Nous sommes heureux de recevoir Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Il est important qu'avant l'intersession, nous puissions vous entendre, quatre mois après la promulgation de la loi Orientation et réussite des étudiants (ORE), que nous avions améliorée, conscients de l'enjeu que constitue une orientation réussie des étudiants. Quel premier bilan pouvez-vous dresser de l'application de cette loi ? Nous avons conscience des difficultés rencontrées et surmontées, et souhaitons vous apporter notre soutien pour la préparation de la future rentrée scolaire.
Vous avez mis en place le comité éthique et scientifique de Parcoursup dont la création avait été décidée au Sénat, ainsi qu'un comité de suivi de la loi. Parcoursup a commencé à produire ses premiers effets : le 27 juin, plus de 644 000 candidats avaient reçu au moins une proposition d'admission mais 169 000 sont encore en attente. Quelle suite sera donnée à leurs demandes ? Depuis mardi, la phase d'admission a repris, après une interruption d'une semaine destinée à ne pas perturber les candidats pendant leurs examens et une phase d'admission complémentaire a été ouverte.
Merci de votre invitation. Je n'avais pas eu l'opportunité d'être entendue par votre commission depuis le mois de janvier, alors que le Sénat s'apprêtait à examiner, dans votre commission puis en séance publique, le projet de loi « orientation et réussite des étudiants ». Ce projet est devenu une loi de la République, en grande partie grâce à la confiance du Sénat et je vous en remercie. Nous avons su trouver ensemble un point d'équilibre et je salue le travail de votre rapporteur, Jacques Grosperrin.
Cet équilibre est le fruit des nombreux travaux conduits par votre commission, et est aussi la preuve que le Gouvernement a su travailler efficacement avec le Sénat. Ce travail n'a pas été remis en cause en commission mixte paritaire (CMP). Bien au contraire, ce fut l'une des rares CMP conclusives de cette session ordinaire, qui a su préserver de nombreuses propositions du Sénat. Nous avons écrit ensemble une loi de progrès social qui accorde un rôle central aux lycéens en leur donnant un véritable pouvoir de choisir leur affectation.
L'accord obtenu en CMP était aussi le reflet d'une préoccupation que nous avons tous partagée. Le système Admission Post Bac (APB) n'était plus en mesure de remplir sa mission d'affectation. La décision de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) du 25 septembre 2017 puis l'annulation de la circulaire permettant de recourir au tirage au sort ont rendu le système illégal et donc inopérant - uniquement pour la phase d'affectation et non pour celle de dépôt des voeux. Nous avions impérativement besoin d'une loi avant le 31 mars.
S'il est encore trop tôt pour dresser le bilan de la campagne d'affectation 2018, je peux déjà vous rendre compte de la bonne exécution de la loi du 8 mars 2018 et du bon fonctionnement de Parcoursup. Les 812 000 candidats inscrits sur la plateforme ont eu jusqu'au 31 mars pour formuler puis valider leurs voeux. La plateforme a diffusé auprès de chaque lycéen les attendus précis des 13 000 formations référencées sur Parcoursup. À ce jour, presque tous les décrets d'application de la loi ont été pris, moins de six mois après l'adoption de la loi.
Parcoursup a mis en évidence la réalité de ce que souhaitent les lycéens. Près de 6,3 millions de voeux ont été formulés, dont 68 % sur des formations sélectives et 32% sur des formations universitaires. Nous avons fait le choix de donner une totale liberté aux lycéens, en contrepartie du renforcement de leur orientation. Depuis le 22 mai, les candidats peuvent prendre connaissance des réponses à leurs voeux et faire leurs choix finaux. Plus de 646 000 candidats ont reçu au moins une proposition d'admission, soit plus de 80 % des lycéens, et plus de 90 % des lycéens inscrits en filière générale. C'est au-dessus des projections initiales du Gouvernement.
Le système est évolutif, il affecte sans tirage au sort et sur le fondement d'une orientation construite tout au long de l'année de terminale. Surtout, il permet aux lycéens d'être maîtres de leur affectation en leur donnant la possibilité de choisir entre plusieurs propositions, ce qui n'était pas le cas avec le système antérieur. En moyenne, chaque candidat a reçu trois propositions. Chaque candidat qui fait son choix libère des places, qui sont immédiatement proposées à de nouveaux candidats. Dès le 22 mai, 63 000 candidats ont définitivement validé leur affectation. Aujourd'hui, ils sont plus de 361 172.
Comme tous les nouveaux systèmes, Parcoursup a suscité des interrogations et il suppose que chacun se l'approprie. Les lycéens en ont compris la logique et le mode de fonctionnement, d'autant mieux qu'ils ont vu, l'année dernière, les lycéens patienter plusieurs semaines entre deux tours d'APB sans avoir la moindre visibilité ni la moindre prise sur le processus.
Parcoursup fonctionne-t-il mieux qu'APB ? Les deux systèmes diffèrent profondément, non seulement sur le plan technique, mais dans leur esprit même. Avec APB, la priorité absolue était, coûte que coûte, de tirer parti des ressorts de l'algorithme pour faire une proposition au plus grand nombre de candidats possible. Chaque année, il a fallu augmenter un peu plus les contraintes qui pesaient sur les lycéens : hiérarchisation des voeux, pastilles vertes - obligation de s'inscrire dans au moins une de ces filières, même si elle ne correspond pas aux voeux du lycéen - règles non écrites comme la « règle des six voeux » - un lycéen ne formulant pas au minimum six voeux était moins bien traité. Ces contraintes conduisaient à formuler aux candidats des propositions qui ne leur convenaient pas : 64 % à peine des candidats acceptaient une proposition faite par la plateforme.
Les difficultés de la campagne 2017 ont mis en évidence un phénomène alors peu connu : le premier voeu n'était pas forcément le premier choix. Outre les stratégies d'optimisation, il est apparu que les préférences des lycéens n'étaient pas nécessairement figées dès mars.
