Cette dernière réunion de la commission d'enquête est consacrée à l'examen du rapport de M. Philippe Dallier. Ce rapport est fondé sur les orientations de travail développées le 21 septembre dernier.
Conformément à la réglementation en vigueur, vous avez pu consulter le projet de rapport, mis à votre disposition le 26 septembre dernier. Plusieurs d'entre vous ont usé de cette faculté et nous allons discuter de quelques propositions de modification.
Je veux rappeler que, en cinq mois à peine, la commission d'enquête a entendu 32 personnalités au cours de 18 auditions et s'est déplacée cinq fois, dont trois fois à l'étranger, au Royaume-Uni, en Italie et en Allemagne.
Je vous indique qu'en dehors des auditions, les travaux des commissions d'enquête restent secrets tant que le rapport n'a pas été publié. Pour le moment, il nous est donc interdit de communiquer sur la réunion d'aujourd'hui et sur le projet de rapport de Philippe Dallier. Si le rapport est adopté, il nous appartiendra de décider si nous voulons que le compte rendu de notre réunion de ce jour figure en annexe.
De même, s'il est adopté, il en sera fait dépôt en fin d'après-midi, ce qui marquera officiellement la fin de notre commission. Ce dépôt sera annoncé en séance plénière et publié au Journal officiel de demain.
L'annonce du dépôt au Journal officiel fera courir un délai de six jours nets durant lequel le Sénat pourra décider, sur son initiative ou à la demande du Premier ministre, de se constituer en comité secret et, le cas échéant, de ne pas publier le rapport ou de n'en publier qu'une partie. Ce n'est qu'à l'issue de ce délai que le rapport sera mis en ligne sur le site internet du Sénat, le mardi 11 octobre 2016. Il sera imprimé puis distribué ; alors nous pourrons librement communiquer sur tout ce qui y figurera.
Concentrons-nous ce matin sur les propositions d'ajouts, puisque je vous ai déjà présenté le rapport le 21 septembre dernier. Néanmoins, je vous rappelle les grandes lignes de notre travail. En ce qui concerne la sincérité des chiffres - tant les données de l'Insee sur le chômage au sens du Bureau international du travail (BIT), que celles de Pôle emploi et de la Dares - il n'y a pas de doute, ces chiffres ne sont pas « truqués ». En revanche, sont-ils fiables ? Cela est un autre débat ! Ils peuvent ne pas toujours refléter exactement la réalité, on l'a vu. Sans doute des efforts ont-ils été faits, mais il y a régulièrement des problèmes de fiabilité et il y en aura encore. Ainsi, le Gouvernement a expliqué l'augmentation du nombre de chômeurs au mois d'août dernier - 50 000 demandeurs d'emploi supplémentaires en catégorie A - par le jour supplémentaire permettant de s'actualiser, ce qui n'est pas faux... Donc, on le voit, tout cela reste soumis à interprétation.
Cela dit, in fine, ce qui importe le plus, ce n'est pas tant le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A (3,5 millions de personnes), ni celui des chômeurs au sens du BIT (2,8 millions), que l'écart entre le dernier chiffre et celui de l'ensemble des demandeurs d'emploi des catégories A, B, C et D, soit 6,2 millions de personnes, auxquels il faut d'ailleurs ajouter tous ceux qui ne sont pas inscrits à Pôle emploi, et ils sont nombreux. Nous avons pu le constater dans le département du Nord, où 40 % des allocataires du RSA ne sont pas inscrits à Pôle emploi - ce qui représenterait, en extrapolant, environ 800 000 personnes en France. Si l'y on ajoute en sus les jeunes de 18 à 25 ans qui ne sont pas suivis par une mission locale ni inscrits à Pôle emploi, on constate que le « halo » du chômage est très important.
C'est là-dessus qu'il faudrait se concentrer et c'est ici que les comparaisons avec les politiques des autres pays européens sont intéressantes. Comment ont-ils tenté de ramener vers l'emploi ceux qui sont au chômage ou à temps partiel non choisi ?
