Notre ordre du jour prévoit un échange de vues sur la définition du programme de travail de la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) pour les prochains mois.
Au préalable, je vous rappelle qu'en 2022, ont été publiés sous le timbre de la Mecss le « traditionnel » rapport sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale, conduit par notre rapporteure générale, Élisabeth Doineau, et un rapport de Cathy Apourceau-Poly et moi-même sur l'unification du recouvrement social, mesure qui a beaucoup fait parler lors de l'examen du projet de loi de finances de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, mais qui n'a finalement pas été retenue, et dont il faudra rediscuter.
En outre, il est également important de regarder les suites données à nos travaux. La loi organique sur les LFSS du 14 mars 2022 a finalement intégré d'assez nombreuses dispositions tirées de la proposition de loi organique de Jean-Marie Vanlerenberghe co-signée par Catherine Deroche, Alain Milon et les rapporteurs de branche, notamment la création des lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss), mais aussi l'insertion de plusieurs « clauses de retour au Parlement », qui devraient, à tout le moins, imposer au Gouvernement de consulter les commissions des affaires sociales des assemblées sous diverses hypothèses, en cas notamment de dépassement du plafond de découvert de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'Acoss, ou de remise en cause de l'équilibre du PLF voté par le Parlement.
S'agissant du programme pour 2023, quelques travaux sont en cours. Tout d'abord, celui de notre rapporteure générale, Élisabeth Doineau, et d'Annie Le Houerou, relatif aux dotations des régimes de sécurité sociale à divers fonds et organismes. De façon opportune, le rapport de la Cour des comptes sur l'agence nationale Santé publique France sera prêt demain. Je crois, chères collègues, que la mise en place du nouveau cadre organique qui prévoit désormais qu'une annexe indique clairement le montant des dotations prévues en N+1, a retardé vos travaux. Néanmoins, au vu des oppositions qui se sont encore manifestées lors de l'examen du PLF 2023 entre le Gouvernement et le Sénat sur ce sujet, je pense qu'il est important d'y voir clair et que vous puissiez mener ce contrôle à son terme, si vous en êtes d'accord.
Les travaux conduits par Philippe Mouiller portent sur l'évaluation des besoins financiers de la nouvelle branche « Autonomie » en matière de handicap. Ils ont été reportés, il conviendrait de les reprendre ; nous lui demanderons, avec votre accord, s'il souhaite poursuivre l'année prochaine. Cathy Apourceau-Poly pourrait travailler sur ce sujet avec lui, le cas échéant.
Enfin, le travail de Jean-Marie Vanlerenberghe concerne la mise en place d'outils de mesures de l'impact financier de la fraude dans les organismes de sécurité sociale. Je crois que vous avez toujours envisagé ce sujet comme un « droit de suite » de votre rapport de 2020 plutôt que comme le sujet d'un nouveau rapport. Nos auditions plénières, notamment celle du directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), qui n'avançait pas très vite sur cette question, pourraient permettre vous permettre de continuer de « battre le fer » en 2023.
La Cnam est très en retard en effet, nous l'avons constaté lors de nos deux auditions. Nous devons continuer à mettre la pression sur ce sujet.
Si vous en êtes d'accord, je souhaitais également vous proposer deux nouveaux sujets : l'un dont m'a parlé le rapporteur de la branche famille, Olivier Henno, sur la prestation partagée de l'éducation de l'enfant (PreParE), dont il pourrait être le rapporteur, en binôme avec un membre de la Mecss issu de l'opposition, par exemple Annie Le Houerou, qui a fait part de son intérêt ; l'autre sujet, que nous avons déjà abordé, serait une étude des conditions préalables à la mise en place de la solidarité à la source et ses implications. Il s'agirait un peu d'une prolongation de notre rapport sur les recouvrements des cotisations sociales par l'Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf). Je pourrais mener ces travaux en binôme avec un membre issu de l'opposition. Le groupe écologiste, solidarités et territoires n'ayant pas encore fait de rapport pour le compte de la Mecss, cette personne pourrait être Raymonde Poncet Monge, si elle le souhaitait.
J'attends vos réactions et vos propositions.
Alain Milon a évoqué la fiscalité des médicaments, sujet qui sera abordé, avec la problématique de la clause de sauvegarde, dans le cadre de la première loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss).
