Nous sommes heureux d'accueillir Mmes Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie, Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille et Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, venues nous présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013.
Ce texte est particulièrement important dans la mesure où il constitue la première traduction législative des orientations du Gouvernement en matière de protection sociale ainsi que par le contexte de dégradation des comptes sociaux dans lequel il s'inscrit.
Ce projet de loi traduit une inversion par rapport à la politique de ces dernières années marquée à la fois par un recul des droits sociaux et une augmentation du déficit. Ce dernier, qui atteint 17,4 milliards d'euros en 2012 pour le régime général et le fonds de solidarité vieillesse (FSV), devrait en effet être ramené à 13,9 milliards en 2013 alors que, dans le même temps, le rôle de la protection sociale sera réaffirmé.
Il s'agit d'un PLFSS de protection, qui ne prévoit pas en effet de déremboursements ou de remises en cause des droits sociaux car les efforts demandés porteront sur l'organisation du système et non sur les assurés.
La priorité donnée à la santé se traduira par une croissance de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) de 2,7 % contre 2,5 % en 2012, soit un effort supplémentaire de 4,5 milliards, réparti entre la médecine de ville et la médecine hospitalière bénéficiant chacune d'une augmentation de 2,6 %, et les dépenses médico-sociales en hausse de 4 %.
Nous avons aussi la volonté d'assainir autant que possible nos régimes de retraite, toujours financièrement très fragiles malgré la réforme de 2010. Une partie des recettes nouvelles bénéficiera donc au FSV et aux différents régimes, des efforts spécifiques étant demandés pour équilibrer la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ou celle des industries électriques et gazières ; le prélèvement instauré sur les retraités alimentera la politique de lutte contre la perte l'autonomie. Le texte prévoit aussi des mesures positives pour les travailleurs de l'amiante, qui pourront prendre leur retraite à soixante ans quel que soit leur régime, et pour les travailleurs non salariés agricoles qui bénéficieront de points retraite gratuits en compensation des périodes d'invalidité et de maladie.
Au titre de la priorité donnée à la famille, nous avons déjà instauré le tiers payant des dépenses de garde d'enfants pour les familles modestes et augmenté de 25 % l'allocation de rentrée scolaire pour un coût de 350 millions d'euros. Un milliard d'euros de recettes ont été affectés à la branche famille pour financer cette dépense et compenser le déséquilibre financier de la branche. Au total, le déficit est stabilisé ; sans cet effort, il se serait aggravé de 700 millions.
Enfin, la prise en charge à 100 % des interruptions volontaires de grossesse a été décidée.
Notre projet s'inscrit donc résolument dans une perspective de maintien et d'extension des droits car il ne s'agit pas seulement de répondre à des besoins sociaux mais aussi, plus que jamais en cette période de tourmente due à la crise, de réaffirmer le rôle central de la protection sociale dans la cohésion républicaine.
Le redressement des comptes ne reposera pas sur les assurés mais passera par une politique de modernisation qui concernera notamment l'assurance maladie, la branche vieillesse faisant l'objet d'une réforme spécifique et globale en 2013, annoncée lors de la conférence sociale de juillet dernier.
Premier pilier de cette modernisation, une politique d'économies renforcée, portant sur 2,4 milliards d'euros dont environ 1 milliard au titre de la politique du médicament et 650 à 660 millions pour l'hôpital, au travers d'une réorganisation des parcours, la maîtrise des dépenses de médicament et la rationalisation des achats. Le reste des économies sera réalisé par la médecine de ville grâce à une baisse des tarifs de certaines professions, davantage de maîtrise médicalisée et, là aussi, une meilleure organisation des parcours.
La réorganisation du système de soins constitue le second pilier de cette politique avec pour fil conducteur l'égalité d'accès aux soins, mise à mal par la croissance non maîtrisée des tarifs ou la constitution de déserts médicaux. Près de 20 % des Français ont renoncé à des soins ou les repoussent pour des raisons financières : ce n'est pas satisfaisant.
Pour l'instant, aucune mesure financière particulière n'est prévue dans la loi car les négociations sur les dépassements d'honoraires sont en cours. Notre action en matière d'organisation consistera d'une part, à revaloriser les missions de l'hôpital public, d'autre part, à veiller à une meilleure organisation de la médecine de proximité. Nous reprenons à cette occasion plusieurs propositions du rapport sur le financement de l'hôpital public, rendu dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) par MM. Le Menn et Milon. Ainsi est-il envisagé de réintroduire dans la loi la notion de service public hospitalier, de faire en sorte que la tarification à l'activité ne soit plus le seul mode de financement des hôpitaux, de protéger les missions d'intérêt général en mettant fin à la pratique des gels de début d'année ou encore de faciliter l'accès au crédit des CHU, en les autorisant à émettre des billets de trésorerie sans passer par les communes. En outre, des concertations sont menées afin de mettre en place un pacte de confiance pour l'hôpital public dont la préparation est confiée à Edouard Couty.
Notre politique de réorganisation concerne aussi la médecine de proximité de façon à éviter les hospitalisations inopportunes, dans la mesure où, dans notre pays, on hospitalise trop et trop longtemps, constat qui ne vaut pas uniquement pour les personnes âgées.
Ceci conduit à des évolutions d'ensemble impliquant notamment la réorganisation des services d'urgence ou encore la constitution de pôles de soins pluridisciplinaires grâce au financement du travail en équipe des personnels soignants. Ces pôles prendront appui sur une expérimentation de parcours de soins menée avec les personnes âgées et dont les résultats sont attendus pour l'année prochaine.
Quant à la lutte contre les déserts médicaux, si elle appelle nécessairement plusieurs mesures, il en est une particulièrement symbolique : la création de contrats de praticiens locaux de médecine générale à destination des secteurs sous-dotés.
Comme les années précédentes, le PLFSS pour 2013 prévoit des réductions de prix sur les médicaments pour environ 1 milliard d'euros. Mais n'allons-nous pas toucher rapidement les limites d'un tel mécanisme ? Comment accroître la part des génériques qui ne représentaient que 13 % du marché des médicaments remboursables en 2011, soit moins que chez nos voisins ?
