Mission commune d'information portant sur les dispositifs médicaux implantables

Réunion du 24 avril 2012 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • AFSSAPS
  • DGCCRF
  • chirurgie esthétique
  • dispositifs médicaux
  • esthétique
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  • médecine esthétique
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  • technique

La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Nous accueillons M. Jean-Yves Grall, directeur général de la santé. Monsieur le directeur général, je souhaite que vous nous apportiez des précisions sur les enseignements et les suites que l'on peut tirer des affaires relatives aux prothèses mammaires et de hanche.

Nous attendons également de vous des éléments portant sur la médecine esthétique, la formation des médecins et l'encadrement des interventions, qui tendent de plus en plus à se répandre dans les officines commerciales, ce qui pose la question de l'interdiction de certains actes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

L'actualité récente a été marquée par la répétition d'incidents relatifs à la sécurité de dispositifs médicaux implantables. Pourquoi le dispositif de sécurité sanitaire et de matériovigilance n'a-t-il pas été en mesure d'identifier plus tôt les défaillances des prothèses PIP ? En dehors de ce cas, qui relève plutôt de la fraude, pourquoi l'alerte est-elle d'abord donnée ailleurs qu'en France, par exemple en Australie dans l'affaire des prothèses de hanche De Puy ? Quelles mesures ont été prises par la DGS, tutelle de l'Afssaps, pour prévenir la récurrence de tels événements ou, en tout cas, pour permettre leur détection plus rapidement ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Je souhaite souligner l'importance de la déclaration des effets indésirables ainsi que des signaux de matériovigilance. En l'occurrence, la détection n'a pas été optimale. En effet, jusqu'à l'inspection sur site réalisée par l'Afssaps en mars 2010, il y a eu très peu de déclarations d'effets indésirables.

En 2009, nous avons enregistré quarante déclarations d'effets indésirables des prothèses PIP. Leur nombre a été multiplié par onze entre mars 2010 et décembre 2011. Les dernières données du recueil de l'Afssaps font apparaître, pour le seul mois de mars 2012, près de deux cents déclarations de rupture.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Des ruptures se sont certainement produites avant le début de l'affaire. Comment, dès lors, procéder aux vérifications nécessaires ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

L'organisation de la surveillance des prothèses mises sur le marché pose problème. Les organismes notifiés et l'Afssaps, confrontés à une fraude caractérisée, n'ont pas donné l'alarme.

Nous proposons de réorganiser le système des vigilances, en facilitant les déclarations, grâce à la mise en place d'un portail unique, par exemple en prévoyant un retour systématique de la déclaration faite par le déclarant et en impliquant le niveau régional de manière systématique. Le fabricant doit faire connaître à l'Afssaps les avis des autorités étrangères sur un produit. Il semble également nécessaire de sérier les dispositifs : les dispositifs médicaux de classe III devraient faire l'objet d'une inspection annuelle par l'Afssaps. Tout cela requiert une modification de la législation européenne. Peut-être faudrait-il également s'inspirer de ce qui existe pour les médicaments, avec une étude préalable avant autorisation de mise sur le marché, si les études pré- et post-exposition ne suffisent pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Comment travaillez-vous avec l'Afssaps et la Haute Autorité de santé (HAS) pour assurer le suivi après commercialisation ? Un article paru aujourd'hui est très dur à l'égard du système actuel.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Nous assurons le pilotage et la tutelle de l'Afssaps, qui est chargée du contrôle. Nos relations avec elle vont être régies par un contrat d'objectifs et de performance. La HAS, chargée de l'évaluation technique des dispositifs médicaux par la Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé, la CNEDiMTS, est indépendante, mais nous devrions pouvoir collaborer via une convention.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Avec l'Afssaps, les modalités de contrôle seront définies par le contrat d'objectifs et de performance qui sera établi d'ici quatre mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Le marquage CE s'avérant insuffisant, faut-il rendre obligatoires les essais cliniques pré et post-inscription ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Le calcul d'un rapport bénéfices-risques semble, en tout cas, nécessaire pour les dispositifs à haut risque. De tels essais, même s'ils sont intéressants, seraient insuffisants. Il faut s'aligner sur la procédure applicable au médicament, avec des dispositifs d'autorisation de mise sur le marché.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Cela vaut pour l'établissement des conditions laissant apparaître qu'un dispositif peut être mis sur le marché.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Oui.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

C'est un outil de suivi très utile, mais un registre doit être exhaustif. Il en existe déjà un pour les prothèses de hanche.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Les inscriptions ou déclarations sont trop peu nombreuses. Toute la question est de savoir comment les rendre nécessaires, voire obligatoires. Peut-être en conditionnant la procédure de remboursement à cette inscription.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Il semble que, jusqu'à présent, on se souciait peu de ce problème.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

La réflexion portant sur la révision de la réglementation européenne applicable aux dispositifs médicaux est en cours. Elle avait débuté bien avant le scandale des prothèses PIP, mais le processus est long.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Faut-il élargir l'accès aux bases de données existantes, comme Eudamed ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Ce serait utile. La transparence de l'information permet l'alerte et donc la sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

J'en viens aux questions sur la médecine esthétique. Savez-vous combien de médecins la pratiquent et quels sont les actes les plus fréquents ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Je n'ai pas d'éléments chiffrés. Les actes de médecine esthétique peuvent être pratiqués par plusieurs spécialités différentes, car la discipline de médecine esthétique n'existe pas en tant que telle.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

La formation des médecins est-elle suffisante ? Comment l'améliorer ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Encadrer la médecine esthétique est une nécessité absolue. La formation devrait être spécifique. Un diplôme universitaire ne suffit pas : je suis pour une formation définie nationalement, comme un diplôme d'études spécialisées complémentaires (DESC). Cette formation spécifique, homogène et de haut niveau doit non seulement concerner les gestes, mais également prendre en compte les effets dans le temps et la prise en charge des complications.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Que pensez-vous de la controverse relative à l'utilisation d'acide hyaluronique par les chirurgiens-dentistes ? Qu'est-ce qui a amené la DGS et la direction générale de l'offre de soins (DGOS) à écrire à l'ordre des chirurgiens-dentistes ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

C'est le résultat d'une saisine de l'ordre des médecins et de celui des chirurgiens-dentistes. Nous avons ainsi rappelé la réglementation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Ce n'est pas ce que nous avons entendu dire. J'aimerais que vous me confirmiez par écrit que vous avez bien été saisi par l'ordre des chirurgiens-dentistes.

La DGS contribue-t-elle à informer les patients sur les risques liés à la médecine et à la chirurgie esthétiques ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Cela existe déjà pour la lipolyse, et nous allons continuer dans cette direction.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Que pensez-vous du développement du tourisme « esthétique » ? Pèse-t-il sur le système de soins français ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Il peut peser en cas de complications liées à l'intervention, qui seraient prises en charge en France. Comme ce phénomène se développe, j'appelle à la vigilance sur la qualité des interventions.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

On propose des séjours à l'étranger, comprenant un séjour en milieu médical puis des soins en milieu hôtelier. Comment réglementer ces pratiques ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Cela touche surtout la chirurgie esthétique.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Il faut travailler sur le sujet avec la DGOS, voir si cela entraîne des complications susceptibles d'être prises en charge par notre système de soins. La mesure du phénomène est peut-être malaisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Que vous inspire le développement d'actes à visée esthétique pratiqués par des gens qui ne sont ni médecins ni dentistes ? On m'a par exemple invité à Toulon pour voir un nouveau laser...

