Le président Jean Bizet et moi-même sommes très heureux, Monsieur le Directeur, de vous accueillir à nouveau au Sénat, pour cette audition commune de la commission des affaires étrangères et de la commission des affaires européennes. Nous vous avions reçu l'an dernier pour évoquer la création du Service européen pour l'action extérieure. Nous souhaiterions aujourd'hui vous entendre sur l'élargissement de l'Union européenne et la politique de voisinage.
La Commission européenne a publié, le 9 novembre dernier, son document stratégique sur l'élargissement et les rapports de progrès et de suivi sur chacun des pays candidats ou candidats potentiels. Actuellement des négociations d'adhésion sont en cours avec trois pays, la Croatie, l'Islande et la Turquie, et l'Union européenne a reconnu la vocation européenne de l'ensemble des pays des Balkans occidentaux. Alors que les négociations avec la Croatie s'approchent désormais de leur phase finale, quelles sont les principales difficultés qui subsistent ? Qu'en est-il des négociations avec l'Islande, dont la classe politique et l'opinion publique sont divisées sur l'entrée dans l'Union ? Enfin, où en sommes-nous dans les négociations avec la Turquie et comment se traduit concrètement la position française à l'égard de ce pays ?
Nous aimerions également avoir un éclairage sur les relations entre l'Union européenne et les pays des Balkans occidentaux. Comment voyez-vous le processus de rapprochement de ces pays avec l'Union européenne ? Plus généralement, quelle est la stratégie de l'Union en matière d'élargissement ? Les conditions et les modalités du processus ont-elles été suffisamment renforcées, à la lumière notamment des précédents roumain et bulgare ? Je pense notamment aux problèmes de corruption. Comment le critère de la capacité d'absorption est-il pris en compte ? Ne conviendrait-il pas de mettre davantage l'accent sur la conditionnalité et la coopération régionale, afin d'éviter notamment que ces pays entrent dans l'Union sans avoir réglé leurs différends avec leurs voisins ? Je pense ici à Chypre et à la querelle gréco-macédonienne.
Enfin, nous souhaiterions connaître votre sentiment à propos de la politique de voisinage de l'Union européenne, et en particulier du partenariat oriental, dont certains pays souhaiteraient faire une « antichambre» à l'adhésion. Alors que la Commission européenne a lancé une réflexion sur l'avenir de cette politique, quelle est la position du Gouvernement à ce sujet ?
Je remercie le président Josselin de Rohan d'avoir associé la commission des affaires européennes à cette audition. Nous avions, l'année dernière, adopté le rapport de notre ancien collègue Pierre Fauchon sur les frontières ultimes de l'Europe. La question est d'actualité du fait d'une, peut-être de deux prochaines adhésions, et de la vocation à l'adhésion de l'ensemble des pays des Balkans.
Je vous remercie de m'accueillir à nouveau.
Cette audition intervient un mois après la réunion du Conseil des affaires générales du 14 décembre qui a adopté, comme chaque année à la même époque, ses traditionnelles conclusions sur l'élargissement. Elle précède également les discussions qui vont débuter, à Bruxelles, dans les semaines à suivre, sur l'avenir de la politique européenne de voisinage, notamment dans le cadre des futures perspectives financières. La réunion ministérielle avec l'ensemble des pays du voisinage du 1er février a été reportée, les pays arabes ne pouvant s'y rendre en raison d'une réunion de la Ligue arabe à Doha le même jour, et de la présence annoncée d'Avigdor Lieberman.
Clarifions d'abord les termes du débat. La position de la France sur l'élargissement, telle qu'elle a été fixée par le Président de la République, est liée à notre vision de l'Europe : celle d'une Europe politique forte et volontariste, à laquelle nos concitoyens peuvent s'identifier, ce qui implique de fixer des limites et donc des frontières. Tous les pays des Balkans occidentaux ont donc vocation à entrer, à terme, dans l'Union. A l'instar des 26 autres membres de l'Union, la France est attachée au respect des engagements pris à l'égard des États des Balkans occidentaux lors du sommet de Zagreb de novembre 2000, sous présidence française, à savoir que ces pays ont clairement vocation à intégrer l'Union, le moment venu, dans le cadre du processus de stabilisation et d'association. Au-delà, mis à part le cas de la Turquie sur laquelle la position de la France est bien connue et n'a pas varié depuis 2007 - la Turquie n'a pas vocation, pour les autorités françaises, à intégrer l'Union européenne - seule l'Islande s'est vu reconnaître, en juillet 2010, un statut de candidat, et a ouvert des négociations en vue d'une adhésion.
Les pays concernés par le processus d'élargissement de l'Union sont donc aujourd'hui clairement identifiés. Le commissaire Stefan Füle, en charge de l'élargissement et de la politique européenne de voisinage, a rappelé à plusieurs reprises que ces deux politiques restaient clairement distinctes. C'est bien entendu notre position : les pays du voisinage - notamment oriental et méridional - n'ont pas vocation, en tout cas c'est clairement le cas aujourd'hui, à intégrer l'Union européenne.
