Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs

Réunion du 15 janvier 2019 à 16h35

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Nous reprenons aujourd'hui nos travaux après l'interruption liée aux fêtes de fin d'année.

Nous avons le plaisir d'auditionner cet après-midi l'Assemblée des départements de France (ADF), représentée par Mme Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle, et par M. Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) du même département.

Les conseils départementaux jouent un rôle essentiel en matière de protection de l'enfance, par l'intermédiaire de leurs services d'aide sociale à l'enfance, de leurs services de protection maternelle et infantile (PMI), mais aussi par le biais des cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP). Ce sont également les départements qui délivrent les agréments aux assistants maternels et familiaux, qui contrôlent les établissements d'accueil des jeunes enfants et qui mettent à disposition des collèges certains personnels non enseignants.

Dans tous ces domaines, la prévention des violences sexuelles sur mineurs est une question centrale. Il serait intéressant que vous nous indiquiez quelles précautions sont prises pour éviter que les professionnels mis au contact des enfants soient susceptibles de commettre des abus sur mineurs. Comment fonctionnent les CRIP et quelles suites sont données aux informations préoccupantes qu'elles recueillent ? Comment est pris en compte l'entourage d'une assistante maternelle au moment de délivrer l'agrément ?

Il serait également utile que vous nous indiquiez si beaucoup de mineurs victimes de violences sexuelles sont pris en charge par l'ASE et si un suivi spécifique est alors organisé.

Nos rapporteurs, Mmes Marie Mercier, Michelle Meunier et Dominique Vérien, vous ont adressé un questionnaire pour vous aider à préparer cette audition. Vous pourrez bien sûr nous adresser des éléments de réponse par écrit afin de compléter vos interventions si vous le souhaitez.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Depuis 2011, le département de la Moselle a fait de l'enfance son cheval de bataille. Environ 1 800 enfants nous sont confiés et 3 000 enfants sont suivis. Nous sommes très vigilants au moment des embauches. Nous vérifions le casier judiciaire et une enquête est menée. En cas d'incident, la personne n'est pas directement licenciée, car elle pourrait bien sûr être innocente, mais elle est reclassée.

Dans tous les départements, le casier judiciaire fait l'objet d'un examen attentif et des psychologues rencontrent les assistants familiaux.

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Nous sommes effectivement très vigilants lors du recrutement des personnels de l'aide sociale à l'enfance. Comme pour tous les fonctionnaires, leur casier judiciaire doit être vierge. Par ailleurs, une attention particulière est accordée à la posture professionnelle. Les assistants familiaux passent par une procédure d'agrément délivrée par la protection maternelle et infantile (PMI). Lors de l'embauche, des entretiens ont lieu, notamment avec un psychologue. Nous questionnons également l'environnement familial élargi du candidat.

Idem pour le milieu associatif habilité. Comme tous les départements, nous avons mis en place une procédure de recrutement : nous examinons aussi bien le casier judiciaire que le déroulé de la carrière des candidats. La Moselle a mis en place des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) avec l'ensemble des associations. Il existe ainsi des « fiches actions » qualitatives, reprenant notamment la qualification des professionnels. De la sorte, nous connaissons exactement le taux de personnel qualifié et formé. C'est pour nous une mesure de protection.

En cas de difficulté, il existe une fiche d'incident grave. Les milieux associatifs habilités doivent ainsi nous informer des incidents à caractère sexuel, mais pas uniquement. Nous transmettons alors l'information au parquet et au préfet. Dans la semaine, l'association doit remettre un rapport d'enquête interne sur les événements. Nous procédons bien sûr à la mise à pied à titre conservatoire du professionnel incriminé le temps que l'enquête préliminaire diligentée par le parquet suive son cours.

En ce qui concerne les assistants familiaux du département, une commission ad hoc a été créée. De la même manière, en cas de suspicion, nous retirons par précaution immédiatement les enfants aux assistants familiaux.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

De ce point de vue, les employeurs sont très mal protégés.

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Effectivement, les employeurs, qu'il s'agisse du département ou du milieu associatif, ne sont pas protégés. Il y a quelques années, nous avons dû licencier une personne à cause de son conjoint.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

C'est souvent le cas...

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

En première instance, le conjoint a été condamné, mais il a été relaxé en appel. Nous avons été obligés de rembaucher la professionnelle, mais sans lui confier d'enfants. Dans nos métiers, le principe de précaution devrait s'imposer. Pour ce faire, il est nécessaire que les employeurs soient protégés...