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

La situation n'est pas satisfaisante. Il y a, de fait, un vide réglementaire, qui peut être utilisé par certains professionnels pour développer des actes à visée esthétique sans limite sécuritaire. Nous travaillons donc à un meilleur encadrement. Un décret devrait préciser prochainement la qualification et la formation des professionnels pouvant pratiquer des actes à risque sérieux, ainsi que les conditions dans lesquelles ils pourront être réalisés. Trois décrets sont en préparation, sur les médecins, les chirurgiens-dentistes et les esthéticiens. Le premier est prêt, les deux autres sont en préparation.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Le premier a été transmis à l'autorité signataire, nous en attendons la publication.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Comment comptez-vous rebondir après l'annulation partielle par le Conseil d'Etat du décret du 11 avril 2011 relatif à l'interdiction des techniques de lyse adipocytaire ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Nous avons fait appel à la HAS et à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, l'Anses, pour reformuler le décret. Nous sommes dans l'attente de leur réponse. Nous avons également demandé l'avis de la HAS sur les risques liés à l'utilisation des produits de comblement, des ultraviolets et de la mésothérapie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

A Périgueux, deux « bars à sourire » ont ouvert cette semaine. Comment s'assurer du respect de la réglementation par ces établissements, notamment en matière de concentration de produits utilisés ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Une directive européenne du 20 septembre 2011 prévoit que les produits de blanchiment contenant entre 0,1 % et 6 % de peroxyde d'hydrogène seront réservés aux chirurgiens-dentistes. Elle est en cours de transposition. L'opération de blanchiment doit être précédée d'un examen dentaire pour éviter des douleurs éventuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Dans les « bars à sourire », la concentration doit donc être inférieure à 0,1 % ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

De toute façon, ce produit exige un examen préalable de la dentition.

Nous avons publié, le 5 décembre 2011, un communiqué de presse commun avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour attirer l'attention du public sur ce sujet. Par ailleurs, une campagne d'inspection est en cours avec l'Afssaps et la DGCCRF.

Se pose un autre problème, celui de l'exposition à la lumière bleue des diodes, qui n'est pas sans danger pour les yeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Des études scientifiques récentes rappellent les effets néfastes de l'exposition de la peau aux UV artificiels. Ne faudrait-il pas, tout au moins, renforcer l'information des utilisateurs sachant qu'il est difficile d'interdire la vente de tels produits ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Il faudrait déjà se poser la question de l'accès à des appareils à UV personnels que l'on peut utiliser soi-même !

La réglementation applicable aux cabines à UV, en matière de formation des professionnels, de contrôle des pratiques et des appareils, a été renforcée depuis 1997. La loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) a alourdi les sanctions. Elles peuvent être d'ordre administratif et financier. Enfin, une campagne d'information ponctuelle, menée par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'Inpes, a été réalisée. Elle sera suivie d'une campagne permanente sur le sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

S'agissant de la matériovigilance, l'obligation de déclaration doit-elle peser d'abord sur les fabricants ou les utilisateurs ?

Est-il nécessaire de clarifier dans la loi la définition des actes à visée esthétique dangereux ?

Enfin, la responsabilité est-elle bien établie en matière de médecine esthétique, notamment en ce qui concerne la charge de la preuve en cas de conséquences néfastes ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

L'obligation de déclaration, en ce qui concerne la matériovigilance, doit peser sur tous, fournisseurs comme professionnels. Le signalement d'effets indésirables est un des éléments de vigie de notre système de sécurité sanitaire. Nous devons la rendre la plus efficiente possible.

Un décret fixera une liste aussi complète que possible des actes à visée esthétique.

Pour ce qui est de la médecine esthétique, la responsabilité incombe clairement à l'effecteur de l'acte.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je souhaiterais obtenir des précisions par rapport aux propositions que vous avez faites relatives à l'évaluation, la formation des médecins. Mais qu'en est-il de l'harmonisation des règles en Europe ? La surveillance des dispositifs médicaux devrait-elle être plus longue que celle applicable aux médicaments ? Quid des implantations réalisées à l'étranger ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Nous avons demandé à la Commission européenne que les firmes aient obligation de faire savoir si des problèmes ont été rencontrés dans d'autres pays. Une meilleure coopération entre les Etats est également nécessaire : l'affaire des prothèses PIP l'illustre. Nous réclamons ces deux points auprès des autorités européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Bruguière

Le tourisme esthétique se développe. Les éventuelles complications sont-elles prises en charge par la sécurité sociale, à quel taux et selon quels critères ? Les médecins ne peuvent-ils pas dénoncer ces pratiques quand ils en ont connaissance ?

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Grall, directeur général de la santé

Les pathologies sont prises en charge par la sécurité sociale au tarif habituel. Le signalement des complications doit entrer dans les moeurs des professionnels. Ce point est très important, et nous sommes en train d'y travailler.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Nous accueillons MM. Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés, Axel Thonier, sous-directeur en charge du secteur industrie, santé et logement, Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne, et Daniel Miles, membre du bureau produits et prestations de santé et services à la personne, à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Vous vous trouvez au coeur des questions qui nous intéressent et nous souhaitons aborder avec vous des thèmes aussi variés que le problème de la contrefaçon sur le marché des dispositifs médicaux implantables, les pratiques tarifaires anticoncurrentielles ou la fraude sur Internet. Nous souhaitons également recueillir votre avis sur l'encadrement des produits à visée esthétique, dont l'offre est abondante et qui sont parfois présentés dans la presse comme des produits miracles alors qu'ils ne sont pas sans danger, ainsi que sur le tourisme à visée esthétique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Parmi les dispositifs médicaux implantables contrôlés par la DGCCRF, quelle est la proportion de produits qui ont été saisis comme ne satisfaisant pas aux obligations communautaires de sécurité sanitaire (marquage CE, règles d'étiquetage et de conditionnement, contrefaçon, péremption, etc.) ? Certains types de dispositifs médicaux implantables sont-ils plus concernés par la fraude et la contrefaçon que d'autres ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

La DGCCRF assure trois missions différentes : la régulation concurrentielle des marchés en lien avec l'Autorité de la concurrence, la protection économique des consommateurs et la sécurité des consommateurs. C'est cette dernière mission qui vous intéresse. La DGCCRF compte environ 2 800 agents répartis sur l'ensemble du territoire et compétents pour assurer l'ensemble de ces trois missions. La partie santé représente quinze personnes en administration centrale et une vingtaine de personnes en région, soit huit à neuf personnes en équivalent temps plein. Dans le sujet qui vous intéresse, la DGCCRF apporte un regard de généraliste, ses agents n'ayant pas de compétence médicale. En matière de surveillance du marché, elle détient en effet des pouvoirs de police générale, qui s'effacent derrière les pouvoirs de police spéciale qui existent par ailleurs.

