Mes chers collègues, je vous prie d'excuser l'absence du président Milon, que je remplace pour les auditions du mois de septembre.
Nous poursuivons nos travaux avec l'audition de Mme Katia Julienne, directrice générale de l'offre de soins au ministère des solidarités et de la santé.
Cette audition fait écho à celle des fédérations hospitalières qui s'est tenue ce matin. Les thématiques sont nombreuses : nous nous interrogeons notamment sur le choix d'un traitement très hospitalier de l'épidémie, mais aussi sur celui de réorienter complétement l'offre hospitalière sur la prise en charge des patients covid - peut-être au détriment des autres -, y compris dans des zones peu touchées. Nous nous interrogeons également sur le point de savoir si cette stratégie n'a pas été dictée par les capacités disponibles, au moins dans un premier temps.
Une commission d'enquête fait l'objet d'un encadrement juridique strict. Je vous informe qu'un faux témoignage devant notre commission serait passible des peines prévues aux articles 434-13 à 434-15 du code pénal.
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, Mme Katia Julienne prête serment.
Je voudrais tout d'abord saluer l'engagement des soignants et, plus largement, celui de l'ensemble des personnels qui ont concouru au bon fonctionnement du système de santé. Il me semble important de souligner devant vous leurs efforts et leur engagement - aujourd'hui encore - dans la gestion de cette crise.
Je voudrais également souligner l'importance des relations que nous avons pu nouer durant la crise avec les fédérations hospitalières, que vous avez auditionnées ce matin, avec les conférences hospitalières et avec les sociétés savantes, sans oublier France Assos Santé. Ces contacts permanents tout au long de la gestion de l'épidémie ont joué un grand rôle dans les décisions que nous avons prises.
La Direction générale de l'offre de soins (DGOS) a mis au service de la Direction générale de la santé (DGS), qui pilote la gestion de la crise sanitaire, non seulement sa capacité à activer l'offre de soins, mais aussi une partie de ses agents dans les cellules - cellule « logistique », cellule « opération »... - mises en place par la DGS, ce qui a permis d'introduire plus d'agilité à l'échelle nationale. Nous avons ensuite retrouvé cette agilité dans les agences régionales de santé (ARS) et dans les établissements de santé. Nous avons profondément fait évoluer nos organisations internes - nous n'y étions pas habitués - pour faire face aux contraintes et aux difficultés liées à la gestion de l'épidémie.
Il en a été de même à l'échelon interministériel : un certain nombre d'évolutions ont pu être mises en place rapidement. Je pense notamment à la garde des enfants des soignants, ce qui a été extrêmement important pour garantir la continuité des soins, ou à la prise en charge des transports, notamment les taxis, pour ramener les soignants à leur domicile. Ces deux exemples témoignent de la très forte coopération interministérielle durant l'ensemble de la crise.
Nous avons suivi deux lignes directrices. Tout d'abord, nous avons constamment veillé à lever les freins et à faciliter l'adaptation du système de santé pour aider les acteurs de terrain, à travers les déprogrammations ou en permettant aux ARS d'octroyer des autorisations exceptionnelles dans des délais très réduits, ce qui a facilité l'extension d'autres activités, notamment de réanimation. Je pense aussi à l'appui sanitaire aux établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad), levier extrêmement important, pour faciliter la prise en charge sanitaire des résidents.
Nous avons ensuite pris des mesures sur les plans administratif, juridique et financier pour faciliter notre engagement massif en termes de réaffectation et de renforts des professionnels de santé entre établissements. Ce fut aussi le cas pour la garde des enfants ou le recours aux taxis que j'évoquais à l'instant.
De même, il était essentiel d'assurer aux établissements de santé publics et privés le maintien de leur financement, qu'il s'agisse d'aides en trésorerie, de délégations financières ou de garanties de financement pour leur éviter toute préoccupation financière et leur permettre de se concentrer sur la gestion des patients covid. Tous ces exemples témoignent de ce que doit être la posture d'une administration centrale : elle n'est pas en première ligne, mais elle vient en appui des acteurs de terrain.
Après cette période de gestion de l'épidémie, nous avons eu à coeur d'organiser des réunions, dans des délais extrêmement courts, pour capitaliser ensemble sur les enseignements à tirer de cette crise. Nous avons ainsi rencontré, fin juin, le Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH), un certain nombre de sociétés savantes, les réanimateurs, les représentants de la médecine physique et de réadaptation (MPR)... Ces réunions nous ont permis, par exemple, de mieux comprendre combien les télésoins réalisés par les kinés avaient permis d'assurer la continuité de la prise en charge de patients dans les services de soins de suite et de réadaptation (SSR), notamment non-covid, durant la période de confinement. Les enseignements que nous pourrons tirer de la gestion de cette crise nous permettront à la fois de nous préparer à un éventuel rebond ou à une reprise de l'épidémie et de mettre en oeuvre des évolutions plus pérennes de notre système de santé.
Nous continuons d'échanger, depuis juillet, avec les deux conseils nationaux professionnels (CNP) de réanimateurs. Nous avons retravaillé avec eux certaines des instructions envoyées dès la fin du mois de juillet aux ARS pour qu'elles se tiennent prêtes en cas de reprise de l'épidémie. Nous travaillons également sur des évolutions plus structurelles des services de réanimation, qu'il s'agisse des professionnels - je pense notamment aux infirmiers - ou de la question du capacitaire. Ce dernier point est important : nous devons choisir avec eux les bons critères de détermination des capacités de réanimation, non seulement au plan national, mais aussi - et surtout - au plan régional. Ces capacités peuvent en effet être très différentes selon les territoires. Nous ne réglerons pas cette question dans les deux mois qui viennent, mais il faut impérativement la traiter. Nous devons travailler à la fois sur le court et le moyen terme.
Les décisions du Ségur constituent un autre élément important. Certaines étaient très attendues par l'ensemble du système de santé - je pense à l'investissement hospitalier, aux rémunérations, aux primes, aux parcours de carrière de l'ensemble des professionnels, personnels médicaux et non médicaux... Ces décisions, que nous mettons en oeuvre dès maintenant, portent sur plusieurs milliards d'euros.
D'autres sujets sont également très importants. Nous avons maintenu la prise en charge à 100 % des téléconsultations. L'épidémie a permis d'accroître très notablement le nombre d'actes de télémédecine, de télésoins, avec des professionnels assez différents. Je pense que la télémédecine a trouvé sa place. Nous devons la conforter de manière pérenne.
Je pense également à l'ancrage sanitaire autour des Ehpad : pendant la gestion de l'épidémie, nous avons demandé aux ARS de mettre en place un maillage sanitaire autour des Ehpad, notamment à travers des astreintes, pour qu'aucun établissement n'ignore qui appeler pour un appui sanitaire, qu'il s'agisse de soins palliatifs ou d'une aide plus générale aux professionnels. Nous avons demandé aux équipes mobiles de gériatrie de sortir de plus en plus de l'hôpital pour aller vers les Ehpad et les aider. Nous avons levé les restrictions qui pouvaient limiter les interventions de l'hospitalisation à domicile (HAD), laquelle a réalisé un travail remarquable auprès des résidents de ces établissements.