Je ne reviens pas sur la situation au Royaume-Uni, en Allemagne et en Italie, le rapport est assez détaillé à ce sujet. Nous avions des a priori, concernant par exemple les « mini-jobs », les « midi-jobs » et les contrats à un euro en Allemagne. Ils ont pu, vus de loin, susciter des commentaires négatifs. Certains commentateurs en soulignent la précarité mais négligent de voir qu'ils ramènent des personnes vers l'emploi en entreprise.
Or qu'est-ce qui est le plus précaire ? Être au RSA et sans travail, ou avoir un mini-job ? En outre, et je vous proposerai de l'ajouter dans le rapport, les efforts consentis en Allemagne et au Royaume-Uni ont permis à ces pays de dégager d'importantes marges de manoeuvre, d'où l'instauration ensuite d'un salaire minimal en Allemagne qui profite à tous les salariés et l'amélioration des conditions de travail au Royaume-Uni avec, là encore, un salaire minimal. Il faut donc mesurer tout cela et de manière objective...
Sur la suggestion de Mme la présidente, reprenant une idée de M. Jean-Baptiste de Foucauld, je propose l'organisation d'assises annuelles de l'emploi rassemblant le Gouvernement, les syndicats, le patronat et des économistes pour faire le point des politiques économiques et tracer des perspectives.
Lors d'une réunion précédente, Jean-Claude Lenoir estimait avec raison que le débat public se concentrait trop sur les chiffres des demandeurs d'emploi de catégorie A. J'ai donc modifié l'avant-propos du rapport pour insister sur ce point.
Georges Labazée estimait pour sa part que la définition du chômage au sens du BIT est très restrictive. Il est vrai que le chiffre de 2,8 millions de personnes comparé aux 3,5 millions de demandeurs d'emploi de catégorie A peut surprendre. Néanmoins, nous rappelons dans le rapport la définition du chômage au sens du BIT : il faut ne pas avoir travaillé dans la période de référence, être immédiatement disponible et être en recherche active. Ce chiffre ne veut rien dire de plus.
Jean-Baptiste Lemoyne a suggéré de demander à Pôle emploi de suivre les personnes entrant en catégorie D et bénéficiant d'une formation - que deviennent-elles ensuite ? C'est pourquoi nous demandons à Pôle emploi, d'une part, de publier les transferts entre catégories, qui existent déjà, d'autre part, de suivre la situation des personnes bénéficiant d'une formation à l'issue de celle-ci.
Enfin, nous avons ajouté au rapport sept annexes permettant une comparaison entre les pays de l'Union européenne sur différents critères : le taux de chômage, le salaire annuel brut moyen, le revenu médian, le revenu moyen, le pourcentage des salariés ayant un emploi à durée déterminée, la part des emplois à temps partiel et le taux de pauvreté. Cela permet d'éclairer le débat sur la précarité. Selon une étude de la Banque mondiale, cependant, la pauvreté a reculé en Allemagne récemment.
Figurera également dans les annexes l'instruction de Pôle emploi du 21 avril 2016 sur la mise en oeuvre du plan « 500 000 formations supplémentaires ». Nous avons réclamé ce document après la parution d'un article du Canard enchaîné à ce sujet cet été.
Par ailleurs, dans la conclusion, je souhaite préciser que les pays qui ont fait des efforts utilisent le résultat de ces efforts pour améliorer les conditions des salariés.
Nous devons examiner plusieurs propositions de modification du rapport, émanant de Georges Labazée et du rapporteur.
La proposition n° 1 de M. Georges Labazée consiste à ajouter à la page 11 du rapport, après « Par ailleurs, de nombreux bénéficiaires du RSA ne figurent pas dans les listes des DEFM, ainsi qu'en atteste l'exemple du département du Nord. », la phrase « Les chiffres mensuels des DEFM sont soumis à des variations statistiques d'un mois sur l'autre selon le nombre des jours chômés, par exemple. »
Cela rejoint ce que je disais à propos des chiffres du mois d'août. Il faut en effet tenir également compte de la correction des variations saisonnières, qui a lieu chaque mois. Faut-il pour autant ajouter cette phrase ? Je n'en suis pas persuadé, les choses me semblent déjà assez claires.