En Moselle, la CRIP joue à plein son rôle pour que nous puissions travailler avec les familles. Concrètement, le nombre des informations préoccupantes est en augmentation - nous repérons mieux -, mais le nombre des signalements diminue. Nous atteignons donc en partie les objectifs de la loi de 2007, renforcés par la loi de 2016.

En ce qui concerne les situations de violences sexuelles faites aux enfants, lorsque les choses sont claires, le dossier est immédiatement transmis à l'autorité judiciaire. Néanmoins, bien souvent, nous disposons d'un faisceau d'indices, mais pas d'une parole claire de l'enfant. Dans ce cas de figure, les psychologues et les équipes dédiées au traitement des informations préoccupantes doivent accomplir un vrai travail d'investigation pour recueillir la parole de l'enfant et de son entourage.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

J'insiste sur le manque de protection des employeurs. Nous avons créé une commission ad hoc réunissant des élus, des représentants syndicaux et des représentants des assistants familiaux. Or, malgré cela, nous avons dû rembaucher une personne.

Mme Marie-Louise Kuntz. - Tout à fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Tous les départements ont-ils le même mode de fonctionnement ?

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Oui, c'est la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Avez-vous pu comptabiliser le nombre d'enfants concernés par des violences dans votre département ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Le nombre des infractions est difficile à quantifier. Un certain nombre de ces enfants ont subi des violences sexuelles dans leur famille et présentent des troubles du comportement. La mission des établissements est donc difficile. Quoi qu'il en soit, ces violences sont heureusement extrêmement rares de la part des professionnels.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Elles sont rares en Moselle, mais aussi ailleurs.

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Nous assistons aujourd'hui à une désertification. Les établissements ont de plus en plus en mal à embaucher des professionnels qualifiés. Ces derniers doivent être courageux et motivés, car ils sont confrontés à des enfants présentant des troubles du comportement. Par ailleurs, ils doivent travailler en soirée et sont amenés à mélanger cadre familial et cadre professionnel. Notre département a lancé une campagne de recrutement massif qui est en train de produire ses effets. À notre sens, une des pistes à creuser est l'apprentissage.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Peu de jeunes sont tentés aujourd'hui par ce métier, d'où notre idée de mettre l'accent sur l'apprentissage. Le Grand-Est y consacre des crédits. Il importe d'être sûr des vocations, car il s'agit d'un métier dur : l'enfant est présent vingt-quatre heures sur vingt-quatre, il part avec vous en vacances, etc... Il est dommage que ce métier ne soit pas assez reconnu. Il faudrait notamment envisager une formation supplémentaire au moment de la séparation.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie Mercier

Avez-vous noté une évolution à la baisse du nombre d'enfants victimes de violence sexuelles ? Le système de protection mis en place porte-t-il ses fruits ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Nous disposons de peu d'éléments comparatifs chiffrés, même si le système présente aujourd'hui plus de points de sécurité que dans le passé. La fiche d'incident joue son rôle et met l'accent sur l'importance qu'il y a à signaler la moindre difficulté. En revanche, les troubles des enfants pris en charge sont plus complexes. Certains d'entre eux peuvent aller jusqu'au fantasme : ils ont certes été victimes de violences, mais ils vont cibler d'autres personnes. Il importe donc de protéger les enfants, mais aussi de sécuriser les professionnels.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

On manque également de psychologues et de psychiatres.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie Mercier

En ce qui concerne le douloureux procès que vous avez évoqué, la relaxe a-t-elle été prononcée faute de preuves ?

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Tout à fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie Mercier

La loi votée en août 2018 permettrait-elle, si le procès avait lieu maintenant, une autre conclusion ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Oui. Au fond, l'enfant s'en fiche si celui qui lui a fait du mal est condamné au civil ou au pénal : ce qui lui importe, c'est que des sanctions soient prises !

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

La procédure est-elle la même en ce qui concerne les personnels qui travaillent auprès des collégiens et des collégiennes ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Non, le niveau de vérification n'est pas le même. Il s'agit de personnels techniciens, ouvriers et de services (TOS) et non de professionnels de la prise en charge.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Cependant, nous contrôlons bien le bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnels TOS.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Vous souhaitez mettre l'accent sur l'apprentissage. De nombreuses formations dans le secteur se font en alternance. Comment envisagez-vous les choses pour les assistants familiaux ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

L'apprentissage concernerait davantage les éducateurs d'internat.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Pour les assistants familiaux, nous envisageons plus d'heures de formation sur des sujets bien précis.

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Oui, via une formation continue pour les sécuriser et les accompagner. Souvent, ces derniers préfèrent ne pas signaler leurs difficultés. Il convient de travailler avec eux la confiance. La présence de psychologues dans nos équipes peut constituer une aide. Dans ce métier, la sphère privée et la sphère professionnelle sont en quasi-fusion et tout entre en collision.