De fait, les dispositifs médicaux implantables ne sont pas contrôlés par la DGCCRF : tout le dispositif de matériovigilance est organisé autour de l'Afssaps et la DGCCRF n'a pas accès aux informations de ce dispositif. L'accès à ces informations ne fait d'ailleurs pas partie de nos revendications puisque nous serions dans l'incapacité de les interpréter compte tenu de l'absence de compétences médicales en notre sein. C'est l'Afssaps qui détient les compétences médicales nécessaires à cette interprétation.

Au plan juridique, le pouvoir de la DGCCRF dans le domaine des dispositifs médicaux est doublement restreint. D'une part, c'est l'Afssaps qui détient le pouvoir de police spéciale, la DGCCRF n'ayant qu'un pouvoir de police générale. D'autre part, l'article L. 221-8 du code de la consommation prévoit que lorsqu'une police spéciale existe, la DGCCRF n'est habilitée à prendre que les mesures relevant de l'article L. 221-5 de ce même code, à savoir les mesures d'urgence, donc les retraits de produits du marché en cas de danger grave et immédiat. Ces retraits requièrent un arrêté conjoint avec le ministère de la santé. Pour déterminer si le danger est grave et immédiat, il est, une fois encore, nécessaire de bénéficier de compétences médicales. Dans le champ des dispositifs médicaux, c'est donc principalement l'Afssaps qui intervient.

Un protocole conclu avec cette agence en 2006 nous permet de répartir nos interventions en fonction de l'autorité la mieux placée face à un type de problème donné. De manière générale, l'Afssaps intervient principalement au stade de la fabrication des produits destinés aux professionnels de santé, la DGCCRF intervenant de manière privilégiée au stade de la distribution des produits directement destinés aux consommateurs individuels, comme par exemple les pansements.

Compte tenu de cette organisation juridique et technique, nous n'avons pas identifié de produits comme ne satisfaisant pas aux obligations communautaires de sécurité sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Vous n'intervenez donc pas sur les dispositifs médicaux implantés ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Non.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Y a-t-il des échanges d'informations avec l'Afssaps en matière de matériovigilance ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Elle nous informe après coup pour une bonne coordination de nos administrations. Encore une fois, nous manquons des compétences médicales requises.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Réalisez-vous des inspections dans les lieux de production ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Cela peut arriver, en complément de nos inspections au stade de la distribution, mais seulement pour les dispositifs médicaux destinés au grand public, et donc pas pour les dispositifs médicaux implantables.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Il existe trois grands types de dispositifs médicaux relevant de la compétence de la DGCCRF : les produits d'optique, les audioprothèses et les aides techniques telles que fauteuils roulants ou rampes d'escalier. Ces produits étant vendus au grand public, les inspecteurs de la DGCCRF sont les mieux placés pour les contrôler. Les circuits de commercialisation sont les pharmacies, les magasins spécialisés et Internet.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Ils ne correspondent pas à une catégorie juridique, ce qui rend la réponse difficile. Parmi les produis à finalité esthétique, certains sont des dispositifs médicaux et nous retombons donc sur le partage évoqué précédemment, d'autres sont des produits cosmétiques pour lesquels les contrôles sont coordonnés avec l'Afssaps qui détient un pouvoir de police spéciale. Un troisième type de produits à finalité cosmétique rassemble des produits inclassables, ceux qui posent probablement le plus de difficulté et parmi lesquels figurent notamment les produits injectables utilisés pour la lyse adipocytaire, qui ont fait l'objet d'une interdiction en avril 2011. Cette dernière catégorie ne relevant ni des dispositifs médicaux, ni des produits cosmétiques, la DGCCRF retrouve ici sa compétence générale mais celle-ci apparaît difficile à exercer : face au principe de la libre circulation des marchandises au sein de l'Union européenne et à la liberté du commerce et de l'industrie, une interdiction requiert un motif de santé publique, lequel ne peut être mis en évidence que par une expertise. Or, l'expertise est réalisée par les agences sanitaires (l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, la Haute Autorité de santé, l'Afssaps, nos laboratoires) et ne parvient donc qu'indirectement à la DGCCRF. S'agissant de la lyse adipocytaire, ce n'est pas le produit qui a été interdit mais la pratique, sur la base de dispositions du code de la santé publique.

Ces « produits frontières » posent de grandes difficultés. La seule obligation qui s'impose est une obligation générale de sécurité, la même que pour les jouets ou les produits alimentaires. C'est une catégorie fourre-tout. Nous nous heurtons ici aux failles de la législation mais ce n'est pas pour autant que nous nous trouvons démunis tant dans les contrôles que dans les pouvoirs de police.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Qu'en est-il du contrôle des produits à visée esthétique vendus sur Internet au regard de la fraude et de la contrefaçon notamment ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Lorsque nous contrôlons un produit, nous le faisons à la fois dans les magasins physiques et au sein du commerce électronique. Il existe une législation particulière sur la vente à distance mais qui relève davantage de la protection économique du consommateur, par exemple au sujet des délais de rétractation, que de la sécurité des produits. Certaines commercialisations de médicaments sur Internet peuvent s'avérer problématiques. En revanche, à ce jour, le centre de surveillance du commerce électronique de la DGCCRF, qui intervient dans toutes les enquêtes, n'a pas identifié de fraude particulière liée à la commercialisation de dispositifs médicaux sur Internet. Bien entendu, cela ne signifie pas qu'il n'en existe pas. Ce qui peut éventuellement poser problème, ce sont les sites implantés à l'étranger, surtout hors de l'Union européenne. Dans ce dernier cas, nous sommes démunis : il n'existe pas de stock physique en France. De plus, quand bien même nous déterminerions qu'un produit commercialisé sur un site Internet hors Union européenne est dangereux, ce qui n'est déjà pas évident, nous ne disposerions pas des moyens juridiques nécessaires pour faire cesser sa commercialisation. C'est d'ailleurs pourquoi, fin décembre 2011, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi « renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs ». Ce texte comporte deux dispositions permettant de répondre à ce problème : la première autorise des agents de la DGCCRF à se faire passer pour des consommateurs lorsqu'il n'existe pas d'autre moyen de preuve possible, ce qui leur permettrait donc d'acheter et de se faire livrer le produit avant de l'envoyer au laboratoire pour examen, procédé impossible en l'état actuel du droit ; la seconde fournit la possibilité de demander au juge de fermer l'accès au site Internet à partir du territoire national, soit via l'hébergeur dans l'hypothèse où le site est hébergé en France, soit via le fournisseur d'accès à Internet dans le cas contraire. Cela ne permettrait pas de sanctionner les délits passés mais d'éviter que d'autres consommateurs continuent d'acheter les produits concernés. Ces dispositions ne sont pas spécifiques aux dispositifs médicaux mais nous seraient très utiles pour contrôler les sites de commerce électronique les plus problématiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Pensez-vous qu'il faille élargir votre compétence, et donc les moyens dont vous pourriez disposer pour la surveillance des produits médicaux à visée esthétique, ou estimez-vous souhaitable que cette compétence fasse elle aussi partie des missions, par exemple, de l'Afssaps ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