La politique européenne de voisinage, née en 2004, vise à renforcer la stabilité et la prospérité des pays voisins de l'Union, notamment par le partage des valeurs démocratiques. Nous avons tiré un premier bilan positif de cette politique de voisinage et soutenons son renforcement, tant dans sa composante méridionale - Union pour la Méditerranée - qu'orientale - Partenariat oriental. Nous sommes attachés au cadre global et unique qu'elle offre, tout comme à son principe de différenciation entre les États qui doit permettre d'aller plus vite et plus loin avec les pays qui le souhaitent et qui sont capables de s'engager dans les réformes.
Le Partenariat oriental et l'Union pour la Méditerranée ont renforcé les ambitions de la politique de voisinage. Il nous appartient maintenant de mobiliser les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de ces priorités. Ces initiatives régionales permettent de tenir compte des réalités différentes entre nos voisinages Sud et Est. De ce fait, nous souhaitons le maintien des grands équilibres financiers entre les deux catégories de voisin. Les besoins spécifiques, la capacité d'absorption et le poids démographique des pays concernés méritent d'être pris en considération. La clé de répartition un tiers - deux tiers entre l'Est et le Sud est le reflet de cette préoccupation et non d'une moindre ambition. La répartition géographique des crédits de l'IEVP (Instrument européen de voisinage et de partenariat) doit, comme il est mentionné dans les conclusions sur le Voisinage du 26 juillet 2010, se fonder sur des critères objectifs et transparents.
Le voisinage oriental est une zone essentielle pour la stabilité du continent européen. Le Partenariat oriental doit nous permettre d'apporter notre contribution à sa stabilisation et son développement, en dépit des inquiétudes que nous pouvons avoir quant à la situation démocratique en Ukraine et en Biélorussie. La France a donc soutenu la rapide mise en place de ce partenariat et le renforcement des relations de l'Union avec nos partenaires orientaux.
Les objectifs et les principes arrêtés par la déclaration de Prague en mai 2009 conservent toute leur actualité. Ces objectifs, qui constituent la feuille de route à suivre pour les prochaines années, sont très ambitieux et demanderont des efforts et du temps pour se réaliser. Sur les questions de mobilité, par exemple, nous devons nous assurer de la mise en oeuvre effective de toutes les conditions techniques préalables à une libéralisation du régime des visas.
Le prochain sommet des 24-25 mai, à Budapest, des chefs d'État et de gouvernement du Partenariat oriental sera l'occasion de tirer un premier bilan de cette initiative encore récente qui s'inscrit dans le cadre plus large offert par la politique européenne de voisinage. Il est encore trop tôt pour assigner de nouveaux objectifs au Partenariat oriental. De nouvelles initiatives ponctuelles, qui pourraient être proposées par la Commission, sont en revanche envisageables, par exemple la création d'une université libre en Lituanie pour accueillir des étudiants biélorusses victimes de la répression. Le sommet ne peut pas, en revanche, préempter le débat sur le prochain cadre financier de l'Union européenne, qui sera nécessairement très contraint.
Lors du Conseil « Affaires étrangères » de lundi prochain, 31 janvier, la France soutiendra la réactivation et l'extension des mesures restrictives en matière de visas et de gel des avoirs à l'encontre du leadership politique biélorusse et des responsables de la fraude électorale et de la répression violente du 19 décembre 2010. Nous devons cependant distinguer entre les autorités biélorusses qui, en tournant le dos aux valeurs démocratiques européennes, ont refusé la main tendue par l'Union depuis 2008, et la société biélorusse qui, en revanche, adopte progressivement ses valeurs. Il convient donc, parallèlement aux sanctions contre le pouvoir, de poursuivre et renforcer l'ouverture de la société biélorusse par une mobilité accrue vers l'Union européenne, un soutien à la société civile et aux petits acteurs économiques privés.
Venons-en maintenant au processus d'élargissement et à l'état d'avancement de chacun des pays candidats à l'adhésion. Comme chaque année, après la publication du « paquet élargissement » de la Commission, le Conseil des affaires générales du 14 décembre a adopté des conclusions détaillées sur l'élargissement et les pays du processus de stabilisation et d'association dans les Balkans occidentaux. Elles ont été endossées par le Conseil européen des 16 et 17 décembre, qui a également décidé, parce que c'est la prérogative des chefs d'État et de Gouvernement, d'octroyer le statut de candidat au Monténégro.
