Nous allons examiner la proposition d'avis motivé de notre collègue Richard Yung sur le « paquet législatif » de la Commission européenne qui tend à opérer une réforme structurelle des plus grandes banques de l'Union européenne.
Je rappelle que, lors de sa réunion du 26 février 2014, le groupe de travail sur la subsidiarité avait identifié plusieurs difficultés, notamment l'insuffisance de l'étude d'impact et le recours excessif à des actes délégués.
L'enjeu est important. Nous venons de légiférer sur la séparation des activités bancaires. Or ce dispositif risque d'être bouleversé, sans qu'il soit établi que la législation française est insuffisante ou inadaptée.
Je saisis cette occasion pour vous indiquer que la Commission européenne a répondu, le 13 mars, à l'avis motivé que le Sénat avait adopté sur le Parquet européen. Le seuil requis de parlements nationaux ayant été atteint, la Commission européenne a été obligée de réexaminer son texte. Elle a décidé de le maintenir en l'état. Mais, elle répond à nos arguments et indique qu'elle tiendra dûment compte des avis exprimés par les parlements nationaux au cours du processus législatif.
Il y a manifestement un désaccord sur la forme que doit revêtir ce Parquet européen. Mais je crois que nous pouvons relever la disponibilité qu'exprime la Commission pour poursuivre un dialogue politique avec les parlements nationaux. C'est l'intérêt de cette procédure de contrôle de la subsidiarité. Je vais donner la parole à Richard Yung.
Merci monsieur le Président. Nous parlons dans la forme plutôt que dans le fond de ce texte qui vient curieusement au mois de mars et qui devrait être examiné par le Parlement européen. De toute évidence ce ne sera pas le cas dans les semaines qui viennent. C'est donc plutôt un exercice pro forma. La question reviendra peut-être à la fin de 2014.
Il s'agit du problème de la réforme des banques trop grandes par rapport au PIB qui font courir un risque systémique qui a été déjà traité en France. Il s'agit de la question de la séparation des activités de fonds propres et des activités commerciales. Les avis ne concordent pas sur ce débat. La loi française a offert une solution, l'Allemagne a choisi une voie assez proche, l'Angleterre une voie qui préserve la liberté d'action de la City. La loi Vickers en Angleterre consiste à isoler la partie commerciale des banques, tout le reste est laissé libre. Les Américains ont aussi un autre système sur lequel je ne reviendrai pas mais qui est plus difficile à mettre en oeuvre car c'est un système assez rigide. On ne peut pas dire que tel ou tel système est supérieur mais, en France, nous avons voulu tenir compte des particularités du système français.
La Commission avait commandé un rapport à M. Liikanen qui a fait des propositions intermédiaires entre les systèmes français et allemands. De cela, la Commission a tiré une proposition de règlement que nous examinons aujourd'hui. C'est un règlement d'application immédiate qui vise l'interdiction de la négociation pour compte propre et le transfert de certaines activités à une structure spécifique.
Nous sommes favorables à une législation européenne en la matière encore que nous venons en France de la faire. Mais là n'est pas le sujet.
La première observation porte sur l'étude d'impact de la Commission qui est très générale et peu argumentée quant au fond. Elle n'explique pas vraiment pourquoi on doit avancer dans la voie proposée, les risques que cela fait courir à l'économie. Pourquoi avoir une règle unique de séparation des activités car cela n'est pas une obligation en soi. On n'est pas convaincu de la nécessité d'avoir un règlement.
La deuxième observation est que ce règlement, curieusement, prévoit en quelque sorte l'exonération de l'application au Royaume-Uni. Alors qu'un règlement par nature est fait pour être appliqué à tout le monde ! C'est une première dans le domaine financier. Le règlement prévoit que le système exonéré doit répondre à certains critères, ceux de Vickers, et doit avoir une date de vote au 29 janvier 2014 ! Cela n'est pas acceptable et il y a d'ailleurs eu immédiatement une protestation conjointe de la France et de l'Allemagne.
Le troisième point est le recours abusif aux actes délégués y compris sur des sujets importants. C'est un sujet que nous avons déjà évoqué dans cette commission.
Merci de ce rapport synthétique et complet issu du groupe de travail qui examine tous les textes soumis au titre de la subsidiarité. Dans ce contexte, nous nous sommes déjà prononcés sur le Parquet européen, le droit de grève sur les travailleurs détachés. Cet avis motivé s'adresse à la Commission mais le gouvernement français en sera bien sûr informé. Enfin, si un tiers des parlements de l'Union se prononce dans le même sens, la Commission devra réexaminer le texte.
Si elle est adoptée, cette résolution sera transmise à la commission des finances qui, nous le savons, partage notre préoccupation.
C'est toujours une grande satisfaction quand un homme de gauche connaît si bien le secteur bancaire. Dans la première partie qui traite de la séparation des activités bancaires, quel est le risque résiduel une fois que les activités spéculatives sont séparées des autres ? Ensuite, une règle unique n'apparaissant pas indispensable, dans quelle mesure la loi Vickers s'extrait-elle du cadre souple de la subsidiarité ?
Monsieur le président, je trouve ce texte fondamental. Le fil conducteur en est de mieux financer le tissu des PME. Or, aux États-Unis, les PME vont sur le marché obligataire alors que ce n'est pas notre culture en Europe. De là découle tout l'intérêt d'avoir un système bancaire sécurisé en Europe. Je suis favorable à cet avis motivé et, je l'avoue, quelque peu surpris de certaines des positions de la Commission européenne sur ces questions.
En fait, il s'agissait pour la Commission de démontrer qu'elle utilisait les conclusions du rapport Liikanen. Si le sujet revient, il y aura d'ailleurs un débat assez long...
Les Américains prévoient une séparation brutale des activités pour compte propre : il faut filialiser. Notre système est plus subtil car il dit que les banques commerciales peuvent continuer à mener des activités à condition qu'elles répondent aux besoins des clients. La discussion reste ouverte pour savoir quel est le meilleur système, les avis diffèrent.