoins.

Nous avons intérêt à veiller à l'évolution des dépenses et à souhaiter des recettes très supérieures ; le relèvement de l'Ondam à 4 % représenterait une dépense de 3,4 milliards d'euros par an, mais ce ne serait pas de l'argent mal employé.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Ces résultats n'ont pas été obtenus d'un coup de baguette magique mais sont le fruit d'un processus long. La situation des hôpitaux ne peut être mise exclusivement au débit du gouvernement actuel, mais relève aussi de la responsabilité du précédent, et il en va de même en ce qui concerne les bons chiffres de la branche famille dont le déficit atteignait 2,5 milliards d'euros en 2012, contre 200 millions d'euros aujourd'hui.

Vous évoquez l'augmentation des créations de places d'accueil de jeunes enfants : l'augmentation de 60 % constatée cette année sur les demandes de subventions a été engagée en 2017 - vous avez été maire, vous savez comment cela se passe. Ce chiffre est le résultat d'une politique volontariste et je souhaite que cet effort se poursuive dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG) de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf).

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

En effet, on succède toujours à quelqu'un !

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

Je suis d'accord avec vous, madame Rossignol, et s'agissant de la Cnaf, je ferai part de votre remarque à Mme la ministre des solidarités et de la santé car ce dossier n'est pas de mon ressort.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

N'oublions pas que l'amélioration de la branche famille s'est faite au détriment des classes moyennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Vous voulez dire des classes supérieures. L'effort a concerné les familles disposant de revenus mensuels supérieurs à 6 500 euros par mois.

La réunion est close à 18 h 40.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.