La commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Catherine Procaccia sur le projet de loi n° 141 (2007-2008) relatif à la réforme du service public de l'emploi.
a rappelé que le projet de loi propose une réforme des deux principaux opérateurs du service public de l'emploi : l'ANPE créée en 1967, établissement public administratif en charge des demandeurs d'emploi et regroupant 28 000 agents, et l'Unedic instituée en 1958, association gérée paritairement par les partenaires sociaux qui indemnise les demandeurs d'emploi et compte 14 000 salariés.
La réforme prévoit de fusionner l'ANPE et le réseau opérationnel de l'Unedic afin de créer un opérateur unique qui assurera à la fois le placement et l'indemnisation des demandeurs d'emploi. Il s'agit d'améliorer le service rendu aux demandeurs d'emploi en simplifiant leurs démarches et en consacrant plus de moyens à leur accompagnement grâce à des économies de gestion. Un ratio de trente demandeurs d'emplois pour un conseiller ANPE contre un pour cent vingt actuellement devrait être atteint dans les toutes prochaines années. La fusion doit également améliorer le service rendu aux entreprises et notamment à celles qui rencontrent des difficultés de recrutement.
L'éventualité d'une fusion de ces deux institutions a souvent été envisagée dans le passé mais les partenaires sociaux y étaient hostiles au nom de leurs prérogatives en matière de définition des règles de l'assurance chômage. Le projet de loi propose donc une solution de compromis : ils continueront de définir par voie conventionnelle les paramètres de l'assurance chômage et l'Unedic sera maintenue comme une structure support permettant de gérer la convention. Ceci explique que la majorité des organisations syndicales et patronales approuve désormais le projet.
Le nouvel opérateur sera chargé pour le compte de l'Unedic de verser les allocations chômage et, dans un premier temps, de collecter les contributions d'assurance chômage. D'ici 2012, le deuxième volet de la réforme prévoit en effet de transférer cette collecte aux Urssaf. Cette réforme suscite cependant une préoccupation légitime chez les salariés des Assedic qui s'interrogent sur le devenir de leurs collègues affectés aux tâches de recouvrement. Le délai prévu avant l'entrée en vigueur du transfert doit justement permettre d'organiser le reclassement professionnel de ces salariés, soit auprès des Urssaf, soit au sein du nouvel opérateur dans d'autres fonctions, ce qui suppose leur formation.
a ensuite détaillé l'organisation du nouvel opérateur. Le projet de loi le définit comme une « institution nationale » afin de souligner l'originalité de son statut qui emprunte sur certains points au mode de gestion privée. Il sera piloté par un conseil d'administration de dix-huit membres dans lequel les partenaires sociaux seront majoritaires et sera dirigé par un directeur général nommé en conseil des ministres. Il s'appuiera sur des directions régionales qui concluront chaque année une convention avec le préfet de région pour déterminer la manière dont les interventions de l'opérateur s'adapteront à la situation locale de l'emploi. Son budget sera divisé en trois sections non fongibles afin de distinguer les dépenses d'indemnisation du chômage financées par l'Unedic, les dépenses de solidarité prises en charge par l'Etat ou le fonds de solidarité et les dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention au profit des chômeurs financées conjointement par l'Etat, l'Unedic et éventuellement d'autres acteurs tels que les collectivités territoriales.
Parmi les problèmes pratiques de la fusion figurent ceux relatifs au statut du personnel et au transfert des biens immobiliers. Le texte propose que les salariés du nouvel opérateur soient régis par le code du travail, mais les agents actuels de l'ANPE pourront conserver leur statut de contractuel de droit public. De plus, la direction du nouvel opérateur et les syndicats représentatifs devront négocier une nouvelle convention collective qui s'appliquera aux salariés employés par l'Assedic, aux agents de l'ANPE qui choisiront de renoncer à leur statut public ainsi qu'aux nouveaux embauchés. La nouvelle convention sera proche de celle en vigueur aux Assedic et la fusion pourrait donc avoir un coût financier important car les rémunérations versées aux Assedic sont nettement plus élevées que celles versées à l'ANPE.
Si l'organisation proposée pour le nouvel opérateur est globalement satisfaisante, plusieurs amendements seront présentés, notamment pour préciser les prérogatives du conseil d'administration, améliorer la structure du budget et fixer les règles applicables en matière de passation de marchés.
Enfin, si la fusion a donné lieu à des inquiétudes concernant le maillage territorial de la nouvelle institution, le texte devrait permettre de les lever puisque l'objectif est de disposer sur l'ensemble du territoire d'implantations polyvalentes et non de réduire la présence du service public de l'emploi dans les zones rurales.