La répartition actuelle fonctionne car chacun se concentre sur son métier. Si nous devions nous voir conférer des compétences sur d'autres produits plus techniques, comme les dispositifs médicaux implantables, cela supposerait que nous recrutions des médecins et aurait un coût. Nous risquerions en outre de faire double emploi avec l'Afssaps. Transférer à l'Afssaps la compétence sur les produits destinés au grand public ne me paraît pas non plus optimal. Le fait que les contrôles au stade de la distribution soient réalisés par le même acteur permet une certaine synergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Je pensais surtout aux produits tels que le silicone par exemple, qui ne constitue pas qu'un produit médical, loin s'en faut, et qui peut entrer dans la composition d'un dispositif médical. Est-ce un type de produit pour lequel vous avez voix au chapitre ? Qu'en est-il, le cas échéant, de vos compétences et de vos moyens ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Les modalités actuelles du partage des missions entre la DGCCRF et l'Afssaps, qui tiennent compte des compétences propres à chaque réseau d'inspecteurs, nous paraissent pratiques. Nous estimons que les agents de la DGCCRF sont les plus aptes à contrôler les produits vendus au consommateur final, à un coût économique moindre, dans la mesure où ils opèrent les contrôles de sécurité sanitaire en même temps qu'ils s'acquittent de leurs missions de protection économique du consommateur. Revenir là-dessus supposerait de revoir les moyens affectés à chaque administration. Par ailleurs, lorsqu'il a créé l'Afssaps en 1998, le législateur a voulu la doter d'une part de pouvoirs d'inspection, d'autre part de pouvoirs de police spéciale, pouvoirs particulièrement renforcés. Le législateur partait du constat que les pouvoirs détenus par l'administration en application des règles du code de la consommation étaient insuffisants pour faire face aux défis de sécurité sanitaire posés tant par les médicaments que par les dispositifs médicaux. On a voulu donner un maximum de pouvoirs à l'Afssaps en la dotant d'inspecteurs spécialisés et d'experts, que l'administration du ministère de l'économie n'a donc pas choisi de recruter de son côté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Comment assurez-vous le contrôle de la qualité des produits à visée esthétique, de l'innocuité de leur utilisation et du respect des mises en garde - je pense par exemple aux produits de blanchiment des dents ? Quel contrôle exercez-vous sur la publicité en faveur de ces produits afin que le client ne soit pas trompé ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Il faut distinguer les produits cosmétiques d'une part et les produits de consommation courante de l'autre. S'agissant des premiers, c'est l'Afssaps qui dispose des pouvoirs de police spéciale, mais sur le terrain ce sont les inspecteurs de l'Afssaps et de la DGCCRF qui s'assurent conjointement du respect de la réglementation issue de la directive européenne 76/768 CEE du Conseil du 27 juillet 1976 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux produits cosmétiques (directive « Cosmétiques »), modifiée à plusieurs reprises et transposée dans le code de la santé publique. A partir de juillet 2013, les produits cosmétiques se verront directement appliquer un règlement européen et ses annexes. Concrètement, nous nous rendons sur les lieux, prélevons des échantillons et les faisons analyser pour vérifier leur conformité. Les produits de blanchiment des dents, par exemple, ne peuvent comporter plus de 0,1 % de peroxyde d'hydrogène.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Oui, certaines inspections sont encore en cours.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Dans le cadre des inspections qui ont déjà été menées à leur terme, avez-vous trouvé des dépassements ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Oui, nous avons trouvé des produits non conformes.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Ce sont des produits que les experts considèrent comme dangereux. Plus précisément, ces produits cosmétiques comportent dans leur composition des substances chimiques qui, effectivement, peuvent être toxiques.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Le constat ne peut être immédiat car le produit est d'abord envoyé au laboratoire pour analyse. En cas de non-conformité, l'inspecteur qui a procédé au prélèvement prend les mesures qu'il estime utiles pour faire cesser le danger et engager les poursuites.

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

A partir du moment où le produit qui dépasse les normes admises a été repéré, nous remontons au responsable de la première mise sur le marché pour suspendre la commercialisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Et le responsable du bar ? Doit-il avoir des diplômes ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

La profession n'est pas réglementée ; aucune qualification n'est requise.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Dans les cas avérés, pour lesquels il n'existe pas encore de compte rendu officiel, aucune mesure de police n'a été mise en oeuvre de la part de l'Afssaps car cela ne s'est pas avéré nécessaire : une fois contactés, les fabricants ont retiré d'eux-mêmes leurs produits du marché.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Ils connaissent pourtant les règles applicables à leurs produits ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Malheureusement, une ambigüité dans le droit applicable à ces produits a laissé penser à certains fabricants qu'ils étaient en droit de commercialiser des produits dont la concentration en peroxyde d'hydrogène était supérieure à 0,1 % en les rangeant sous le registre des dispositifs médicaux et en se soustrayant à la législation sur les produits cosmétiques. C'est pourquoi la DGCCRF a cru devoir rappeler, au mois de décembre dernier, que la législation sur les produits cosmétiques s'appliquait aux « bars à sourire ». La Commission européenne elle-même a estimé devoir remédier à ce flou dans la réglementation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Venons-en aux lasers à lumière pulsée utilisés pour les épilations.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

A priori les lasers, qui sont des dispositifs médicaux, ne sont vendus qu'à des professionnels de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

J'ai reçu chez moi, comme consommateur, une invitation à assister à une démonstration d'appareil à lumière pulsée. N'importe qui peut donc en acheter.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

La commercialisation de ces produits à lumière pulsée apparaît peu encadrée à l'heure actuelle. Le fabricant est tenu à l'obligation générale de sécurité de ses produits mais il est difficile d'en contrôler l'usage par les particuliers. Le problème est relativement récent. Il se pose surtout depuis que le prix de ces appareils est devenu plus abordable, c'est-à-dire inférieur à 10 000 euros.

En l'absence de législation particulière, laquelle devrait d'ailleurs être mise en regard avec le principe de libre circulation qui prévaut au sein de l'Union européenne, nous ne pouvons que veiller à ce que les notices de ces appareils soient suffisamment précises et comportent les avertissements nécessaires sur les dangers potentiels. L'usage par les professionnels est une autre question mais elle ne regarde pas les agents de la DGCCRF.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Vous êtes donc en demande d'encadrement légal ou réglementaire ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Oui, nous devons vous l'avouer.

