La réunion est ouverte à 15 h 35.
Cette audition sera diffusée en direct sur le site Internet du Sénat. Elle fera également l'objet d'un compte rendu publié. Je rappelle, pour la forme, qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal. Je vous invite à prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité ; levez la main droite et dites : « Je le jure. ».
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Benoît Thieulin prête serment.
Président du Conseil national du numérique de 2013 à 2016, vous avez contribué à asseoir cet organisme consultatif dans le paysage institutionnel français, et à inspirer la loi pour une République numérique de 2016. Vous êtes désormais membre du Conseil économique, social et environnemental, où vous avez été rapporteur d'un avis adopté le 13 mars dernier et intitulé « Pour une politique de souveraineté européenne du numérique ».
Nous réfléchissons à la souveraineté et à son exercice, plutôt dans le cadre national qu'avec une dimension européenne mais nous sommes heureux d'élargir avec vous notre approche. Dans votre avis, vous soulignez la dépendance économique de l'Union européenne vis-à-vis des géants américains et chinois de l'internet. Quelles sont les conséquences en termes de souveraineté ? Au-delà de l'économie et de la sécurité informatique, c'est l'État de droit, la démocratie, les droits fondamentaux qui sont menacés.
Quels sont les principaux constats de votre rapport ? Vous proposez notamment un renforcement de la régulation des plateformes en Europe et le soutien à l'émergence d'un écosystème numérique conforme aux principes et aux valeurs européennes.
Merci de cette communication passionnante, extrêmement claire et illustrée d'exemples parlants.
Selon la formule consacrée, lorsqu'une innovation apparaît dans le secteur numérique, les Américains en font du business, les Chinois la copient et les Européens la régulent. Mais, pour assurer une régulation à l'échelle de l'Union européenne, il n'est pas facile de dégager une majorité. La question cruciale qui se pose ici est de savoir si les États sont à même de pousser leurs citoyens à adopter tel ou tel comportement, par exemple à ignorer telle ou telle plateforme ?
À propos des VTC, vous mettez en évidence ce qu'on nomme le « capitalisme de surveillance ». Mais ne s'agit-il pas d'un nouvel esclavagisme ?
Il faut certes une politique industrielle européenne pour le numérique. Toutefois, une agence serait-elle efficace ? Et les plateformes sont-elles réellement pleines de bonne volonté, voire « embarrassées » par leur pouvoir ? Voyez le lobbying qu'il a fallu vaincre pour mettre en oeuvre le RGPD ou la directive sur les droits d'auteur. Quant à Mark Zuckerberg, il savait dès 2014 que les Russes avaient infiltré Facebook, il n'a rien fait et a même menti sur ce sujet. N'est-il pas temps d'entrer dans une ère nouvelle, en instaurant un véritable statut des plateformes, en reprenant le chantier de la directive sur le commerce électronique et en se gardant de tout angélisme ?
Enfin, pouvez-vous préciser ce que vous suggérez pour la régulation, qu'il s'agisse de la concurrence ou des médias ?
Vous faites un parallèle entre le changement climatique et la transformation numérique. Les Européens sont, en grande partie, conscients du premier enjeu. Mais mesurent-ils bien l'importance du second ? Et la révolution numérique peut-elle perdurer longtemps sans l'approbation des citoyens ?
Quelles limites apporter à la nécessité de connaître les algorithmes, au regard des droits individuels ?
Nous vous remercions de l'éclairage que vous nous avez apporté.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.