En conclusion, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a souligné que la fusion de l'ANPE et des Assedic marque une première étape de la réforme du marché du travail qui devrait être complétée dans les prochains mois par une réforme du contrat de travail et de notre système de formation professionnelle.
évoquant le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, entravé par l'existence de statuts différenciés pour le personnel, a estimé que les dispositions du projet de loi ouvrent la voie à des difficultés identiques et a insisté d'une part, sur la nécessité de régler les questions de statut avant la création effective de la nouvelle institution, d'autre part, sur l'importance de la formation du personnel à ses nouvelles tâches.
a exprimé son soutien à la fusion de l'ANPE et des réseaux de l'assurance chômage mais s'est dit inquiet des conséquences de la différence des cultures des deux pôles de la nouvelle institution. Il a estimé nécessaire de rationaliser les réseaux de collecte des cotisations dans le respect des compétences et des aspirations du personnel, afin de donner des perspectives claires aux salariés affectés à de nouvelles missions. Il a jugé délicate à gérer la coexistence de plusieurs statuts du personnel au sein de la nouvelle institution et s'est assuré que les salariés recrutés par celle-ci seront soumis à la convention collective dont la négociation est prévue.
a approuvé l'existence d'un guichet unique pour accueillir les demandeurs d'emploi indemnisés ou non, tout en rappelant que de tels guichets fonctionnent déjà. Un meilleur service aux chômeurs n'implique pas nécessairement la fusion des réseaux, compte tenu en particulier des problèmes de statut que pose celle-ci.
Elle a jugé l'intitulé du projet de loi disproportionné par rapport à son contenu. Ce texte, qui vise seulement la fusion de deux opérateurs, n'aborde en aucune manière le projet politique du Gouvernement en matière d'emploi. Par ailleurs, l'urgence n'est pas opportune sur ce texte qui aurait justifié deux lectures.
De fait, de nombreux points ne sont pas réglés. C'est en particulier le cas du statut du personnel, essentiel pour impliquer les agents dans la réussite de l'institution. L'incertitude s'installe à cet égard et provoque sur le terrain la montée latente des oppositions. C'est aussi le cas en ce qui concerne les oeuvres sociales, l'organisation territoriale de la nouvelle institution, le rôle des collectivités territoriales, compétentes à des titres divers en matière d'emploi et pratiquement absentes du projet de loi.
Enfin, l'absence de la notion de sécurisation professionnelle dans le débat public sur le droit du travail est inquiétante à maints égards.
estimant la fusion nécessaire, a évoqué les difficultés subsistantes, en particulier en ce qui concerne le reclassement des salariés des Assedic, qui nécessite de mettre en place à leur intention des dispositifs efficaces. Il a aussi mentionné la coexistence délicate de deux conventions collectives et d'un statut de droit public, ainsi que la complexité du mécanisme retenu pour la dévolution des biens des Assedic à la nouvelle institution.
a regretté à son tour la déclaration d'urgence sur le projet de loi et la précipitation du calendrier d'examen par le Sénat, alors que de nombreux problèmes ont été insuffisamment étudiés. Elle a regretté en particulier le faible délai entre l'examen en commission et en séance publique, ce qui ne lui permettra pas de disposer du rapport de la commission pour préparer suffisamment le débat.
En ce qui concerne le principe de la réforme, elle a critiqué le repli du statut public, la soumission des salariés recrutés au code du travail, l'adoption des règles de la comptabilité d'entreprise, même si l'Etat reste relativement présent dans la nouvelle entité.
Elle a regretté que le budget de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) dépende de l'Etat.
Elle a prédit que le régime du personnel sera difficile à mettre en oeuvre et a évoqué le cas des agents du groupement des Assedic de la région parisienne (GARP), estimant la mise en oeuvre d'actions de formation nécessaire mais peu susceptible de compenser l'absence de reconnaissance des compétences acquises par les personnels.
Elle a exprimé la crainte que les regroupements prévus au sein des réseaux n'aboutissent à rendre l'accès plus difficile en zone rurale et a dénoncé le recul de la présence des services publics dans ces zones.
Elle a enfin déploré que l'objectif du ratio de trente demandeurs d'emploi suivis par agent ne concerne que les personnes jugées prioritaires.
a demandé si les auditions du rapporteur permettent de penser que les économies de gestion attendues de la fusion seront effectivement réalisées, notant le caractère inflationniste de l'alignement des statuts sur la convention collective des Assedic. Il a aussi souhaité savoir si la réduction du nombre des agents est envisagée.