Il en va de même du déploiement du service d'accès aux soins qui nous permettra de parfaire l'organisation de la régulation médicale avec les généralistes et les urgentistes. Nous avons demandé aux ARS qui ont monté des projets de sites pilotes de les déployer et de nous faire un retour d'ici au 30 septembre.
Voilà quelques exemples d'évolutions structurelles, dont certaines peuvent être mises en place très rapidement et d'autres en quelques mois, que nous devons enclencher dès maintenant pour améliorer notre système de santé de manière pérenne et nous préparer au mieux à ce qui pourrait advenir.
J'évoquais les autorisations exceptionnelles de soins critiques - il en a d'ailleurs été question lors de votre audition de ce matin. Nous les avons mises en place dans le cadre de l'état d'urgence, pour une durée limitée. Nous nous interrogeons aujourd'hui pour savoir s'il ne serait pas intéressant - à titre personnel, j'y souscris - de confier cette responsabilité aux ARS plutôt qu'à l'administration centrale pour leur permettre de décider directement de l'octroi de ces autorisations dans un délai plus court, ce qui leur permettrait de mieux s'adapter à la situation de leur région.
Durant cette crise, il était important pour nous d'avoir des échanges permanents avec les acteurs de terrain afin d'identifier le plus tôt possible les difficultés qui étaient de notre ressort et de modifier, dans les délais les plus courts possible, les textes qui constituaient des freins administratifs ou d'agir sur les leviers financiers à notre disposition pour faciliter l'action locale de ces acteurs. C'est cet état d'esprit qui nous a animés.
Il me semble essentiel de préserver cette écoute entre nous et cette capacité de réactivité, ce qui nous conduit à définir des cadres généraux et à laisser les ARS et les acteurs de terrain en déterminer les modalités concrètes d'application. Lorsque nous avons demandé aux ARS de reprendre les soins, y compris hors covid, le 7 ou le 8 mai dernier, nous avons souligné qu'elles devaient le faire en fonction de la situation propre à leur territoire. La situation n'était alors pas la même dans le Grand Est et en Occitanie, par exemple. Il appartenait au plan local de déterminer, en fonction de ses contraintes et de ses capacités, comment conduire la reprise d'activité et non à l'administration centrale de donner des guidelines ou de publier des textes très prédictifs.
Madame la directrice générale, vous avez dressé un tableau de ce que vous avez fait, et nous ne doutons pas que vous avez agi au mieux. Mais pourriez-vous nous parler de ce qui s'est moins bien passé sur le terrain : réorientations, pénurie de matériels, malades non-covid ayant connu des retards de soins... Les auditions que nous avons déjà conduites nous ont permis de constater un certain nombre de dysfonctionnements - ce qui est inévitable en période de crise - qu'il serait possible d'améliorer. Pourriez-vous nous en dire quelques mots ?
Je pourrais parler de la déclinaison entre décisions nationales et régionales. Lors de sa montée en puissance, nous ne savions pas si l'épidémie allait concerner essentiellement quelques régions ou se propager sur l'ensemble du territoire. Nous avons donc pris des décisions très fortes - je pense notamment à la déprogrammation - pour dégager des capacités en matériels, en renforts de personnels et en prise en charge de patients.
Nous devons recourir aujourd'hui à ces outils de façon beaucoup plus localisée et proportionnée. La déprogrammation reste intéressante, mais doit être maniée avec beaucoup de précaution en fonction de la situation dans une région ou dans un département et être beaucoup plus circonscrite au territoire concerné par l'épidémie. Nous avons développé un certain nombre d'indicateurs qui nous permettent de prendre des mesures plus limitées dans l'espace et dans le temps en fonction de la situation. C'est un enseignement très important.
Nous avons concentré les évacuations sanitaires sur les patients covid. Demain, nous pourrions être conduits à y recourir pour d'autres types de patients et mieux piloter les places disponibles. Nous avons développé de bons outils ; nous devons maintenant en faire un usage plus proportionné dans l'espace et dans le temps.
Comme l'a souligné le président, nous aimerions vous entendre sur ce qui, selon vous, n'a pas fonctionné de façon optimale et sur les voies d'amélioration en matière d'offre de soins.
La question du dépistage est aujourd'hui un des éléments importants de notre capacité à freiner la circulation du virus. Or cette offre est difficile à mettre en oeuvre : les laboratoires sont débordés et nous cherchons d'autres lieux pour réaliser ces tests. Les collectivités locales, les agences régionales de santé et d'autres acteurs prennent des initiatives pour porter une offre de dépistage en dehors des laboratoires. La détermination du public-cible pose également question. Cet exemple montre combien nous devons sans cesse adapter notre réponse. Selon vous, notre système de santé est-il conçu, adapté et pensé pour la gestion d'une épidémie ? Quelles voies d'amélioration pouvez-vous proposer ?
Vous avez évoqué la volonté de la DGOS d'améliorer et de faciliter l'offre de soins en Ehpad. Comment cette offre a-t-elle évolué - selon quels ratios - entre 2003 et début 2020 dans les Ehpad et les établissements médico-sociaux ? Vous aurez peut-être du mal à nous apporter une réponse précise aujourd'hui, mais j'aimerais avoir quelques éléments que vous pourrez ensuite compléter par écrit.
Enfin, nous nous interrogeons sur la faible mobilisation du secteur ambulatoire. En mars, les formes légères devaient être prises en charge par l'ambulatoire et les formes plus sévères par l'hôpital. Ce principe de répartition n'a pas vraiment fonctionné, même en amont. Les premières alertes avaient été actionnées courant janvier. Pourquoi le secteur ambulatoire n'a-t-il pas été mobilisé de façon satisfaisante ? Pourquoi n'a-t-il pas pleinement participé à l'offre de soins et à la lutte contre l'épidémie lors de cette première phase ?
L'organisation de notre système de soins est-elle adaptée pour gérer une épidémie ? Pendant trop longtemps, nous n'avons pas su tisser de liens suffisants entre le secteur médico-social et le secteur sanitaire. C'est une constatation. Nous avons demandé aux ARS de monter en quelques jours des dispositifs à même de faciliter, pour tous les Ehpad, cette prise en charge, quels que soient les acteurs sanitaires - hôpitaux de proximité, SSR, HAD, équipes mobiles de gériatrie... Nous devons impérativement consolider cette faiblesse de notre système de santé et pérenniser les dispositifs mis en place. Plus aucun Ehpad ne doit être privé d'appui sanitaire. Il s'agit d'un enseignement très fort de cette crise.
Début mars, nous recommandions à l'ambulatoire de prendre en charge les patients aux pathologies les plus modérées. Son rôle a sans doute été insuffisant et nous devons nous interroger sur la façon de renforcer la place de ces acteurs. Je nuance toutefois le propos : si le nombre de consultations a beaucoup baissé dans les cabinets de médecins généralistes, celui des téléconsultations a beaucoup augmenté. Nous avons aussi développé la prise en charge de l'appel téléphonique pour faciliter la prise en charge de certains patients. Ce levier est en train de trouver sa place. Jusqu'alors, nous n'avions pas de très bons chiffres en matière de téléconsultation au plan national. Les choses ont changé : la téléconsultation ne doit se substituer ni aux consultations ni aux visites à domicile, mais trouver sa place dans la prise en charge en ambulatoire que nous offrons à tous les patients.