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Effectivement, à partir du moment où ces appareils commencent à être diffusés dans le circuit de distribution grand public... Toutefois, l'encadrement risque de constituer une restriction aux échanges impliquant de devoir faire une notification à la Commission européenne sur la base de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques. La suite dépend de la sensibilité des autres Etats membres aux enjeux de santé publique et le débat doit se tenir au niveau communautaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Avez-vous identifié d'autres types de produits posant un problème similaire ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Nous avons demandé à l'Anses et à la HAS un inventaire complet des produits se trouvant sur le marché, de leurs caractéristiques et de leurs risques potentiels. C'est sur cette base-là que nous interviendrons soit directement par une modification réglementaire apportée au code de la consommation, soit en portant l'affaire au niveau communautaire, pour que la Commission européenne s'empare elle-même du sujet, celui-ci dépassant le simple territoire français.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Avez-vous déjà identifié d'autres types de produits qui se situent à la limite de la réglementation et qui mériteraient que le législateur ou le Gouvernement intervienne ?

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

Les produits qui utilisent des ultrasons s'apparentent à certains dispositifs médicaux et pourraient engendrer des risques pour la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis surpris du flou des réponses. Quel que soit le prix du produit en question, ce qui importe est son caractère dangereux ou non. Le principe de libre circulation ? On ne compte plus les normes européennes sur tant de produits, et voilà qu'ici, on nous oppose ce principe ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Tant que ces produits coûtaient très cher, la question de la vente au grand public ne se posait pas. Plus les progrès techniques ont permis de faire baisser les prix, plus les particuliers ont commencé à être intéressés.

Nous ne disons pas que le droit communautaire s'opposerait forcément à une législation ou à une réglementation nationale. Mais si nous voulons réglementer la commercialisation d'un produit sur le territoire national, il faut démontrer à la Commission et aux autres Etats membres que les dispositions envisagées et les objectifs de santé publique poursuivis sont proportionnés à la restriction des échanges qui s'ensuivrait. Dans cette perspective, la saisine de l'Anses va permettre de posséder un dossier scientifique étayé.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Que pensez-vous de l'utilisation du terme de massage par des personnes ne disposant d'aucune qualification médicale ou paramédicale ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

L'état du droit, tel que confirmé par la Cour de cassation, veut que le terme de massage soit réservé aux kinésithérapeutes, que le but du massage soit thérapeutique ou non. Conformément à la loi de n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, le terme de massage se distingue de celui de modelage, lequel serait un massage qui resterait plus superficiel... Les esthéticiennes ne peuvent utiliser que ce dernier terme.

La demande des consommateurs est importante. Sur le principe, nous sommes plutôt favorables à l'existence d'une concurrence entre les opérateurs tant que cela ne porte pas atteinte à la santé publique. Dans une décision du 12 octobre 2010, la cour d'appel de Paris a condamné un institut de massage ayant usé du terme de masseur pour exercice illégal de la profession de masseur-kinésithérapeute mais en appliquant une sanction modérée : au vu « du peu d'entrain manifesté par les pouvoirs publics à faire application de la protection pénale de la profession de masseur-kinésithérapeute si l'on en juge par le nombre d'établissements, proposant des massages de détente, ayant pignon sur rue, il y a lieu d'appliquer une sanction modérée aux deux prévenus ».

A cela s'ajoute la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur (directive « services ») qui exclut de son champ d'application tout ce qui relève des soins de santé. Dès lors que le massage n'est pas à but thérapeutique, il tombe donc sous le coup de cette directive : un opérateur qui exerce légalement une activité de masseur autre que thérapeutique dans un Etat membre pourrait, d'assez bon droit à notre sens, se prévaloir de la directive « services » pour qu'on ne lui oppose pas la législation nationale. Sur ce point, la législation ne paraît donc pas très adaptée ni aux évolutions du marché, ni au droit communautaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Vous n'agissez donc pas face à cette multiplication de salons de massage ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Cela relève du ministère de la santé, comme pour l'exercice illégal de la médecine.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Quel est votre avis sur la réglementation applicable à la profession d'esthéticienne ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Au-delà de la nécessité de réfléchir à une éventuelle évolution des règles qui distinguent le « massage » du « modelage » afin de mettre notre législation en conformité avec la directive « services », nous n'avons rien à ajouter.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Quelle appréciation portez-vous sur le tourisme esthétique ? Que pouvez-vous faire face aux agences touristiques qui proposent des interventions à visée esthétique dans le cadre de séjours à l'étranger ?

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Je vois mal comment les pouvoirs publics pourraient intervenir sur des pratiques de ce type au sein de l'Union européenne. A l'extérieur de l'Union européenne, il reste difficile de disqualifier globalement les prestations médicales d'un pays tiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Les soins de suite sont souvent assurés dans de simples hôtels. Ce n'est pas adapté !

Debut de section - Permalien
Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la DGCCRF

Encore une fois, nous n'avons pas les compétences médicales.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

La publicité pour la chirurgie esthétique est pourtant interdite.

Debut de section - Permalien
Alain Boulanger, chef du bureau produits et prestations de santé et services à la personne

L'interdiction ne vaut que pour les installations autorisées en France. Mais il n'existe pas d'interdiction de principe de la publicité pour la chirurgie esthétique. Une entreprise étrangère qui fait de la publicité en France est dans son droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Je remercie les participantes à cette table ronde, qui font partie des rédactions des magazines Elle, Marie Claire et Grazia, tout en regrettant que les représentants d'autres magazines n'aient pas souhaité y prendre part. Sachant que vos articles contribuent souvent à créer des tendances et à promouvoir de nouvelles techniques esthétiques, nous souhaiterions comprendre, sans préjugés ni parti pris, comment vous définissez vos sujets, et quelles réponses vous recevez de vos lectrices et lecteurs. Il est d'ailleurs dommage qu'aucun magazine masculin n'ait donné suite à notre invitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Quelle place accordez-vous à l'esthétique et aux interventions à visée esthétique, médicales ou non, dans la ligne éditoriale de votre magazine ? Avec quelle régularité et sous quel angle ces thèmes sont-ils abordés dans vos colonnes ?

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Nous traitons au moins deux fois par an, au printemps, à la rentrée et parfois en fin d'année, dans des numéros spéciaux, des thématiques anti-âge. Nous abordons également ces sujets à travers notre couverture de l'actualité, comme ce fut le cas avec les prothèses PIP.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Pas uniquement, la notion d'anti-âge comprenant aussi bien les crèmes que la médecine et la chirurgie esthétiques, cela dépend du thème de l'article et de l'actualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Il y a bien toujours une dimension esthétique dans vos publications, n'est-ce pas ?

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Oui, bien sûr.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Qui traite ces sujets ? Avez-vous des spécialistes dans vos équipes ? Des médecins pour les sujets médicaux ?

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

C'est moi, entre autres. Nous interrogeons des médecins, mais ils n'écrivent pas les articles.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Non. Ces sujets apparaissent dans la rubrique beauté. Il n'y a pas, à proprement parler, de section consacrée chaque semaine à la santé dans Grazia, notre couverture dépend plutôt de l'actualité et des tendances.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous faisons un suivi régulier des évolutions du secteur de l'esthétique, sous différents angles et en fonction de l'actualité. Elle fait environ une accroche par mois sur l'esthétique, soit un numéro sur quatre. Nous réalisons aussi des sujets thématiques réguliers, avec une fois par an des numéros estampillés « Rajeunir » qui comportent une cinquantaine de pages dédiées, « Spécial kilos » ou encore « Cellulite »...