Parcoursup est fondé sur le principe du dernier mot à l'étudiant, gravé dans la loi : l'objectif n'est pas seulement de faire une proposition à chaque candidat, c'est de lui faire une proposition qui lui convienne. Cette idée simple permet d'accomplir l'objectif cardinal de cette réforme : démocratiser l'accès à l'enseignement supérieur et accompagner la réussite des étudiants. Pour cela, il faut donner à chaque futur étudiant le plus grand choix possible, multiplier les réponses et lui permettre de choisir non pas de manière abstraite, en classant des voeux sur une liste, mais concrètement, en répondant aux différentes propositions.
En un mois à peine, Parcoursup a fait plus de deux millions de propositions aux candidats inscrits sur la plateforme, ce qui permet de faire de vrais choix. Près de 80 % des candidats ont eu trois propositions, alors qu'APB était construit pour ne faire qu'une seule proposition à chacun de ses tours.
Le principal mérite d'APB aura été de construire une unité de temps et de lieu pour l'affectation des lycéens en réduisant le nombre important des procédures parallèles. Parcoursup parachèvera ce mouvement dès 2020 en intégrant la totalité de l'offre nationale de formation d'enseignement supérieur. Actuellement, 15 % des formations ne sont pas présentes sur APB. Une deuxième vague d'affectations aura ainsi lieu après les résultats des concours d'infirmière, des concours aux classes préparatoires d'ingénieurs et aux instituts d'études politiques, qui libèreront quelques places.
La mobilité territoriale et sociale est au coeur de cette réforme. Nous avons instauré des quotas de boursiers dans toutes les formations, y compris dans les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE). Nous avons assoupli les règles de mobilité académique, notamment en Ile-de-France, afin que personne ne soit assigné à résidence. Surtout, nous avons ouvert à l'échelle de la région académique d'Ile-de-France les formations les plus demandées : sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps), première année commune aux études de santé (Paces) et psychologie. Il n'y a dans ces filières aucune différence entre un Parisien et un Francilien. Dans l'académie de Versailles, 34 % des inscrits sur Parcoursup ont obtenu une proposition dans un établissement parisien, contre 21,7 % avec APB l'année dernière. De même dans l'académie de Créteil, où le taux est passé d'un sur trois à un sur cinq avec Parcoursup. Ce progrès doit être souligné.
Sans mobilité sociale ou territoriale, il ne saurait y avoir de démocratisation réelle de l'accès au supérieur : j'ai installé jeudi dernier un comité de suivi de la réforme composé d'experts et d'enseignants-chercheurs - et notamment de sociologues. Si des progrès ont été réalisés cette année, le comité de suivi nous appuiera afin de les amplifier en dressant un état complet des effets sociaux et territoriaux de la réforme à la rentrée.
La transparence est dorénavant la règle. Les critères pris en compte par les formations sont affichés sur Parcoursup depuis le mois de janvier. Les algorithmes permettant de faire fonctionner la plateforme nationale ont été rendus publics le 21 mai, soit trois mois avant l'expiration du délai légal. Il y a encore quelques mois, on distribuait l'algorithme d'APB sur papier ! La loi du 8 mars reconnait un droit nouveau aux étudiants, celui de pouvoir obtenir à titre individuel les informations utiles pour comprendre la réponse qui leur a été faite, sans préjudice de la nécessaire protection du secret des délibérations. Jamais un Gouvernement n'avait fait un tel effort de transparence sur les modalités d'accès au premier cycle.
Le comité éthique et scientifique, chargé de suivre et d'évaluer le fonctionnement de la plateforme Parcoursup, fera des propositions d'amélioration technique du dispositif. Il faut faire en sorte que le droit fasse le code, et non que le code fasse le droit.
De nombreuses personnes, dans les médias, et parfois même au Parlement, n'ont jamais soutenu la réforme et la contestent à la première occasion, alimentant ainsi l'anxiété des lycéens. Ce sont les mêmes qui nous disaient que la plateforme ne fonctionnerait pas, que les fiches avenir ne seraient pas remplies, que les enseignants chercheurs ne liraient pas les dossiers. Les faits leur ont donné tort : 135 000 parcours individualisés seront proposés cette année.
D'autres estiment qu'il n'y a pas assez de place dans l'enseignement supérieur. Or j'ai ouvert depuis mardi la procédure complémentaire, qui ouvre 90 000 nouvelles places. Elle recense toutes les places encore disponibles. En 2017, après la rentrée étudiante, près de 135 000 places étaient encore vacantes. Nous en créerons plus de 21 000 supplémentaires pour la rentrée prochaine, dont 4 000 pour des brevets de technicien supérieur (BTS). Avec le Premier ministre, je me suis engagée à dresser un état des lieux des besoins en places supplémentaires. Je m'exprimerai prochainement sur ce sujet. Chacun pourra accéder à une formation qui lui correspond.
Ce sont les mêmes qui soutenaient les blocages des universités. Le débat, la controverse voire la contestation font partie de notre vie et de notre histoire universitaires. Pour autant, débattre, ce n'est pas dégrader. Contester, ce n'est pas vandaliser ni s'en prendre au personnel des établissements. Le mouvement de blocage des universités est assez inédit dans le registre des mobilisations étudiantes. Les manifestations ont été peu nombreuses cette année et ont attiré très peu d'étudiants.
Dans ce mouvement, le blocage était à la fois un moyen d'action et sa propre finalité. Les bloqueurs cherchaient à vivre une forme d'engagement très utopique et bien éloigné de l'exigence de la formation à l'université. Pour autant, ce mouvement était très minoritaire. Seule une poignée de nos 73 universités ont été bloquées, sans parler des 300 autres établissements d'enseignement supérieur qui n'ont pas été touchés.
Plutôt qu'un mouvement uniforme de blocage, je parlerais plus volontiers de situations de blocage dont les ressorts étaient souvent très différents d'un site à l'autre et généralement assez éloignés de Parcoursup. Tout le monde garde à l'esprit la parodie de conférence de presse menée par les bloqueurs du site de Tolbiac.