L'an passé, le Parlement a voté la création d'un fonds d'intervention régional (Fir) assurant une certaine fongibilité des crédits gérés par les agences régionales de santé (ARS). Comment cette réforme se met-elle en place, notamment en ce qui concerne la permanence des soins qui représente l'enveloppe la plus importante ? Avez-vous l'intention d'élargir encore ce fonds ? Alors que le Fir est abondé par des crédits de l'assurance maladie et de l'Etat, ces derniers devraient, d'après le PLF, passer de 182 millions d'euros en 2012 à 150 millions en 2013, soit une réduction de 32 millions. Quel sera donc le montant, fixé par arrêté, de la dotation que l'assurance maladie devra verser au Fir en 2013 ?
La convention qui lie l'assurance maladie aux centres de santé expirant prochainement, comment le Gouvernement entend-il renforcer la place de ces structures qui pratiquent tiers payant et tarifs opposables ?
Face aux évolutions des besoins de santé et de la démographie médicale, comment avancer concrètement vers une meilleure répartition des compétences entre les différents professionnels de santé : médecins, infirmiers, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes... ?
Peut-on connaître les objectifs du Gouvernement dans les négociations sur les dépassements d'honoraires qui devraient s'achever très prochainement ?
Pourquoi la contribution additionnelle payée par les retraités pour financer la politique d'autonomie est-elle versée au FSV et non à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) qui est normalement en charge de cette politique ?
Quel sera le calendrier de la réforme sur la dépendance ?
Comment analysez-vous la hausse du déficit du FSV, qui passe de 3,4 milliards en 2011 à 4,1 milliards en 2012 alors que, lors de la réforme 2010, il avait été annoncé que ce déficit se réduirait du fait du recul de l'âge légal ?
De même, à l'occasion de cette réforme, avait été évoqué un retour à l'équilibre de la branche vieillesse en 2017, perspective contredite par les chiffres actuels qui laissent, pour cette même année, entrevoir un déficit de 8 milliards d'euros. Un rendez-vous en 2013 avait été annoncé. Débouchera-t-il sur une nouvelle réforme et si oui, selon quel calendrier ?
Enfin, nous sommes très sollicités à propos des conséquences de la suppression de l'allocation équivalent retraite (AER) fin 2010 qui, si elle ne concerne pas directement la sécurité sociale, laisse néanmoins nombre de nos concitoyens, et surtout de concitoyennes, dans des situations dramatiques. Qu'envisagez-vous ?
Pourquoi n'est-on malheureusement pas revenu sur la décision du précédent gouvernement visant à reporter de trois mois la date de revalorisation des prestations familiales ?
Dans son rapport de septembre sur les comptes de la sécurité sociale, la Cour des comptes critique l'effet faiblement redistributif des prestations familiales sous conditions de ressources et appelle plus largement à repenser l'architecture de l'ensemble de notre politique familiale. Comment réagissez-vous à ces observations et comment comptez-vous engager ce vaste chantier ?
Je tiens à saluer la triple ambition affichée par la ministre : protéger les Français au moment où, faute de moyens, ils sont près d'un quart à renoncer à se soigner, redresser les comptes sociaux et réorganiser notre système de sécurité sociale pour le rendre plus efficient de façon à en assurer la pérennité. Vous jouez la carte de la solidarité, ce dont on ne peut que se féliciter.
Je me félicite de même de la croissance de 4 % de l'Ondam médico-social, cette hausse étant de 4,6 % pour les personnes âgées et de 3,3 % pour les personnes handicapées. Ceci représente 18 milliards, dont 650 millions d'euros de mesures nouvelles. 50 millions sont destinés à la modernisation de soixante-dix établissements, l'ensemble des acteurs saluant la priorité donnée aux établissements existants dont les moyens progressent de 1,4 % contre 0,8 % en 2012. Si j'avais regretté, l'an dernier, l'absence d'avancées en matière d'autonomie, tel n'est pas le cas cette année, grâce aux perspectives ouvertes par l'article 16 du PLFSS relatif à la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie.
Ma première question concerne la convergence tarifaire pour les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) : alors que sa suppression est attendue, sa poursuite pourrait ne pas être sans conséquence sur l'emploi. Pourquoi dès lors ne pas procéder à un gel, ce qui enverrait un signal politique fort ?
Si l'article 53 réduisant à un an le délai de facturation à l'assurance maladie des prestations des établissements pour personnes handicapées ne pose pas de problème de principe, une difficulté existerait toutefois du fait des délais de notification des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Il semble en effet que sans notification individuelle, aucune facturation ne soit possible.
Quid des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) dans le secteur médico-social alors que les décrets d'application de la loi HPST (hôpital, patients, santé et territoires) ne sont pas parus sur ce point ?
Je salue les propos volontaristes concernant les personnes handicapées vieillissantes ainsi que la mission confiée à notre collègue Claire-Lise Campion sur l'accessibilité. Je souhaiterais connaître les contours et le calendrier de celle-ci.
Enfin, je confirme que nous sommes très sollicités à propos de la suppression de l'AER.
Tout d'abord deux motifs de satisfaction : la possibilité pour les travailleurs de l'amiante de tous les régimes de prendre leur retraite à soixante ans et le quasi-doublement de la majoration pour tierce personne.
La diminution prévue de 200 millions d'euros des ressources du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) lui permettra-t-elle de faire face à ses obligations ? Qu'en est-il des suites des contentieux devant la Cour d'appel de Douai ?
S'agissant du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata), sera-t-il possible d'inscrire de nouveaux établissements sur la liste ouvrant droit à l'allocation ?
Pour 2013, aucun versement de la branche AT-MP à la branche vieillesse n'est prévu au titre de la retraite anticipée pour pénibilité. Cette situation va-t-elle perdurer ?