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Le choix des mots utilisés est très important et fait l'objet, de notre part, d'une longue réflexion. Ainsi, nous n'utilisons plus le terme « maigrir », car c'est une notion à l'intérêt discutable. Tous ces numéros se vendent bien.

Par les sujets traités, nous ne faisons que refléter les préoccupations des femmes qui ont des attentes, des espérances, des envies, mais aussi des méfiances et des interrogations. Nous sommes comme des éponges qui intègrent et répondent à ce qui se passe dans la tête et le corps des femmes. Nous n'avons pas la science exacte mais nous leur apportons des réponses et des éclairages en faisant des enquêtes, en nous renseignant sur les nouveaux produits, en les testant. Notre métier est bien d'aider les femmes.

Nous publions aussi des témoignages sur des sujets ponctuels, plutôt sous l'angle de la psychologie ou de l'estime de soi, comme « La chirurgie esthétique a changé ma vie », ainsi que des articles qui rendent compte de phénomènes qui font l'actualité ou suscitent des polémiques, comme ce fut le cas pour ce que l'on a appelé le « vampire lift », technique qui consiste à réinjecter dans le visage du patient son sang préalablement prélevé après l'avoir passé à la centrifugeuse. Dans des cas pareils, nous enquêtons : il est hors de question d'en faire état sans en savoir plus. Tel a été notre comportement également lorsqu'il s'est agi de parler du laser fractionné ou de la cryothérapie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Mettez-vous en garde contre les risques de ces techniques ?

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Bien sûr, c'est notre métier. Nous cherchons continuellement à faire la part des choses, entre le pour et le contre, mais nous nous interdisons de juger : nous mettons les éléments à disposition de nos lectrices, sans stigmatiser celles d'entre elles qui ont recours à ces techniques. Nous les interrogeons plutôt sur leur expérience et les résultats qu'elles estiment avoir obtenus grâce à de telles interventions. Lorsque surgissent des polémiques, comme sur les cabines UVA, le blanchiment des dents ou la qualité du Botox® vendu sur Internet, elles sont traitées plutôt dans la partie généraliste de notre magazine que dans la section beauté afin de les aborder sous un angle plus large.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Comment préparez-vous vos articles ? Quel est le travail de recherche que vous menez ? Vos enquêtes sont-elles toujours approfondies ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Elles le sont d'autant plus qu'il en va de la santé de nos lectrices. En matière d'esthétique, nous ne publions aucun article qui n'a pas été relu ou qui n'a pas fait l'objet d'une véritable enquête.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous sommes beaucoup lus, nous n'avons donc pas le droit à l'erreur.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Et nous faisons confiance aux spécialistes pour nous prévenir si jamais nous avons malgré tout fait une erreur.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Nous ne pourrions rien écrire si nous n'enquêtions pas.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous sommes des journalistes à part entière et, au même titre que des journalistes politiques ou économiques, nous enquêtons sur les sujets qui paraissent dans nos colonnes.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Nous parlons tout autant des points positifs que des points négatifs. Nous présentons le pour et le contre, ce qui nous conduit régulièrement à écrire, par exemple, sur les dangers des injections trop importantes de Botox® qui ont été mis en lumière aux Etats-Unis et se traduisent par des maux de tête. S'agissant des nouvelles techniques, nous précisons toujours que nous n'avons pas assez de recul pour en mesurer pleinement les effets et, le cas échéant, qu'aucune étude scientifique n'a été publiée dans une revue de référence.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Considérez-vous que vos articles sont scientifiques ou de vulgarisation ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Dans mon cas, je considère que nous faisons de la vulgarisation. Marie Claire n'est pas un journal scientifique.

Debut de section - Permalien
Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

C'est la même chose pour Elle : nous mettons en garde nos lectrices lorsque les techniques sont nouvelles et nous interrogeons des spécialistes afin de nous faire notre propre idée sur la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La vulgarisation des différentes formes d'interventions esthétiques dans vos colonnes n'encourage-t-elle pas des personnes facilement influençables à courir des risques et à se soumettre à des pratiques sans que leur consentement éclairé ne puisse être établi ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Certaines femmes veulent de toute façon recourir à ces techniques, autant qu'elles soient informées des risques qu'elles encourent.

Debut de section - Permalien
Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

D'après les échos que je peux en avoir, nos articles les dissuadent parfois. Nous donnons un maximum d'informations sur ce qui existe afin que les femmes aient le plus d'éléments possible avant de décider de recourir à un acte esthétique.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

En outre, il existe aujourd'hui, en réaction au développement des interventions esthétiques, un engouement pour les techniques naturelles, sans risque, à base de massage ou de modelage. Il existe une vraie demande de la part de femmes qui refusent ces pratiques nouvelles. Nous leur fournissons donc aussi des informations à ce sujet.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Dans Grazia, nous passons plutôt notre temps à mettre en garde les jeunes femmes sur les risques et les précautions à prendre si elles envisagent une intervention esthétique. Notre lectorat étant plus jeune, nous faisons plutôt la promotion de méthodes plus naturelles dans la technique comme dans le résultat.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Chaque journal a une cible d'âge spécifique. Celle de Grazia est plus jeune. En revanche, il existe une demande d'information de la part de femmes plus âgées. Nous devons y répondre.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Bien sûr. Nos lectrices constituent notre caisse de résonance.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Comment les préoccupations de vos lectrices vous parviennent-elles ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Nous sommes non seulement des femmes, mais notre métier de journalistes fait de nous, comme le disait ma consoeur, des éponges : on sent les tendances, on rencontre les acteurs, beaucoup d'informations nous remontent sur ce qui a du succès. Cette intuition des journalistes est complétée par les travaux de nos services de marketing et les tables rondes avec des lectrices que nous organisons régulièrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Avez-vous des règles d'éthique en matière de publicité pour le choix des annonceurs ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Cela relève du service publicitaire, qui est complètement distinct de la rédaction. Toutefois, je crois savoir que nous n'avons légalement pas le droit de refuser une publicité.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Je n'ai personnellement jamais vu de publicité pour des produits injectables.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Pourtant il y en a mais, phénomène plus inquiétant, on voyait il y a quelques années des publicités pour des cliniques privées qu'un magazine ne pouvait pas refuser.

