Déposé le 28 novembre 2023 par : MM. Kern, Longeot, Henno, Mme Billon, MM. Jean-Michel Arnaud, Bleunven, Mmes Guidez, de La Provôté.
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L'article 1520 est complété par un paragraphe V ainsi rédigé :
« V. – La taxe, lorsqu’elle est instituée, s’applique sur l’intégralité du territoire sous réserve des dispositions de l’article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales. Toutefois, à titre dérogatoire, si des différences objectives de service le justifient, la commune, l’établissement public de coopération intercommunale ou l’établissement public local compétent peut décider de n’instituer la taxe que sur une partie seulement de son territoire nonobstant les mécanismes transitoires prévus par l’article 1639 A bis du code général des impôts. » ;
2° Au I bis de l’article 1522 bis, après la référence : « article 1639 A bis », la fin de la phrase est supprimée ;
3° L' article 1639 A bis est ainsi modifié :
a) À la première phrase du deuxième alinéa du III, après les mots : « sept années suivant la fusion » sont insérés les mots : « sous réserve des dispositions du V de l’article 1520 » ;
b) Au premier alinéa du IV, après les mots : « la cinquième année qui suit celle du rattachement », sont insérés les mots : « sous réserve des dispositions du V de l’article 1520 ».
II. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L’article L. 2333-76 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La redevance, lorsqu’elle est instituée, s’applique sur l’intégralité du territoire. Toutefois, à titre dérogatoire, si des différences objectives de service le justifient, la commune, l’établissement public de coopération intercommunale ou l’établissement public local compétent peut décider de n’instaurer la redevance que sur une partie seulement de son territoire nonobstant les mécanismes transitoires prévus par l’article 1639 A bis du code général des impôts et les 2ème et 3ème alinéa du présent article. Le service du territoire couvert par la redevance fait l’objet d’un budget distinct. » ;
2° L’article L. 2333-78 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
a) La première phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : « Ils ne peuvent l’instituer que sur les secteurs géographiques où ils n’ont pas institué la redevance prévue à l’article L. 2333-76. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la taxe d’enlèvement des ordures ménagères est instaurée sur une partie seulement du territoire, la redevance spéciale ne peut s’appliquer que sur le ou les territoires concernés en application du paragraphe V de l’article 1520 du code général des impôts. » ;
3° A la fin du premier alinéa de l’article L. 2333-79, il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé : « Lorsque la redevance est instaurée sur une partie seulement du territoire, la suppression de la taxe ne s’applique que sur le territoire concerné en application de l’article L.2333-76 précité et du V de l’article 1520 du code général des impôts.»
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ierdu livre III du code des impositions sur les biens et services.
Cet amendement s’inscrit dans les ambitions portées par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire (AGEC) qui fixe un objectif de réduction de 15% des déchets ménagers et assimilés par habitant d’ici 2030.
Cet amendement contribue également à l’atteinte des objectifs nationaux et européens d’augmentation des taux de collecte pour recyclage (77% des bouteilles en plastique pour 2025).
Cet amendement permettrait surtout de tendre vers l’objectif de 25 millions d’habitants en France bénéficiant d’une tarification incitative en 2025 fixé par la Loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV). Seuls 7 millions de Français sont actuellement en tarification incitative selon le rapport de la Cour des comptes du 27 septembre 2022. Il est urgent d’accélérer.
Cet amendement propose de lever un frein au déploiement ou au maintien de la tarification incitative en France. Il donne ainsi la possibilité aux élus locaux de mettre en œuvre la tarification incitative sur une partie seulement de leur territoire et supprime le délai d’harmonisation des modes de financement du Service Public de Gestion des Déchets (SPGD).
Ce changement législatif éviterait les difficultés techniques rencontrées par les collectivités locales qui ont des territoires très différents : les collectivités pourraient ainsi déployer la tarification incitative sur la partie de leur territoire qui se situe en milieu périurbain et rural, et ne pas être obligées de le faire en milieu urbain où celui-ci peut apparaître comme plus complexe (plus grande difficulté pour suivre les usagers ainsi que pour implanter des conteneurs équipés de compteurs…).
En effet, la mise en place d’une tarification incitative en centre urbain dense est souvent complexe car il nécessaire d’individualiser les facturations, alors qu’en zone pavillonnaire ou rurale l’habitat individuel est favorable à la tarification incitative car il simplifie cette identification. A l’échelle d’un Etablissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) compétent en matière de gestion des déchets ou d’un syndicat de traitement, les typologies de territoires diffèrent et répondent à des enjeux très distincts.
Cet amendement propose de donner la souplesse aux élus locaux, qui connaissent les réalités de leur territoire, pour adapter la tarification des déchets en fonction des freins et opportunités.
La suppression de l’obligation faite aux élus locaux d’harmoniser les modes de financement du SPGD permet par ailleurs de favoriser le maintien d’une tarification incitative sur les territoires nouvellement fusionnés. Cela permettrait ainsi de conserver un dispositif au service de la transition écologique qui a fait ses preuves, notamment en zone rurale. Les collectivités ayant recours à la tarification incitative sont en effet en général des collectivités de moins de 30 000 habitants actuellement en taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMi) ou redevance incitative (REOMi). Si cet amendement n’est pas adopté, le risque est que ces collectivités reviennent vers une taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) et perdent ainsi le caractère incitatif de la fiscalité des déchets. Or, ces territoires sont souvent des pionniers de la tarification incitative en France. Il serait particulièrement préjudiciable que des années d’efforts de la part d’élus locaux volontaires soient remises en cause par une simple limite juridique.
La Communauté d’Agglomération Pau Béarn Pyrénées fait actuellement face à ce problème. Le président de la Communauté d’Agglomération, François BAYROU, a écrit à la Première ministre Elisabeth BORNE pour demander le maintien de la possibilité au sein du même EPCI de deux modes de financement du SPGD et ainsi autoriser la cohabitation TEOM/TEOMI ou TEOM/RI. Caen, Grenoble, Bordeaux, Montpellier et Versailles s'intéressent par ailleurs de près à cette possibilité pour leurs territoires respectifs.
La Cour des comptes a par ailleurs publié le 27 septembre 2022 un rapport intitulé « Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser ». Les magistrats encouragent particulièrement la mise en place de la tarification incitative qui est vue comme « un levier important de responsabilisation. En effet, elle permet l’application du principe pollueur-payeur aux usagers du service en intégrant dans la facturation le niveau de production des déchets ». La tarification incitative permet ainsi de « réduire de 41% la quantité d’Ordures Ménagères Résiduelles (OMR), d’augmenter à due concurrence la collecte des recyclables et de réduire de 8% les Déchets Ménagers et Assimilés (DMA)».
Les magistrats de la Cour des comptes notent par ailleurs : « Nombreux sont ceux qui considèrent que l’application sur l’intégralité du territoire sera difficile alors qu’elle pourrait être plus facilement envisagée sur seulement une partie du territoire (habitat pavillonnaire, communes périphériques, …) : une dérogation à l’obligation d’uniformité du mode de financement sur un EPCI à fiscalité propre et donc l’autorisation de faire cohabiter formes classique et incitative d’un mode de financement donné(TEOM/TEOMi ou REOM/REOMi) au-delà des sept ans explicitement prévus au Code général des impôts pour la TEOMi pourrait répondre à cette difficulté et favoriserait le développement de la TI en milieu urbain, au prix sans doute d’une certaine complexité de gestion voire d’une insécurité juridique. »
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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