Les conclusions adoptées par le Conseil confirment que la politique d'élargissement s'inscrit toujours dans le cadre des grands principes définis par le « consensus renouvelé sur l'élargissement » de 2006, auxquels la France tient tout particulièrement : un examen rigoureux des mérites individuels de chaque candidat, sa capacité effective à satisfaire aux conditions d'adhésion - les critères de Copenhague et la prise en compte de la capacité d'absorption de l'Union. Ces conclusions précisent que le rythme du processus d'élargissement est largement déterminé par la capacité du pays candidat à remplir les critères d'adhésion.
Le Conseil a aussi discuté de l'importance de la réconciliation et de la coopération régionale au sein des pays candidats à l'élargissement. C'est un point très important. Compte tenu de la persistance de nombreux différends bilatéraux dans cette région des Balkans occidentaux, l'Union doit éviter que le processus d'élargissement ne conduise à importer ces différends dans l'Union - comme ce fut le cas pour Chypre ou pour le différend frontalier entre la Slovénie et la Croatie. Nous devons nous assurer que ces différends seront réglés avant l'adhésion ou, à tout le moins, qu'ils ne seront pas utilisés par les nouveaux entrants comme un moyen de bloquer la négociation avec leur voisin. Les conclusions du Conseil incitent les parties concernées à régler leurs problèmes bilatéraux. Nous continuons à soutenir toutes les initiatives allant dans ce sens - arbitrage du différend croato-slovène, approches proactives des Présidents croate Josipovic et serbe Tadic, perspective de dialogue entre Belgrade et Pristina.
Les conclusions adoptées par le Conseil, en décembre dernier, respectent, par ailleurs, pleinement notre position sur la Turquie et sur l'ouverture, très encadrée, d'un dialogue sur la libéralisation des visas avec le Kosovo.
Deux autres principes constants, rappelés par le Président de la République, encadrent le processus d'élargissement : celui-ci doit se faire, a priori, à traité constant. Maintenant que l'Union dispose, grâce au traité de Lisbonne, des institutions dont elle a besoin, les prochains élargissements ne doivent pas impliquer, a priori, de nouvelles réformes institutionnelles. Le processus doit en outre se faire à budget constant car l'adhésion des pays des Balkans occidentaux, avec leurs 20 millions d'habitants et leurs retards de développement, constituera une charge importante pour le budget communautaire. Compte tenu des tensions actuelles sur les budgets des États membres, devra aussi, à cette occasion, se poser la question du maintien des rabais accordés à certains - le Royaume-Uni, par exemple - qui sont, au demeurant, les premiers avocats de cet élargissement.
Qu'en est-il, maintenant, de la situation de chacun des pays candidats et de leur perspective à court terme ? La Croatie est entrée dans la dernière ligne droite de ses négociations d'adhésion - 34 chapitres ouverts et 28 clos sur un total de 35. La présidence hongroise a programmé deux Conférences intergouvernementales ce semestre en avril et juin. Les chapitres à implication budgétaire - 11, « agriculture », 13, « pêche » et 22, « politique régionale» - devraient être programmés pour une clôture en avril, s'ils sont prêts à temps. Trois chapitres resteraient en discussion. D'abord le chapitre 8 sur la concurrence : le principal critère de clôture porte sur la finalisation de la procédure d'appels d'offres pour la restructuration des six principaux chantiers navals croates. La question est difficile pour les Croates, car près de 10 000 emplois sont concernés.
Ensuite, s'agissant du chapitre 23 sur le pouvoir judiciaire et les droits fondamentaux, la Commission a noté des avancées dans son rapport de novembre, notamment une nouvelle législation renforçant l'indépendance du pouvoir judiciaire, la réduction de l'arriéré judiciaire, les premiers résultats positifs en matière de lutte contre la corruption, le renforcement de la protection des droits fondamentaux, mais la Croatie doit encore redoubler d'efforts si elle veut remplir tous les critères requis. La Commission présentera le 11 mars prochain un rapport intérimaire sur le chapitre 23, qui fera le point des progrès enregistrés. S'ils sont jugés suffisants, la Commission pourrait proposer un projet de position commune pour la clôture du chapitre en juin. Reste le problème de la coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, qui constitue un des critères de clôture du chapitre - à la demande de La Haye et Londres. Le procès Gotovina s'est achevé à l'été et le jugement n'est pas attendu avant mars 2011, mais les exigences du procureur Brammertz, notamment sur les carnets d'artillerie de la guerre de 1995, demeurent.
Au-delà, devra également être discuté, après la clôture des chapitres budgétaires, le chapitre 35 « divers », qui comporte notamment les clauses de sauvegarde.
Les négociations pourraient donc s'achever en 2011, pour autant que la Croatie ait rempli toutes les conditions fixées par l'Union, notamment dans les domaines qui sont les plus difficiles. La présidence tournante hongroise a pour ambition de conclure les négociations d'ici le 30 juin de cette année, mais il reste à voir si les autorités croates sauront faire les efforts nécessaires pour y parvenir.