D'ailleurs, sur quels critères pourrions-nous refuser la publicité d'un fabricant et accepter celle d'un autre ? Nous, journalistes, serions assez mal placés pour juger.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Un cas s'est récemment présenté avec un produit dangereux. Une firme française, qui cherchait à commercialiser un produit injectable, avait besoin pour celui-ci d'obtenir le marquage CE. Elle l'a demandé dans un autre pays européen puis a pu vendre ce produit en France. Heureusement, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) est intervenue. Les exigences pour obtenir le marquage CE ne sont pas uniformes dans l'Union européenne alors qu'il produit les mêmes effets. Le marquage CE est une garantie mais n'est pas une panacée.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Le marquage CE est une garantie de production, de conformité à un cahier des charges mais non de sécurité sanitaire. Un produit marqué CE n'est pas forcément inoffensif.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Vous dites être attentives au souhait d'information et aux préoccupations de vos lectrices et lecteurs en matière de santé et de beauté. Déterminez-vous votre cible sur la base de critères autres que la simple vente de vos journaux ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Nous répondons aux attentes de notre lectorat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Mais tracez-vous une frontière entre les pratiques qui relèvent de la santé, du bien-être et de la beauté ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

La distinction entre santé et beauté tient dans l'urgence qui peut être attachée aux questions médicales. En matière de beauté et de lutte contre le vieillissement, on n'est jamais dans l'urgence. Notre conseil aux lectrices est donc de toujours prendre le temps de la réflexion en la matière.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous leur recommandons de consulter des spécialistes et de recueillir plusieurs avis. De plus, nous ne sommes pas les seuls à même de dispenser des conseils à ces femmes. Les esthéticiennes, les kinésithérapeutes et surtout les médecins, professionnels diplômés et compétents, doivent eux aussi faire correctement leur métier. Le nôtre est d'informer notre lectorat, le leur est de mettre leurs compétences au service des femmes et des hommes qui viennent les voir. A chacun son métier.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Le délai de réflexion est essentiel. Tout le monde aspire au rajeunissement et lorsqu'on est face à une telle promesse, on veut y croire et on a tendance à se précipiter. Il faut pouvoir y repenser chez soi, à tête reposée. Je veux insister sur le fait qu'en médecine ou chirurgie esthétique il n'y a jamais d'urgence.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

En somme, vous apportez de l'information sur des bases vérifiées, tout en appelant à la prudence. Vous vous gardez de toute incitation.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Par rapport à des domaines comme la coiffure ou le maquillage, le caractère incitatif est bien moindre. Nous sommes sensibles aux risques et au caractère aléatoire des résultats en fonction des personnes et des praticiens, d'où notre prudence.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Les techniques de médecine esthétique, bien que moins invasives que la chirurgie esthétique, ne sont jamais anodines ; nous le rappelons toujours.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Nous précisons également le recul qu'on peut avoir sur certaines techniques. On préfère attendre d'avoir les premiers retours plutôt que de traiter des nouveautés dès leur sortie. Aujourd'hui, comme le prix des études cliniques est très élevé, certains tests se font dans le cabinet du médecin. Nous ne voulons pas que nos lectrices soient des cobayes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Votre ligne éditoriale est-elle tournée vers un certain style de femmes ? Après le style mannequin, qui a fait des ravages en matière d'amaigrissement chez les jeunes, favorisez-vous le modèle d'une femme jeune et dynamique ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Marie Claire a une cible très large, qui débute dès dix-sept ans. Nous nous adressons donc à un public très nombreux et diversifié et nous laissons une grande liberté aux femmes, héritage de notre tradition militante et féministe. Nous écrivons des articles comme « Belle avec mes rides » ou « Plus belle à soixante qu'à trente ans » car ils sont le reflet de notre société. Une femme de cinquante-cinq ans aujourd'hui a une apparence beaucoup plus jeune qu'une femme du même âge il y a vingt ans. Avec l'augmentation de l'espérance de vie, le curseur se décale. Désormais, l'esthétique ou la beauté ne sont plus l'essentiel, mais le dynamisme compte aussi beaucoup. L'explosion du marché des tests génétiques est une bonne illustration de cette nouvelle réalité dont l'esthétique ne rend compte que très partiellement.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Je n'ai pas l'impression de travailler pour un journal qui ne vise qu'un type de femmes. Il a un panel très large et même 30 % d'acheteurs. Nous avons sans doute tous des idéaux en tête, d'une image physique et intellectuelle de nous même que l'on souhaiterait atteindre. Mon journal est surtout marqué par un état d'esprit qui met l'accent sur le dynamisme et l'optimisme. Voila ce que nous souhaitons partager avec notre lectorat.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Quelles évolutions de la demande en matière d'esthétique avez-vous pu constater ces dernières années ? Le critère esthétique principal est-il donc désormais plutôt le dynamisme que la beauté ?

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Aujourd'hui, les femmes ne veulent pas avoir l'air fatigué. Comme l'expliquent très bien les sociologues, l'apparence a de l'importance vis-à-vis des autres mais aussi de soi-même en ce qu'elle contribue, chaque matin, à définir notre état d'esprit.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Il est intéressant de noter une autre évolution récente en la matière. Les femmes ne se focalisent plus sur les rides comme il y a vingt ans mais sur la santé et l'éclat de la peau. Nos articles sur le sujet doivent aborder aussi bien l'alimentation que l'hygiène de vie. On sort du champ de la médecine esthétique.

Debut de section - Permalien
Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

Les femmes ne veulent pas être transformées et sont plus méfiantes que par le passé vis-à-vis de la chirurgie esthétique. Elles recherchent maintenant une harmonie générale et veulent rester elles-mêmes.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Les femmes subissent plus jeunes des interventions plus légères, et cela se voit beaucoup moins. On repère facilement une femme plus âgée qui a subi une intervention il y a quelques années. Aujourd'hui, les techniques et les gestes chirurgicaux plus précis, développés notamment par l'école française, la french touch reconnue jusqu'aux Etats-Unis, visent à privilégier le naturel. Les codes américains d'injections du Botox® s'en inspirent afin d'éviter d'en utiliser de trop grandes quantités.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Il est désormais plus important d'avoir une belle peau, sans pores, mais je trouve cela paradoxal car avec l'arrivée du Botox® et de l'acide hyaluronique les femmes qui y ont recours, même jeunes, changent de tête. Je repère vite ces femmes qui, ayant fait de la mésothérapie, ont un teint plus ciré. Les femmes veulent plus de naturel mais sont prises dans un engrenage.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Avec le Botox® et l'acide hyaluronique, qui sont résorbables, il faut six mois pour revenir à l'état de départ. L'image qu'on a de soi, son image corporelle, n'est donc pas modifiée, contrairement à ce qui se passe en cas d'intervention définitive, comme un lifting. Cette idée de réversibilité me semble capitale. On peut décider de recommencer ou non. Les femmes qui tombent dans la dysmorphophobie ou l'addiction à ce genre de techniques n'attendent pas que leur apparence revienne à sa forme naturelle. Il faut être prudent sur ce point, et nous disons clairement à nos lectrices qu'il n'est pas recommandé de subir de telles injections plus de deux fois par an.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Des considérations financières n'entrent-elles pas également en jeu ? Et puis il me semble que certaines femmes ont recours à ces techniques par crainte des complications parfois rencontrées en chirurgie esthétique. Les effets du Botox® ne sont pas permanents.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Ils durent de quatre à six mois, puis le vieillissement revient.