Le déficit de 1,7 milliard d'euros de la branche AT-MP est actuellement supporté par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). L'augmentation de 0,05 point de la cotisation permettra-t-elle de le réduire progressivement ? Je rappelle que parmi les observations que nous avions, Catherine Deroche et moi, formulées sur ce sujet, nous avions exclu la reprise de ce déficit par la Cades car il n'est pas concevable que l'ensemble des Français contribuent à une branche qui devrait s'équilibrer elle-même.
Enfin, nous sommes une majorité à penser, après en avoir beaucoup débattu lors de l'examen du PLFSS 2012, que la fiscalisation des indemnités journalières ne se justifiait pas dans la mesure où, conformément à l'accord qui a présidé à leur création, il s'agit bien d'indemnités plafonnées et non de salaires. Le Gouvernement va t-il réfléchir au retour à une situation plus juste ?
Ma réponse sur la revalorisation des prestations familiales vous semblera peut-être en demi-teinte. Alors qu'en 2012, le précédent gouvernement avait procédé à une moindre revalorisation de la base mensuelle des allocations familiales et du plafond de ressources, nous procéderons en ce qui nous concerne à la revalorisation légale, c'est-à-dire suivant l'inflation. En revanche, la date du 1er avril sera maintenue, point sur lequel François Hollande n'avait pris aucun engagement de campagne.
Nous pouvons rejoindre l'avis de la Cour des comptes sur la complexité du dispositif qui conduit même certaines familles à renoncer à demander des prestations, constat aussi partagé par le Haut Conseil de la famille. Aussi, veillerons-nous à ce que la prochaine convention d'objectifs et de gestion (Cog) avec la caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) prévoie des mesures de simplification.
De même, nous partageons le souci de faire en sorte que les aides soient ciblées sur les familles les plus modestes. La revalorisation de l'allocation de rentrée scolaire et le tiers payant pour garde d'enfant déjà décidés vont en ce sens.
Le travail de simplification ne fait toutefois que commencer, l'ensemble des partenaires sociaux ayant, au cours de la conférence sociale de juillet dernier, reconnu la nécessité d'une meilleure adaptation du dispositif aux besoins des familles.
Il y a quelque temps, interrogée sur le fait que la santé et la solidarité en faveur des personnes âgées ne figuraient pas parmi les priorités du budget, j'avais été amenée à rappeler qu'elles relevaient non du PLF, mais du PLFSS. L'examen de ce dernier met bien en évidence que ce Gouvernement accorde une place de toute première importance à ces sujets. Le budget des personnes âgées est un beau budget et je le porte avec fierté, avec des crédits médico-sociaux en progression de 4,6 %. En outre, la progression de 0,8 % de la masse salariale, jusqu'ici gelée, donnera plus de fluidité aux négociations et d'attractivité à un secteur difficile. Les 147 millions d'euros de crédits de médicalisation créeront entre six mille et huit mille emplois tandis que l'amendement qui sera déposé par le Gouvernement débloquant 50 millions d'euros en faveur de l'aide à domicile donnera un moment de respiration à ce secteur ainsi qu'aux départements qui ont soutenu les associations. Nombre d'emplois devraient ainsi être sauvés.
L'un des éléments forts du PLFSS est bien entendu l'inscription, dans la loi, d'un financement de la perte d'autonomie, très peu de temps après notre arrivée. Selon quel calendrier ? La réforme devrait être mise en place lors de la première moitié du quinquennat et espérons le, très vite après le 1er janvier 2014, date à laquelle la contribution exceptionnelle sera prélevée en totalité.
Monsieur Kerdraon, la réforme de la perte d'autonomie traitera non seulement du financement, mais aussi d'anticipation et de prévention, car la dépendance n'est pas inéluctable : il est possible d'agir en amont. D'où, dans le prolongement du parcours de soins déjà évoqué, la mise en place de calendriers de santé, de rendez-vous de prévention et de traitement des pertes partielles d'autonomie ainsi que des signes de fragilité dès lors qu'ils sont réversibles.
Un décret devait intervenir pour fixer les seuils au-delà desquels les Cpom deviendraient obligatoires. Toutefois, compte tenu du caractère très contraignant de cette procédure, nous préférons que le dispositif demeure volontaire tant que nous n'avons pas procédé à une réforme de la tarification, sujet auquel nous accordons beaucoup d'importance.
En matière de convergence, les travaux engagés par les représentants du secteur en 2009 avaient été interrompus dans l'attente d'une réforme de la dépendance qui est, comme vous le savez, passée par pertes et profits. C'est un sujet complexe et nous faisons actuellement en sorte de mettre au point des règles claires de tarification.
Enfin, je souhaiterais rappeler avec beaucoup d'enthousiasme et de force que le paiement de la petite cotisation additionnelle sur les retraites, largement indolore, doit être mis en regard du fait que, grâce à elle, nous posons d'ores et déjà les premières pierres du projet de loi sur la perte d'autonomie.
Je salue le travail de qualité qui a été réalisé par le Sénat et, en particulier par la commission des affaires sociales, en faveur des personnes en situation de handicap. Il nous sera utile pour mener nos politiques.
L'article 53 est un article technique et de bonne gestion : il réduit le délai de facturation à l'assurance maladie des dépenses des établissements médico-sociaux. Ce délai est aujourd'hui compris entre deux et cinq ans, ce qui pose un problème de gestion. Il devient en outre très difficile de gérer les crédits de l'Ondam. La Cour des comptes et l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) nous ont interpellés à ce sujet. Cette mesure de bonne gestion ne doit évidemment par se retourner contre les établissements, qui ne sont pour rien dans l'affaire : ce délai moyen s'explique le plus souvent par le temps de réaction des MDPH, parfois par le refus des caisses d'assurance maladie d'examiner les factures non notifiées par celles-ci. Les associations, les députés et les sénateurs s'en sont inquiétés. Mais, plutôt que de retirer l'article 53, nous allons chercher d'autres solutions : on peut par exemple donner des consignes plus précises visant à favoriser la fluidité des échanges entre les différents acteurs.