Nous devons encore renforcer la place de la médecine de ville, surtout si nous devons être confrontés à un nouveau rebond de l'épidémie. Nos difficultés sur les équipements de protection individuelle (EPI) ont sans doute pesé. Avec le confinement, certains patients avaient aussi des réticences à aller physiquement chez leur médecin ou leur professionnel de santé. Nous devons travailler sur ces points pour nous assurer que la médecine générale ou, plus largement, la médecine de premier recours, joue pleinement son rôle dans la prise en charge des patients, y compris en cas de rebond épidémique.
La mise en place du service d'accès aux soins vise à mieux organiser sur le territoire la régulation médicale de la prise en charge des soins non programmés, qu'elle soit effectuée par le généraliste ou par l'établissement. C'est quelque chose qui nous manque et que nous développons. Au cours de cette période épidémique, des sas préfigurateurs ont été mis en place dans certaines régions. Ce n'est pas un hasard : nous avons besoin de ce mode d'organisation et nous devons renforcer l'organisation structurée en ville, comme vous l'avez largement souligné ce matin.
Très peu de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) se sont constituées en tant que telles, mais le nombre de projets a très fortement augmenté - 578 au total, me semble-t-il - ces derniers mois. C'est très important, car nous avons besoin que les acteurs de ville se structurent entre eux et dans leurs relations avec l'hôpital et le médico-social.
Nous avons aussi facilité l'intervention des professionnels libéraux dans les Ehpad pour améliorer la prise en charge des résidents.
Pour résumer ma pensée, une des pistes d'amélioration de notre système de santé consiste à renforcer l'organisation et la structuration en ville et les liens du secteur sanitaire avec les Ehpad. Ce sont les deux points qui me semblent particulièrement importants.
Je serai prudente en ce qui concerne le dépistage, piloté par la Direction générale de la santé. Hier, nous avons atteint le seuil du million de tests réalisés en sept jours. Nous y sommes aussi parvenus parce que nous avons fait évoluer, au cours des dernières semaines, les textes sur les modalités de prélèvement et sur la capacité des professionnels à les réaliser.
Merci de la qualité de vos réponses, madame la directrice générale.
Nous partageons de longue date votre constat sur les Ehpad - j'ai évoqué 2003 à dessein. Depuis la loi de 1975, le fossé qui s'est creusé entre le médico-social et le sanitaire est pointé dans une somme de rapports et de travaux. Il s'agit d'une interrogation collective : pourquoi n'avons-nous pas comblé ces lacunes qui nous ont probablement coûté très cher lors de la survenue de la crise ? Sur un aussi grand nombre d'années, il ne s'agit pas d'une interrogation politicienne.
Une question d'organisation demeure sur le dépistage. Nous avons nettement dépassé le million de tests effectués sur sept jours, mais le quantitatif n'est pas le seul aspect à prendre en compte. Passons sur les limites et défauts du test PCR - faute d'avoir encore les tests salivaires. Quand les délais sont trop longs entre la demande de prélèvement, le prélèvement en lui-même et les résultats, on finit par rater la période de contagiosité et il devient compliqué de rompre la chaîne de transmission. Il s'agit encore d'une difficulté d'organisation que nous avons du mal à anticiper - ce n'est pas faute d'avoir eu les bons concepts : tester, tracer, protéger. La stratégie est élaborée depuis longtemps et l'assurance maladie et les agences régionales de santé, par exemple, ont mis en place - certes, avec retard - différents dispositifs pour aller au contact des populations et mieux dépister.
Pourtant, les modalités ne sont pas satisfaisantes aujourd'hui. Est-ce par défaut de responsabilisation des acteurs locaux ou par manque d'habitude ? Quand on fait face à une crise pour la première fois, on n'a pas nécessairement les bons réflexes... J'aimerais que vous dépassiez le constat des lacunes pour nous dire comment les choses pourraient mieux fonctionner.
C'est le propre d'une commission d'enquête de se poser ces questions, madame la directrice générale.
Pendant l'épidémie, nous avons dû faire évoluer les pratiques et les textes. Il existait, par exemple, des restrictions sur l'intervention rapide de la HAD en Ehpad. Des questions de moyens se posaient également, notamment pour les équipes mobiles de gériatrie. C'est à nous de donner les moyens, y compris financiers, permettant de faire fonctionner ces structures et de les développer.
De même, il faut financer les astreintes et il faut que des professionnels viennent. Cela fait partie des choses que nous n'avions pas faites. Nous avons fait bouger les textes et mis les moyens pour faire en sorte - c'est notre objectif - qu'il n'y ait plus d'Ehpad sans accroche sanitaire. C'est ce que nous avons fait concrètement et c'est ce que nous devons continuer de faire pour nous assurer que cette organisation persiste sur l'ensemble du territoire.
Nous avons piloté tout cela avec les ARS en instaurant un reporting hebdomadaire pour vérifier que les choses étaient bien mises en place. Je pense que cette organisation a bien fonctionné et que nous devons la conserver.
Encore une fois, la question des tests relève plutôt de la compétence de la DGS. Je préfère rester prudente. Les laboratoires ont connu un afflux très important de patients venus se faire dépister, une prescription n'étant plus nécessaire. Il était donc essentiel pour nous de permettre une priorisation dans la prise en charge de ces patients.
En ce qui concerne les délais, s'il existe encore des disparités selon les lieux - à charge pour nous de renforcer nos capacités -, il me semble que le délai moyen s'établit aujourd'hui à 1,6 jour. Nous avons ainsi étendu les types de professionnels pouvant faire les prélèvements pour faciliter l'organisation locale mise en place par les ARS.
Nous sommes en train de le faire.
Vous avez évoqué l'agilité des ARS. Je pense qu'elle aura été différente selon les territoires, et ce d'autant plus qu'elles n'auront pas été sollicitées de la même façon.
Vous avez ensuite parlé des coopérations interministérielles, très efficaces dans certains cas. Toutefois, au cours de nos auditions, nous avons pu constater quelques dysfonctionnements entre les préfets et les ARS. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Comment éviter que ces incidents ne se reproduisent ?
Contrairement à mes deux excellents collègues rapporteurs, je ne suis pas médecin. Selon moi, la priorisation des patients ne va pas de soi. Comment déterminez-vous cette organisation ? J'ai cru comprendre que les patients covid avaient été priorisés durant la crise. Comment décider de faire perdre davantage de chances de survie aux malades non atteints du covid ? Il s'agit d'une interrogation éthique.
Toujours en ce qui concerne la priorisation, et à la lumière des auditions que nous avons conduites hier, était-il bien prévu que les patients des Ehpad ne soient plus admis à l'hôpital ? Il semblerait que cette priorisation soit caractérisée. Pouvez-vous nous donner des explications ?