Il est beaucoup plus facile de contrôler ce qui se passe lorsqu'il y a quarante enfants dans un établissement du milieu associatif habilité que lorsque vous avez 280 jeunes répartis chez 220 assistants familiaux. La question de l'accompagnement est alors forcément plus délicate.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Le problème tient aussi aux budgets des départements qui sont loin d'être extensibles. La formation continue des assistants familiaux fait souvent l'objet de réductions, voire de suppressions.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Les départements doivent travailler avec les régions. C'est le cas chez nous, dans le Grand-Est, pour la formation.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

Je voudrais revenir à la question du personnel : je pense aux collèges ou aux conservatoires, où des agents travaillent aux côtés des enfants, même s'ils n'ont pas de missions éducatives.

Lors de l'embauche, vous demandez le casier judiciaire des candidats, avez-vous dit. Réitérez-vous cette demande régulièrement ?

Quel accompagnement spécifique offrez-vous aux enfants victimes de violences sexuelles ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Lorsque nous recevons un enfant qui a été victime de violences sexuelles dans un établissement ou dans une famille d'accueil, un process est immédiatement mis en place avec un accompagnement psychologique. En outre, nous utilisons de nouvelles méthodes de travail, comme l'intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires, couramment appelée méthode EMDR, pour traiter les traumas. À Metz, nous avons la chance de disposer d'un centre qui a recours à ces techniques innovantes. D'ailleurs, même les micro-traumas peuvent laisser de fortes traces. Toutes les maisons d'enfants à caractère social (MECS) disposent de psychologues. Les centres médico-psychologiques (CMP) suivent les enfants et les psychologues de l'aide sociale à l'enfance interviennent également. N'oublions pas non plus qu'un enfant peut ne pas avoir envie de parler ; il nous faut respecter le temps de l'enfant. En outre, il pourra avoir envie de se confier à une personne qui travaille dans l'établissement mais qui n'est pas directement impliquée. Il faut donc rappeler à tout le personnel, quel qu'il soit, qu'il ne travaille pas dans un lieu neutre : il a donc un rôle à jouer vis-à-vis des enfants.

En revanche, nous n'avons rien prévu pour les professionnels qui travaillent dans les bibliothèques.

Les professionnels qui interviennent dans les établissements sont suivis régulièrement : nos dialogues de gestion avec les établissements nous permettent de revenir chaque année sur toutes les questions, y compris la qualification des professionnels. Nous sommes informés systématiquement des causes des licenciements et nous mettons une alerte pour que les personnes licenciées ne soient pas embauchées dans un autre établissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

Vous est-il arrivé de recevoir des enfants maltraités qui ont, par la suite, révélé qu'ils avaient subi des violences sexuelles ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

C'est notre coeur de métier. Lorsque nous recevons des enfants, le centre départemental de l'enfance observe, évalue et oriente. Lors de la phase d'observation, nous prenons en compte tous les signes verbaux et non verbaux des enfants. Nous les traitons ensuite avec les décisions judiciaires qui s'imposent.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Dans les hébergements conventionnés par les départements, il arrive que des surveillants de nuit procèdent à des attouchements, voire des viols. Il est toujours difficile d'apporter des preuves, car la parole des jeunes - souvent fragiles - peut être mise en cause.

Les assistants maternels sont agréés par le département. Malheureusement, on se heurte parfois à des comportements déviants du conjoint ou du fils aîné. La procédure du comportement préoccupant s'applique-t-elle à ces cas ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Il s'agit là du travail de la PMI : il peut effectivement arriver que l'entourage de la professionnelle soit en cause.

L'institutionnel ne peut, à lui seul, sécuriser le système. Notre maxime en matière de protection de l'enfance est que s'il faut tout un village pour éduquer un enfant, il faut aussi tout un village pour le protéger. N'attendons pas tout du champ professionnel ! Autour des assistants maternels et familiaux, il existe des voisins, des familles, des écoles, des clubs sportifs. Tous ces acteurs ont un rôle à jouer en matière de prévention.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Dans les maisons d'assistantes maternelles (MAM), les enfants sont protégés, mais aussi les assistantes maternelles, car elles travaillent à trois ou quatre dans un même lieu, et il n'y a ni mari, ni fils. En outre, cela professionnalise le métier. Je suis donc tout à fait favorable à la multiplication de ces maisons, qui concourent à la prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

J'ai été vice-présidente chargée de la protection sociale dans mon département.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

C'est une belle délégation : on peut y mener des actions importantes !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Les MAM, qui se développent en Charente-Maritime, sont un bel outil : elles permettent de protéger les professionnelles. Quoi de pire en effet de perdre son travail alors que l'on n'est pas responsable de la faute ? Pour avoir présidé la commission paritaire pour les assistants familiaux et maternels, je connais la difficulté d'avoir à décider dans certains cas.