À chaque fois qu'une parole démocratique a été rendue aux étudiants, leur majorité a systématiquement demandé la levée des blocages. On l'a vu notamment lors des consultations électroniques organisées à Strasbourg ou à Sorbonne Université, mais aussi dans les quelques assemblées générales qui ont su conserver un esprit démocratique, comme à Pau.
Face à la violence de certaines situations de blocage, les présidents d'université ont réagi avec fermeté et mesure. À aucun moment ils n'ont hésité à faire évacuer les bâtiments bloqués lorsque les conditions devenaient trop dangereuses pour les étudiants et les personnels, afin de garantir la sécurité de tous et la préservation des bâtiments. Je souligne la très grande qualité du travail de nos forces de l'ordre et le sang-froid des présidents d'universités. Des stocks de cocktails Molotov, de barres de fer et de pavés ont été retrouvés, notamment à Tolbiac, en perspective de l'intervention des forces de police.
Tout cela a eu un coût. Le Gouvernement avait débloqué 35 millions d'euros pour l'application de la loi ORE. Nous estimons la facture globale des dégradations à plus de 5 millions d'euros. L'État étant son propre assureur, le ministère prendra cette dépense à sa charge, dans l'attente que les responsabilités soient établies dans le cadre d'instructions judiciaires en cours.
Le mouvement minoritaire de blocage s'est rapidement transformé en une entreprise toute aussi marginale de perturbation des examens universitaires. Le Gouvernement, à la suite des déclarations du Président de la République, a pris un engagement très clair : 2018 ne sera pas une année universitaire blanche et il n'y aura pas d'examens ou de diplômes de complaisance. Ce phénomène était aussi très minoritaire. En Ile-de-France, trois sites étaient particulièrement sensibles : Tolbiac à Paris I, Censier à Paris III et Paris X, soit un total de 56 000 étudiants. Afin de parer à ces perturbations, j'ai installé au sein du ministère une cellule d'appui à ces trois établissements de sorte de leur proposer des solutions de délocalisation d'examens. Cette cellule a proposé 300 000 places d'examens sur table en présentiel, sécurisés par des agents de sécurité et de police.
Paris I a effectivement délocalisé une partie de ses examens à Rungis et Paris X a opté pour la dématérialisation du contrôle des connaissances. Ce mode de contrôle est pratiqué depuis plusieurs années par plusieurs établissements et nous savons en sécuriser le processus. Ainsi, à Montpellier III, le sac de la salle des serveurs avait vocation à perturber le déroulement des examens en ligne. La délocalisation des examens de cette université a permis à plus de 7 000 étudiants de composer sur table en toute sécurité. Les examens ont eu lieu sur l'ensemble du territoire et dans des conditions qui garantissent aux diplômes toute leur valeur. L'engagement du Gouvernement a donc été tenu.
Le travail réalisé cette année avec le Plan Étudiants, la loi ORE, la mise en place de Parcoursup, va dans le même sens : continuer à faire de l'université un lieu de réussite pour tous les étudiants. C'est pour cela que nous avons mis un point d'honneur à sécuriser l'organisation des examens. C'est dans ce sens que nous travaillons à préparer la prochaine rentrée universitaire qui donnera lieu, je n'en doute pas, à une prochaine audition à l'automne.
Merci de votre présence et de vos propos sur le Sénat. Si nous avons des approches différentes, nous avons le souci commun de l'intérêt général des étudiants. Vous l'avez souligné, cette CMP fut l'une des rares à avoir abouti.
À l'occasion de l'examen de la loi ORE puis de la loi sur le Règlement général sur la protection des données (RGPD), nous nous étions émus de l'absence de transparence sur les algorithmes - ou les fichiers Excel - éventuellement utilisés par les établissements pour établir le classement des candidatures ; que pouvez-vous nous dire sur l'utilisation effective de tels algorithmes par les établissements en cette première édition de Parcoursup ? Le comité éthique et scientifique a-t-il commencé à travailler sur cette question ? Les candidats à la deuxième édition de Parcoursup auront-ils connaissance des critères - notes retenues et pondérations - sur lesquels ils seront choisis avant de faire leurs choix ?
Plus de 21 000 candidats sont actuellement sans proposition et plus de 6 000 ont déjà demandé à être accompagnés par le recteur : quelle a été l'activité des commissions rectorales à ce stade pour leur apporter une solution ? Quels sont vos objectifs ? Quels moyens avez-vous mis à disposition des recteurs pour s'acquitter de cette mission ? Je laisserai mes collègues évoquer l'application des taux académiques.
Parcoursup a proposé 135 000 « oui, si ». Comment sont-ils perçus par les candidats ? Sont-ils acceptés ?
Les « algorithmes locaux » ont fait couler beaucoup d'encre. Le décret d'application confie l'examen des voeux à des commissions pédagogiques sous le contrôle du chef d'établissement. On peut toujours jouer sur les mots avec les fichiers Excel... Il n'y a pas d'algorithmes locaux mais un outil d'aide à la décision, mis à disposition des établissements, qui est totalement facultatif et qui doit être retravaillé. Il est commun à toutes les filières, qu'elles soient ou non sélectives. Certains points restent à améliorer, mais le dispositif n'est qu'un filtre à poser sur l'algorithme Parcoursup, et est transparent : certains établissements ont choisi de l'utiliser, d'autres non.
Énormément de candidats sur la plateforme ne sont pas des lycéens ; il a fallu intégrer les étudiants en réorientation, ceux qui changent d'académie, ceux qui viennent de l'étranger... Dans tous les cas, il y a obligatoirement une gestion humaine des dossiers.
Le comité éthique et scientifique, présidé par Noëlle Lenoir, s'est déjà réuni cinq fois et réalise des auditions des acteurs de Parcoursup. Comme le prévoit la loi, il rendra prochainement, après la fin de la procédure, un rapport et un avis sur le dispositif, qui seront publiés, conformément à nos engagements.