Vous avez également évoqué la réorganisation de la capacité de réanimation au niveau national et au niveau régional. Est-ce quelque chose de ponctuel ou de pérenne ? Allez-vous faire monter en puissance la capacité nationale ? Allez-vous mettre en place une adaptabilité au niveau régional de façon à pouvoir répondre aux infections plus localisées ?
En ce qui concerne l'agilité, tout n'est pas absolument parfait au plan national comme au plan local. Comme vous l'avez souligné, chaque ARS a été confrontée à des réalités différentes.
J'ai écouté avec attention ce qu'elles nous ont dit. Ce qui ressort de positif n'exclut évidemment pas les difficultés qui ont pu apparaître. La région Île-de-France a eu de très bonnes coopérations, tout comme les Hauts-de-France. Des choses intéressantes ont été mises en place. Je pense notamment aux ARS qui ont développé des échanges avec les établissements publics et privés. Il s'agit d'une bonne pratique qu'il nous faut développer. Les échanges que nous avons nous permettent de progresser dans la façon de faire face à une épidémie de ce genre.
En ce qui concerne la priorisation, nous n'avons pas donné de consigne. Nous avons demandé de déprogrammer toutes les activités non urgentes pour pouvoir se concentrer sur les patients covid. Nous n'avons pas défini quelles étaient les activités urgentes ne relevant pas du covid : ce n'était pas au national de définir qui devait être pris en charge durant l'épidémie.
Au moment de la reprise d'activité, nous n'avons pas fixé de listes de pathologies ou d'actes. Ce n'est pas à nous de le faire, mais aux acteurs locaux en fonction de l'état de santé des patients, de la situation des établissements et du niveau de l'épidémie. Ce n'est pas à nous de dire quels sont les patients prioritaires. Nous n'avons pas donné de consigne de priorisation.
Nous n'avons pas non plus donné de consignes pour les résidents des Ehpad. Je crois que les sociétés savantes se sont exprimées sur ce point en juillet dernier. Il existe des recommandations de bonnes pratiques de ces sociétés sur les critères d'admission et de prise en charge des patients. Nous n'avons pas à donner de recommandations de ce type et nous ne l'avons pas fait. C'est très important : nous considérons que la prise en charge des patients est fonction de leur état de santé et non d'instructions venant d'une administration centrale. Les sociétés savantes de réanimation et d'urgentistes l'ont clairement dit en juillet dernier. Il me semble important qu'il n'y ait pas d'ambigüité sur ce point.
En ce qui concerne la réorganisation des capacités de réanimation, vous connaissez les chiffres : nos capacités de réanimation, de soins continus et de soins intensifs sont importantes, mais diffèrent d'une région à l'autre. Nous travaillons avec les réanimateurs pour déterminer le bon niveau de capacité en réanimation dont nous devons disposer au plan national et au plan régional. Ces deux questions sont également importantes : certaines régions n'ont pas eu les capacités suffisantes pour prendre en charge leurs patients. Je pense à de grandes régions comme Grand Est, Hauts-de-France ou Île-de-France, mais aussi à Bourgogne-Franche-Comté qui a organisé directement des transferts de patients avec Auvergne-Rhône-Alpes dont les capacités étaient plus importantes.
Nous réfléchissons à déterminer le bon nombre de places. Peut-être faudra-t-il en créer à tel endroit plutôt qu'à tel autre. Je ne préjuge pas de la fin de nos discussions. Ce qui est certain, c'est qu'elles doivent aboutir à des décisions pérennes. Pour autant, cela n'exclut pas d'étendre à moyen terme les capacités de prise en charge - les professionnels ont très bien su le faire durant la crise - en ayant recours aux unités de soins intensifs et de soins continus et de mettre en place ce que certains d'entre eux ont appelé des « réas éphémères » pour répondre à un afflux important de patients dans les services de soins critiques.
Vous dites ne pas avoir dressé de listes d'actes dans le cadre de la reprise des activités. Mais il semblerait que certaines ARS ont signifié à des établissements qu'ils ne seraient pas remboursés s'ils ne respectaient pas le critère d'urgence. S'agit-il de décisions locales ?
Il ne s'agit pas de décisions nationales. J'ai écouté votre audition ce matin...
Comme vous, je l'ai entendu ce matin, je ne peux donc rien confirmer. Je vais regarder cette question. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il ne s'agissait pas d'une consigne nationale. Nous avons laissé le soin à chaque ARS de décider de la mise en oeuvre de la reprise d'activités, compte tenu des contraintes différentes qui pouvaient peser sur elles en termes de nombre de patients, de capacité ou de médicaments disponibles. Ce dernier point a été très important à un certain moment de la gestion de l'épidémie.
Vous avez dressé le bilan de votre action. Ce matin, les fédérations ont salué l'assouplissement de certaines procédures par la DGOS. Toutefois, toutes nos auditions - acteurs du domicile, représentants des Ehpad, ordres professionnels... - montrent que tout n'a pas été aussi parfait que ce que vous avez laissé entendre. Mais peut-être vous ai-je mal comprise...
Vous avez évoqué la télémédecine en soulignant le retard que nous avions en ce domaine. Il y a eu des prolongations de prise en charge jusqu'au 31 décembre pour certains actes. Pouvez-vous nous préciser lesquels ? Si nous étions en retard, c'est aussi parce que nous étions en pleine négociation sur le remboursement des actes de télémédecine entre la CNAM et les professionnels de santé. Où en est-on et les choses vont-elles se pérenniser ? J'ai vu qu'il s'agissait d'un des objectifs de la feuille de route que le ministre Olivier Véran a confiée au nouveau directeur de la CNAM. Hier, les kinés évoquaient les difficultés qu'ils avaient rencontrées dans les télésoins avec des tarifs peu encourageants qui ne correspondaient pas aux besoins.
À quel moment la bascule s'est-elle opérée entre les consignes du départ, selon lesquelles il ne fallait surtout pas aller chez son médecin traitant mais appeler le 15 - consignes que nous avions nous-mêmes relayées au Sénat - et celles selon lesquelles on pouvait finalement se rendre chez son médecin ? Avez-vous une idée de la date précise de cette bascule et des raisons qui y ont conduit ? Début mars, au Sénat, j'avais alerté le ministre sur les risques d'engorgement du 15.
Quelles étaient les réflexions de la DGOS par rapport à la gestion de cette crise au mois de février, avant que n'arrive la vague du Grand Est puis l'accélération des procédures, avec la crainte que l'épidémie ne se développe partout ? Quelque chose me frappe : le Grand Est nous a dit que, tout début mars, on voyait le tsunami arriver. Or, dans le même temps, le 6 mars, le Président de la République incitait les Français à aller au restaurant, au cinéma, au théâtre... Était-on dans une démarche d'immunité collective qui n'aurait pas été dite ? Pourquoi pas, il ne s'agit pas d'une critique... Comment expliquer le décalage entre ce qui se passait dans le Grand Est et les conseils donnés à Paris ?
Il existait effectivement plusieurs freins au développement de la télémédecine, notamment la tarification. Le ministre a demandé au nouveau directeur général de la CNAM de reprendre les négociations sur cette question.