Le recrutement des assistants familiaux et maternels est-il centralisé dans votre département ? Demandez-vous le casier judiciaire des maris et des garçons de la famille ?

Le code de l'action sociale et des familles prévoit, en cas de problème, une suspension de quatre mois du professionnel. Est-ce suffisant ? Le temps de la justice est bien différent... Le législateur doit-il revenir sur ce délai ?

Enfin, contrôlez-vous les séjours de vacances que vous financez ?

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

Nous disposons d'un service centralisé pour le recrutement, la formation et l'accompagnement des assistants familiaux. Nous avons séparé le suivi professionnel du projet pour l'enfant qui est porté par les équipes de territoires. C'est une bonne chose quand des difficultés se présentent, car lorsque le même service porte le projet pour l'enfant et l'accompagnement du professionnel, il est difficile de gérer les conflits.

Les quatre mois de suspension sont bien trop courts : nous sommes régulièrement obligés de prolonger ce délai, car le temps de la justice est bien différent et les enquêtes tardent à démarrer : il peut parfois s'écouler plus d'un an avant qu'elles ne s'enclenchent. Il nous arrive de licencier pour suspicion de danger pour l'enfant alors que l'assistant familial n'est pas directement mis en cause, puisqu'il s'agit de son entourage. C'est un drame humain, mais le principe de précaution doit s'appliquer.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

La situation peut parfois être très difficile lorsque nous recevons la personne en commission ad hoc...

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Il ne faut pas confondre prévention et délation, et dans le doute, on a souvent envie de regarder ailleurs. En outre, il y a toujours un risque de se tromper : une rumeur peut détruire une famille ou un enseignant...

On a souvent tendance à dire que les MAM sont faites pour les petites communes qui n'ont pas les moyens de financer des crèches. Mais les deux structures sont loin d'être comparables !

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Il faut à la fois prendre en compte la sécurité des parents, des enfants, mais aussi des professionnels. Dans le cas des assistantes familiales, c'est toute la famille qui est partie prenante.

Debut de section - Permalien
Marie-Louise Kuntz, vice-présidente du conseil départemental de la Moselle

Vous avez raison. Et lorsque l'on sent que le mari ou les enfants ne sont pas d'accord, l'agrément n'est pas délivré.

Debut de section - Permalien
Ludovic Maréchal, adjoint au sous-directeur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de la Moselle

L'agrément est bien sûr donné au professionnel, mais le contexte familial est scruté de près. Un psycho-sociologue belge m'a dit en 2012 que notre procédure d'information préoccupante pouvait s'apparenter à un système vichyste. Je ne le crois pas : nous devons prendre toutes les précautions possibles pour le bien de l'enfant.

Nous avons créé un groupe de parents qui s'appelle « parole de familles » pour avoir leur sentiment sur notre politique de protection de l'enfance. Les parents sont les premiers protecteurs de l'enfant. Ainsi, nous leur avons montré la lettre que nous adressons aux parents lorsque nous disposons d'une information préoccupante et dans laquelle nous leur disons que nous allons venir les rencontrer. Lorsque nous l'avons montrée au groupe de parents, ils nous ont dit que les familles refuseraient d'ouvrir leur porte aux enquêteurs, alors même que nous pensions notre rédaction très douce ! Avec eux, nous l'avons donc modifiée, car notre but est de travailler avec les familles, et non pas de les menacer de leur retirer leur enfant.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Merci de nous avoir parlé de votre expérience. Nous vous souhaitons un bon retour en Moselle.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Pour cette deuxième audition, nous avons le plaisir de recevoir plusieurs représentants du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped). Ce groupement rassemble, d'une part, l'Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE), d'autre part, le service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated), c'est-à-dire le service qui gère le numéro national d'urgence 119. Le Giped a donc, à la fois, un rôle d'étude et de diffusion des bonnes pratiques, mais aussi un rôle opérationnel de recueil de la parole des victimes.

Nous souhaitons que vous nous expliquiez comment fonctionne ce service et la façon dont sont traités les appels reçus.