Enfin le Conseil a souligné, encore en décembre dernier, que la clôture des négociations dépendait de la satisfaction des critères restants. Nous sommes totalement en phase avec cette position, qui s'inscrit clairement dans le cadre du principe de conditionnalité du consensus de 2006 et nous serons exigeants. Cela dit, il serait important de montrer, avec la Croatie, que le processus demeure ouvert ; ce serait un exemple et une incitation pour les autres pays balkaniques à progresser encore.
Notre position signifie que nous devrons tirer les leçons du sixième élargissement, à la Roumanie et la Bulgarie, et peut-être réfléchir, avant même la clôture des négociations d'adhésion, à un mécanisme de surveillance qui garantisse, pendant quelques années, la poursuite de la reprise intégrale de l'acquis, notamment dans le domaine de l'état de droit et aussi de la coopération de la Croatie avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie.
Le Conseil du 14 décembre dernier a constaté que la Turquie n'a toujours pas rempli ses obligations au titre du protocole d'Ankara et qu'en conséquence, les mesures décidées en 2006 - gel de huit chapitres liés à l'Union douanière et gel de la clôture de tous les chapitres - seront maintenues. La « nécessaire normalisation » par la Turquie de ses relations avec Chypre est, en outre, rappelée dans les conclusions du Conseil. Pour notre part, nous restons sur notre position, à savoir que cinq chapitres ne sont pas ouvrables car ils préjugeraient d'une adhésion. Sur le plan des négociations, aucun nouveau chapitre n'a pu être ouvert sous présidence belge, faute de respect par la Turquie des critères requis. Notre position sur ce sujet n'a pas changé. Nous restons favorables à l'ouverture de nouveaux chapitres, dès lors que les conditions en sont réunies et, naturellement, que les chapitres concernés sont compatibles avec notre vision du résultat final de la négociation. C'est le cas des trois chapitres dont l'ouverture ne pose aujourd'hui pas de problème : « politique de concurrence », « marchés publics », « politique sociale et emploi ». Mais, deux d'entre eux nécessitent des réformes législatives profondes - droit de grève dans la fonction publique, réforme totale du système des marchés publics - que la Turquie doit mener à leur terme. S'agissant du chapitre 8 « politique de la concurrence », la Commission estime qu'à ce jour, l'ensemble des critères ne sont pas encore satisfaits et qu'elle ne peut recommander l'ouverture du chapitre. C'est une bonne approche, tout à fait conforme à la qualité et la crédibilité du processus de négociation.
Comme l'ont rappelé à juste titre la Commission et le Conseil en décembre, le rythme des négociations dépend avant tout de la poursuite des réformes par la Turquie. Au-delà des désaccords que les États membres peuvent avoir sur l'issue du processus, il y a, en revanche, un large consensus à Bruxelles pour renforcer le dialogue entre l'Union et la Turquie en matière de politique étrangère, sur des sujets d'intérêt commun comme les Balkans, le Caucase ou encore le processus de paix au Proche-Orient. Les conclusions du Conseil invitent à progresser dans cette voie. En dépit de certains désaccords sur l'issue des processus, un consensus existe en faveur d'un renforcement du dialogue sur des sujets communs.
S'agissant de l'Islande, la Commission a débuté en novembre son exercice de « criblage » - c'est-à-dire d'évaluation du niveau de préparation du pays candidat - qui s'achèvera en juin. L'ouverture des premiers chapitres de la négociation pourrait intervenir avant l'été, en particulier dans les domaines de l'acquis déjà couverts par l'appartenance de l'Islande à l'Espace économique européen. Sur d'autres chapitres où l'Islande ne respecte pas encore l'acquis communautaire - pêche, agriculture, environnement, services financiers - la discussion sera en revanche plus difficile et ne débutera pas avant le second semestre. Comme le Conseil l'a rappelé en décembre, l'objectif des négociations est bien la reprise intégrale de l'acquis et sa mise en oeuvre, qui devront avoir lieu avant l'entrée de l'Islande dans l'Union. Il n'y aura ni traitement privilégié, ni calendrier accéléré. Au-delà, nous restons préoccupés par la faiblesse du consensus national sur l'adhésion en Islande, même si la tendance semble plus positive aujourd'hui, à en croire certains sondages.
Dans les Balkans, deux pays bénéficient du statut de candidat à l'adhésion. L'ancienne République yougoslave de Macédoine s'est vu reconnaître ce statut dès 2005 et a progressé dans le respect des critères politiques de Copenhague et la mise en oeuvre de l'accord de stabilisation et d'association avec l'Union. Le dernier rapport de progrès de la Commission est à cet égard positif et recommande une nouvelle fois l'ouverture des négociations d'adhésion. Cette étape reste toutefois entravée par la question toujours pendante du nom du pays et le Conseil du 14 décembre dernier a, une nouvelle fois, appelé ce pays et la Grèce à trouver une solution mutuellement acceptable, sans se prononcer sur les négociations.