La prise en charge à 100 % par l'assurance maladie obligatoire a permis de faciliter les choses. Nous avons pris ce texte au tout début de la crise. C'était important, parce que tous les patients ne sont pas à l'aise avec la téléconsultation. La CNAM discute et négocie sur ce point. Notre responsabilité consiste maintenant à préserver cette prise en charge dans la palette des pratiques pour l'ensemble des professionnels, qu'ils soient médecins, kinés ou infirmiers.
Il y a eu plusieurs phases assez différentes. La période que vous évoquez correspond aux phases 2 et 3.
Durant la phase 2, l'épidémie était très concentrée sur quelques lieux. Par ailleurs, on savait très peu de choses de la maladie. Notre préoccupation collective était d'isoler, de contenir l'épidémie et d'éviter sa propagation. Dans cette phase, nous nous sommes beaucoup reposés sur le 15. L'activité du SAMU a alors très fortement progressé - nous vous transmettrons les chiffres, mais on constate un pic très important d'activité. J'avais alors des échanges quotidiens avec les urgentistes. Ils ont fait évoluer très fortement leur capacité à prendre en charge les appels avec des renforts de personnels et l'aide d'organismes de téléphonie pour s'équiper et s'adapter. Dans certains endroits, ça a été extrêmement impressionnant. Et cela a duré durant toute la phase 2, tout début mars.
La bascule en phase 3 a fait baisser cette pression. On savait alors que la propagation de l'épidémie serait plus importante. Je pense que le directeur général de la santé en parlerait mieux que moi, puisqu'il pilotait ces différentes phases. C'est à ce moment que la pression s'est beaucoup relâchée sur le 15. Je vous ferai parvenir la chronologie précise.
Notre préoccupation était alors de préparer l'ensemble du système de santé au développement de l'épidémie. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la déprogrammation a lieu le 12 mars. La chronologie est vraiment parlante : en phase 2, certains territoires comme la région Grand Est ou l'Oise sont clairement identifiés ; la bascule en phase 3 correspond à la propagation de l'épidémie et à la prise de mesures très fortes comme le confinement afin de stopper cette propagation et de limiter l'afflux de personnes en réanimation - comme vous le savez, le pic de prise en charge de patients en réanimation a été atteint le 7 avril. Entre début mars et le 7 avril, la montée du nombre de patients pris en charge a été constante et assez impressionnante.
Je n'ai pas eu l'impression que le message avait changé. On voyait encore à la télévision les spots incitant à appeler le 15...
Quand la situation est grave, le message est toujours d'appeler le 15. Si les personnes ont un doute sur leur état de santé ou si elles ont besoin d'aide, elles doivent appeler. Après, le message consistait également à inciter les personnes ayant une forme modérée de la maladie à appeler leur médecin généraliste. Durant toute la durée de l'épidémie, la prise en charge de ces patients via la téléconsultation a représenté une partie très importante de l'activité des médecins.
Je vous prie de m'excuser, mais je ne suis pas en mesure de le faire. Le directeur général de la santé serait bien plus à même de vous répondre.
Selon vous, madame la directrice générale, un des acquis de cette crise a été de permettre aux ARS de prendre des décisions dans des délais plus courts qu'habituellement. Vous avez notamment évoqué les autorisations pour les lits de réanimation. Quel est le délai habituel et quel fut-il durant la période de crise ?
Accorder plus d'autonomie aux ARS constituerait selon vous une piste pour l'avenir. Quelle est aujourd'hui l'autonomie des ARS par rapport à la direction générale de l'offre de soins ?
Vous avez évoqué la collaboration entre l'hôpital public, les structures privées et la médecine de ville. Aviez-vous une vision, une doctrine sur cette collaboration et quelles ont été les consignes données pour la mettre en oeuvre ? Comment l'envisagez-vous à l'avenir ?
Au début de de la crise, les laboratoires départementaux, par l'intermédiaire des conseils départementaux et de leurs présidents, ont demandé à pouvoir effectuer des tests. Je crois qu'il existe soixante-quinze laboratoires départementaux en France. Il aura fallu attendre trois semaines et demie pour obtenir une réponse positive. Ce délai ne me semble pas compatible avec une période de crise qui exige des réponses rapides.
Vous nous avez indiqué que, encore récemment, différents professionnels de santé ont été habilités à procéder aux tests. Nous sommes donc passés d'un délai de quelques semaines à un délai de plusieurs mois pour faciliter enfin la réalisation des tests, ce qui ne me paraît pas davantage compatible avec une période de crise. Ne peut-on envisager, en cas de crise éventuelle future, de prendre des décisions plus rapidement ?
Au tout début de la crise, la France disposait de 5 500 lits de réanimation. On nous a dit récemment que nous étions à peu près, du fait des commandes de respirateurs et de l'ouverture de nouvelles chambres, à 11 000 lits. Or une nouvelle notion assez surprenante est apparue, celle de « capacité de réanimation glissante ». Il s'agit de déterminer combien de personnes peuvent passer en réanimation sur un ou deux mois - puisque, par définition, ils n'y restent pas tous deux mois... La direction générale de la santé nous a donc fait savoir que la France était en capacité d'accueillir 17 000 personnes en réanimation en deux mois. Peut-on avoir un vrai chiffre, définitif et clair ? Quelles sont nos réelles capacités, non pas avec des respirateurs de complément, mais avec des respirateurs lourds et le personnel nécessaire ? Sommes-nous plus proches des 11 000 lits ou ne s'agissait-il que d'une capacité provisoire, liée à la crise ?
Ce matin, comme lors de nos auditions précédentes, on a souligné qu'il existait trop de structures - ARS, comité scientifique, direction générale de la santé, comité national de la santé publique et autres organismes en tout genre... On n'y comprend plus grand-chose et chacun défend son « pré carré » : c'est moi qui m'occupe des masques, c'est moi qui m'occupe de la répartition, c'est moi qui m'occupe de je-ne-sais-quoi... N'avez-vous pas le sentiment que cette crise aurait dû ou devrait permettre une simplification des structures de décision en matière de santé. En temps normal, cette concurrence ne pose peut-être pas de véritable problème, mais elle est tout à fait ravageuse en période d'urgence et de crise.
Je voudrais parler des invisibles, qui sont aussi inaudibles : les laboratoires de biologie médicale, ceux des établissements publics de santé et ceux des établissements extrahospitaliers.
Dans votre intervention liminaire, vous n'avez pas du tout parlé de la place des laboratoires dans l'offre de soins. Or ils jouent un rôle essentiel dans le diagnostic clinique et dans l'aide à la décision. Je ne comprends pas que le Gouvernement ait fait des annonces concernant le nombre de tests à réaliser avec une très grande méconnaissance - dans le droit fil des propos de Mme Jourda - de la situation exacte des différents laboratoires.
Tous n'étaient pas en capacité de prendre en charge les tests. Au début, ces derniers n'étaient pas assez performants ni fiables ou sensibles. À cela s'ajoutent des difficultés en matière d'équipement. Fin 2019, quasiment tous les laboratoires, à l'appel de tous les syndicats de biologistes, étaient en grève. Je ne sais pas si vous connaissez les raisons de cette colère, mais on s'est rend compte, peu de temps après, que les laboratoires étaient limités, faute de disposer des équipements nécessaires. Les surcoûts pour les doter sont considérables.