Oui. Inutile de rentrer à ce point dans le détail à ce stade du rapport.
On voit toujours le taux de chômage augmenter fortement en septembre, en raison de l'entrée des jeunes diplômés sur le marché du travail. Y a-t-il une mention spécifique à ce sujet dans le rapport ?
Tout le monde connaît et comprend ce phénomène, de même que l'existence des corrections des variations saisonnières. Est-il nécessaire de le souligner spécifiquement ? Il n'y a pas de polémique là-dessus, on sait que ce taux augmente en septembre, il n'est donc pas utile, selon moi, de le préciser.
On le voit d'ailleurs à la page 23 du rapport, avec le tableau présentant, mois par mois, l'écart entre les données brutes et celles corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrés sur 18 mois.
Avant de donner mon avis sur cette proposition de modification, je veux faire un commentaire général sur le rapport. La première partie constitue un excellent travail. Le décompte des demandeurs d'emploi en fin de mois, les DEFM, suscite en effet des interrogations. Les méthodes de comptabilisation changent, sous l'impulsion du pouvoir politique, tous les trois ou quatre ans ; cela pose problème. En outre, certains bénéficiaires du RSA ne figurent pas parmi les DEFM, ce qui fausse complètement l'analyse. Cela rejoint d'ailleurs la proposition n° 2 de Georges Labazée, qui me paraît plus importante.
Vous l'avez très bien expliqué, il n'est pas pertinent d'intégrer parmi les 6,8 millions de chômeurs les personnes relevant de la catégorie C, c'est-à-dire ayant déjà un emploi et en recherchant un autre. En sens inverse, les chiffres du BIT ne comprennent pas des personnes qui ne travaillent que quelques heures par semaine.
Pour ce qui concerne la proposition de modification n° 1 de Georges Labazée, je rejoins ce que dit Mme la présidente, ce n'est pas utile. Vous avez bien montré ce qu'il en est dans le rapport. Encore une fois, le problème principal vient de l'absence de recensement des allocataires du RSA et des variations politiques dans les méthodes de comptabilisation.
Dans la foulée de notre déplacement à Berlin, je me suis rendu à Vienne. Les choses m'y sont apparues clairement : il y a certes les données du BIT, sur lesquelles tout le monde s'accorde et qui permettent les comparaisons internationales, mais chaque pays a ses problèmes de comptabilisation. Ainsi, en Autriche, serait considérée comme demandeur d'emploi une personne souhaitant travailler une heure de plus...
Il faut donc entreprendre un travail à ce sujet, sans quoi les chiffres ne conviendront jamais. Il y a les données statistiques du chômage au sens du BIT, qui sont utilisées par tous les pays, mais en intégrant le halo on passe, en Autriche, du simple au double !
Ainsi, on débat autour de chiffres plus ou moins imaginaires et on a du mal à cadrer la discussion, ce qui nourrit les populismes. Comment donc faire pour arrêter un cadre à l'échelon européen et éviter de débattre de tout et n'importe quoi ?
En effet, les données du BIT permettent de faire des comparaisons internationales mais, dès que l'on en sort, la comparaison devient impossible, car les pays ne comptabilisent pas le chômage de la même manière.
Faut-il pour autant s'orienter vers une comptabilisation administrative uniforme du chômage dans l'Union européenne ? Cela ne me semble pas faisable et cela ne changerait rien au problème de fond, le chômage. Il faut favoriser le retour à l'emploi des chômeurs ou, à défaut, faire en sorte qu'ils soient correctement indemnisés.
De toute façon, on n'arriverait pas à une telle uniformisation parce que les habitudes nationales sont prises. En outre, il y a là une question idéologique : en gros, la droite considère qu'un emploi à temps partiel est un emploi, et la gauche estime que le temps partiel non choisi constitue du chômage.
Il y a le temps partiel voulu et le temps partiel subi...
La proposition n° 1 de M. Georges Labazée n'est pas adoptée.