Les critères pris en compte par chaque établissement au-delà des attendus nationaux sont adoptés par le conseil d'administration, publics et affichés sur Parcoursup. C'est très important : le candidat doit connaître les raisons d'un refus d'affectation.
Les commissions rectorales, composées du recteur et des équipes chargées du supérieur et du secondaire, ont déjà commencé leur travail ; 7 885 candidats ont sollicité leur accompagnement. Elles mettent en oeuvre le droit au réexamen, qui a fait l'objet de 277 demandes. J'ai visité plusieurs commissions d'accès à l'enseignement supérieur. Le travail est en cours.
Nous avons identifié deux catégories de lycéens : d'une part, ceux qui ont de bons voire de très bons résultats mais n'ont demandé que des filières très sélectives, qui leur ont été refusées, les commissions académiques leur proposent alors d'autres formations qui pourraient les intéresser ; d'autre part, les lycéens dont les résultats sont très faibles, à qui est proposée une année de préparation. Ce dispositif nous a permis d'amorcer un dialogue ; dans la dernière commission académique que j'ai visitée, deux tiers des lycéens avaient reçu une proposition de ce type. Ils ne sont pas tenus de les accepter : le dialogue se poursuit alors. C'est parfois un bilan d'orientation complet qui leur est offert. En tout état de cause, ce sont des cas que nous n'aurons pas à gérer en septembre : l'an dernier, à la rentrée, de nombreux lycéens ne s'étaient pas présentés physiquement dans les filières où ils avaient été acceptés : il avait alors fallu les appeler pour essayer de trouver des solutions. Le dispositif actuel est compris et accepté par les familles.
Le « oui, si » a été proposé à 135 000 jeunes. Je me réjouis de voir que les lycéens en ont compris l'utilité et l'acceptent bien souvent, car ils savent qu'il y a davantage de travaux dirigés et d'encadrement à la clé. Il est trop tôt pour faire un bilan général, mais de nombreux présidents d'université m'ont dit leur agréable surprise de voir que les lycéens plébiscitaient le « oui, si ». D'aucuns craignaient initialement que cette hypothèse soit vécue comme décourageante ; j'étais pour ma part convaincue, connaissant bien les étudiants et tout particulièrement ceux de première année, qu'ils y verraient un outil de sortie de l'anonymat de la première année et de personnalisation des enseignements.
Vous avez indiqué que le coût des dégâts occasionnés par les blocages des universités s'élevait à 5 millions d'euros et que l'État le prendrait en charge - c'est-à-dire, le contribuable. Un partenariat avec les tribunaux de grande instance (TGI) est-il envisageable pour que certaines de ces réparations soient effectuées sous la forme de travaux d'intérêt général par les auteurs de vandalisme ?
Le Sénat a rétabli la semaine dernière la compétence de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) pour les visites médicales des étudiants étrangers, qu'elle exerçait jusqu'en 2016. Cette visite permet notamment de dépister un certain nombre de maladies infectieuses, dont la tuberculose, qui touche chaque année près de 300 étudiants sur les 70 000 qui arrivent sur notre territoire. La loi de 2016 avait transféré cette compétence aux universités sans transférer les moyens de l'exercer, alors que l'OFII y consacrait 58 euros par étudiant... Quelle est la position du ministère sur cette question ?
On ne peut demander aux établissements, qui ont subi ces dégradations, de financer les réparations sur leurs budgets de fonctionnement... J'aurais évidemment préféré que ces 5 millions d'euros soient consacrés à la réforme et à l'accompagnement des étudiants ; ils seront consacrés à réparer les dégâts et à racheter du matériel, c'est ainsi. Tous les présidents d'université ont porté plainte. Des enquêtes sont en cours, mais il est toujours difficile d'attribuer de telles infractions à un individu en particulier, d'autant que ceux qui les ont commises, qui n'étaient pour la plupart pas étudiants - et ne représentaient personne lorsqu'ils l'étaient - étaient cagoulés et s'en sont pris en premier lieu aux systèmes de surveillance. Nous ferons notre possible pour que les auteurs identifiés des dégradations les réparent et pour aider les établissements. Certains sites sont cependant si endommagés qu'une réouverture n'est pas envisageable avant janvier 2019.
Il est vrai que la loi de 2016 avait transféré cette compétence relative aux visites médicales des étudiants étrangers mais non les moyens correspondants aux universités. La visite n'est toutefois pas obligatoire : les étudiants étrangers qui attestent d'un suivi médical régulier en sont dispensés. Les universités ont salué le retour de cette compétence à l'OFII, mais j'ignore si c'est la meilleure solution à long terme, alors que nous cherchons à accroître l'attractivité de nos universités et le nombre d'étudiants étrangers qu'elles accueillent.
La loi ORE renforce par ailleurs, au moyen de la contribution vie étudiante, les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé, crée des conférences de prévention étudiantes, et met en place des centres de santé rendant la prise en charge médicale des étudiants possible sans avance de frais. Je suis d'une manière générale plus favorable à des solutions de prise en charge globales et intégrées des étudiants sur les sites universitaires - que les étudiants qui les fréquentent soient, ou non, inscrits à l'université.
Je remercie M. Grosperrin d'avoir précisé que l'expression de nos divergences, madame la ministre, dans un domaine qui nous tient tous à ce point à coeur, relevait de l'exercice démocratique et ne visait qu'à attirer l'attention sur ce qui appelle notre vigilance collective. Les objectifs poursuivis par la réforme étaient le droit à la poursuite de la formation, la réussite - c'est le but du « oui, si » -, et l'arrêt du creusement des disparités sociales. J'espère que le rapport qui sera remis en septembre par le comité de suivi démontrera qu'ils ont été atteints.
Les algorithmes locaux, ou outils d'aide à la décision, reposent sur trois types de données : la formation motivée, les résultats académiques, et la fiche Avenir. Membre de la CNIL, je sais que la transparence des outils informatiques nourrit la confiance. Avez-vous regardé de près la pondération de ces trois éléments dans les algorithmes locaux ? Il y va du respect de la loi...