Le Conseil européen du 17 décembre dernier a accordé le statut de candidat au Monténégro. Les progrès à accomplir par ce pays demeurent toutefois importants, en particulier dans les domaines de l'État de droit et de la lutte contre la corruption et le crime organisé. La Commission, prenant en compte l'expérience du dernier élargissement et des négociations avec la Croatie, a ainsi établi une liste de sept critères clefs dans le domaine de la primauté du droit, critères dont le respect conditionne désormais toute ouverture de négociations. Cette approche, qui tire notamment les leçons des expériences précédentes, nous convient pleinement.
La Serbie a déposé sa candidature à l'adhésion en décembre 2009. Compte tenu des efforts et de l'engagement politique manifestés par les autorités serbes, le Conseil des affaires étrangères a, enfin, décidé le 25 octobre dernier de transmettre cette candidature à la Commission pour avis. Celui-ci sera donné à la fin de cette année 2011 au plus tôt. Le Conseil des affaires générales du 14 décembre a en outre rappelé à la Serbie ses obligations en matière de réformes, de coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, et de coopération régionale, y compris la normalisation des relations avec le Kosovo.
La candidature de l'Albanie stagne depuis avril 2009. C'est dû au blocage politique à Tirana, qui freine l'activité parlementaire, en particulier sur les réformes exigées par le rapprochement européen, et de manière générale, à l'absence de progrès suffisants dans les domaines de l'État de droit et de la démocratisation des institutions. Dans ces secteurs, la Commission a identifié douze critères clefs, qui conditionnent l'ouverture des négociations. Dans le prolongement de l'avis de la Commission, le Conseil des affaires générales du 14 décembre dernier n'a pas accordé le statut de candidat à l'Albanie et l'a appelée à dépasser ses blocages politiques et à progresser sur la voie des réformes, notamment pour les douze critères clefs.
Deux pays n'ont pas déposé leur candidature. La Bosnie-Herzégovine a accompli, ces dernières années, des progrès excessivement lents. C'est dû à des institutions peu fonctionnelles, héritées des accords de Dayton-Paris, mais plus encore à l'absence de consensus politique. Cela s'illustre dans l'absence aujourd'hui d'une coalition gouvernementale, près de quatre mois après les élections du 3 octobre. L'Union européenne s'efforce de relancer le processus de réformes, y compris par une révision constitutionnelle qui rendrait les institutions plus effectives. L'Union prépare en outre, dans le cadre de la mise en place du Service d'action extérieure, une présence rationalisée sur le terrain, qui paraît particulièrement bienvenue, avec la fusion des fonctions de délégué et de représentant spécial de l'Union.
La position du Kosovo est particulière, compte tenu du fait que ce pays n'est pas reconnu par cinq États membres, l'Espagne, la Grèce, la Slovaquie, la Roumanie et Chypre. Prenant part au processus de stabilisation et d'association, il bénéficie toutefois, comme les autres pays, d'une perspective européenne. A ce stade, ce processus passe par la possibilité, à terme, d'une ouverture commerciale et du lancement d'un dialogue sur la libéralisation du régime de visas de court séjour. Nous veillons particulièrement à ce que toutes les conditions préalables à l'ouverture d'un tel dialogue sur les visas soient entièrement et effectivement remplies, et que le Conseil soit pleinement associé à chaque étape de ce processus. Notre position est précisément reprise dans les conclusions du Conseil des affaires étrangères du 14 décembre.
S'agissant, enfin, de la question très sensible des visas, l'ensemble des pays des Balkans, à l'exception du Kosovo, bénéficie d'une libéralisation du régime des visas de court séjour en direction de l'espace Schengen. Nous l'avons accepté, tout en insistant sur la nécessité d'un suivi rigoureux et dans la durée du respect des critères par ces pays. Nous avons ainsi obtenu la mise en place, en novembre dernier, d'un mécanisme de suivi qui inclut une alerte d'urgence et la possibilité de suspendre à tout moment, si nécessaire, la décision de libéralisation.
Dans l'année à venir, on peut donc s'attendre à un achèvement possible des négociations pour la Croatie, si elle remplit les critères requis. Les avancées des autres pays des Balkans occidentaux sont suspendues à différentes conditions : les nombreuses réformes identifiées par la Commission pour ouvrir les négociations avec l'Albanie et le Monténégro ; l'avis sur la Serbie que remettra la Commission d'ici l'automne 2011, avec l'enjeu du TPIY ; la résolution de la question du nom pour l'ARYM (Ancienne république yougoslave de Macédoine) ; de nouvelles avancées, notamment sur les visas, pour le Kosovo. Aucune avancée significative n'est attendue pour la Turquie, faute de progrès sur le protocole d'Ankara et en raison des élections générales de cet été et de la stagnation du processus de réformes.