La situation des personnes handicapées vieillissantes constitue une question de société majeure. Seules 40 % des places pour adultes handicapés programmées en 2008 sont aujourd'hui installées et 60 % sont autorisées, ce qui représente respectivement 16 500 et 24 500 places. Nous accusons donc un énorme déficit concernant les adultes et faisons le constat d'une prise en compte très insuffisante des personnes handicapées vieillissantes. Nous avons toutefois renversé la vapeur, en créant 3 000 places en établissements médico-sociaux cette année.
Nous avons en outre décidé de mettre l'accent sur la dimension qualitative, grâce notamment à une revalorisation de la masse salariale. Nous souhaitons traiter les personnes handicapées vieillissantes différemment : quand on est handicapé, on est vieux très tôt et on vieillit vite. Pour cela, nous prendrons en compte l'ensemble du parcours de vie et ferons évoluer les équipements médico-sociaux : nous examinerons par exemple la possibilité de créer des Ehpad spécialisés. Sur les 2 500 places programmées par le plan en foyers de vie, moins de la moitié ont été créées à ce jour. Notre projet qualitatif a amorcé le rattrapage. Nous travaillons en outre sur le maintien à domicile ainsi que sur l'adaptation des pratiques professionnelles à ce nouveau public : nous avons mis en place, avec Mme Delaunay, un groupe de travail dédié, composé de personnalités qualifiées, et serons en mesure de répondre précisément à vos questions dès le début de l'année prochaine. La personne handicapée vieillissante sera pour nous une priorité, et ce budget nous donne les moyens de rattraper notre retard.
M. Daudigny s'inquiétait d'un possible épuisement des pistes d'économies réalisables en matière de médicament. J'entends là une autre question : à travers les mesures significatives d'économies sur le médicament que nous proposons, ne mettons-nous pas en péril, dans un contexte difficile pour l'emploi, la vitalité de l'industrie du médicament ? En premier lieu, nous devons continuer à étendre la présence des génériques, ce qui implique de faire en sorte que davantage de médicaments soient généricables, et que les génériques soient plus souvent prescrits. Il nous faut pour cela nous associer le concours des médecins - les pharmaciens ayant été incités directement à le faire - puis avoir une négociation sur les prix : en France en effet, les prix des princeps, comme des génériques, sont sensiblement supérieurs à ceux rencontrés dans les autres pays. Vous le voyez : la politique du médicament ne se limite pas à une seule mesure, et il ne suffit pas de dérembourser la moitié du répertoire existant, comme le suggèrent certains. A ces questions, nous associerons également les patients, qui sont dans notre pays de véritables consommateurs de médicaments : l'ordonnance moyenne compte chez nous un peu moins de cinq médicaments, lorsque moins d'un seul est prescrit aux Pays-Bas ou dans les pays du Nord. Et cette pression à la prescription, on le sait, vient souvent des patients. Ce faisant, mettons-nous en cause le dynamisme de notre industrie pharmaceutique ? Celle-ci a bien sûr un rôle majeur à jouer pour favoriser notre compétitivité économique, mais on ne peut demander à la sécurité sociale de la financer par le biais d'un soutien excessivement élevé à des médicaments qui, pour certains, sont anciens, pour d'autres, sont de vrais blockbusters. La perspective de ce secteur devrait plutôt être celle de l'innovation, de la recherche, de l'investissement dans les biomédicaments, tous chantiers pour lesquels nous pouvons d'ailleurs réfléchir au soutien de l'Etat, via le crédit impôt recherche ou tout autre dispositif de compétitivité hors coût.
Je veux vous rassurer à propos du Fir, qui permet une certaine fongibilité des crédits gérés par les ARS. Vous avez constaté que les dotations provenant de l'Etat diminueraient d'environ 30 millions d'euros entre 2012 et 2013. Toutefois, on peut considérer que la prévention passe aussi par les taxes comportementales. Une partie des ressources affectées à ce titre à la Cnam sera mobilisée au profit du Fir.
S'agissant des centres de santé, qui sont chers à votre présidente - mais pas seulement ! -, j'ai rencontré récemment leurs représentants. Je leur ai dit mon attachement à la spécificité de ces centres, dont je souhaite assurer la pérennité en leur trouvant un nouveau modèle de financement. Leur équilibre économique n'est en effet pas assuré, compte tenu de l'importance qu'occupent, dans ces structures, les soins préventifs, l'éducation thérapeutique, la participation à des politiques territoriales de santé. J'ai demandé à l'Igas de formuler des propositions prenant en considération la spécificité de ces missions. Les conclusions de la mission permettront en outre de redéfinir la convention les liant à l'assurance maladie, qui doit être renégociée en 2013.
La répartition des compétences entre les différents professionnels de santé est un sujet complexe, sur lequel il est néanmoins indispensable d'avancer. Des infirmières me faisaient observer, aujourd'hui encore, qu'elles étaient compétentes pour pratiquer des vaccinations : il n'y a pas de raisons de les en empêcher. Figurant dans ce PLFSS, la rémunération des équipes pluriprofessionnelles nous permettra de tracer les contours d'une nouvelle organisation entre les différentes professions ; la mise en oeuvre du parcours de soins pour les personnes âgées nous fournira un cadre suffisamment large pour expérimenter une coopération entre les professionnels, qui doit être guidée par le souci d'éviter toute nouvelle subordination. Les professionnels paramédicaux sont notamment attentifs à ce que ces transferts de compétences n'entraînent pas de nouvelle hiérarchisation par rapport aux médecins.
La négociation relative aux dépassements d'honoraires entre dans la dernière ligne droite. Même si je n'assiste pas aux négociations, je les suis de très près. La dernière séance de négociation aura lieu demain : je souhaite qu'elle aboutisse à un accord satisfaisant. Dans le cas contraire, je ferai le choix de ne pas agréer un tel accord et proposerai, dans le cadre du PLFSS, des amendements dont vous auriez à débattre directement. L'enjeu consiste, d'une part, à garantir à nos concitoyens la transparence des tarifs qui leur sont pratiqués et de la définition du dépassement. Je ne parle pas des dépassements en général, mais de ceux, abusifs, qui doivent être sanctionnés par une procédure rapide, efficace et dissuasive. D'autre part, nous devons nous engager dans une maîtrise des dépassements non abusifs : les médecins doivent accepter de les limiter dans le temps et de garantir davantage de consultations à des tarifs abordables. Les Français doivent s'y retrouver, c'est un enjeu majeur pour leur reste à charge. Cela étant dit, rappelons qu'il y a une majorité de médecins qui exercent en secteur 1 et qui s'engagent dans des démarches de coordination pluridisciplinaires, que nous devons mieux reconnaître. Je n'ignore pas les tensions : un mouvement de grève des internes et des chefs de clinique est prévu pour demain dans les hôpitaux. Mais les Français attendent des mesures fortes. Nous leur proposons des perspectives significatives et crédibles.