Le Gouvernement a également annoncé qu'il pourrait recourir aux laboratoires vétérinaires. Mais avant de pouvoir les mettre à disposition, il faut qualifier le matériel et habiliter le personnel. Je regrette qu'à aucun moment vous n'ayez montré une attention particulière pour les biologistes et pour les techniciens de laboratoire qui ont travaillé quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre pendant toute cette période pour répondre non seulement aux besoins liés au covid, mais aussi à tous les autres besoins de santé dans les milieux hospitaliers et dans les cliniques.
Il faut revenir sur les dysfonctionnements, mais aussi sur les omissions, volontaires ou non. Les laboratoires ont besoin d'une attention particulière. La grève de novembre 2019 témoigne de leurs difficultés. Ces personnels sont invisibles : ils sont dans des labos, ils ne font pas de bruit, ils n'étaient pas sur les ronds-points... Pourtant, ils connaissent de grosses difficultés. Regardez les files d'attente devant certains laboratoires : vous voulez tester, mais pour cela il faut des personnes formées, des personnes qualifiées, des personnes compétentes. Il en manque certainement, mais il faut commencer par valoriser ceux qui sont déjà là et prendre en compte non seulement les différentes recommandations pour l'accréditation des laboratoires, mais aussi les besoins qu'ont exprimés quasiment tous les syndicats de biologistes lorsqu'ils ont interpellé le Gouvernement avant même le début de cette crise.
Je voudrais déjà que vous, en tant que directrice générale de l'offre de soins, preniez en compte les laboratoires et les personnes qui y travaillent. M. Jomier a parlé des tests, tout comme Mme Jourda, mais les tests ne se font pas tout seuls.
Quand j'évoquais l'hypothèse de transférer des autorisations aux ARS, je pensais aux autorisations d'activité exceptionnelle, lesquelles ont notamment servi pour la réanimation. La procédure diffère du régime des autorisations habituelles qui répondent à des textes que nous souhaitons d'ailleurs simplifier. Quel que soit le secteur d'activité, nous pensons que nous devons progresser, notamment sur la question du renouvellement des autorisations et simplifier les procédures existantes. Cette question fait consensus avec les fédérations hospitalières et fait partie des discussions que nous avons eues dans le cadre du Ségur sur le volet simplification.
Cette mécanique est un peu particulière, puisqu'il s'agit de répondre à une situation exceptionnelle. Il me semble que l'ARS est alors mieux à même de mesurer les raisons pour lesquelles elle a besoin de cette autorisation, et dans quelles conditions. Ce transfert n'exclut pas une évolution du process d'autorisation qui est assez long et dont la durée peut varier entre l'autorisation initiale et son renouvellement. Les process peuvent différer selon le contenu des dossiers et selon les demandes liées à la qualité et à la sécurité des soins. Ils répondent à une procédure qui découle des projets régionaux de santé (PRS) élaborées par les ARS.
Il est nécessaire de simplifier le droit commun, au moins pour le renouvellement. C'est un point très important. Par ailleurs, afin de répondre à des besoins qui ont montré leur utilité durant la gestion de l'épidémie, il me semble nécessaire de transférer aux ARS la capacité de délivrer ces autorisations dont elles sont les plus à même de déterminer le caractère primordial ou non.
Il s'agit de cycles : les autorisations sont corrélées à des renouvellements de programme...
Il faut un plan régional de santé...
Il faut donc des années, par rapport aux quelques semaines que vous évoquiez pour les autorisations exceptionnelles.
En cas d'urgence, les autorisations exceptionnelles peuvent effectivement être prises en quelques jours. Elles permettent d'être très réactifs en cas de crise. Elles ne rentrent pas dans l'organisation pérenne des soins sur un territoire, mais permettent de répondre à une demande urgente ponctuelle.
Nous avons toujours eu des relations avec les acteurs privés et publics. Durant la crise, nous avons eu des conférences avec toutes les fédérations hospitalières en même temps, tous les deux jours. Il était très important qu'elles disposent toutes du même niveau d'information. Dans les recommandations que nous diffusions, nous ne faisions pas de différence et demandions à ce que l'organisation soit mise en place avec les secteurs public et privé. Dans la recommandation de début mai que j'évoquais sur la reprise d'activité, nous demandions explicitement que l'ensemble des acteurs du territoire soit pris en compte.
Quel type de recommandation pourrions-nous donner ? Je pense à la mise en place d'une gouvernance généralisée, à l'instar de ce que font déjà beaucoup d'ARS, notamment celles d'Île-de-France ou des Hauts-de-France qui avaient mis en place des échanges réguliers, voire quotidiens, avec les établissements publics et privés. Il nous semble qu'il s'agit d'une bonne pratique que nous pourrions recommander. Mais la plupart des ARS en ont déjà l'idée et je sais que l'une d'entre elles l'a fait encore très récemment.
Tout à fait. Tous les directeurs généraux des ARS auxquels nous en avons parlé nous ont dit de le faire. Je pense que cette recommandation ne présente que des avantages. Vous avez raison, nous devons travailler avec l'ensemble des acteurs, y compris la médecine de ville. Au plan national, nous avons eu des liens réguliers avec la médecine de ville, qu'il s'agisse des médecins, des infirmiers ou des kinés. C'est extrêmement important.
En ce qui concerne les tests, je ne verrais également que des avantages à améliorer les délais. Nous essayons de faire un point très régulier avec les laboratoires. Pardon, madame Jasmin, si j'ai pu donner le sentiment de négliger le rôle des laboratoires. Ce n'était pas mon intention : les laboratoires en ville et les laboratoires hospitaliers jouent un rôle fondamental en temps normal et a fortiori en ce moment. Je tiens à le dire.
Cette stratégie est pilotée par un autre directeur et je me dois de rester prudente s'agissant d'une compétence qui lui échoit tout particulièrement. Mais le rôle des laboratoires est bien évidemment fondamental. Nous avons fait évoluer un certain nombre de textes pour faciliter les capacités à prélever. Nous savons qu'il faut améliorer la capacité des laboratoires en général : la cellule test pilotée par le directeur général de la santé se réunit chaque semaine avec les représentants des syndicats de biologistes pour faire un point sur les difficultés qu'ils peuvent rencontrer, y compris celles que vous évoquiez.
Une question vous était posée sur le délai des agréments, pour les laboratoires vétérinaires ou pour les autres. Pour les kinés, ce n'est toujours pas fait. Pourquoi ne prenez-vous pas de décision pour former très rapidement ces personnels à effectuer le prélèvement nasal ?
Nous avons pris plusieurs arrêtés visant à étendre le nombre de professionnels, après une formation assez courte, ayant la capacité de réaliser ces prélèvements.
Mais les délais étaient très longs : trois semaines pour les labos vétérinaires. Il nous semble que les choses pourraient aller plus vite.
Toutes les pistes sont bonnes à prendre. Nous pouvons nous pencher sur les délais d'agrément de la même manière que nous l'avons fait sur les autorisations.
