Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a examiné le rapport de M. Ladislas Poniatowski sur la proposition de loi n° 137 (2007-2008), modifiée par l'Assemblée nationale en première lecture, relative aux tarifs réglementés d'électricité et de gaz naturel.
a tout d'abord rappelé que le texte de cette proposition de loi, adopté le 1er octobre 2007 par le Sénat, s'appuyait sur l'examen conjoint par la commission de trois propositions de loi, l'une déposée par ses soins, l'autre par M. Xavier Pintat et la dernière par les membres du groupe socialiste. Il a souligné que son objectif principal était d'apporter une réponse aux difficultés juridiques nées de la censure par le Conseil constitutionnel de l'article 17 de la loi relative au secteur de l'énergie, cette décision conditionnant désormais le bénéfice des tarifs réglementés de vente d'électricité et de gaz naturel, d'un ménage emménageant dans un logement, à la décision d'un précédent occupant de quitter ou non les tarifs.
Tout en précisant que, sur proposition du groupe socialiste, les dispositions du texte avaient été élargies aux tarifs de gaz naturel, il a fait valoir que la possibilité pour un ménage de bénéficier à nouveau, dans son logement, des tarifs d'électricité après les avoir quittés pour une offre de marché avait été écartée lors de la discussion au Sénat, compte tenu des deux contentieux communautaires en cours sur le système tarifaire français. Il a noté que le gouvernement s'était également déclaré défavorable à cette proposition au Sénat pour les mêmes raisons.
a ensuite constaté qu'à l'occasion de la discussion du texte à l'Assemblée nationale, les députés étaient allés plus loin que les sénateurs sur ce point en instaurant une réversibilité du choix du consommateur, le gouvernement ayant changé d'avis par rapport à la position défendue au Sénat en soutenant cette initiative. Il a expliqué qu'aux termes de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale, les consommateurs particuliers d'électricité ayant choisi la concurrence se voyaient donc reconnaître la possibilité de retourner au tarif réglementé à l'issue d'un délai de six mois.
Il a alors précisé qu'il n'était pas hostile, à titre personnel, à un tel dispositif, son avis de rejet lors de l'examen au Sénat ayant exclusivement été motivé par les contentieux en cours. Dans la mesure où le gouvernement estime désormais que cette disposition n'est pas susceptible de poser problème au plan communautaire, il a suggéré à la commission de s'y rallier.
Il a toutefois remarqué qu'avec le vote de cet amendement, les députés avaient supprimé les dispositions votées par le Sénat pour permettre aux consommateurs emménageant dans un logement ayant fait, par le passé, l'objet d'un approvisionnement énergétique sur la base d'un contrat libre, de ne pas être engagés par ce choix. Déplorant cet oubli, il a proposé à la commission de rétablir cette disposition en adoptant un amendement.
s'est interrogé sur les raisons ayant conduit le gouvernement à changer d'analyse entre les lectures de la proposition de loi par les deux assemblées.
En réponse, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, a rappelé que la commission avait récemment créé un groupe de travail sur le troisième « paquet énergie » présenté par la Commission européenne. Indiquant que, dans ce cadre, il avait eu l'occasion de se rendre à Bruxelles pour rencontrer des responsables de la Commission européenne en charge de l'énergie, il a fait valoir que ses interlocuteurs avaient conscience de l'échec, en France, de l'ouverture à la concurrence des marchés de l'énergie pour les particuliers, dans la mesure où seulement 38.000 consommateurs particuliers, sur un total de 26 millions, ont pour le moment quitté les tarifs réglementés d'électricité. Il a toutefois relevé que la direction générale de la concurrence demeurait par principe hostile au système français des tarifs réglementés, dont elle estime qu'il est subventionné par la puissance publique. Dans ces conditions, il a déclaré ne pas connaître les raisons ayant conduit le gouvernement à changer de position sur la réversibilité, puisque les tarifs continuent à faire l'objet de contentieux juridictionnels et que le changement de la législation proposée par la proposition de loi pourrait être de nature à en susciter un nouveau.
a constaté que le gouvernement avait changé de position sur la question de la réversibilité, compte tenu du faible enthousiasme des Français à choisir la concurrence pour leur approvisionnement électrique. Tout en relevant que le groupe communiste, républicain et citoyen demeurait favorable à la réversibilité, il a noté, de ce point de vue, qu'un tel dispositif serait certes de nature à rassurer le consommateur mais encore à favoriser les expérimentations par ces derniers d'offres commerciales libres. Pour autant, il a précisé que le groupe s'abstiendrait sur le vote sur l'ensemble du texte, compte tenu de ses inquiétudes sur l'avenir des tarifs réglementés à long terme, déplorant à ce titre la timidité de la proposition de loi dont les dispositions ne sont valables que jusqu'au 1er juillet 2010.