A Christiane Demontès, je réponds que nous aurions pu affecter directement le produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Le Gouvernement examinera avec bienveillance les amendements qui iraient dans ce sens, car l'enjeu est bien celui-là. Quant au FSV, c'est par principe un fonds d'autant plus sollicité que la conjoncture est difficile. La nouvelle dégradation du FSV ne s'explique pas autrement. C'est la raison pour laquelle nous faisons le choix de lui apporter des financements. Il faut en effet distinguer les questions d'équilibre et de réforme des retraites d'une part, de nature structurelle, et le FSV de l'autre, pour lequel les enjeux sont conjoncturels.
La réforme de 2010 n'a pas abouti à l'équilibre financier des régimes de retraite. J'ai d'ores et déjà saisi le Conseil d'orientation des retraites (Cor) qui fera de nouvelles projections au tout début de l'année prochaine. Il présentera des analyses ciblées : sur les femmes, sur la notion de pénibilité. Je nommerai ensuite un comité des sages chargé de faire des propositions d'orientation de réformes, notamment de long terme. Nous intégrons ainsi le rendez-vous 2013 dans la réflexion globale que nous menons et dans la perspective d'une réforme qui devrait intervenir dans le courant de l'année 2013.
L'AER préoccupe à juste titre. Il existe des estimations très diverses des populations concernées et des enjeux financiers qui s'y rapportent, notamment selon la date prise en référence des licenciements et l'âge des personnes concernées. Conçue comme un dispositif de préretraite, cette allocation était prise en charge par le ministère du travail. C'est toute l'ambigüité : elle ne peut relever du PLFSS. Nous réfléchissons toutefois aux réponses à apporter dans le cadre de la réforme des retraites, ou, idéalement, avant celle-ci.
Un mot sur la convergence tarifaire dans les Ehpad. Nous ne pouvons comparer la tarification des Ehpad à la tarification hospitalière : les mécanismes ne sont pas de même nature. C'est pourquoi nous devons nous situer dans la perspective d'une tarification globale sur les établissements médico-sociaux. La convergence tarifaire hôpital-clinique concerne, elle, des actes très identifiés et procède notamment de la volonté, que certains ont assimilé à une logique entrepreneuriale, d'aligner le financement des établissements publics sur celui des établissements privés.
S'agissant du Fiva, l'impact du contentieux de Douai devrait s'élever à quelques dizaines ou centaines de milliers d'euros au maximum, qui sont parfaitement pris en compte dans son financement.
La définition du champ des établissements susceptibles d'ouvrir droit à un financement par le Fcaata ne suscitera pas de difficultés. Nous répondrons évidemment à l'ensemble des besoins qui se présentent. J'ai moi-même récemment signé des arrêtés permettant l'intégration de nouvelles entreprises dans cette liste, qui n'est pas bouclée.
Enfin, l'augmentation du prélèvement destiné à garantir l'équilibre de la branche AT-MP, telle qu'elle est fixée dans le PLFSS, devrait nous permettre d'atteindre l'objectif affiché en 2017. Dans le cas contraire, nous pourrions toujours avoir une nouvelle discussion.
J'ai noté que le déficit conjoncturel allait être réduit et l'Ondam augmenté, ce qui est une très bonne chose, grâce à une meilleure organisation du système de santé.
Mais la sécurité sociale, en particulier l'assurance maladie, connaît aussi un déficit structurel. Vous avez certes laissé la réflexion ouverte, mais je ne vois pas encore de pistes permettant de le résorber : je n'ai rien vu sur le mode de rémunération des médecins, que nous savons totalement archaïque. S'oriente-t-on vers l'adoption, plus ou moins généralisée, d'un dispositif de tiers payant ?
Je n'ai pas compris comment vous envisagiez de réduire le coût des médicaments. On parle d'un milliard, ce n'est pas rien. S'agit-il de réduire des prix dont on sait qu'ils sont, en France, notamment pour les nouveaux médicaments, bien supérieurs à ceux constatés dans d'autres pays européens ? Ou de mettre de l'ordre dans l'éventail des médicaments, où l'on trouve beaucoup de doublons qui permettent à l'industrie pharmaceutique de mieux vivre ? Je n'ai rien vu non plus sur le gaspillage des médicaments. Réfléchit-on à adapter les méthodes retenues dans les autres pays pour réduire la boulimie des Français en la matière ?
Quant à l'implantation des médecins, je suis d'accord pour user d'actions non autoritaires : même si certains de nos collègues nous sollicitent en ce sens, ce serait une très grave erreur qui mettrait le feu aux poudres. Différentes actions ont été testées suivant les secteurs, qui concernent les maisons médicales, les aides à destination des étudiants. Mais le résultat n'est pas miraculeux, notamment dans les milieux ruraux. Le problème est plus profond que celui du choix d'une installation.
Enfin, en quoi consiste le contrat de praticien territorial de médecine générale ?
Dans un contexte économique et financier assez dépressif, vous arrivez à nous présenter un budget qui tend à la fois à redresser les comptes, protéger les personnes et moderniser notre système social. Nous ne pouvons que vous approuver.
En matière de protection, l'absence de nouveau déremboursement est de nature à rassurer nos concitoyens ; l'augmentation de l'Ondam pour les hôpitaux et le secteur médico-social est une autre bonne nouvelle. S'agissant des réformes de modernisation, vous n'avez rien dit sur l'investissement hospitalier. Or, les attentes sont fortes. Alain Milon et moi-même avions, sous la responsabilité du président de la Mecss Yves Daudigny, posé un certain nombre de questions auxquelles il conviendrait de répondre.