Vous nous préciserez quelles sont les activités de l'Observatoire et si vous avez mené des travaux sur le sujet qui intéresse notre mission d'information, à savoir la lutte contre les infractions sexuelles commises contre des mineurs par les institutions et hors de la sphère familiale. Nos trois rapporteures, Mmes Marie Mercier, Michelle Meunier et Dominique Vérien, vous ont envoyé un questionnaire pour vous aider à préparer cette audition.

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Le Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated) a acquis au fil du temps un certain nombre de données et de connaissances sur les violences faites aux enfants, ce qui nous a permis de construire des études statistiques annuelles sur les différents types de dangers auxquels sont exposés les enfants.

Il compte une cinquantaine de personnes, dont vingt-six écoutants qui assurent un service 24 heures sur 24, sept jours sur sept, 365 jours par an. Ces écoutants sont tous des professionnels de la protection de l'enfance. Ils sont tous salariés. La plupart sont psychologues de formation, d'autres sont juristes et d'autres, travailleurs sociaux. Ils bénéficient tous d'une formation initiale de soixante-dix heures, composée de modules théoriques, sur les bases juridiques, le développement de l'enfant et les clignotants de la maltraitance, et de modules pratiques pour acquérir la technicité de l'écoute téléphonique en protection de l'enfance. Notre équipe est donc formée à la conduite de l'entretien téléphonique ainsi qu'à la détection et au repérage des paramètres de la situation de danger. Elle formalise chaque appel par une fiche d'appel qui comprend une partie de restitution écrite de l'entretien, et une partie où il s'agit de cocher des items qui, agrégés, permettent d'élaborer l'étude annuelle statistique. Bien sûr, cette étude se fonde sur des éléments déclaratifs tels qu'ils sont analysés par les écoutants.

En 2017, les écoutants ont traité un peu plus de 33 000 appels sur un total de 450 000 appels entrants - soit environ 1 200 appels par jour ! Un appel traité fait l'objet de deux orientations possibles : une aide immédiate, c'est-à-dire une mesure de conseil, d'assistance ou de soutien, ou bien une transmission, lorsqu'il s'agit d'une information préoccupante, qui doit donc être transmise aux cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP).

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Comment expliquer une telle différence entre le nombre d'appels reçus et le nombre d'appels traités ?

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Beaucoup de ceux qui appellent le 119 le confondent avec d'autres numéros, comme le 115 ou le 39 19. Nous avons donc un système de filtrage, à la fois par des messages d'accueil téléphonique qui rappellent les missions du service, et par une équipe de pré-accueil, qui filtre les appels, ce qui nous donne un taux de décroché assez bon : 94,5 % des appels sont décrochés en moins de dix-sept secondes. C'est au niveau du pré-accueil que certains appels sont réorientés vers les services compétents ou, dans les situations d'urgence, que les services de police et de gendarmerie sont immédiatement saisis pour intervention. Les autres font l'objet d'un patientage avant d'être transférés vers la plateforme d'écoute, où les écoutants se relaient 24 heures sur 24.

Nous avons aussi une équipe d'encadrement pour accompagner à la fois techniquement et hiérarchiquement les écoutants, qui effectuent également des astreintes la nuit et le week-end.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

L'activité fluctue-t-elle en fonction des tranches horaires, y a-t-il des pics ?

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Les phases intenses se situent entre 11 heures et 23 heures. Les périodes qui précédent les vacances scolaires sont aussi plus actives, quand les phases estivales le sont moins. En week-end, il y plus d'activité le samedi matin que le dimanche matin. Bien sûr, nous adaptons la couverture-plateau aux besoins du public, notamment lorsque nous faisons des campagnes de communication.

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Nous pouvons savoir si les appelants sont mineurs. C'est le cas de 15 % d'entre eux - soit environ 5 000 appels - et 12,2 % appellent pour eux-mêmes - part qui est en hausse. L'âge des enfants concernés varie selon le type de danger envisagé, mais il est en moyenne de huit ans et demi. La répartition entre garçons et filles est à peu près équilibrée, sauf en matière de violences sexuelles, qui concernent à 65 % les filles.

Le profil des auteurs qui nous sont désignés, que nous appelons auteurs présumés, varie lui aussi selon le type de danger. Les violences sexuelles sont plutôt commises par des personnes issues de l'entourage de l'enfant - à ne pas confondre avec la famille proche, qui sont les parents, les grands-parents, les oncles et tantes. L'entourage désigne les voisins, le petit-ami, les camarades - et aussi les professionnels. Ces derniers sont les principaux auteurs des violences psychologiques - 37,8 % des cas - et physiques - 32 %. Ils sont aussi responsables de 16,2 % des négligences lourdes, de 5,6 % des faits compromettant les conditions d'éducation et de 8,4 % des violences sexuelles, qui sont plutôt le fait de l'entourage. Il s'agit de professionnels d'accueil de l'enfance, d'enseignants ou de toute autre personne de l'Éducation nationale, de professionnels qui exercent en institution...