À la différence d'APB, Parcoursup permet la mobilité géographique, ce qui est une bonne chose. Mais les chiffres qui circulent font état de quotas de mobilité oscillant entre 1 % et 70 % selon les universités : est-ce vrai ? Une régulation n'est-elle pas souhaitable ?
Toutes les universités n'ont pas joué le jeu du « oui, si », qui limite leur visibilité sur le nombre d'étudiants qu'ils accueilleront à la rentrée. Ne peut-on modifier le calendrier sur ce point ? La rentrée a lieu dans deux mois !
Vous aviez promis, madame la ministre, que nous aurions à connaître d'un grand plan d'orientation dans le cadre du projet de loi « Avenir professionnel », or il n'en est rien, alors que c'est un élément primordial. La réforme du lycée sera en vigueur dès la seconde l'année prochaine ; n'est-ce pas l'occasion de reconfigurer Parcoursup, pour améliorer l'orientation des étudiants qui passeront le baccalauréat deux ans après ?
Je sais que vous ne reviendrez pas sur la hiérarchisation des voeux. Mais tout de même, ne peut-on, pour faciliter le travail de l'ensemble des acteurs et susciter la confiance des jeunes et de leurs parents, hiérarchiser les trois premiers ? En l'état actuel des choses, on ne sait pas à quoi les lycéens aspirent !
Nous sommes tous des sénatrices et des sénateurs de la République française, décidés à faire avancer les choses. Ne doutez pas de ma loyauté républicaine, madame la ministre.
M. Mahjoubi a tenu à nous rassurer sur les algorithmes locaux, mais l'université de Pau et des pays de l'Adour m'a communiqué le sien, avec le nombre de points associés aux différents éléments contenus dans les dossiers des lycéens : le brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (BAFA), par exemple, contrairement aux assurances que vous me donniez en séance en janvier dernier, en rapporte quinze ! Si l'université de Pau publie son algorithme, pourquoi les autres ne le feraient-elles pas ? Il est en effet essentiel, pour les candidats et leurs familles, de savoir comment les universités cotent les différentes composantes de leur dossier : je demande donc de nouveau la publication de ces algorithmes locaux.
Ces outils auront un rôle majeur dans la reconfiguration du paysage universitaire et le choix que feront les lycéens et leurs familles. Nous avons donc besoin de transparence. En l'état, les universités peuvent se passer de tout contrôle national et sélectionner les étudiants selon des critères qui leur sont propres. Or je tiens à un enseignement supérieur national, dans lequel l'État est garant de l'orientation et du respect de la loi. Dans un système de concurrence généralisée des universités entre elles, tout le monde sait qui seront les gagnants, et qui seront les perdants.
Merci, madame la ministre, pour ces premiers chiffres. La nouvelle plateforme devra être évaluée lorsque nous aurons davantage de recul. Nous attendons avec impatience les chiffres de l'automne, car les situations les plus délicates à gérer sont encore à venir...
Vous nous avez donné des chiffres globaux. Comment les choses se passent-elles dans les filières sous tension, plus complexes à gérer ?
Disposez-vous d'indications sur les affectations dans l'enseignement supérieur des bacheliers professionnels et technologiques, notamment dans les filières de BTS et d'IUT que vous souhaitiez ouvrir davantage à ce public ?
Dans la loi ORE il est hélas moins question d'orientation que d'affectation. Vous-même, madame la ministre, parlez constamment d'affectation, jamais d'orientation.
Y a-t-il des disparités dans le traitement des dossiers selon les régions ?
Merci, madame la ministre, pour toutes ces précisions. De nombreux élèves à haut potentiel ne vont pas au-delà du baccalauréat ; un tiers d'entre eux seulement poursuit des études supérieures et ils sont globalement surexposés à l'échec scolaire. Existe-t-il pour eux un dispositif adapté ?
Que faites-vous pour accompagner les élèves qui ont des prédispositions aux études scientifiques ? En Israël, il existe des programmes d'accompagnement des jeunes talents scientifiques. La France ne peut-elle se doter d'une ambition analogue en développant des passerelles entre le secondaire et le supérieur ?
Merci, madame la ministre, pour les éléments que vous nous avez fournis. Pourra-t-on obtenir un bilan chiffré par académie et par département ?
Merci, madame la ministre, et cher collègue Ouzoulias, d'avoir cité l'esprit démocratique de l'université de Pau et des pays de l'Adour !
L'outil Parcoursup fonctionne globalement, il accompagne davantage et est plus transparent qu'APB. Mais la loi ORE a une ambition qui ne se résume pas à l'affectation. Les appréciations portées par les professeurs du secondaire sont très variables ; comment faciliter leur appropriation de l'outil, afin d'éviter les disparités selon les établissements, que les commissions d'affectation corrigeaient naguère ?
Je trouve intéressantes les réformes du lycée, du baccalauréat, de l'orientation et de l'apprentissage prises séparément, mais je ne vois pas la logique d'ensemble. Nous nous accordons pourtant sur la nécessité de fluidifier les parcours, du lycée à la licence.
Merci, madame la ministre, de votre présence au Sénat. Notre Assemblée a joué son rôle d'amélioration de la loi ORE, dans des délais très courts. Il y avait urgence en effet, ce qui explique sans doute que la CMP ait été conclusive. J'avais regretté dans la discussion générale le manque de respect du temps législatif, mais tout cela est derrière nous.
Dans le Maine-et-Loire, Parcoursup fonctionne plutôt bien, après les compréhensibles épisodes de saturation et les difficultés de saisie sur smartphone des débuts.
Le groupe Les Républicains souhaitait que les attendus, dans Parcoursup, s'apparentent davantage à des prérequis : les retours d'expérience me laissent penser que nous sommes sur la bonne voie - nous en reparlerons peut-être dans trois ans lorsque le réforme du lycée aura été appliquée. Le système manque toutefois de clarté : certains lycéens, classés 200e ou 250e sur la liste d'attente de leur filière de prédilection et ignorant sa capacité d'accueil, finissent souvent par en choisir une autre. Une meilleure information sur le nombre de places dans chaque formation permettrait d'y remédier.