Vous avez parlé d'un million de tests. Mais ce qui nous intéresse, ce sont les tests réalisés. Il en allait de même pour les masques : c'est très bien d'en commander un milliard, mais seuls ceux dont les résultats sont arrivés nous intéressent. Ce qui importe, c'est la capacité des acteurs de réaliser un million de tests et non de commander un million de tests. Il faut prioriser les demandes, tenir compte des délais durant lesquels les gens ne sont pas isolés... On a l'impression de perdre du temps. Quelle optimisation recherchez-vous pour améliorer le dispositif ?
Monsieur le président, hier, nous avons bien atteint le seuil du million de tests réalisés. Nous avons beaucoup augmenté nos capacités. Pardonnez-moi si je n'ai pas été suffisamment claire.
Quel est le délai de résultat ? On a beau augmenter le nombre de préleveurs, encore faut-il analyser le plus rapidement possible pour mieux répondre aux exigences en termes de voyage, de travail et surtout pour éviter de contaminer son entourage.
Actuellement, le délai moyen est de 1,6 jour.
Ce n'est clairement pas le chiffre qui nous est remonté. Peut-être reste-t-il encore à faire... Pardonnez notre impertinence, mais le but d'une commission d'enquête est aussi de faire avancer les choses
S'agissant des chiffres de réanimation, vous avez eu raison de souligner qu'il existait plusieurs notions différentes. La première concerne la capacité en réanimation : notre capacité initiale stricto sensu - je parle exclusivement des lits pour adultes - était d'un peu plus de 5 000 lits. Nous pouvions ajouter des capacités en soins continus d'un peu plus de 7 000 lits et, en soins intensifs, d'environ 5 800 lits. Il s'agit de nos capacités en matière de soins critiques.
Nous avons eu pour objectif de réarmer ou d'armer en respirateurs et en professionnels et de transformer des lits de soins continus ou de soins intensifs en capacités de réanimation, ce que certains professionnels appellent les « réas éphémères ». C'est de cette façon que nous avons pu étendre nos capacités de prise en charge de patients en réanimation.
La question de déterminer le bon niveau capacitaire en temps normal demeure. Mais en tout état de cause, nous pouvons réarmer des lits pour étendre nos capacités de réanimation très au-delà des 5 000 lits initiaux. Au pic de la crise - de mémoire, le 12 avril -, nous avons pris en charge 7 000 patients en réanimation.
Cette question est différente de celle du nombre de patients que nous pouvons prendre en charge en même temps. Nous regardons ce sujet de très près, puisque nos capacités de prise en charge dépendent aussi de la durée moyenne de séjour des patients. Comme vous l'avez vu, cette durée pouvait être très variable et parfois assez longue, ce qui a des conséquences sur la prise en charge non seulement en réanimation, mais aussi en soins de suite et de réadaptation. On en a peu parlé, mais c'était très important dans la filière de prise en charge : après avoir passé des temps parfois longs en réanimation, certains patients avaient besoin d'une réadaptation très importante. C'est un segment de l'offre de soins qui a joué un rôle très important et sur lequel nous sommes très vigilants.
Tout à fait, monsieur le président.
Comment expliquer la différence avec l'Allemagne en termes de nombre de lits par habitant ?
Nous en avons parlé avec les CNP de réanimation en juillet dernier : nous nous interrogeons sur la comparabilité. De mémoire, le chiffre de 28 000 lits est avancé pour l'Allemagne. Devons-nous les comparer aux 5 000 lits de réanimation ou faut-il additionner les lits de soins continus ? Si on additionne, on est à peu près à 18 000 lits. Il faut prendre les chiffres avec précaution.
La question de fond qui nous est posée est de déterminer le niveau de capacité de prise en charge en soins critiques que nous devons assurer à nos concitoyens au plan national et en termes de répartition régionale. C'est sur cette question que nous travaillons et c'est celle qui importe.
Devons-nous simplifier notre organisation ? Certaines questions se posent. Nous avons modifié nos organisations et notre fonctionnement durant toute la période de la gestion de crise : la Direction générale de la santé pilotait l'ensemble des dispositions sanitaires de la crise et réunissait, sous son égide, l'action de la Direction générale de l'offre de soins, de la Direction générale de la cohésion sociale, de la Direction générale de la sécurité sociale... Nous avions tous les jours des points quotidiens avec la Direction générale de la santé et l'ensemble des directions pour veiller à ce qu'il y ait une bonne articulation. Nous avons dû nous réorganiser pour monter des cellules spécifiques, que ce soit en matière de logistique - pour les équipements de protection individuelle - ou bien en matière de tests, constituées d'agents de différentes directions pour ces missions très spécifiques.
Devons-nous pour autant nous réorganiser de manière plus fondamentale ? La question peut se poser. Toujours est-il que les réorganisations que nous avons dû mener très rapidement pour être en capacité de répondre aux difficultés de cette crise ont montré qu'il nous fallait être capable de faire évoluer nos organisations et de fusionner des équipes traitant de sujets proches, parfois de manière séquencée dans le temps.
Je voudrais revenir sur quelque chose qui ne s'est pas particulièrement bien passé lors de cette crise, à savoir le nombre de personnes âgées décédées. Ces dernières constituent quasiment la moitié des décès, principalement dans des établissements pourtant mis à l'isolement.
Faute d'équipements de protection, les salariés qui entraient et sortaient de ces établissements ont été une source de contamination que nous n'avons pas su identifier, alors que c'était évident. Cet isolement, même bien respecté, n'a donc pas protégé. Pensez-vous que la situation aurait été pire si on ne l'avait pas fait ? Mon département du Lot a été très peu touché par le virus. Pourtant, la moitié des résidents des quatre structures de ma commune et des communes voisines a été testée positive - avec quelques décès, malheureusement. Quel enseignement tirer de tout cela ? Nous avons déjà connu la canicule : n'est-il pas possible de faire passer une consigne claire au niveau national, notamment sur les salariés qui entrent et qui sortent de ces établissements ? Isoler, c'est bien ; mais à quoi cela sert-il si on ne teste pas et si on ne dispose pas d'équipements de protection ?
Pouvez-vous quantifier et qualifier les personnels mobilisés, tout particulièrement ceux venus en renfort dans le cadre de cette crise sanitaire sans précédent, si possible par catégorie socio-professionnelle et par territoire ? Bien évidemment, il faudrait corréler ces indicateurs au nombre de patients traités pour le covid et aux équipements de protection individuelle (EPI) commandés, et surtout utilisés.
Pouvez-vous également quantifier le nombre de personnels contaminés et décédés, là aussi par catégorie socio-professionnelle et par territoire, qu'il s'agisse de titulaires ou de renforts ?
Qu'est-il prévu en matière de reconnaissance de maladie professionnelle pour ces personnels touchés ? Que vont advenir les personnels venus en renfort et qui n'avaient pas un statut de titulaire ou de contractuel ?
Avez-vous organisé un retour d'expérience sur chaque département pour pouvoir fluidifier le parcours des liens complémentaires des uns par rapport aux autres et se préparer à toute nouvelle échéance éventuelle ?