L'examen des fiches d'appel montre une forte hétérogénéité sur la question des violences sexuelles : on va des personnels de crèche aux enseignants et aux éducateurs sportifs en passant par des chefs scouts... Aucune profession n'est particulièrement concernée.

Entre les deux orientations possibles, les violences sexuelles font le plus souvent l'objet d'une aide immédiate de nos écoutants, car dans la plupart des cas une procédure est déjà engagée et l'appelant a surtout besoin d'être réassuré.

Un appelant mineur évoque beaucoup moins qu'un majeur une situation en lien avec des violences sexuelles subies. Il est vrai qu'il y a sur ce sujet une certaine difficulté à faire parler les personnes concernées, et le support téléphonique n'est pas forcément le plus adapté à un dévoilement souvent assez long. D'où l'intérêt de la formation des écoutants, qui apprennent à capter et à repérer entre les lignes des choses indicibles, notamment au travers de symptômes physiques.

Debut de section - Permalien
Agnès Gindt-Ducros, directrice de l'Observatoire national de la protection de l'enfance (Onpe)

L'observatoire a été créé en 2004 sous le nom d'Observatoire national de l'enfance en danger (Oned), avant de devenir en 2016 l'observatoire national de la protection de l'enfance (Onpe). Son objectif, qui est de mieux connaître la protection de l'enfance pour mieux prévenir et mieux prendre en charge, se décline en trois missions.

D'abord, une mission de recensement, de mise en cohérence et de développement de données chiffrées, et donc d'études et de recherche, pour laquelle nous avons des contacts très forts avec les conseils départementaux pour la transmission des informations relatives à la protection de l'enfance. Nous avons aussi une mission de recensement, d'analyse et de diffusion des pratiques de prévention et d'intervention en protection de l'enfance évaluées comme étant concluantes. Troisième mission : le soutien à la mise en réseau des acteurs de la protection de l'enfance, par un travail important d'animation de réseau avec les observatoires départementaux de la protection de l'enfance et les services d'aide sociale à l'enfance dans les conseils départementaux.

Nous sommes une équipe de quatorze personnes, dont quatre ont des fonctions dites supports et dix des fonctions de production de connaissances et de publication : sociologues, statisticiens, démographes, experts en sciences médicales, juridiques ou politiques... Trois chargés de mission sont mis à disposition ou en détachement par leur ministère pour couvrir des fonctions transversales. Ils connaissent très bien la protection de l'enfance. Des chargés d'études sont davantage dans des fonctions d'opérationnalité, de traitement et d'analyse de données.

La grande force de notre travail est l'intrication de chacune de ces missions : les données chiffrées brutes n'ont pas de sens si elles ne sont pas mises en rapport avec des pratiques professionnelles et avec des connaissances cliniques. Nous faisons aussi un gros travail de lien avec les conseils départementaux et les observatoires départementaux de la protection de l'enfance, par le biais de l'animation de groupes de travail, de journées d'études ou de séminaires. Ainsi, nous menons une enquête tous les deux ans pour savoir où en sont les observatoires départementaux de la protection de l'enfance. Cela nous donne une connaissance précise de ce qui se passe dans les départements.

Debut de section - Permalien
Agnès Gindt-Ducros, directrice de l'Observatoire national de la protection de l'enfance (Onpe)

Pas tout-à-fait : soixante-quatorze en ont un, il en manque donc environ vingt-cinq. Mais leur nombre augmente à chaque enquête et, alors qu'auparavant ces observatoires étaient souvent intégrés dans d'autres observatoires ayant des périmètres plus larges, on a de plus en plus d'observatoires vraiment dédiés à la protection de l'enfance, et on voit augmenter aussi le nombre de personnes qui y travaillent, qui peut aller jusqu'à plusieurs équivalents temps plein dans des grands départements. Les responsables de ces observatoires, souvent d'anciens travailleurs sociaux, ont de vrais besoins de formation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Votre expérience vous a-t-elle fait repérer des manques ou des failles dans le dispositif législatif autour de la protection de l'enfant ? Peut-on l'améliorer, qu'il s'agisse du repérage, de la prise en charge ou des sanctions contre les agresseurs ?