Nous en arrivons à la proposition n° 2 de Georges Labazée, qui vise à ajouter, au dernier paragraphe de la page 27, après la phrase « Votre commission d'enquête a ainsi constaté que la question du traitement des personnes bénéficiaires du RSA n'avait pas été clairement tranchée. » une mention sur la comptabilisation des bénéficiaires du RSA non inscrits à Pôle emploi. Dans le département du Nord, le chiffre a été rendu public.
Il n'est pas directement disponible. Le président du conseil départemental du Nord a dû demander à la Cnil l'autorisation de croiser plusieurs fichiers pour en extraire cette donnée. Faut-il généraliser cette démarche ? Il serait effectivement intéressant de disposer de ce chiffre.
Il n'y a pas d'obligation, en effet, à être inscrit à Pôle emploi pour toucher le RSA.
Non, pas du tout. Du reste, certains bénéficiaires ne sont pas employables.
Je ne suis pas d'accord avec la phrase de Georges Labazée telle qu'elle est rédigée puisque, vous le dites, on ne dispose pas de ces chiffres. Néanmoins, l'idée selon laquelle il faut recenser les allocataires du RSA comme des personnes en attente d'emploi n'est pas fausse. On pourrait ajouter une recommandation à ce sujet. Mais qui doit se charger de ce recensement ? Pôle emploi doit-il tout faire ? Vous insistez d'ailleurs dans le rapport sur le fait que Pôle emploi crée une confusion entre la mesure du chômage et celle de la demande d'emploi - mais alors, qui doit le faire ? Vous dites que les données au sens du BIT sont très intéressantes pour faire des comparaisons internationales ; et que les données administratives de Pôle emploi sont très utiles pour connaître la situation des catégories et mesurer les évolutions... Mais si vous dites cela, vous ne pouvez pas laisser les allocataires du RSA en dehors du recensement.
Ils n'en sont pas tous exclus, puisque certains allocataires sont inscrits à Pôle emploi.
C'est vrai mais d'autres ne le sont pas. On pourrait demander que les pouvoirs publics s'intéressent aux bénéficiaires du RSA qui ne sont pas inscrits à Pôle emploi.
Je n'y suis pas opposé, mais je le ferais différemment ; c'est d'ailleurs l'objet de ma proposition de modification n° 1. Celle-ci consisterait à ajouter, à la fin du premier paragraphe de la page 28, la phrase « Il serait par conséquent souhaitable qu'une évaluation de ce phénomène soit rapidement menée au niveau national. » Peut-être faudrait-il d'ailleurs indiquer plutôt « une évaluation régulière ».
En outre, nous devrions confier ce rôle à la Dares, que ce soit pour produire ce chiffre ou pour en suivre l'évolution. Cela me paraît être son rôle.
Je propose donc la rédaction suivante : « Il serait par conséquent souhaitable qu'une évaluation régulière de ce phénomène soit rapidement mise en place au niveau national par la Dares ». Il faudrait faire de même pour les jeunes de 18 à 25 ans. En outre, on ajoutera la recommandation correspondante dans la liste des conclusions et propositions de la commission d'enquête.
Ma proposition n° 2 vise à ajouter, à la page 27 du rapport, après le paragraphe situé sous le graphique, un simple constat - la phrase « Une analyse fine de l'écart entre le nombre de DEFM et le nombre de chômeurs au sens du BIT apparaît indispensable. Le nombre total de DEFM s'élevait ainsi à 6,2 millions en juillet 2016 (dont 5,4 millions de DEFM inscrits en catégories A, B et C, et 3,5 millions inscrits en catégorie A seulement), contre 2,8 millions de chômeurs au sens du BIT. » En effet, c'est à cet écart qu'il faut s'intéresser...
Je suis pleinement satisfait de la première partie du rapport. Je comprends la différence entre les données du chômage au sens du BIT et celles de Pôle emploi et je me réjouis, non du nombre des chômeurs, mais de la fiabilité des chiffres. Il y avait un doute à ce sujet, il était important de le lever.
En ce qui concerne le RSA, j'apprécie les propositions qui sont faites mais il ne faut pas tout mélanger, car intégrer la variable du RSA dans les chiffres du chômage apporterait une confusion supplémentaire. Cela dénaturerait le débat politique à chaque publication des chiffres du chômage.