Il a estimé la nomination du directeur général de la nouvelle institution par le Gouvernement contradictoire avec l'évolution de celle-ci vers le droit privé et s'est inquiété de la coexistence de trois statuts du personnel.
a rappelé que la récente mission d'information sur la formation professionnelle a préconisé le rapprochement de l'Afpa et des services chargés du placement. Que prévoit le projet de loi à cet égard, sachant que la présence de l'Afpa dans le service public de l'emploi ne doit pas remettre en cause ses conditions d'accès à la commande publique de formation ?
a regretté que le projet de loi n'apporte aucun éclairage sur la politique de l'emploi du Gouvernement. Son inquiétude sur le fond du texte n'est pas atténuée par le calendrier d'examen, trop précipité.
En ce qui concerne le statut du personnel, il a fait valoir l'existence d'un lien entre l'acceptation de la diversité des statuts et la réussite en douceur d'une réforme structurelle.
Il s'est inquiété des propos du Président de la République en ce qui concerne les conséquences du refus, par un chômeur indemnisé, de deux offres « acceptables », de la suppression de l'ASS et de la diminution du nombre des chômeurs indemnisés, ce qui accroît les contraintes pesant sur les demandeurs d'emploi.
Il a enfin fait état de son expérience insatisfaisante du fonctionnement des Assedic, insuffisamment accessibles aux demandeurs d'emploi.
a évoqué la couverture des expatriés français contre le chômage, indiquant qu'il leur est actuellement nécessaire de rentrer en France pour percevoir les indemnités acquises. Il a annoncé son intention de déposer un amendement afin de permettre le versement des indemnités dans le lieu de résidence, pour une durée limitée. L'argument de l'absence de dispositif de contrôle invoqué jusqu'à présent pour s'opposer à cette réforme n'est plus pertinent compte tenu du rôle des comités consulaires pour l'emploi et la formation professionnelle.
a reconnu que le délai d'examen du projet de loi est insuffisant. Tous les aspects techniques du texte n'ont pu être étudiés avec la précision qu'elle aurait souhaité pouvoir y apporter.
L'objectif de la réforme est de fournir un meilleur service aux demandeurs d'emploi. La question du statut des personnels, pour légitime qu'elle soit, ne doit donc pas primer sur la recherche du meilleur service possible. De plus, la fusion devrait se traduire par une amélioration du statut pour l'ensemble des anciens agents de l'ANPE. Les salariés de l'Unedic devraient bénéficier, grâce à la nouvelle convention à négocier, d'une situation globalement équivalente. Un amendement prévoyant que cette convention devra être signée avant le 30 septembre 2010 sera déposé. La fusion ne se traduira donc pas, dans l'immédiat, par des économies de gestion mais elle devrait, comme le montrent les expériences déjà menées, accroître l'efficacité du service public de l'emploi.
Ce seront les partenaires sociaux qui détermineront le poids des oeuvres sociales.
La fusion ne modifiera pas le mode de financement de l'ASS puisqu'il sera toujours assuré par l'Etat, via la nouvelle institution.
Le caractère privé du nouvel organisme ne porte en rien atteinte à sa mission de service public. De nombreuses associations de droit privé assument déjà depuis plusieurs dizaines d'années des missions de service public.
Un amendement permettant au conseil d'administration de déposer une motion de censure contre le directeur général sera proposé afin de contrebalancer le pouvoir du Gouvernement dans la nomination.
Les personnels chargés du recouvrement des cotisations devront effectivement bénéficier d'une formation afin d'être affectés à de nouvelles tâches.
Il aurait été souhaitable d'associer l'Afpa à la fusion mais une réforme de la formation professionnelle est prévue pour le premier semestre 2008.
La notion d'« offre d'emploi acceptable » est en effet mal définie ; ceci étant, on peut penser qu'elle équivaut à la notion figurant dans le code du travail d'« offre valable d'emploi » définie par l'organisation internationale du travail (OIT) selon trois critères : proximité géographique, compétences équivalentes, salaire égal. Il faut aussi que ces deux notions soient bien utilisées afin de permettre au demandeur d'emploi d'avoir accès à des offres même si elles ne lui correspondent pas a priori et au conseiller de pouvoir sanctionner éventuellement un demandeur qui refuserait systématiquement des offres valables.
a déclaré ne pas partager l'optimiste de Mme Catherine Procaccia et a cité l'exemple du Royaume-Uni : la notion d'« offre publique valable » y a été récemment redéfinie au détriment des salariés.