Debut de section - Permalien
Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Il me semble qu'aujourd'hui la chirurgie esthétique s'adresse aux femmes qui ont plus de cinquante ans.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Tout dépend de l'opération envisagée.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Il est vrai que le nombre d'actes de chirurgie esthétique est en nette diminution. C'est la raison pour laquelle les chirurgiens esthétiques souhaitent faire plus d'injections et sont en opposition sur ce point avec les médecins esthétiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Comment expliquez-vous que le phénomène de développement des interventions esthétiques ait moins d'ampleur en France qu'ailleurs ?

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

C'est difficile à dire. Les raisons sont sans doute culturelles. En Asie, les femmes ont une culture de la blancheur mais peu de rides. Au Brésil, les interventions concernent bien plus le corps que le visage. On peut toutefois constater l'apparition d'un modèle universel de la femme. Les caractéristiques spécifiques à chaque continent tendent à s'amenuiser face à la mondialisation d'un type féminin. Les Asiatiques se font débrider les yeux, par exemple.

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Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

Mais celles qui vivent hors d'Asie, contrairement à celles qui y vivent, ne les font débrider qu'à moitié, comme si elles voulaient préserver une part de leur identité.

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Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Dans certains pays, comme aux Etats-Unis ou en Amérique du Sud, la chirurgie esthétique ou les injections peuvent être un signe extérieur de richesse...

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Comme le bronzage l'était il y a quelques années.

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Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Mais chez les jeunes, le Botox® devient une mode.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

C'est incontestable.

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Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Ce n'est absolument plus tabou.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Effectivement, et plus on commence jeune, plus le risque est élevé de perdre l'image de soi et de refuser le vieillissement par rapport aux générations qui n'ont connu ces techniques qu'à cinquante ans. Cela va susciter un problème psychologique d'appréhension du vieillissement totalement différent de ce que nous avons connu jusqu'à présent.

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Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

Tous les médecins ne sont pas d'accord sur ce point. Certains disent qu'ils accueillent plus de jeunes dans leur cabinet, d'autres non. En l'absence de statistiques officielles, il est difficile de se prononcer. Peut-être une frange de cette génération a-t-elle recours à cette chirurgie pour imiter celle de ses parents, qui l'a banalisée.

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Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

C'est peut-être un phénomène très parisien.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

En matière de chirurgie mammaire, les demandeuses sont de plus en plus jeunes. Certains chirurgiens sont extrêmement rigoureux sur ce point et refusent d'opérer, si le but est purement esthétique, les jeunes filles de moins de dix-huit ans mais d'autres acceptent.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Qu'est-ce qui vous préoccupe le plus dans le domaine de l'esthétique ?

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Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

La chirurgie esthétique est assez bien encadrée alors que la médecine esthétique ne l'est pas du tout. Des personnes se faisant passer pour des médecins proposent des injections de Botox® ou d'acide hyaluronique. Les produits utilisés sont assez mal connus de l'Afssaps. La réaction de la peau et du corps aux produits injectés sur la durée l'est également. Les médecins rechignent à signaler les effets secondaires qu'ils constatent.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

La situation est différente pour le Botox®, pour lequel nous disposons d'un recul de plus vingt ans.

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Julie Lasterade, chef du service beauté-santé du magazine Grazia

Effectivement, c'est un médicament qui bénéficie d'une autorisation de mise sur le marché (AMM). Mais d'autres produits injectables, comme l'acide hyaluronique, ne sont pas des médicaments. Il n'y a donc pas eu d'AMM, les remontées sont très limitées et l'encadrement est faible.

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Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

C'est pareil pour les injections anticellulite, qui sont heureusement interdites aujourd'hui.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Le marché pour ces produits est énorme et mondial, avec une croissance de 12 % et de 8 % par an en Europe et en France. De grosses entreprises l'investissent car elles ont bien compris son potentiel de développement. Certains acteurs issus de pays où les contrôles sont peu rigoureux font du marketing pour leur acide hyaluronique en mettant en avant sa composition spécifique, qui le différencie de la concurrence. Pourtant, plus la formule de ces produits est complexe, à base de molécules et d'ingrédients nouveaux, plus les risques allergiques sont élevés. Ils peuvent agir à retardement et se déclarer plus tard, lors d'une nouvelle injection. Il est indispensable de savoir précisément ce que l'on se fait injecter. Le carnet de suivi esthétique est donc une bonne chose, surtout sur la longue durée. Comment connaître autrement, à soixante ans, les produits qui composaient une injection reçue à trente ans ?

Il existe donc un risque de croisement des allergènes et de multiplication des réactions très important. Nous incitons nos lectrices à choisir les produits les plus simples et à bien regarder la boîte de ceux-ci.

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Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Malheureusement elles refusent de le faire, malgré les mises en garde réitérées dans chacun de nos articles. Elles ne veulent pas savoir.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Des médecins peu rigoureux, à qui les laboratoires offrent de nouveaux produits, les testent ensuite sur leurs patientes et les leur facturent sans révéler leur véritable composition.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Attention, il ne faut pas faire d'amalgame : ne mettons pas tous les médecins dans le même panier.

Avez-vous consacré des articles au tourisme esthétique ? Si c'est le cas, quel jugement avez-vous porté dessus ?

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Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous y avons consacré un article il y a bientôt trois ans : nous étions très circonspects car nous manquions de recul. Nous avions mis en garde nos lectrices sur l'absence de suivi. Il fallait traiter ce sujet car il faisait alors l'actualité, mais nous avons recommandé la prudence.

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Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

Il paraît aberrant d'aller se mettre entre les mains d'un chirurgien qu'on ne rencontre pas avant l'opération et qu'on ne connaît pas.

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Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

C'est très souvent une question de coût.

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Il est souvent trois fois moindre.

Par ailleurs, il faut rappeler que la formation des médecins esthétiques est souvent assurée par les fabricants des produits qu'ils utilisent.

Debut de section - Permalien
Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

Il n'y a pas de véritable diplôme reconnu en médecine esthétique car le terme « esthétique » est réservé aux chirurgiens plasticiens. Les formations proposées par les sociétés savantes sont assez hétérogènes. Il faudrait créer une formation de médecine esthétique qui soit reconnue par le ministère de la santé afin que les femmes puissent savoir quelle est la qualification de ceux à qui elles s'adressent.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Nous y pensons également, c'est l'objet de notre mission d'information.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Nous sommes plusieurs à avoir récemment assisté au congrès international de médecine anti-âge à Monaco. Nous avons été affolées...

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Isabelle Sansonetti, journaliste au magazine Elle

Par la foire commerciale !

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Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

par le nombre de produits proposés. C'est un marché énorme qui dépasse de loin les injections : machines, gélules, tests génomiques.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous souhaitons, afin de protéger nos lectrices, qu'il y ait un véritable encadrement de ce secteur.

Debut de section - Permalien
Ariane Goldet, rédactrice en chef santé-beauté-forme du magazine Marie Claire

Les femmes et les hommes sont tentés par ces techniques, c'est le cours des choses. On ne pourra pas les en empêcher, il faut donc prendre des mesures pour mieux les protéger.

Debut de section - Permalien
Monique Le Dolédec, rédactrice en chef adjointe beauté du magazine Elle

Nous comptons sur vous !