Vous proposez, monsieur le rapporteur, de rapprocher les données sur les DEFM de celles relatives au chômage au sens du BIT, mais le vrai problème réside dans la catégorie C. En fait, Pôle emploi ne comptabilise pas les chômeurs mais les demandeurs d'emploi.
Il y a, de mémoire, dans la catégorie C, 467 000 personnes occupant un emploi à temps plein mais souhaitant en changer ; elles sont en effet comprises dans les chiffres.
Or, comme vous l'indiquez dans le rapport, il est très difficile de lier les chiffres de la catégorie C, donc l'ensemble des DEFM, à ceux du chômage au sens du BIT.
C'est néanmoins un point majeur et il est nécessaire d'y voir plus clair à ce sujet.
C'était bien l'objet de nos travaux, me semble-t-il. On ne peut donc pas conclure qu'il faut « chercher à y voir plus clair ». Que le rapport se termine en indiquant qu'une liaison entre les chiffres du chômage au sens du BIT et ceux de Pôle emploi est très difficile et qu'il faut les publier en même temps, très bien. Mais ne disons pas également qu'il faut y voir plus clair entre les deux, cela me semble contradictoire.
Il faut en effet publier les deux données concomitamment pour montrer que la catégorie A n'est pas suffisante pour comprendre le chômage. C'est l'écart qui est intéressant.
Il existe en effet des personnes travaillant et souhaitant bénéficier des services de Pôle emploi pour trouver un autre emploi. Toutefois, on peut chercher à en savoir plus pour avoir une meilleure compréhension des chiffres. Il ne faut pas faire disparaître la catégorie C mais il faut aller plus dans le détail pour mieux comprendre les phénomènes.
On pourrait alors positionner votre proposition d'ajout à la page 27 mais avant le graphique, après le paragraphe relatif au changement des règles.
Le problème est que l'on n'y parle pas uniquement des chômeurs de catégorie A. Je ne suis donc pas sûr que ce soit beaucoup plus clair ainsi.
Le véritable problème réside dans la comptabilisation des demandeurs d'emploi de catégorie C dans le chômage. On ne dispose pas de comparaison européenne là-dessus, mais je crois que nous sommes les seuls en Europe à considérer que sont des chômeurs ceux qui ont un emploi et cherchent à en changer.
D'autant que de nombreuses personnes sont dans cette situation sans être inscrites à Pôle emploi. Donc, si l'on va dans ce sens-là...
Quid de ma proposition ? Je souhaitais insister sur l'importance de comprendre l'écart entre les chiffres. Peut-être n'ai-je pas proposé le meilleur endroit pour faire figurer ce paragraphe ?
Nous pourrions supprimer la première phrase pour éviter de donner l'impression que l'on relance le débat, et faire simplement figurer les chiffres.
On pourrait insérer ma proposition juste après le graphique, puisque c'est en quelque sorte un commentaire de ce dernier. Cela vous convient-il ?
Selon moi, c'est « indispensable » ! Je veux qu'on y voie clair, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. On dispose de nombreux éléments qui permettraient d'éclairer le débat.
Les chiffres au sens du BIT correspondent aux personnes qui n'ont pas travaillé, qui cherchent activement du travail et qui sont disponibles immédiatement.
Pôle emploi répertorie les chômeurs de catégorie A, les temps partiels - la catégorie B -, la catégorie C et les personnes en formation. Ces chiffres recouvrent de nombreuses données et, pourtant, certaines manquent - je pense aux personnes qui touchent le RSA et aux jeunes. Pourquoi relancer la machine en essayant de lier les deux chiffres ? Vous dites vous-mêmes qu'il est très difficile d'établir un rapport entre les deux. Il faudrait publier ensemble ces chiffres qui sont complémentaires.
Notre proposition est claire : nous préconisons de publier les chiffres de Pôle emploi et de demander à la Dares d'analyser l'écart entre les chiffres. Nous voulons que cet organisme soit un véritable service d'analyse statistique des chiffres de l'emploi.