Debut de section - Permalien
Agnès Gindt-Ducros, directrice de l'Observatoire national de la protection de l'enfance (Onpe)

Ce que nous voyons dans les départements, et ce que les magistrats nous disent, c'est que nous disposons d'un arsenal législatif complet, qui permet vraiment d'agir et de protéger les enfants - mais que sa mise en oeuvre pose parfois problème, et notamment son appropriation par les professionnels. Ainsi, la question du secret professionnel, avec l'idée de secret partagé, figure bien dans les textes réglementaires sur la protection de l'enfance, mais les médecins ont du mal avec cette notion, même si la construction législative les protège. Le secret professionnel peut être aussi une forme d'alibi. Bref, les magistrats nous disent que la question est au niveau de la mise en oeuvre. La notion d'information préoccupante, aussi, n'est pas toujours bien comprise, même si elle porte bien son nom. Certains la confondent avec un signalement devant conduire au placement des enfants.

Pour les violences sexuelles exercées par des professionnels, se pose la question des personnes qui ont été jugées : comment informer les institutions qui accueillent des enfants ? Des procédures existent à l'Éducation nationale, notamment.

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Et sa consultation périodique.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

Vous dites que 15 % des appels au 119 sont passés par des mineurs. Les autres, je suppose, le sont par la famille et les proches. En cas d'urgence, vous contactez la police. Sinon, l'appel est orienté vers la plateforme d'écoute. En ce cas, quelles suites sont données ?

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Il peut arriver - c'est le cas environ un jour sur deux - qu'un écoutant appelle lui-même, pendant l'appel, les services de premiers secours. En 2017, 250 appels ont été passés aux services de première urgence. Il s'agit par exemple de cas où l'enfant est barricadé chez lui parce qu'il a peur de recevoir des coups, ou du passage à l'acte de la mère, qui va jeter son enfant par la fenêtre, ou d'un enfant en fugue dans une rue et qui demande de l'aide.

Dans notre convention constitutive, à laquelle tous les départements ont dû adhérer, figure l'obligation pour les départements de nous communiquer dans les trois mois qui suivent la transmission d'informations préoccupantes les suites qui leur ont été données. Dans six cas sur dix, il s'agit d'un suivi de secteur, dans deux cas sur dix, il y a une transmission à l'autorité judiciaire et dans les deux autres cas, un suivi administratif est mis en place.

Lorsqu'on adresse une information préoccupante à un département, dans six situations sur dix la situation n'était pas connue pour des faits de maltraitance par celui-ci. C'est que certaines personnes ne souhaitent pas forcément s'identifier auprès des services sociaux locaux. Pour notre part, nous assurons une certaine confidentialité des appels : la personne n'est pas obligée de décliner son identité lorsqu'elle nous appelle.

Nous avons en effet 15 % d'appels de mineurs, mais aussi presque 5 % d'appels de professionnels, alors même qu'il existe des protocoles dans leurs institutions. Il arrive tout simplement qu'ils soient en questionnement sans avoir envie de l'exposer à leurs collègues ou à leur hiérarchie, avec laquelle ils peuvent être en opposition. Du coup, ils ont besoin d'échanger avec un professionnel de la protection de l'enfance pour voir si leurs doutes et leurs inquiétudes sont réellement constitutifs d'une information préoccupante. Bref, le public auquel nous avons affaire est très hétérogène.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Quelle est la proportion d'appelants qui refusent de donner leur identité ?

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

La part des personnes qui refusent de donner leur identité est de plus en plus faible, et n'est plus que de 8 %, contre 22 % en 2012. C'est que nous avons beaucoup communiqué sur le fait qu'appeler le 119 était un acte citoyen.

Nous ne pouvons pas garantir un anonymat total car nous avons une obligation légale de transmission, et ces transmissions peuvent faire l'objet d'un signalement au procureur de la République et donc d'une enquête : en cas de réquisition judiciaire, les services de police et de gendarmerie peuvent nous demander de donner le numéro de téléphone de la personne.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Quelles sont vos relations de travail avec la Défenseure des enfants ?

Debut de section - Permalien
Agnès Gindt-Ducros, directrice de l'Observatoire national de la protection de l'enfance (Onpe)

Nous avons des groupes de travail communs, par exemple dans le cadre du Conseil national de la protection de l'enfance. Selon les rapports sur lesquels nous travaillons, nous pouvons aussi nous rencontrer sur des sujets donnés. Ainsi, la Défenseure des enfants vient de publier un travail sur le droit de la petite enfance, et nous allons publier très prochainement une étude sur la protection des enfants placés de zéro à six ans. Nous faisons aussi partie de réseaux européens, notamment le réseau des observatoires de l'enfance, présidé actuellement par la Défenseure des droits française.