Nous avons été plusieurs à souligner le succès du « oui, si », mais toutes les universités n'ont pas joué le jeu, invoquant le manque de moyens pour le faire.
Avant le baccalauréat, 18 000 lycéens n'avaient reçu aucune réponse positive sur Parcoursup, soit 21,5 % ; la comparaison avec APB n'est pas totalement pertinente, mais enfin, l'an dernier, ils n'étaient que 19 % dans cette situation. L'affectation au fil de l'eau a ses avantages et responsabilise les lycéens, mais il faut dire aussi la vérité des chiffres.
Nous avons d'autres frustrations, madame la ministre, concernant le débat sur le projet de loi « Avenir professionnel », que nous vous invitons à relayer. Notre rapporteur pour avis, Laurent Lafon ici présent, a dû écrire son rapport alors que nous ne disposions même pas encore du texte issu des travaux de l'Assemblée nationale ! On gagne toujours à respecter des délais permettant une réflexion vraiment sérieuse et approfondie.
Vous avez pu mesurer notre investissement sur la loi ORE ; nous aurions aimé connecter cette question de la réussite et de l'orientation des étudiants aux autres questions que nous débattons en ce moment. Peut-être d'ailleurs pourrez-vous nous parler du travail que vous poursuivez, avec Jean-Michel Blanquer, sur ce sujet.
Par ailleurs, je m'exprimerai au nom de mes collègues sénateurs ultramarins : quid de la rentrée dans les universités des DROM-COM ? Je pense en particulier à l'université Antilles-Guyane, à laquelle nous avions consacré un rapport il y a quelques années.
S'agissant des algorithmes locaux, si une recette de cuisine est un algorithme, alors, en effet, nous ne parlons pas de la même chose, monsieur Ouzoulias, et c'est moi qui suis probablement ignorante.
La pondération des données sera évidemment essentielle. La très grande majorité des universités a dû accomplir une tâche à laquelle elles n'avaient jamais été confrontées ; elles ont beaucoup tâtonné. Elles se sont appuyées sur l'expérience des IUT, qui font ce travail de classement des dossiers depuis très longtemps. Certaines conférences de doyens avaient anticipé, en STAPS notamment, de façon à ce que les choses se déroulent de manière uniforme dans toutes les universités.
Monsieur Ouzoulias, j'imagine que vous demandez leurs algorithmes locaux à tous les établissements d'enseignement supérieur, et pas seulement aux universités ; ces dernières ne sont que 73, alors qu'il existe plus de 350 établissements d'enseignement supérieur non universitaires.
Les formations sélectives classent depuis des années en utilisant des algorithmes, sans que personne ne s'intéresse à la façon dont ces algorithmes sont conçus.
Comment la pondération des données paramétrable est-elle effectuée ? Cette question est évidemment très importante. Reste que les commissions sont totalement libres de décider si elles souhaitent rendre publiques ces données ou, au contraire, ne pas briser ce qu'elles appellent le secret des délibérations. Les positions, de ce point de vue, sont très variables d'un établissement à un autre. La grille que vous mentionnez concernant l'université de Pau m'est inconnue, parce qu'aucune université ne se sent dans l'obligation de me faire remonter ce genre d'informations. Les universités sont autonomes.
Dès lors, elles sont responsables du contenu de leur offre de formation, et donc de la façon dont elles accueillent les étudiants dans ces formations. Le comité scientifique et éthique s'intéresse à ces sujets, et, en effet, sans aller jusqu'à l'uniformité, il faut que nous veillions à établir, malgré tout, une forme d'harmonie.
Quoi qu'il en soit, en matière de gestion des affectations, je ne vois pas comment on peut aller beaucoup plus loin. Il faut simplement que nous trouvions le juste équilibre.
Je voudrais parler maintenant de mobilité géographique et de variation des quotas de mobilité. Il faut bien se garder de confondre le thermomètre avec la température !
Parcoursup a permis de mettre en évidence la variabilité des taux de mobilité en fonction des formations. Ces taux ont été fixés au cas par cas par un travail conjoint des recteurs et des présidents d'université. Et les recteurs ont veillé à ce que les jeunes ne soient pas empêchés de poursuivre les études de leur choix à proximité de leur lieu de résidence. Dans certains cas, c'est vrai, ces quotas de mobilité sont très faibles, de l'ordre de quelques pourcents, mais, faut-il ajouter, cette situation concerne les filières sous tension, où l'an dernier lesdits quotas étaient de zéro, sachant que priorité absolue était donnée à la résidence académique ! Ces quotas sont plus importants lorsque la pression des étudiants locaux est moindre, et lorsqu'on peut, donc, ouvrir largement les formations à des étudiants venant d'ailleurs. Vous voyez que le travail a été fait dans la dentelle.
Par ailleurs, on ne peut pas traiter de la même façon la région Île-de-France et les autres régions. Dans la majorité des régions, il existe une université par grand centre urbain, donc une faculté de droit, une faculté de médecine, une faculté de sciences, une faculté de lettres, etc., sans divergences particulières de réputations. L'Île-de-France, elle, connaît une situation spécifique ; il importe que nous puissions y assurer de la mobilité. Les taux de mobilité sont d'ailleurs de 100 % dans les filières qui se sont entendues pour travailler ensemble, la psychologie par exemple. Dans ces cas-là, la région et l'académie se confondent. Dans d'autres filières - je pense notamment à la chimie -, peu de formations sont offertes par les universités de Paris intra-muros. Il est donc très compliqué d'accepter beaucoup d'étudiants non parisiens dans ces formations, à moins de décréter que les formations de chimie de Paris intra-muros sont censées accueillir tous les meilleurs étudiants d'Île-de-France, et que celles qui sont proposées de l'autre côté du périphérique sont censées accueillir les étudiants moyens.