Si c'est ce qui est demandé, je suis d'accord. La Dares deviendrait un observatoire de l'ensemble des données de l'emploi et du chômage.
Pôle emploi se contente de donner les chiffres, la Dares les analyserait.
Mon paragraphe s'insèrerait donc immédiatement après le graphique.
La proposition n° 2 du rapporteur ainsi rectifiée est adoptée.
Venons-en à la proposition n° 3, qui consiste à insérer, à la page 117 après l'avant-dernier paragraphe, les phrases : « Il faut pourtant noter que les efforts consentis par l'Allemagne et le Royaume-Uni durant la crise leur ont permis de dégager des marges de manoeuvre qui sont aujourd'hui mises à profit pour revaloriser les salaires et améliorer la situation des personnes les plus éloignées de l'emploi. Grâce notamment à l'institution d'un salaire minimum fédéral en Allemagne ou d'un salaire de subsistance au Royaume-Uni, le salaire moyen y a connu une progression vigoureuse, augmentant respectivement de 2,9 % et de 12 % entre 2014 et 2015 (cf. annexe). »
Dans certains pays comme le Royaume-Uni et l'Allemagne, les politiques mises en place ont pu, aux yeux de certains, sembler conduire à une précarisation. Néanmoins après ces efforts l'Allemagne a mis en place un salaire minimum et le Royaume-Uni a adopté des mesures de revalorisation des salaires. C'est un fait et non une opinion. Je souhaite que cela figure dans le rapport.
Cette approche présente un point faible : nous ne nous sommes pas rendus dans les pays scandinaves, où il n'y a pas de salaire minimum. Cette semaine, nous sommes allés à Berlin avec la délégation aux entreprises, pour examiner leur façon de faire la loi, une évaluation du coût y est effectuée pour chaque nouvelle loi. On constate l'impact non négligeable du salaire minimum sur l'économie. Il faut regarder à moyen terme. Votre prise de position s'explique peut-être par le fait que nous ne nous sommes pas rendus dans des pays qui n'ont pas de salaire minimum.
J'énonce un fait. J'estime qu'il est utile de pointer que l'Allemagne a mis en place un salaire minimum l'année dernière, à l'issue du processus de réforme. Chacun a son opinion sur les réformes mises en place depuis les lois « Hartz ». Certains estiment qu'elles conduisent à une précarisation des travailleurs. Pour ma part, je constate qu'a été instauré dans la foulée un salaire minimum, qui n'existait pas auparavant...
C'est un choix politique. Il ne faut pas dire que la décision découle d'une situation économique.
C'est parce que l'Allemagne avait les moyens de le faire ! Leur situation économique s'est améliorée. Si les réformes n'avaient pas donné de résultats, cette proposition n'aurait certainement pas été formulée. Vous avez raison, c'est un choix politique, mais nous sommes aussi là pour analyser les politiques mises en oeuvre dans les trois pays que nous avons choisis.
C'est le SPD qui avait proposé d'instituer le salaire minimum en Allemagne. Vous pointez une réalité, mais n'ayant pu observer cette progression vigoureuse que sur un temps relativement court, nous manquons de recul.
L'amélioration de la situation des travailleurs en Allemagne est notamment liée aux accords de flexi-sécurité qui ont été adoptés pour faire face à la crise et qui étaient assortis d'une sorte de clause de retour à bonne fortune, ce qui a permis de faire accepter au patronat la création du salaire minimum.
Quoi que l'on pense du processus politique qui a permis de faire accepter ces réformes en Allemagne, il reste que le nombre de chômeurs a été réduit, que la croissance est meilleure et qu'un salaire minimum a été créé.
Nous devrions signaler qu'il faut rester prudent sur les résultats de l'Allemagne. L'instauration d'un salaire minimum ne peut être analysée au bout de neuf mois seulement. De plus, un million de migrants ont été accueillis dans ce pays, ce qui va modifier l'interprétation des chiffres du chômage dans les années à venir.
La progression du salaire brut moyen en Allemagne et en France entre 2006 et 2015 est exactement la même : 20 %. Ce chiffre figure dans les annexes.