Quelles réflexions vous inspire la récente adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie ? Le traité de Lisbonne a-t-il apporté des améliorations institutionnelles suffisantes pour que l'adhésion de certains pays des Balkans ne fragilise pas, davantage encore, le fonctionnement de la Commission ?
Il est évident qu'il nous faut tirer les leçons de ces deux dernières adhésions que, sous une forte pression politique, nous avons acceptées en 2007, après avoir constaté qu'elles étaient impossibles en 2004. Mais, il faut bien le reconnaître, le succès n'est pas au rendez-vous. Ne serait-ce que pour deux raisons. D'abord, ces pays ne sont pas capables de dépenser plus de 15 % des fonds structurels qui leur sont accordés. Ensuite, la corruption y semble généralisée, comme le président Basescu le reconnaît lui-même. C'est pourquoi nous nous opposerons au printemps prochain à l'entrée de ces deux pays dans l'espace Schengen. Les conditions de leur entrée ne seront sans doute pas remplies avant deux ans, avant qu'ils ne soient réellement capables de gérer les frontières communes de l'Union. Songez que 70 à 80 % de l'immigration clandestine dans l'Union passe par les frontières avec la Turquie... L'adhésion à Schengen est un signal adressé à la Roumanie et à la Bulgarie. Il faudrait sans doute que la Commission envisage d'y déléguer une mission permanente plus substantielle. Pour l'instant, ces deux pays ne tirent pas profit de leur adhésion...
Globalement les institutions issues du traité de Lisbonne semblent constituer un progrès. Les candidats balkaniques étant démographiquement assez faibles, leur adhésion n'aurait que peu d'incidences sur le fonctionnement du Conseil. La vraie question se pose s'agissant de la Commission. Faudra-t-il conserver la règle d'un commissaire par État membre ? On n'imagine pas une Commission de 35 à 37 commissaires... On pourrait régler la question en ramenant leur nombre à 20 ou 22, ou bien en instituant deux catégories : des commissaires principaux et des commissaires adjoints, chaque commissaire principal ayant en quelque sorte un ou deux secrétaires d'État. La difficulté sera de faire accepter que, seuls les commissaires de plein exercice, aient le droit de vote. Il est probable qu'il faudra reprendre plus tard la réflexion sur le sujet.
Je me souviens avoir appris, il y a bien longtemps, une loi de la dialectique, énoncée par Engels, selon laquelle l'accumulation de la quantité provoque, à un moment donné, une modification de la qualité. Nous en sommes là ! A 27, l'Europe ressemble déjà à une usine à gaz. Si on ajoute les 11 candidats, on arrive à 38 et je ne parle pas des 16 « pays du voisinage » grâce auxquels nous passerions à 54 !
L'idée yougoslave du regroupement des nationalités était quand même une très bonne idée. Ne devrions-nous pas exiger des pays des Balkans une forme de coopération régionale en préalable à toute avancée vers l'acceptation de leurs candidatures ? Cette entité ne s'appellerait pas la Yougoslavie, bien sûr, mais peut-être les « Balkans de l'Ouest ». Il est évident que ces pays ont beaucoup de choses en commun et sont faits pour vivre ensemble. Et plutôt que de raisonner en termes technocratiques, en « chapitres » et en « critères », ne devrait-on pas avoir une vision plus politique du problème ?
Il est évident qu'accepter la Croatie, c'est forcément s'engager à accepter un jour la Serbie, le plus grand pays des Balkans occidentaux, un pays qui a eu des torts, mais qui n'a pas eu tous les torts. Il ne saurait y avoir de politique sérieuse dans les Balkans occidentaux, qui ne prenne en considération la Serbie. Je sais bien que se pose la question des deux fugitifs, et que l'économie n'est pas encore en mesure d'adhérer, mais la Commission est-elle bien fondée à réclamer la privatisation de certains secteurs ? Là encore nos critères sont à revoir.
Pristina a fait des efforts, dites-vous, et est prête au dialogue, mais le Kosovo n'est pas une réussite. C'est un État qui n'est pas viable, et le rapport Marty du Conseil de l'Europe a révélé que le Premier ministre lui-même pouvait être impliqué dans un trafic d'organes sur des prisonniers serbes. Nous avons vraiment besoin d'une réflexion politique, notamment sur les Balkans occidentaux pour exiger d'eux une forme de regroupement régional.
L'Europe ne peut plus fonctionner. Déjà il est insensé que chaque pays ait un Commissaire, que Chypre et Malte en aient un au même titre que la France ou l'Allemagne ! C'est déraisonnable. Et même si le vote au Conseil est pondéré par la démographie, il y faut aussi le pourcentage de 55 % des États ! On multiplie les micro-États, qui ne sont pas des États, mais plutôt des entités régionales. Il faut y mettre le holà ! Les mânes de Jean Monnet doivent en frémir. Cette approche est beaucoup trop technocratique. Où est l'Europe voulue par le général de Gaulle ? Une initiative politique s'impose.