Je ne peux pas entendre, encore moins valider, une telle proposition. Je maintiens que toutes les filières de premier cycle de l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur du territoire sont des filières de qualité. On a observé, pour les classes préparatoires aux grandes écoles, une aspiration par un faible nombre d'entre elles des meilleurs lycéens de toute la France, à l'exception de ceux qui n'avaient pas les moyens financiers de déménager. C'est un vrai problème ! Les admis aux concours d'entrée des très grandes écoles françaises sortent d'un très petit nombre de lycées, qu'on peut compter sur les doigts d'une main, tout ça parce qu'il n'existe pas de régulation de la mobilité académique.
Ma philosophie est la suivante : je veux de la mobilité académique, mais je ne veux pas qu'un jeune soit forcé d'aller étudier à 50 kilomètres de chez lui, parce qu'on aura accepté que des étudiants de toute la France viennent étudier dans son université de proximité. Tout a été fixé de gré à gré entre recteurs et présidents d'universités.
J'ai demandé au comité scientifique et éthique de faire des propositions. Ce comité comprend des scientifiques, des sociologues, qui pourront travailler sur les données chiffrées et émettre des recommandations susceptibles de relancer la mobilité sociale et géographique sans pour autant produire des concentrations sur certaines filières de tous les meilleurs étudiants de France. Je suis très attachée à la mobilité géographique ; elle a, en tout état de cause, progressé cette année par rapport à l'an dernier.
Concernant les « oui, si », certains établissements ont émis ce type de réponse, d'autres s'y sont refusés. Il faut distinguer plusieurs cas de figure.
Certains établissements, qui étaient en général plutôt farouchement opposés à la loi ORE, ont considéré que les « oui, si » auraient des effets d'exclusion vis-à-vis des lycéens ; ils ont donc volontairement décidé, pour des raisons parfois exclusivement idéologiques, de se passer d'une telle option. Le taux de réussite de ces établissements, évidemment, n'a aucune chance de s'améliorer.
Certains établissements ont considéré qu'ils ne devaient émettre des « oui, si » que si les filières étaient en tension, ce qui n'a aucun sens - le taux de réussite des étudiants n'est pas forcément supérieur dans les filières qui ne sont pas en tension ! Ils ont pris le « oui, si » comme une réponse dissuasive.
Certains établissements ont plébiscité le système du « oui, si » et l'ont très largement exploité, jusqu'à proposer plus de « oui, si » que de « oui » ; ces établissements sont ceux qui sont les plus accompagnés d'un point de vue financier.
Enfin, certains établissements préfèrent accepter tout le monde et, après la rentrée, organiser des tests et mettre en place des groupes de niveaux. Avec ce genre de stratégie, néanmoins, rien n'est obligatoire ou prescriptif.
En observant les taux de réussite, nous verrons bien ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Je compte sur un effet d'entraînement et d'entraide - le monde universitaire y est particulièrement propice. Ceux qui ont conçu des dispositifs d'accompagnement des « oui, si » sont tout à fait prêts à partager leurs réflexions. De ce point de vue, je pense que les choses vont s'améliorer assez rapidement.
Monsieur Ouzoulias, vous avez dit votre attachement à un enseignement supérieur national. J'y suis moi aussi très attachée ! Ceci dit, une fois de plus, il faut regarder la réalité. On ne donne pas forcément le même cours à tous les étudiants d'une même licence et l'on n'attend pas la même chose de tous les lycéens qui arrivent en première année. L'harmonisation est importante, mais instaurer une même grille pour tout le monde...
n'aurait vraiment aucun sens.
S'agissant de l'orientation, le système d'orientation tel qu'il a été mis en place cette année a été très efficace. Nous n'avons reçu que de très bons retours sur le dédoublement des professeurs principaux et sur les deux semaines d'orientation. Le lien est constant avec Jean-Michel Blanquer et avec la réforme du lycée : il est prévu de consacrer 56 heures à l'orientation dès la seconde.
L'orientation se fera d'autant mieux que les commissions d'accès à l'enseignement supérieur, que nous avons créées, ont bouleversé les pratiques : elles ont permis de réunir autour de la même table des enseignants du secondaire et des enseignants du supérieur, avec pour préoccupation commune le sort du lycéen et futur étudiant. Ils ont eu l'occasion d'échanger enfin sur ce qu'aujourd'hui on attend respectivement d'un lycéen et d'un étudiant, sur les programmes de terminale et de première année de licence.
Nous avons entendu de très belles histoires de la part de professeurs principaux : d'abord réticents à remplir les fiches avenir, et notamment à juger la « capacité de motivation » des lycéens, ils se sont mis à regarder leurs élèves d'une autre façon. Une nouvelle culture va se mettre en place : une orientation fondée sur l'accompagnement et vécue de manière moins stressante. Les conseillers d'orientation pourront, par là même, prendre le temps de dresser de vrais bilans avec les élèves qui leur seront spécifiquement adressés. Une partie des moyens qui ont été débloqués ont d'ailleurs été mis à disposition des rectorats pour renforcer les conseillers d'orientation.
Oui, monsieur Manable, le département des études statistiques du ministère produit chaque année un bilan chiffré ; ce bilan est académique et non départemental. Comme je le disais tout à l'heure, la région Île-de-France mérite, par sa spécificité, une attention particulière. Cette spécificité est liée à la quantité de lycéens et d'étudiants qui s'y trouvent, et à la profusion d'établissements, dont beaucoup sont d'ailleurs mal connus.
Quid de la présence des bacheliers professionnels et technologiques dans le supérieur ? Nous avons insisté, cette année, pour que cette présence ne soit plus un objectif à atteindre, mais donne lieu à des quotas contraignants de bacheliers professionnels dans les BTS et de bacheliers technologiques dans les IUT. Le travail reste à effectuer, dans les mois qui viennent, pour organiser au sein des universités la coexistence de vraies filières courtes technologiques et de filières de préparation aux écoles d'ingénieurs ou de commerce, les IUT et les BTS étant souvent utilisées comme voies alternatives aux classes préparatoires pour atteindre le niveau bac + 5. Nous examinerons cette question avec les présidents d'université.