Les 800 000 migrants que l'Allemagne a accueillis auront certes un impact, mais celui-ci est en dehors du champ de notre analyse, qui porte sur les évolutions intervenues depuis les réformes « Hartz » de 2003-2005.
Ce rapport fera date. J'ai hâte que l'opinion publique et les journalistes s'en saisissent car le traitement mensuel de ces données laisse songeur. La focalisation sur un indicateur unique cache une véritable tectonique des plaques.
Je me réjouis que le rapporteur ait pu prendre en considération ma remarque concernant le suivi des personnes ayant bénéficié d'une formation. Cela me semble important pour la bonne compréhension du sujet.
L'appareil de mesures que prévoit ce rapport nous permettra de mieux décrypter le phénomène du chômage. Je tiens à remercier vivement le rapporteur et Mme la présidente.
Serait-il possible de dissocier les deux parties du rapport ? Je voterais ainsi pour la première partie, qui présente un travail très intéressant sur les chiffres et les préconisations. En revanche, dans la seconde partie, qui traite des effets des politiques de lutte contre le chômage, si le terme « fluidité » est élégant et gomme certaines aspérités droite-gauche, le traitement de la question de la sécurité et l'analyse économique du capital me paraissent un peu insuffisants. L'essor économique de l'Allemagne tient non seulement aux mesures sociales qui ont été prises mais aussi aux spécificités du capital, qui, en Allemagne, n'est pas prédateur comme il l'est en France. C'est pourquoi, monsieur le rapporteur, madame la présidente, sans remettre en cause votre travail, je préfèrerais m'abstenir sur cette deuxième partie.
Toute la difficulté de cette seconde partie était de rester dans le constat, d'aller voir sur place comment les choses avaient été traitées et quels étaient les résultats sans pour autant recommander l'importation de telle ou telle mesure prise par l'Allemagne ou par le Royaume-Uni.
Par ailleurs, ce rapport n'avait pas pour objet la comparaison de la structure du capital en Allemagne et en France, ou alors il nous aurait fallu six mois supplémentaires !
La présentation de la seconde partie me convient tout à fait, et elle me conviendrait encore mieux si nous n'adoptions pas votre proposition n° 3, monsieur le rapporteur !
Le salaire minimum a été instauré, pourquoi ne pourrait-on le dire ? C'est factuel !
On peut le dire mais, dans la rédaction actuelle, cette mesure est présentée comme analogue à l'instauration du salaire de subsistance au Royaume-Uni. Or il me semble que ce n'est pas la même chose.
Nous pourrions supprimer « grâce notamment à », et rédiger la fin de la phrase ainsi : « L'institution d'un salaire minimum fédéral en Allemagne ou d'un salaire de subsistance au Royaume-Uni participe de la progression vigoureuse du salaire moyen, augmentant respectivement de 2,9 % et de 12 % entre 2014 et 2015 » ?
Très bonne proposition pour accorder les points de vue ! Cela me convient.
Le salaire minimum fait toutefois nettement augmenter le coût du travail. Nous n'aurons de recul sur les effets de son instauration que dans deux ou trois ans.
Nous devons faire état des chiffres dont nous disposons aujourd'hui... et qui sont parlants.
« Participe de la progression » me paraît être un bon compromis. C'est une réalité sans être une vérité absolue.
La proposition n° 3 du rapporteur ainsi rectifiée est adoptée.
Je vous propose comme convenu une autre proposition de modification pour intégrer dans le rapport le pendant, pour les jeunes de 18 à 25 ans, de la modification que nous avons adoptée à propos des allocataires du RSA. À la page 25, au sixième paragraphe, après la phrase « L'exemple des jeunes de moins de 25 ans a notamment été mentionné. En effet, ces derniers ne sont pas incités à s'inscrire à Pôle emploi dans la mesure où la plupart d'entre eux ne peuvent prétendre à une indemnisation. », nous ajouterions : « Ce phénomène devrait faire l'objet d'une évaluation régulière qui pourrait être confiée à la Dares. »
La proposition est adoptée.