Le traité de Lisbonne a raté son objectif. Le problème est celui de la zone euro. Lisbonne prévoyait des règles qui ne peuvent pas s'appliquer. Et qu'on viole, d'ailleurs. Et heureusement qu'on les viole, heureusement que la Banque centrale européenne rachète les dettes d'États menacés par la spéculation. Heureusement qu'on viole la clause du no bail out et qu'on met sur pied des mécanismes de solidarité.
Le Conseil européen est le lieu où doivent se prendre les décisions, car c'est là que se trouve la légitimité politique, celle des chefs d'État et de gouvernement. La Commission, elle, n'a plus aucune légitimité démocratique. Organisons-là donc comme une haute administration, certes dotée d'immenses compétences, mais placée sous l'autorité du Conseil européen.
Nous en sommes arrivés à un moment où cette usine à gaz, qu'on continue à sans cesse compliquer, a déjà entraîné une crise profonde. Chacun en est conscient, quelles que soient ses options passées. On ne peut plus continuer ainsi. Nous avons atteint le point limite fixé par Engels où la qualité même se transforme.
Pour continuer dans le florilège de citations allemandes ouvert par notre ami Chevènement, je rappellerai le propos de Bismarck à la Conférence de 1878 sur les Balkans : « Le problème avec les Balkans, c'est qu'ils produisent plus d'Histoire qu'ils n'en peuvent consommer ». Un siècle après, on ne saurait mieux dire.
L'Histoire retiendra contre nous la folle course à l'élargissement, à marche forcée, qui a marqué une décennie de l'Union européenne. Et la France en est parmi les principaux responsables. Quiconque connaissait cette région savait que l'idée de faire adhérer la Bulgarie et la Roumanie avant qu'elles aient complètement régénéré leurs systèmes judiciaires et policiers, était une absurdité.
C'est pourtant ce que nous avons fait. Je rappelle avec quelle extrême précipitation nous avons été, au Sénat, convoqués, quand on s'est aperçu qu'il fallait consulter les parlements avant l'ultime ratification. Cela nous a valu une mémorable séance de la délégation aux affaires européennes, la veille de Pâques ; nous avons estimé que nous ne pouvions pas raisonnablement formuler quelque avis que ce soit.
Le résultat est là. Je suis retourné, encore récemment, en Roumanie et en Bulgarie. Vous n'imaginez pas l'état de leurs justices ! C'est donc une absolue nécessité de leur fermer Schengen et d'exiger de ces pays des transformations structurelles. L'état de leurs appareils judiciaires est encore loin de répondre aux standards européens. Je l'ai dit à Mme Reding. Elle m'a répondu qu'il n'y avait pas d'argent. En même temps, on apprend que ces pays ne consomment pas leurs fonds structurels... Le développement de l'Europe judiciaire est entravé par cette situation dans les Balkans.
La Croatie ne soulèvera pas de difficultés -à condition que nous restions vigilants. Au-delà, la Serbie a une évidente vocation à entrer dans l'Union ; ce serait un facteur de paix pour l'avenir. Il faut qu'elle adhère et que nous contrôlions son évolution.
Mais les autres États ! Nous aurions au Conseil de l'Union ou à la Commission un représentant du Monténégro ! Et la Bosnie-Herzégovine ! Voilà un bon sujet d'épreuve constitutionnelle à l'agrégation de droit public : « Imaginez la meilleure Constitution possible pour la Bosnie-Herzégovine, à partir des accords de Dayton » ! Comment les Nations unies ont-elles pu faire un État de trois morceaux juxtaposés qui se haïssent ?
Poser certaines questions n'est pas les résoudre, mais poursuivre l'élargissement serait de l'aveuglement ! Par absence de lucidité, mais aussi par manque de courage politique, nous avons été incapables de nous opposer aux missionnaires de l'élargissement, car nous voulions être aimés - une des pires faiblesses pour des politiques. Résultat : la situation est sans issue. Voilà où nous en sommes !
La seule recommandation à faire est d'utiliser l'espérance d'entrer dans l'Union européenne pour transformer les pays candidats. Nous avons été aveugles, au lieu de regarder en face la situation dans les Balkans.
Parmi les coupables figure aussi le président Wilson, avec sa théorie des nationalités. Un archiduc y avait laissé sa vie, mais aussi un roi, celui de Yougoslavie, à Marseille, vingt ans plus tard.
Le président Mitterrand fut le plus lucide, puisqu'il a tenté de s'opposer à la dissolution de la Yougoslavie, alors que le chancelier Kohl s'empressait de reconnaître la Croatie.
Il était utile de nous rappeler la formule d'Engels qui veut qu'une modification quantitative transforme la qualité... L'élargissement de 2004, lui, comporte beaucoup d'éléments positifs. La Pologne a fait des progrès considérables, tout comme la République tchèque, la Slovaquie, la Slovénie ou la Hongrie, même si le résultat des dernières élections hongroises conduit à des décisions politiques qui soulèvent des interrogations. Les seules difficultés concernent la Bulgarie et la Roumanie.