S'agissant des filières qui étaient particulièrement en tension, monsieur Lafon, nous leur avons alloué 17 000 places supplémentaires. Nous attendons de voir comment les choses vont s'articuler. Certaines de ces filières se sont révélées statistiquement moins attractives que les années précédentes - je pense par exemple aux cursus STAPS, dont le taux d'attractivité a baissé. Mais cette baisse est due à la réouverture simultanée de places en DEUST, diplôme d'études universitaires scientifiques et techniques, et en CREPS, centres de ressources, d'expertise et de performance sportive.
Certaines filières qui pensaient être le premier choix des étudiants s'avèrent ne pas toujours l'être. Les filières STAPS sont remplies, certes, mais, pour l'instant, les jeunes qui ont été acceptés n'ont pas tous confirmé leur voeu de manière définitive - ils veulent prendre encore le temps de réfléchir un peu. C'est toujours la même histoire : hiérarchisation versus choix a posteriori. On rencontre ce phénomène dans toutes les filières sous tension, et y compris dans les classes préparatoires, qui en conçoivent de l'étonnement. Les lycéens ont parfaitement compris qu'ils avaient le temps : ils attendent de voir pour choisir la voie qu'ils préfèrent. Certes, cette situation est un peu plus difficile à gérer pour les établissements ; mais il en va de l'intérêt des étudiants.
Oui ! D'autant que tout va bien : on sait faire des emplois du temps !
Monsieur Piednoir, pour éviter un bug à l'ouverture de Parcoursup, nous avions prévu six sites miroirs sur lesquels les flux devaient basculer. La bascule a occasionné six à sept minutes d'attente, et les sites miroirs ont parfaitement fonctionné. Au regard du travail fourni par les équipes, auxquelles je rends hommage, je ne peux pas laisser dire qu'il y a eu un bug à l'ouverture de la plateforme.
Même chose pour les smartphones. Quelques dizaines de lycéens, soit une toute petite minorité, ont échoué à trouver le bouton, qui a pourtant toujours été présent ; ceci a suffi à faire le buzz. Nous avons bien compris que c'était un sujet d'inquiétude ; l'an prochain, nous vous promettons que le bouton sera énorme. L'application n'était peut-être pas des plus ergonomiques ; nous allons y travailler.
Faut-il améliorer l'information sur les listes d'attente ? Bien sûr ! Mais il s'agissait de la première année de fonctionnement de la plateforme ; dès l'an prochain, nous serons en mesure de communiquer aux candidats le rang du dernier appelé de l'année précédente.
Je précise néanmoins qu'un grand nombre d'informations sont redescendues via les professeurs principaux. L'intérêt de fixer la date des premières réponses au 22 mai, c'est que les professeurs étaient là pour accompagner la réforme. Un travail remarquable a été fait pour produire des documents d'accompagnement à destination des établissements.
Quelques chiffres. Parmi les candidats inscrits sur la plateforme Parcoursup, 597 567 se sont vus proposer une procédure d'admission ; à la même date, sur APB, ce chiffre était de 589 845, soit 1,3 % de plus pour Parcoursup. Mais je ne donne ces chiffres qu'à titre de clin d'oeil : cela n'a aucun sens de comparer les systèmes, dans un sens comme dans l'autre.
Le nombre de candidats inscrits était de 812 000, sensiblement identique à celui de l'année précédente.
S'agissant des outre-mer, Guyane d'un côté, Martinique et Guadeloupe de l'autre, je vois très régulièrement les présidents des deux universités ; ils ne me signalent aucune difficulté particulière concernant Parcoursup. Nous avons eu un problème à Mayotte ; nous l'avons résolu en ouvrant des places supplémentaires et de nouveaux bâtiments pour le Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR), qui travaille en partenariat avec l'université de Nîmes. En Nouvelle-Calédonie, le calendrier est adapté à l'hémisphère sud.
Ce matin, nous avons eu le plaisir de livrer les conclusions des Assises des outre-mer en présentant le livre bleu qui en est issu. Un vrai travail a été mené avec les universités afin de les mettre en réseau, sachant qu'elles ne sont pas en capacité d'offrir tout l'éventail de formations qu'on peut trouver en métropole. L'idée est que les premières années au moins puissent être effectuées sur place sans mobilité - avec mobilité, le taux de réussite est très faible. Nous nous efforçons en outre de placer ces universités au coeur de leurs régions respectives. L'objectif est de prendre en compte la dimension internationale pour développer de véritables stratégies de site.
Merci pour la précision de vos réponses, madame la ministre. Je souhaiterais simplement vous entendre sur l'arrêté licence et l'enseignement modulaire.
L'arrêté licence permet de mettre la loi sur les rails de son application, via la mise en place de formations personnalisées fondées sur l'acquisition de connaissances et de compétences par modules capitalisables. Ceci permet de répondre aux attentes d'étudiants qui ont besoin de plus de temps que d'autres pour s'orienter définitivement, en leur faisant notamment des propositions pluridisciplinaires. Certains de ces modules peuvent être spécifiquement professionnalisants. L'idée est de prendre en compte toute la diversité des étudiants, qu'ils viennent à l'université pour faire des études longues ou des études courtes professionnelles, les études courtes pouvant très bien, d'ailleurs, devenir des études longues. La modularité permet cette souplesse. Elle permet aussi de donner une place aux stages ou à l'alternance.
Merci, madame la ministre, d'avoir pris le temps de répondre à chacune de nos questions.
Une première étape, très encourageante, a donc été franchie, dont il faudra ultimement mesurer toute l'efficacité et toute la portée. Nous continuerons à suivre le dossier Parcoursup, jusqu'à la rentrée, c'est-à-dire jusqu'à ce que chaque futur étudiant se trouve affecté.
Je remercie notre rapporteur Jacques Grosperrin qui a su être à la fois exigeant et constructif au moment de l'examen du projet de loi ORE. Le système APB ne pouvait plus durer ! Nous nous réjouissons qu'un terme ait été mis à ce scandale.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 12 h 20.