En ce qui concerne les Ehpad, je serai encore une fois prudente, dans la mesure où la Direction générale de la cohésion sociale, que vous avez auditionnée hier, est en charge de ces questions.
Il est important de mettre en place une stratégie claire de dépistage dans les établissements sociaux et médico-sociaux et de bien recenser les personnels qui reviennent de vacances, par exemple, et qu'il est important de dépister pour protéger les résidents et les protéger eux-mêmes. Cette stratégie est aussi importante au sein des établissements de santé, si vous me permettez d'élargir votre question : nous devons veiller à ce que les professionnels puissent bénéficier de dépistages. Pour en avoir discuté, je sais que ces stratégies se mettent en place dans les établissements. Il est très important de l'adapter en fonction de l'état de santé des professionnels et des services dans lesquels ils travaillent. Ces modalités de mise en oeuvre sont extrêmement importantes.
Je pourrai vous transmettre les chiffres de Santé publique France sur les personnels contaminés. Entre le 1er mars et le 21 juin, ils montrent qu'un peu plus de 30 000 professionnels avaient été contaminés dont 84 % de professionnels de santé, 10 % de non-soignants, 29 % d'infirmiers... Cette étude permet de faire le point à date à sur le nombre de personnes contaminées et de personnes décédées, par région.
La Direction de la sécurité sociale (DSS) travaille sur la reconnaissance pour maladie professionnelle. Les discussions se poursuivent. Nous pourrons vous transmettre les documents que la DSS nous transmettra sur l'état d'avancement de ces travaux très importants pour les professionnels, quel que soit leur statut.
Je n'ai pas les chiffres en tête sur les renforts par catégorie ou par territoire. Je vous les transmettrai également. Cette crise nous a permis de voir que nous devions aussi faire évoluer la réserve sanitaire et la façon dont nous organisions les renforts. Il s'agit d'un point de recommandation important : on voit bien que la réserve sanitaire avait initialement été mise en place pour des crises limitées dans le temps et dans l'espace. Or nous avons fait face à une crise qui a exigé que nous organisions de manière territorialisée des renforts de professionnels d'établissements publics et privés vers d'autres établissements sur un même territoire - organisés par une ARS - ou vers d'autres territoires. Ce fut un mouvement extrêmement important et très massif. Nous vous transmettrons les chiffres ; ils sont particulièrement éloquents. Nous avons mis en place une plateforme nationale qui permet de faciliter ces renforts, qu'il s'agisse du secteur sanitaire ou du secteur médico-social.
La DGOS a organisé des retours d'expérience au plan national avec ses interlocuteurs - sociétés savantes, représentants syndicaux ou de professionnels... Nous n'en avons pas organisé par département. Je pense que les ARS doivent se pencher sur ces questions. Vous avez tous souligné combien il est important d'avoir un retour rapide pour capitaliser sur ce que nous avons pu faire d'intéressant et sur ce que nous devons faire évoluer. C'est fondamental, car les chiffres actuels de propagation de l'épidémie nous conduisent à mettre en place l'ensemble des évolutions indispensables pour lui faire face.
Comptez-vous augmenter les capacités de traçage, au regard du nombre de clusters en augmentation exponentielle ? N'avez-vous pas peur d'être saturés ?
C'est effectivement une charge très lourde qui pèse sur les ARS. Cela fait partie des sujets sur lesquels nous travaillons. Le nombre de cas contacts a beaucoup augmenté à partir de ces clusters, notamment pour les jeunes qui ont une vie sociale très importante. Nous regardons comment aider les ARS, les CPAM et la CNAM pour faire face à cet afflux.
Le débordement risque effectivement de venir de ce côté et non du système hospitalier.
Je voudrais revenir sur la question du délai nécessaire pour se faire tester aujourd'hui en France. Vous avez évoqué le chiffre moyen de 1,6 jour sur l'ensemble du territoire national. Avez-vous des chiffres affinés par département ?
J'ai passé quelques jours à Ajaccio, cet été. Je devais récupérer mon fils, qui était dans une autre partie de la Corse. Or il a été en contact avec quelqu'un ayant contracté le coronavirus. Le temps que je trouve un laboratoire pouvant le tester, trois jours se sont écoulés. C'était avant le week-end et deux jours se sont encore écoulés avant d'obtenir les résultats. Nous avons pu l'isoler durant ces cinq jours et le garder à la maison. Mais ses autres amis, loin de leurs parents, de leur foyer, sont tous repartis en avion pour se faire tester à Paris. L'histoire s'est bien terminée, puisqu'ils se sont tous avérés négatifs. Ce problème de délai est tout de même très important. Est-ce par manque de personnels dans les laboratoires, comme le soulignait Victoire Jasmin - et l'on peut comprendre qu'ils soient éreintés ? Est-ce parce que des personnes particulièrement inquiètes continuent de se faire tester de manière régulière, même sans aucun symptôme, ce qui augmente les délais ? Pouvez-vous nous donner plus de précisions ? Le délai nous semble encore bien trop important, surtout pour les cas contacts.
J'ai bien indiqué que le délai de 1,6 jour était une moyenne qui pouvait recouvrir des situations différenciées. Je vais regarder quels chiffres nous pourrions vous transmettre pour vous donner les précisions demandées. Nous avons d'abord renforcé la capacité à prélever : depuis le mois de juillet, nous avons modifié à plusieurs reprises l'arrêté dressant la liste des professionnels habilités à réaliser ces prélèvements, sous réserve qu'ils aient suivi une formation. Ce levier nous a été demandé par les ARS pour accroître leur capacité de prélèvement.
Dans cet afflux très important, nous priorisons les personnes symptomatiques et les cas contacts.
Nous sommes en train d'analyser les motifs en cours pour les faire évoluer. Nous en discutons en permanence avec les ARS et avec les laboratoires de biologie que nous rencontrons une fois par semaine. Nous avons agi sur plusieurs leviers et nous regardons encore ce que nous pouvons améliorer. D'ores et déjà, nous pouvons nous réjouir d'avoir atteint, hier, le million de tests réalisés.
Même si elle est crédibilisée, on se dit par moments qu'il serait bon de faire entendre davantage la parole publique. À la fin du mois d'août, sur toutes les chaînes d'information, des épidémiologistes de talent et des virologues estimés ont appelé, dans leurs débats, tous les jeunes qui rentraient de vacances à se faire tester. Tous ! Résultat des courses, on a provoqué une sorte de panique : tout le monde a voulu faire tester ses enfants, même s'ils étaient en parfaite santé. Pourquoi ne peut-on entendre une parole publique expliquer dans quels cas précis et dans quel délai il est nécessaire de se faire tester ? Les gens ne sont pas absurdes, mais entre les conseils des uns et des autres sur les plateaux de télévision, tous plus savants les uns que les autres, c'est du grand n'importe quoi ! Comme si les jeunes partis en vacances étaient, par définition, tous positifs.
Si nous en avions les moyens, ce serait l'idéal.
Merci, madame la directrice générale, d'avoir répondu à nos questions.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 15 h 40.
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