Je souhaiterais en outre avoir davantage de précisions sur les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac). Dans notre rapport, nous avions contesté le bien-fondé des gels des crédits, notamment sur les aides à la contractualisation. Mais il y a des politiques de santé à conduire dans le cadre de l'Ondam, et s'il devait y avoir des ajustements, ils se feraient au niveau de la tarification. Celle-ci est fondamentalement à revoir, déconnectée qu'elle est des coûts des prestations délivrées. Vous disiez vouloir retenir un certain nombre de nos propositions : pouvez-vous nous dire lesquelles ? Nous avions notamment suggéré de reporter la révision annuelle de la tarification du mois de février au 1er juillet ; en matière de recherche et d'innovation, nous avions fait des propositions radicales sur le long terme, notamment celle de basculer du support de l'assurance maladie à un support par l'Etat. Compte tenu de la situation de l'un et de l'autre, cette évolution ne sera pas immédiate, mais c'est une tendance à considérer sérieusement.
Enfin, les jalons de la prise en charge de la perte d'autonomie ont été posés. Vous les fixez dans la durée : le financement, très lourd, commence dès cette année, et reste un objectif prioritaire. Nous attendons les chiffrages...
Vous avez fixé l'augmentation de l'Ondam à 2,7 %, ce qui ouvre la possibilité pour la santé française d'avoir 4,6 milliards d'euros supplémentaires. La Cour des comptes avait préconisé le maintien du taux de progression de l'Ondam à 2,5 %, constatant que, établi à ce niveau en 2012, une croissance de 2,7 % avait été enregistrée. En le fixant à 2,7 % en 2013 et étant donné la situation financière de l'Etat, comment trouver les 4 milliards supplémentaires ? Etes-vous sûre que la progression de l'Ondam ne sera pas de 2,9 % ou de 3 % ? Cela serait une catastrophe pour la sécurité sociale.
En outre, envisagez-vous véritablement de supprimer le jour de carence dans les hôpitaux ?
S'agissant de la branche vieillesse, je signale à Mme Delaunay qu'on arrive toujours après quelqu'un. Avant vous, la réflexion sur la vieillesse et la dépendance ont eu lieu. Certes, elles n'ont débouché sur aucun texte, mais vous et moi avons assisté à des colloques sur la dépendance, la vieillesse, le cancer de la personne âgée. Et vous nous dites que ces réflexions conduiront à une loi dans la première moitié du mandat du Président de la République, soit au plus tôt dans deux ans et demi : vous nous reprochez, à nous, de n'avoir pas fait de loi sur la dépendance en un an, et vous vous accordez deux ans et demi de plus pour la mettre en place ! Des réflexions ont été faites, sur lesquelles vous pouvez vous fonder. Mais ne dites pas que rien n'a été fait.
Notre collègue Gérard Roche a déposé une proposition de loi qui doit être examinée demain par la commission des affaire sociales du Sénat, dans laquelle il propose que la Casa soit affectée immédiatement aux départements pour remédier aux difficultés qu'ils rencontrent actuellement dans le financement de l'Apa. Pourquoi faire le choix de préfinancer une loi qui n'existe pas encore, alors qu'on sait que les départements ont des difficultés considérables ? Et pourquoi n'avoir pas dit que la Cnav a donné un avis largement défavorable à ce PLFSS ?
Je rappelle que la Fédération hospitalière de France (FHF) demande l'abandon de la convergence tarifaire des établissements médico-sociaux. Elle estime qu'elle entraînerait la perte de 80 millions d'euros pour les Ehpad, soit environ deux mille postes d'aides soignants et d'infirmiers.
Votre PLFSS prévoit enfin, dans la branche famille, une expérimentation sur certains territoires, destinée à faciliter la garde d'enfants de bénéficiaires du RSA ayant trouvé un emploi : il s'agit de verser en tiers payant le complément de libre choix du mode de garde. Mais qui va payer ? Les collectivités locales vont-elles être mises à contribution ?
Merci pour cette présentation à la fois claire, fouillée, et précise dans chacune des quatre branches de la sécurité sociale. Madame Delaunay, une partie de votre budget favorisera une progression salariale globale, notamment dans les Ehpad et les établissements recevant du public âgé. Mais je voulais votre avis sur l'avenir de la convention collective dite « 1951 » des établissements privés à but non lucratif. Il y avait hier un mouvement social très suivi en Loire-Atlantique et, je suppose, dans d'autres départements. Les établissements pour personnes âgées ne sont pas les seuls concernés par cette convention collective : les secteurs des personnes handicapées et de la protection de l'enfance le sont également. Avez-vous des informations récentes à nous donner à ce sujet, et pouvez-vous nous dire si la négociation sociale aura bien lieu comme on l'espère ?
Je serai aussi objectif qu'Alain Milon pour rappeler que tout n'a pas été négatif dans le passé. Nous sommes conscients que les recettes stagnent voire régressent. Mais vous proposez une maîtrise des dépenses, ce qui était aussi le cas précédemment. Les déserts médicaux étaient, pareillement, une préoccupation de vos prédécesseurs.
J'ai écouté avec attention l'intervention de Mme Carlotti sur la perte d'autonomie, les Ehpad et, plus particulièrement, le maintien à domicile. Je soutiens tout ce qui peut être fait pour le promouvoir et souhaite rendre hommage au travail réalisé, dans ce cadre, par les personnels de terrain, en dépit des difficultés financières que rencontrent de nombreuses associations. De précédents dispositifs ont joué un rôle important, comme le plan Alzheimer. Reste que certains établissements, privés comme publics, manquent encore de personnel, et malgré le grand dévouement de celui-ci, la tâche reste immense. Que peut-on faire ?