La commission a ensuite examiné les amendements présentés par le rapporteur.
A l'article premier (coordination des acteurs du service public de l'emploi), elle a adopté un amendement créant dans chaque région un conseil régional de l'emploi à l'image du conseil national de l'emploi prévu par le projet de loi.
a fait part de ses réserves sur cet amendement, jugeant que cette nouvelle structure risque d'être excessivement lourde.
A l'article 2 (institution du nouvel opérateur), elle a adopté six amendements. Le premier prévoit de faire évoluer le nombre des représentants syndicaux et patronaux dans le conseil d'administration de la nouvelle institution en fonction du nombre d'organisations reconnues représentatives ; le deuxième institue une procédure de révocation du directeur général à la demande du conseil d'administration ; le troisième crée, dans le budget de l'institution, une nouvelle section afin de séparer les dépenses d'intervention en faveur des chômeurs et les dépenses de fonctionnement ; le quatrième applique à la nouvelle institution, en matière de gestion des achats, le régime actuellement applicable aux institutions du régime d'assurance chômage ; le cinquième précise que la convention collective de la nouvelle institution sera une convention de branche ; le sixième prévoit que les conventions signées entre le préfet de région et le directeur régional de la nouvelle institution fixeront les conditions dans lesquelles les autres acteurs locaux du service public de l'emploi, notamment les maisons de l'emploi, seront associés à l'action des directions régionales.
A l'article 3 (nouvelle organisation du régime d'assurance chômage), la commission a adopté, outre un amendement de coordination, deux amendements, l'un introduisant des dérogations au principe du transfert aux Urssaf du recouvrement des cotisations de chômage, le second affirmant la volonté du Parlement de voir l'Etat continuer à s'engager dans le financement du service public de l'emploi.
A l'article 4 (transfert du recouvrement des cotisations Assedic aux Urssaf), elle a adopté un amendement rédactionnel et un amendement précisant le régime juridique applicable au recouvrement des contributions et cotisations exigibles avant la date du transfert du recouvrement aux Urssaf.
A l'article 5 (instance de préfiguration de la nouvelle institution), elle a adopté un amendement prévoyant le lancement immédiat de la recherche du nom de la nouvelle institution.
A l'article 6 (modalités du transfert à la nouvelle institution des personnels de l'ANPE et de l'Unedic), la commission a adopté deux amendements, l'un enserrant dans des délais précis la négociation de la convention collective de la nouvelle institution, l'autre soumettant, à titre transitoire, les personnes recrutées avant l'entrée en vigueur de cette convention à la convention collective des salariés des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage.
A l'article 7 (modalités du transfert à la nouvelle institution des biens de l'ANPE et des Assedic), elle a adopté un amendement précisant que l'Unedic, attributaire des biens des Assedic dissoutes, mettra à la disposition de la nouvelle institution, les biens qui lui sont nécessaires.
Elle a adopté sans modification l'article 8 (date de la création de la nouvelle institution).
Après l'article 8, elle a adopté un amendement portant article additionnel, demandant au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur le transfert éventuel à la nouvelle institution des personnels de l'Afpa chargés de l'orientation professionnelle des demandeurs d'emploi.
A l'article 9 (cohérence rédactionnelle des textes législatifs et réglementaires en vigueur), elle a adopté un amendement rectifiant une erreur matérielle.
Elle a adopté sans modification l'article 10 (abrogation de dispositions caduques).
A l'article 11 (insertion dans le nouveau code du travail des dispositions figurant aux articles 1er à 3) et à l'article 12 (insertion dans le nouveau code du travail des dispositions figurant à l'article 4), la commission a adopté dix amendements de coordination, de rectification d'erreur ou de précision.
Elle a ensuite précisé l'intitulé du projet de loi. Puis elle a adopté le projet de loi ainsi modifié.
Puis la commission a procédé à la nomination de rapporteurs. Elle a désigné :
sur la proposition de loi n° 47 (2007-2008) de Mme Michèle Demessine et plusieurs de ses collègues visant à améliorer la santé au travail des salariés et à prévenir les risques professionnels auxquels ils sont exposés ;
sur la proposition de loi organique n° 140 (2007-2008) de MM. Alain Vasselle et Nicolas About tendant à prévoir l'approbation par les lois de financement de la sécurité sociale des mesures de réduction et d'exonération de cotisations et de contributions de sécurité sociale adoptées en cours d'exercice.