Nous insérerions également un tiret ainsi formulé à la proposition n° 8 : « Ajouter une évaluation régulière du nombre de bénéficiaires du RSA et de jeunes de moins de 25 ans non inscrits dans les listes de Pôle emploi. »
Je propose de formuler ce tiret ainsi : « Donner comme mission à la Dares... »
Dans ce cas, insérerons plutôt une nouvelle proposition : « Confier à la Dares le soin de comptabiliser les allocataires du RSA et les jeunes de moins de 25 ans non inscrits à Pôle emploi. »
On ne leur demande pas seulement de produire un chiffre mais encore d'analyser une évolution.
Oui mais il faut produire les chiffres ! Je propose donc cette rédaction : « Confier à la Dares la mission de comptabiliser les allocataires du RSA et les jeunes de moins de 25 ans non inscrits à Pôle emploi. »
La proposition ainsi rectifiée est adoptée.
Je veux d'abord remercier M. le rapporteur et Mme la présidente pour l'important travail qu'ils ont fourni. Je découvre aussi les règles d'une commission d'enquête, qui rendent le travail compliqué, notamment pour les groupes qui n'ont qu'un représentant. Je me demande si ces règles, qui s'appliquent à toutes les commissions d'enquête, sont indispensables sur des sujets comme le nôtre.
J'en viens à mon avis général sur le rapport. La principale proposition consiste à demander une publication mensuelle, en un document unique, des chiffres du chômage au sens du BIT et de ceux de Pôle emploi.
La deuxième proposition importante porte sur l'organisation annuelle d'assises. Elle me semble très intéressante. Je note toutefois que les syndicats ne sont pas nommément cités. On parle seulement d'associations. Les syndicats en feront-ils partie ?
Nos discussions l'ont montré, on peut douter que cela améliore la fiabilité des chiffres du chômage, compte tenu de la difficulté d'appréciation des chiffres du chômage au sens du BIT, de ceux de Pôle emploi et, au-delà, du halo du chômage, difficile à identifier.
La seconde partie du rapport pose davantage problème au groupe CRC. En raison du périmètre de la commission d'enquête, le rapporteur a précisé à plusieurs reprises qu'il se gardait de tirer des conclusions, mais le simple fait de choisir tel ou tel pays oriente, qu'on le veuille ou non, les conclusions du rapport.
Monsieur le rapporteur, vous avez d'ailleurs déclaré il y a quelques jours que l'on déduisait « en creux » les politiques à mettre en oeuvre.
Cela ne représente qu'une page et demie mais ces conclusions sont orientées. Selon nous, ce sont des politiques convergentes et libérales, qui conduisent à la création de petits boulots très précaires. Comme cela est d'ailleurs noté dans le rapport, elles peuvent à très brève échéance avoir des conséquences en matière de productivité, d'inégalités salariales et de segmentation du marché du travail. Elles sont donc porteuses de risques.
Le rapport évoque le fait que ces politiques s'appuient sur la nécessité de décentraliser au niveau de l'entreprise les négociations salariales ou sur la durée de travail - un sujet qui a largement animé les débats du Sénat durant l'examen de la loi Travail. Nous ne pouvons pas approuver cette partie. Nous prendrons une décision définitive tout à l'heure lors de notre réunion de groupe, mais je souhaitais d'ores et déjà indiquer les éléments qui nous posaient problème.
Le vote doit être global sur les deux parties du rapport mais la possibilité donnée aux membres de la commission de formuler leur position dans des contributions annexées au rapport leur offre l'occasion de se prononcer sur chacune des deux parties. Cela permet de remédier au formalisme des commissions d'enquête, qui est, je le confirme, extrêmement lourd pour un sujet tel que celui que nous traitons.
Nous sommes pour la première partie et nous abstiendrons sur la seconde.
Le groupe socialiste votera pour, nous faisons confiance à Mme la présidente.
J'ai tenté d'éviter la manière « éléphant dans un magasin de porcelaine » !
La commission adopte le rapport ainsi modifié, ainsi que les annexes.
Je remercie Mme la présidente, avec laquelle j'ai eu plaisir à travailler. Nous avons, je crois, été efficaces !
La réunion est levée à 9 h 30.