La réunion

Source

La réunion est ouverte à 10 heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Nous nous sommes rendus à Bruxelles, avec François Marc, les 16 et 17 février derniers afin de participer à deux conférences interparlementaires.

La conférence sur le semestre européen organisée par le Parlement européen s'est tenue le premier jour. Celle-ci était censée disparaître avec la mise en place de la conférence prévue par le TSCG, mais le Parlement européen a préféré la conserver car il en maîtrise l'ordre du jour et l'organisation.

Le deuxième jour, nous avons assisté à la sixième conférence interparlementaire sur la stabilité, la coordination économique et la gouvernance de l'Union européenne, aussi appelée « conférence de l'article 13 ». Elle était co-présidée par le Parlement européen et le Parlement néerlandais, dont le Gouvernement assure actuellement la présidente tournante de l'Union européenne. Il s'agissait de la première réunion régie par le nouveau règlement intérieur, adopté en novembre 2015 après deux années de discussion.

Les travaux ont débuté dans un climat de tension palpable. Nous étions en effet à la veille du Conseil européen des 18 et 19 février, au cours duquel devait être examinée la question du « Brexit ». Le président du Parlement européen, Martin Schultz, a fait le récit d'un entretien bilatéral avec le Premier ministre britannique, David Cameron, en soulignant à la fois son attachement à la formule du traité d'une « union sans cesse plus étroite entre les peuples de l'Europe » et son souhait que le Royaume-Uni demeure membre de l'Union européenne.

La crise des réfugiés a également été évoquée dès le début de la conférence. De nombreux parlementaires nationaux grecs, italiens mais aussi suédois et allemands ont interpellé les représentants de la Commission européenne présents afin de souligner l'urgence à laquelle leur État fait face et la nécessité d'apporter une véritable réponse européenne.

Les débats thématiques sur les sujets économiques et financiers se sont ensuite poursuivis dans une ambiance plus apaisée. Ces deux jours ont également été l'occasion d'échanger, en marge des réunions, avec certains eurodéputés, en particulier notre ancien collègue et président de la commission des finances, Jean Arthuis, aujourd'hui président de la commission des budgets, Pervenche Berès et Alain Lamassoure.

Lors d'une table ronde organisée par la commission des affaires économiques du Parlement européen sur l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices - le projet BEPS (Base Erosion and Profit Shifting) - je suis intervenue pour rappeler la vigilance nécessaire dans la transposition de cet accord, en particulier face aux inquiétudes de certaines grandes entreprises françaises, et j'ai indiqué que notre commission des finances avait récemment organisé une table ronde sur la diplomatie fiscale. Nous y reviendrons la semaine prochaine en entendant Pascal Saint-Amans, responsable du projet BEPS à l'OCDE, mercredi prochain.

Les deux sessions matinales de la conférence de l'article 13, qui portaient sur la gouvernance économique et la coordination budgétaire au sein de l'Union européenne, étaient également d'un grand intérêt. À la suite du rapport dit « des cinq présidents » des institutions européennes, publié en juin dernier, et de ses propositions de réformes et de nouvelles structures visant à compléter l'Union économique et monétaire, les membres du Parlement européen, Pervenche Berès et Reimer Böge, ont, quant à eux, présenté un projet de rapport sur la création d'une capacité budgétaire de la zone euro.

Pierre Moscovici a rappelé que les commissaires européens compétents, et lui en particulier, étaient disponibles pour venir présenter au printemps les recommandations par pays devant les parlements nationaux ; nous nous saisirons de cette proposition.

La conférence de l'article 13 n'a pas adopté de conclusions. Cette faculté est à la discrétion de la présidence. Je crois qu'il serait souhaitable, à l'avenir, d'adopter systématiquement des conclusions pour conserver une trace des débats. Toutefois, sur le fond, l'enjeu essentiel est de trouver au sein de cette conférence une forme de représentation spécifique pour les parlements des États membres de la zone euro.

La prochaine conférence de l'article 13 devrait se dérouler au mois d'octobre, sous la présidence slovaque.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Tout d'abord, j'ai participé à une réunion organisée par la commission des budgets du Parlement européen où il a été question de la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020. Le Parlement européen milite pour une telle révision afin d'affecter davantage de moyens au contrôle des frontières extérieures et à l'accueil des réfugiés.

Un membre de la chambre des représentants des Pays-Bas est intervenu pour rendre compte de la conférence qui s'est tenue sur ce sujet en janvier à Amsterdam. Il a relayé la demande d'une réorientation du budget européen, des « vieilles » politiques comme la politique agricole commune (PAC) vers des objectifs plus ciblés et moins nombreux, à savoir l'innovation, la sécurité, le renforcement des frontières extérieures et l'énergie. C'est peu dire qu'une telle proposition ne fait pas l'unanimité...