Nous ne pouvons qu'adhérer à l'effort d'information et de responsabilisation auquel nous encouragent les ministres et devrions tous prendre part. Tous les renseignements fournis contribuent à éclairer la situation présente et serviront à préparer l'avenir. J'ai le souvenir très douloureux de la loi de janvier 1993 relative aux relations entre les professions de santé et l'assurance maladie, que nous avions fait voter avec l'accord de toutes ces professions, y compris celui du docteur Beaupère. Cette loi n'a jamais été appliquée, car le changement de majorité a précipité le texte aux oubliettes. A ce jour, nous n'avons pas réussi à concilier les deux logiques contradictoires sur lesquelles repose notre protection sociale : une prescription libérale et des prestations socialisées. En l'absence d'une responsabilisation permanente du prescripteur qui ouvre les dépenses, et du consommateur soumis aux aléas de l'existence, nous n'arriverons pas à trouver un équilibre économique et financier.
Vous êtes en train de renverser la vapeur. Il faut persévérer. Considérez le secteur du troisième âge et de la retraite : arrêtons cette dramatisation économique de l'allongement de l'espérance de vie ! Développons au contraire les mécanismes de solidarité entre les générations. L'allongement de l'espérance de vie est tout de même le résultat extraordinaire des conquêtes médicales et de la recherche. Arrêtons également de parler de fin d'activité professionnelle, car cela sous-entend souvent la fin d'activité économique et sociale. Or, nous avons fort heureusement dans nos municipalités tout un secteur associatif composé de personnes engagées dans de telles activités, contribuant ainsi à faire vivre notre démocratie.
Nous ne pouvons qu'approuver entièrement l'effort d'information et de communication que vous êtes en train de faire et nous devons vous y aider très activement.
Pour atteindre les objectifs que vous avez fixés, et que je partage, avez-vous réfléchi, pour diminuer les dépenses de santé et améliorer l'offre de soins, à la prévention sous toutes ses formes ? Cela comprend le temps qui pourrait être donné aux professionnels dans leurs relations avec les patients. On ferait certainement beaucoup d'économies de cette façon.
Merci d'avoir ouvert des perspectives sur les préoccupations qui sont les nôtres, et largement portées et partagées par nos concitoyens : je pense aux propos de Mme Delaunay sur la prise en charge du maintien à domicile, dont j'ai compris que nous obtiendrons un effet immédiat. Merci en outre d'avoir rappelé les intentions du Gouvernement en matière de prise en charge de la dépendance. Je reviens néanmoins sur la situation extrêmement grave que connaissent les départements. Ce que vous avez dit est bel et bon pour l'avenir, mais n'apporte pas de solutions pour la situation présente. Je pourrais prendre de nombreuses allocations universelles de solidarité comme la prestation de compensation du handicap (PCH) ou le revenu de solidarité active (RSA), mais je me limiterai à l'Apa. Dans mon département, et je sais que Mme la ministre des affaires sociales et de la santé y est sensible pour avoir occupé les fonctions de présidente de conseil général, l'Apa représente 50 millions d'euros. La CNSA prend en charge 24 % de ce montant, soit 12 millions d'euros. Le différentiel restant à la charge du contribuable local s'élève donc à 37 millions d'euros. Cette somme permettrait de construire deux collèges neufs ! Deux questions sont ainsi posées : comment organise-t-on la solidarité en direction des personnes les plus dépendantes, et comment organise-t-on son financement ? Dans une période de très faible croissance, où les collectivités ont le devoir de contribuer au développement économique, les conséquences que supportent dès lors les départements sont très dommageables à la croissance et à leurs capacités à préparer l'avenir de nos territoires. Je suis conscient que la question est connue, le constat partagé, mais je veux de cette façon me faire le porte-parole de l'ensemble des élus des conseils généraux.
Lors du débat sur la loi HPST, j'étais notamment intervenu sur la carte hospitalière. J'avais constaté que la diminution du nombre de lits pourrait être importante : je l'avais évaluée à 20 000. Aujourd'hui, on assiste à son accélération, que je constate en tout cas dans l'agglomération lyonnaise, avec des regroupements surprenants qui associent le privé et le public. Dès lors que l'hôpital public représente 50 % des dépenses d'assurance maladie, je comprends la volonté de rationaliser l'emploi de l'argent public. Mais pouvez-vous nous rassurer, ou à tout le moins préciser, votre politique en matière de restructuration de la carte hospitalière ?
Nous prolongerons sans doute ce débat en séance, car certaines questions sont majeures.
Quand vous vous faites, M. Jeannerot, le porte-parole des présidents de conseils généraux, vous êtes en réalité le porte-parole de l'ensemble des élus locaux. Vous avez rappelé que j'ai occupé cette fonction : il est vrai que nous y sommes pris en tenaille entre les contraintes sociales, que nous acceptons, et la réalité des moyens alloués pour gérer l'ensemble des responsabilités qui sont les nôtres. Vous avez évoqué les collèges, on pourrait évoquer d'autres enjeux moins à la mode, mais non moins utiles dans certains territoires ruraux, comme l'aménagement routier. Nous avons conscience de cette réalité et souhaitons apporter des réponses appropriées sans attendre que la loi de décentralisation fixe un cadre plus pérenne à l'action des différentes collectivités.
S'agissant du financement de l'Apa, il sera organisé dans le cadre de la réforme de la perte d'autonomie. Je ne méconnais pas l'existence de besoins plus immédiats : le Gouvernement y travaille, nos proposerons nos pistes d'orientations.
Je veux dire à Bernard Cazeau que ce PLFSS commence, d'ores et déjà, à modifier le mode de rémunération des médecins : avec le forfait de rémunération en équipe, une part de la rémunération va aux professionnels, non pour les actes qu'ils accomplissent mais pour la mise en coordination d'un travail, la prévention, le suivi, l'accompagnement d'une population. De même, l'expérimentation du parcours de santé, pour les personnes âgées dans un premiers temps, pour les maladies chroniques dans un deuxième temps, doit être l'occasion d'identifier des modes de rémunération non liés à l'acte. Je réponds incidemment à la question d'Aline Archimbaud : la prévention est un enjeu majeur de réduction des coûts et de santé publique, trop largement abandonné au cours des dernières années. Elle suppose des modes de rémunération, de financement et de prise en charge spécifiques.