À propos de Schengen, il faudra maintenir encore plusieurs années le mécanisme de contrôle et de vérification extrêmement serré mis en place lors de l'élargissement, et la Commission devrait s'impliquer beaucoup plus activement en particulier dans le bon emploi des fonds européens dans ces deux pays.
Monsieur Chevènement, la batterie de critères a peut-être un aspect un peu technocratique, mais elle nous protège utilement. Alors qu'elle n'a pas été appliquée à la Bulgarie et à la Roumanie, elle conditionnera sans doute fortement l'ouverture de négociations avec les pays des Balkans occidentaux.
Il est impossible de revenir sur l'éclatement de la Yougoslavie à la suite du conflit terrible que vous savez, mais on peut sans doute y développer plus de coopération régionale, c'est ce que nous avons commencé à faire. La Croatie a connu des progrès marquants depuis 1991, les mentalités ont évolué et l'accompagnement européen a joué un grand rôle. Mais, après son adhésion, le « paquet » suivant d'élargissement ne sera pas pour demain.
Sur le plan institutionnel, il paraît difficile d'envisager d'avoir 30 à 40 commissaires. Au Conseil, la pondération démographique limite les inconvénients du système.
L'exemple croate donne des perspectives à d'autres pays, notamment pour la Serbie, dont l'intégration à terme serait légitime et conforme à notre intérêt.
Si le Kosovo indépendant, sur lequel les jugements sont sévères, ne normalise pas ses relations avec la Serbie, l'autre risque pourrait être un jour une « grande Albanie », avec les incidences que l'on peut craindre aussi sur la minorité albanophone macédonienne. La division des Balkans est source de dangers, comme avant 1914.
Il est vrai que le nombre d'États membres de l'Union va s'accroître, mais l'important est de ne pas perdre en qualité. Au demeurant, la petite taille d'un pays n'est pas un problème en soi. Voyez le membre fondateur qu'est le Luxembourg ! En revanche, il faut véritablement respecter les critères politiques et techniques, donc opposer parfois un refus et contester les recommandations de la Commission. Je vous rappelle que l'adhésion suppose une décision unanime. Une fois l'entrée de la Croatie acquise, l'Allemagne devrait être moins allante pour l'élargissement. En définitive, seuls les Britanniques soutiennent avec détermination l'élargissement, pour les raisons que l'on sait. Toutefois, leur position a peut-être légèrement évolué depuis la dernière consultation électorale et la victoire de M. Cameron : c'est à vérifier.
Nous retrouvons dans les Balkans la frontière historique de l'empire byzantin, mais aussi la séparation entre l'Empire ottoman et l'Empire austro-hongrois. Un jour, le président Mitterrand m'a dit que l'Allemagne avait récupéré à la fois l'héritage diplomatique du Reich et celui de l'Empire austro-hongrois et avait retrouvé ses frontières avec la Croatie et, dans une certaine mesure, l'ancien protectorat autrichien de Bosnie-Herzégovine. Au-delà, elle ne voit que les méchants Serbes. La France ne doit pas cautionner cette attitude.
La Croatie actuelle ne veut pas être sous l'emprise allemande. D'ailleurs, tous les pays concernés par l'élargissement de 2004 souhaitent équilibrer, notamment avec nous, l'influence allemande.
Aujourd'hui, la Serbie se heurte à un blocage néerlandais, à cause du TPIY, alors que l'Allemagne nous a beaucoup soutenus pour transférer le dossier serbe à la Commission. Les facteurs historiques n'empêchent donc pas l'évolution. En 2007, la France était le pays le plus favorable à l'élargissement, en raison de ses liens historiques avec la Roumanie, considérée comme un pays francophone. Aujourd'hui, les Roumains ont l'impression que nous les avons « lâchés » au sujet de Schengen. Au demeurant, grâce à l'investissement linguistique remarquable réalisé en Europe centrale depuis 2000, la francophonie y progresse : à titre d'exemple, j'utilise couramment le français avec mes collègues en Hongrie, en Slovénie, en République tchèque, en Pologne, etc.
Dans les Balkans, il faut distinguer les pays issus de l'ancien Empire austro-hongrois et ceux dont le territoire faisait autrefois partie de l'Empire ottoman. Il y a là ce que j'appelle une « frontière invisible du droit », les premiers, qui ont une forte culture juridique, me paraissent bien plus faciles à intégrer à l'Union européenne.
M. Badinter a dit que les Balkans produisaient plus d'histoire qu'ils ne pouvaient en assumer. C'est vrai, mais nous sommes condamnés au succès, car ces pays sont au coeur de la stabilité en Europe. Il faut naturellement faire évoluer les instances communautaires, pour éviter leur enlisement à terme.