Tout en faisant part de son soutien à la position défendue par le rapporteur, M. Bruno Sido s'est interrogé sur les tarifs offerts par EDF, se demandant si leur niveau couvrait tous les coûts, notamment ceux liés au démantèlement des centrales nucléaires et à la gestion durable des déchets radioactifs. Il a, à ce sujet, souligné que les coûts de démantèlement de la centrale de Brennilis n'avaient pas été provisionnés par l'entreprise. Il a souhaité que, dans ces conditions, la commission des affaires économiques puisse étudier ce sujet de manière approfondie.
Tout en ne se déclarant pas hostile à ce que la commission mène une réflexion sur ce sujet, selon des modalités restant à débattre, M. Jean-Paul Emorine, président, a renvoyé aux déclarations de Mme Anne Lauvergeon, présidente du directoire d'Areva, lors de son audition par la commission, qui avait affirmé que les coûts de démantèlement étaient pris en compte par l'entreprise.
Tout en reconnaissant que la réversibilité était plus favorable pour le consommateur, M. Jean-Marc Pastor a néanmoins fait part des interrogations de son groupe dans le cas où ce dispositif aurait pour but de permettre aux fournisseurs alternatifs d'acheter en bloc de l'électricité à EDF pour la revendre à leurs clients. Il a, à ce titre, noté que les tarifs de vente d'électricité compétitifs proposés par EDF étaient le fruit d'investissements massifs effectués par le passé pour développer un parc de production efficace. Il a ensuite fait valoir qu'une grande majorité de pays de l'Union européenne partageait une vision libérale de la politique énergétique communautaire, plus axée sur l'ouverture à la concurrence de la fourniture d'électricité que sur l'amélioration de l'outil de production d'électricité, et fait part de ses inquiétudes à ce sujet. Il a donc considéré indispensable que le Parlement français puisse faire savoir à la Commission européenne qu'il ne partageait pas cette approche, compte tenu de l'attachement traditionnel de la France à une politique énergétique fondée sur la programmation des investissements, la régulation et la mutualisation des prix.
Tout en indiquant comprendre l'objectif de la proposition de loi, qui tend à lisser les conséquences de la libéralisation des marchés énergétiques, il s'est interrogé sur l'avenir à long terme des tarifs après le 1er juillet 2010. Il a ainsi rappelé qu'au cours des trois dernières années, la libéralisation des prix de l'électricité s'était traduite par la hausse des bénéfices des principaux producteurs, puisqu'elle avait conduit au rapprochement entre le niveau des tarifs et celui des prix libres. Il a jugé que si cette tendance se poursuivait, il n'y aurait plus de différence entre les prix et les tarifs, ce qui justifierait alors la suppression de ces derniers. Dans ces conditions, il a souligné que son groupe entendait tirer la sonnette d'alarme sur les conséquences pour le consommateur d'une telle évolution. Il a ainsi précisé que le groupe socialiste et apparentés était favorable à la réversibilité, moyennant les réserves précédemment indiquées, mais s'interrogeait encore sur le vote sur l'ensemble de la proposition de loi.
a tout d'abord pris acte de la position du groupe communiste, républicain et citoyen et du groupe socialiste et apparentés, rappelant qu'ils s'étaient prononcés en faveur de la réversibilité, dès la lecture du texte au Sénat.
Puis, il a apporté les précisions suivantes :
- EDF affirme que ses prix de vente de l'électricité tiennent compte du coût du démantèlement des centrales et de gestion des déchets radioactifs. Au demeurant, la loi du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs a créé la Commission nationale d'évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des déchets radioactifs chargée de contrôler que les exploitants ont constitué des provisions suffisantes pour couvrir les dépenses afférentes à ces charges. Les présidents des commissions parlementaires chargées de l'énergie ou des finances des deux assemblées, ou leur représentant, sont membres de cette commission ;
- les fournisseurs alternatifs sont favorables à la réversibilité car ils estiment que cela incitera les consommateurs à tenter l'expérience de la concurrence. Les premiers mois de l'ouverture totale du marché ont vu un très faible nombre de consommateurs changer de fournisseur, dans des proportions largement inférieures aux prévisions des principaux fournisseurs alternatifs ;
- Le Conseil de la concurrence a obligé EDF à vendre, par voie d'appels d'offre, de l'électricité en bloc à destination de ces fournisseurs alternatifs pour l'alimentation de leurs clients et ce, afin de développer la concurrence ;
- il a été indiqué à la Commission européenne qu'il existait un consensus politique en France sur le maintien des tarifs réglementés ;
- la Commission européenne espère que les niveaux des prix libres et des tarifs pourront se rapprocher à l'avenir. Il convient, dans ce cadre, d'expliquer aux autorités communautaires que les tarifs ne sont pas subventionnés par la puissance publique, mais qu'ils reflètent les coûts exposés par les opérateurs et que ceux-ci sont faibles grâce à l'existence du parc électronucléaire.
Puis la commission a examiné et adopté à l'unanimité l'amendement que lui présentait son rapporteur à l'article 1er (retour au tarif d'électricité) tendant à rétablir les dispositions supprimées par les députés permettant aux consommateurs d'électricité de bénéficier du tarif dès leur entrée dans les lieux en cas de déménagement.
Enfin, la commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée sur le rapport de M. Ladislas Poniatowski.