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Le Snated est accompagné d'un comité technique composé de membres issus des ministères et des départements, mais également de personnes qualifiées, parmi lesquelles la Défenseure des enfants. Celle-ci contribue de ce fait à un certain nombre de travaux, comme la co-construction d'un 119 au service des droits de l'enfant, dans le cadre d'une labellisation qu'elle a lancée ; chaque article de la Convention internationale des Droits de l'enfant a été illustré par un appel réel au 119, pour montrer comment s'incarnent les droits de l'enfant. A la prochaine réunion de service du Snated, dans dix jours, une chef de bureau de la Défenseure des enfants viendra présenter sa mission, parce que les écoutants peuvent être amenés à orienter les appelants vers ses services.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Avez-vous une politique d'évaluation des appels ? Les appels sont-ils enregistrés ?

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Les appels au 119 ne sont pas enregistrés car il s'agit d'une intervention sociale, qui requiert une certaine confidentialité. Toutes les informations préoccupantes qui sont transmises passent par la validation d'un encadrant, ce qui garantit une certaine harmonisation et une certaine qualité de travail.

Nous travaillons certaines thématiques, comme le traitement des appels d'enfants, ou la loi Schiappa sur les violences sexuelles dans des réunions de coordination.

Les écoutants bénéficient également de quatre heures par mois de supervision avec un psychologue extérieur au service, notamment pour travailler la distanciation nécessaire à l'exercice de leur activité.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Le turnover est-il important chez les écoutants ? Des campagnes spécifiques ont-elles été menées, ou sont-elles envisagées, pour diffuser la connaissance du 119 ? La bande dessinée contre les violences sexuelles faites aux enfants, éditée par Bayard, mentionne ce numéro. Elle a été distribuée dans toutes les écoles d'Angers.

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Il y a peu de turnover parmi les écoutants depuis 2015, l'année de ma prise de fonctions, en dehors des départs pour raisons personnelles - un déménagement par exemple. Nous investissons dans la formation du personnel et dans l'accompagnement pour ménager aux écoutants des moments de distanciation et de réflexion ; nous cherchons à installer un climat de bienveillance et de bientraitance.

Le code de l'action sociale et des familles assigne au Snated l'obligation d'affichage du 119 dans les lieux qui accueillent des mineurs, mise en oeuvre dans le cadre de conventions avec, entre autres, le ministère de l'éducation nationale. Ainsi, tous les ans, 120 000 affiches sont envoyées aux 65 000 établissements scolaires sur la question des violences. Nous avons récemment créé une plaquette pour les enfants, mise en ligne sur le portail Eduscol du ministère.

Les campagnes de communication grand public incluent le livret que vous mentionnez, auquel nous avons contribué. Nous essayons de participer à toutes les initiatives en ce sens. Le message que nous souhaitons diffuser est positif, avec le slogan suivant : « Le mieux, c'est d'en parler ». La communication sur les violences sexuelles est délicate : il faut éviter d'être anxiogène pour les enfants et stigmatisant pour les professionnels. Nous avons été associés à la dernière campagne en date du ministère de l'éducation nationale, lancée le 20 novembre, du moins dans sa phase initiale.

L'impact de ces actions est réel : le nombre d'appels au 119 augmente, tout comme les informations préoccupantes. Ainsi, ces dernières ont augmenté de 40 % sur la durée de la campagne lancée en 2017 à l'occasion du plan de lutte contre les violences faites aux enfants. Au-delà de ces retombées immédiates, ces actions doivent également provoquer une maturation chez les victimes et leur entourage, qui peut prendre plus de temps.

Ces campagnes réclament des moyens, or notre budget pour la communication est relativement faible. De plus, il faut également prévoir le recrutement d'écoutants pour absorber leur impact.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Travaillez-vous avec les associations d'élus comme l'Association des maires de France ? Les bulletins municipaux sont un vecteur de diffusion et de communication à moindre coût.

Debut de section - Permalien
Violaine Blain, directrice du Groupement d'intérêt public Enfance en danger (Giped) et directrice par intérim du Service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated)

Cet outil figurait dans le plan de lutte contre les violences faites aux enfants lancé en mars 2017, dans le cadre de conventionnements. Nous n'avons pas encore passé de convention avec l'AMF. C'est en projet avec la caisse nationale des allocations familiales, pour une diffusion via ses supports de communication que l'on trouve notamment dans les salles d'attente des caisses d'allocations familiales. En revanche, nous avons déjà passé des conventions avec le ministère des sports et la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Merci pour votre présentation et la précision de vos réponses.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 18 h 25.