Je trouve très intéressant de travailler sur la PreParE. Les parents doivent se partager la durée du congé parental puisqu'un parent ne peut prendre au maximum que deux ans. C'est donc au second de prendre les douze mois restants pour atteindre les trois ans de l'enfant. Je ne pouvais qu'être favorable à cette mesure : il s'agit de pousser le père, car il s'agit souvent du père, à prendre sa part dans l'éducation des enfants. Or une mesure aussi vertueuse idéologiquement se traduit par 1 milliard d'économies pour la caisse d'allocations familiales (CAF), car la prestation est très basse. Comment rendre cette prestation plus juste au sein de la famille et au regard de l'égalité entre les hommes et les femmes sans que cela ne soit contreproductif ?
Par ailleurs, je suis d'accord pour participer à une réflexion sur la solidarité à la source. On nous a menés en bateau avec le revenu d'activité ; un rapport a été réalisé qui n'est pas public. Aujourd'hui il est question de la solidarité à la source. On sait aussi l'importance des non-recours aux prestations sociales. Il me parait donc souhaitable que, sans attendre davantage, nous soyons producteurs de l'information.
Il faut s'assurer de la fiabilisation des données, en effet. C'est ce que nous avions vu dans notre travail sur le recouvrement : ce sont souvent les recouvrements des indus qui mettent les gens en difficulté. Dans un cadre idéal, on pourrait éviter les versements indus et la fraude. Mais le système n'est pas mûr. Nombre de problèmes restent à résoudre. En dépit de la mise en place de la déclaration sociale nominative (DSN), l'Urssaf peine à extrapoler les données. Il faudrait aussi tenir compte des données du DRM, le dispositif de ressources mensuelles, car il est possible de cumuler des revenus d'activité et des revenus de solidarité. Si l'on veut pouvoir ajuster chaque mois le niveau des prestations, il est indispensable de disposer de données nominatives d'une grande fiabilité. C'est faisable à condition que le système informatique soit solide, mais c'est loin d'être le cas. Il faudra interroger aussi la Commission nationale informatique et liberté (Cnil) sur le partage des données.
Ce groupe relève de la commission des affaires sociales. Nous en saurons plus la semaine prochaine. J'avais co-rédigé un rapport intitulé Crises sanitaires et outils numériques : répondre avec efficacité pour retrouver nos libertés, avec la proposition de constituer un Crisis Data Hub, une plateforme sécurisée spécifique susceptible d'être activée en temps de crise. Il faut poursuivre ce travail et voir si le Gouvernement a tenu ses engagements, notamment sur l'hébergement des données.
Ou européenne. Mais il travaille toujours avec Microsoft. Ce qui veut dire que nos données sont encore partagées hors de l'Union européenne.
Des engagements ont été pris sans être tenus. J'ai vu le ministre délégué chargé du numérique pour l'alerter sur ce sujet qui relève un peu de sa compétence. Le problème est que l'entreprise envisagée n'aurait pas la taille nécessaire.
Si un jour un accident nucléaire avait lieu, et que nous n'étions pas capables de prévenir la population... Ce serait un drame. Nous ne sommes pas à l'abri d'un accident de données. Sans volonté politique, nous n'avancerons pas.
C'est une question de santé, de prévention et aussi de souveraineté. Les États-Unis prennent des décisions radicales dans ce domaine ; pas une de leurs données ne quitte leur pays, d'où leurs dispositions vis-à-vis de Huawei. Il s'agit moins de protectionnisme que de souveraineté.
En 2023, pour la première fois, nous aurons à voter un projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale de l'exercice de l'année précédente. C'est une bonne chose.
D'influence, non, mais nous verrons si les objectifs fixés ont été tenus. Cela peut se révéler très intéressant si on nous donne tous les éléments. Par exemple, la clause de sauvegarde est d'une complexité inouïe. Le mode de calcul est opaque : il est facile de mélanger des choux et des carottes pour faire dire aux chiffres ce que l'on veut ! Nous touchons à la limite de la sincérité. En regardant dans le détail, j'ai été très surpris. Nous allons devoir muscler un peu notre discours, car nous ne disposons pas de tous les éléments.
Je vous propose d'acter le programme de travail pour 2023.
Il en est ainsi décidé.
La réunion est close à 16 h 40.