Pour ma part, je suis intervenu en faveur d'une plus grande flexibilité du cadre financier pour réorienter certains fonds vers les urgences du moment, par exemple l'accueil des réfugiés mais aussi la crise agricole.

Lors de la séance de travail sur l'union bancaire, j'ai souligné que, malgré les avancées conséquentes des dernières années, des interrogations lourdes subsistaient sur la cohérence de la régulation et du contrôle au sein de l'Union européenne - John Vickers lançait d'ailleurs le même jour un « cri d'alarme » dans la presse économique à propos des « trous dans la raquette » de la régulation bancaire.

Enfin, dans le cadre de la conférence de l'article 13, j'ai interrogé le ministre des finances néerlandais et président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, sur la proposition du rapport des « cinq présidents » de créer des « autorités de la compétitivité de la zone euro » dans chaque État membre : ne risque-t-on pas d'ajouter à la technostructure existante ? Comment fonctionneraient ces autorités en pratique ? Jeroen Dijsselbloem a défendu avec conviction cette recommandation, en précisant qu'elle s'inspirait de l'expérience du conseil économique et social néerlandais - dont les membres ont su conduire une concertation approfondie et s'accorder sur les leviers pour améliorer leur compétitivité. C'est, selon lui, une expérience tout à fait intéressante qui pourrait être étendue à l'échelle de l'Union.

En conclusion, la conférence de l'article 13 doit certainement trouver sa place, notamment vis-à-vis du Parlement européen. Les parlements nationaux sont encore loin d'opérer un réel contrôle de la gouvernance économique et financière de l'Union européenne, mais les travaux de Bruxelles laissent entrevoir des perspectives d'évolution. J'ai constaté des progrès dans la préparation aussi bien que dans la méthode suivie par la conférence interparlementaire, une écoute attentive entre délégations et des axes de travail commun : tout ceci est encourageant.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

La question de l'excédent commercial excessif de l'Allemagne a-t-elle été abordée ? Le seuil de 6 % du PIB est dépassé, quelles corrections l'Allemagne entend-t-elle prendre en faveur de l'investissement européen ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

L'inquiétude demeure sur la solidité des banques européennes, y compris allemandes et françaises. Une bulle s'est formée et gonfle, malgré les mesures de régulation et de supervision adoptées dans différents États. Je pense en particulier à notre loi dite de séparation des activités bancaires. Une réflexion est-elle menée sur l'assouplissement quantitatif de 60 milliards d'euros mensuels auquel procède la Banque centrale européenne ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L'excédent commercial allemand n'a pas fait l'objet d'un débat en soi, même si plusieurs délégations l'ont mentionné - nos collègues grecs, portugais, par exemple -, appelant l'Allemagne à infléchir sa politique pour plus d'investissement et de croissance. Les représentants de la Commission européenne ont indiqué que des recommandations seront faites à nos voisins allemands en ce sens.

Comme Éric Bocquet, j'aurais aimé que les questions monétaires et financières soient davantage abordées, mais les esprits étaient focalisés sur la question des réfugiés et sur le débat budgétaire, lequel faisait l'objet de la seconde journée. Plusieurs interventions ont cependant évoqué le risque déflationniste - qui constitue une réelle préoccupation pour les banques centrales puisque nous constatons désormais des taux d'intérêt négatifs de 0,2 % en Allemagne et de 0,1 % en France : nous sommes bien loin de l'objectif d'une inflation à 2 % ! C'est dans ce contexte qu'on doit regarder la facilité quantitative - et pour avoir travaillé sur le shadow banking avec la commission des affaires européennes, je confirme que l'argent injecté dans le système n'est pas intégralement dépensé de façon conforme aux objectifs poursuivis...

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Nous aurons, le 23 mars, une audition sur la garantie des dépôts et sur l'union bancaire, avec des représentants de la Commission européenne et Elke König, nouvelle présidente du Conseil de résolution unique. Je précise que lorsque nous participons à ces conférences interparlementaires, nous pouvons y porter vos interrogations et parler en votre nom.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Si la définition d'un cadre pluriannuel est souhaitable pour le budget européen, la durée actuelle de sept ans, définie par la précédente Commission européenne, présente bien des inconvénients. Le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, avait obtenu un accord en jouant de la fongibilité, tâchant de répondre aux demandes toujours plus diverses et élevées des États qui veulent, dans le même temps, toujours minorer leur quote-part au budget communautaire. Or il est interdit à l'Union européenne de recourir à l'endettement pour financer son budget. La programmation budgétaire sur sept ans est irréaliste en période de forts changements et, facteur aggravant, elle est déconnectée du calendrier politique puisque les élections des députés européens sont intervenues après la définition du cadre financier 2014-2020. Pourquoi ne pas caler le cadre financier pluriannuel sur le calendrier des élections européennes ?

Il faut, ensuite, se méfier de la fongibilité et mieux distinguer les types d'aides, sinon les aides structurelles et la politique agricole commune risquent d'en pâtir en fin de période. Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des finances, a proposé d'instaurer une nouvelle ressource propre, à savoir une taxe de 1 centime d'euro sur l'essence, qui serait affectée à la gestion de la crise des réfugiés. L'ambassadeur d'Allemagne en France, entendu par la commission des affaires européennes, nous disait que nous serions mal avisés de ne pas saisir cette occasion rare. Où en est-on de cette piste ?

Le Parlement européen, très sourcilleux en la matière, voit dans l'article 13 du TSCG une atteinte à ses - faibles - prérogatives législatives, alors que les parlements nationaux n'ont, en fait, guère voix au chapitre. Plusieurs États ont demandé une meilleure association des parlements nationaux à la procédure législative européenne, notre commission des affaires européennes a voté une résolution dans ce sens : où en est-on ?

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

L'assouplissement quantitatif de la BCE créera-t-il une bulle ? Non, car les 60 milliards d'euros mensuels investis dans l'économie...

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Ils ne sont pas tous investis, c'est bien le problème...

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Le problème est moins de savoir s'ils abondent le shadow banking, que de constater le défaut de programmes d'investissements crédibles en Europe, voyez ce qu'il en est du plan « Juncker ». Ensuite, si la BCE ne rachetait pas de la dette, la déflation serait là, c'est le risque majeur à éviter - et c'est bien pourquoi les États demandent tous le maintien de cette « planche à billets » au-delà de septembre prochain, comme les États-Unis l'ont fait pendant bien des années quand ils en avaient besoin. La Banque européenne d'investissement parle de grands projets, mais on ne voit rien venir, voilà le problème ; ne cassons pas l'outil, ou bien nous risquons fort de mettre à bas l'ensemble du système bancaire européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Le plan Juncker comprend des seuils d'investissement trop élevés pour bien des territoires. Nous l'avons dit dès le début : constate-t-on une évolution ? Une autre anomalie est de compter dans le déficit les emprunts réalisés pour investir. C'est contre-productif : il faut comptabiliser ces emprunts différemment que ceux qui financent du fonctionnement, pour inciter davantage à l'investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Nous aurons effectivement un débat lors de l'audition du 23 mars. Je n'ai pas critiqué l'assouplissement quantitatif, mais constaté que son objectif d'une inflation à 2 % est encore très loin. C'est un fait, nous devrons nous interroger sur ce point.

Sur la flexibilité du budget de l'Union européenne, j'ai réagi à la proposition du représentant néerlandais, de prélever sur la PAC pour accroître d'autres dépenses et j'ai alerté sur le manque de marges de manoeuvre, les fonds de secours pour la production porcine, par exemple, étant presque intégralement consommés. Je crois avoir été entendu, puisque le commissaire européen à l'agriculture, en visite à Paris, vient de s'engager à examiner la possibilité d'une intervention européenne spécifique pour faire face à la crise majeure que nous traversons. Il l'a dit au Premier ministre.

Faut-il faire passer le cadrage budgétaire européen du septennat au quinquennat ? Il s'agit d'une bonne question. La Commission européenne l'envisage mais, lors de notre réunion interparlementaire, nous avons senti que le « Brexit » stérilisait toute discussion sur les propositions... Il faut passer ce cap.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Nous en saurons davantage après le référendum britannique du 23 juin prochain.

La commission donne acte de leur communication à Mme Michèle André et à M. François Marc.

La commission demande à se saisir pour avis sur le projet de loi (AN n° 3473, XIVe législature) renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale (sous réserve de sa transmission) et nomme M. Albéric de Montgolfier rapporteur pour avis.

La commission demande à se saisir pour avis du projet de loi n° 325 (2015-2016) pour une République numérique et nomme M. Philippe Dallier rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je vous propose d'élargir la composition de notre groupe de travail sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF), en y nommant Francis Delattre, Jacques Genest et Georges Patient.

La composition du groupe de travail sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) s'établit désormais comme suit : MM. Charles Guené et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Bernard Delcros, Jacques Genest, François Marc, Georges Patient et Jean-Claude Requier.

La commission entend enfin, lors d'une audition conjointe, MM. Raoul Briet, président de la première chambre de la Cour des comptes, Gérard Orsini, président de la commission juridique et fiscale de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME), Patrice Puypéroux, membre élu de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Île-de-France, et Bruno Parent, directeur général des finances publiques, accompagné de M. Olivier Sivieude, chef du service du contrôle fiscal (DGFiP), sur les moyens et priorités du contrôle fiscal.

Le compte rendu de cette réunion sera publié ultérieurement.

La réunion est levée à 12 h 55.