La question du tiers payant est importante. Pour l'heure, nous n'avons pas pu lever l'ensemble des obstacles, notamment techniques, à sa résolution. Son absence dans le PLFSS est donc délibérée. La difficulté principale consiste à faire en sorte que le médecin soit payé à la fois par la sécurité sociale et par la complémentaire du patient. Si nous n'arrivons pas à lever cet obstacle du côté des complémentaires - cela suppose en effet l'accès à leurs données -, nous le ferons au moins du côté de la sécurité sociale, ce qui limiterait l'avance de frais de la part du patient. Une telle solution ne serait toutefois pas optimale.
La boulimie médicamenteuse est réelle. Nous essayons de peser sur les prescriptions en promouvant, via la formation des médecins, de bonnes pratiques. Nous devons aussi peser sur les pratiques hospitalières : une partie de la dépense de médicament est en effet générée à l'hôpital, qui sert ensuite de base à la dépense ambulatoire. Ces prescriptions ne sont pas toujours éclairées, en raison des programmes expérimentaux dont les hôpitaux peuvent bénéficier.
Vous m'interrogiez sur les mesures précises aboutissant à la réduction de dépenses d'un milliard d'euros : il s'agit des baisses de prix de certains médicaments princeps et génériques ainsi que de certains dispositifs médicaux, de la volonté de mettre en cohérence les prix des médicaments tout au long de leur parcours, d'évaluer le service médical rendu dans certaines spécialités... Nous proposons enfin des mesures de convergence de prix par classe thérapeutique, au sein desquelles se trouvent parfois des différences significatives.
Les praticiens locaux de médecine générale sont des médecins libéraux qui auront fini leurs études depuis deux ans ou plus, qui auront vocation à s'installer dans des lieux sous-dotés identifiés par les ARS, espaces ruraux ou urbains sensibles. Cette proposition est notamment adaptée aux lieux où des médecins prêts à partir en retraite souhaitent transmettre leur savoir et leur cabinet à de jeunes médecins recherchant une garantie de revenus pour s'installer tranquillement. Le dispositif consiste à verser le différentiel par rapport à un objectif de revenus préalablement identifié.
Jacky Le Menn a souhaité savoir quelles mesures spécifiques du rapport de la Mecss j'entendais reprendre. Il y a dans le PLFSS des mesures qui concernent la modulation de la T2A ; j'ai déjà indiqué la mise en place d'une commission transparence et qualité qui, dès le début de l'année prochaine, permettra d'évaluer les mécanismes de financement souhaitables pour l'hôpital public en matière de formation, de recherche, de missions d'intérêt général, mais prenant également en compte le coût des structures, et, éventuellement, la localisation des établissements. Les Migac ne seront donc pas gelées. Nous procéderons à l'inverse à un gel des tarifs hospitaliers pour pouvoir disposer de cette réserve.
Nous voulons en outre engager des investissements grâce au niveau de progression de l'Ondam que nous avons défini et rechercher des financements complémentaires. Je travaille actuellement avec la Banque européenne d'investissement afin engager un plan massif de constitution d'hôpitaux d'avenir. L'hôpital moderne doit l'être au point de vue des structures, mais également de sa conception : les parcours de soins doivent y être mieux définis, les systèmes d'information plus efficaces.
Je réponds à Alain Milon : l'évolution de l'Ondam a été fixée à 2,7 %. Mais l'enjeu n'est pas d'avoir, par principe, une augmentation des dépenses. La tendance spontanée de progression des dépenses étant supérieure à 2,7 %, nous réalisons quand même 2,5 milliards d'euros d'économies. J'ajoute que ce 0,2 % de hausse d'Ondam supplémentaire n'est pas là pour la consommation courante mais pour faire des réformes de structure, favoriser l'investissement immobilier et la mise en place de nouveaux parcours de soins, expérimenter des formes d'organisation. De surcroît, 0,2 % d'Ondam, c'est seulement 350 millions d'euros.
Quant au jour de carence, il ne figure pas dans le projet de loi. La ministre de la fonction publique mène de façon globale les discussions pour les trois fonctions publiques.
Madame Meunier, il n'est pas question que je donne mon agrément à la révision de la convention collective nationale « 1951 » tant que de vraies négociations n'auront pas eu lieu. Je le dis fermement, comme je l'ai indiqué aux représentants des salariés : la négociation doit reprendre et je ne me contenterai pas d'une commission mixte paritaire de façade : qu'elle discute six semaines ou deux mois ne changera rien si elle répète la même chose. Pour aboutir à un compromis, il faut que les gens bougent, et ce n'est pas encore le cas...
Monsieur Teulade, nous sommes en effet à un moment charnière de la réorganisation du système de santé. Notre système socialisé doit répondre aux besoins de la population : si nous voulons réussir, il faut responsabiliser ses acteurs, ce qui passe notamment pour les professionnels par des mécanismes de rémunération plus adaptés.
Monsieur Fischer, restructurer pour restructurer ne sert à rien ; c'est ce que nous montre le rapport de l'Igas « Fusions et regroupements hospitaliers : quel bilan pour les quinze dernières années ? » : en se cantonnant à des objectifs purement financiers, on obtient des résultats catastrophiques. Interrogeons-nous plutôt sur les besoins de santé d'un territoire : comment les structurer, comment y répondre, comment les articuler ? A la fin des années 1990, je n'ai pas attendu la loi HPST pour procéder à une restructuration entre deux hôpitaux, signer une convention entre un hôpital local et le CHU dans mon département. Nous avons sauvé l'hôpital local en permettant à des chirurgiens du CHU d'y intervenir ponctuellement. Au total, nous avons mieux répondu aux besoins de la population et à ceux du territoire, mieux structuré l'offre hospitalière et amélioré la qualité du service. C'est dans cette perspective que nous devons travailler.
M. Le Menn m'a interrogée sur le financement du projet de loi sur la perte d'autonomie. A partir du 1er janvier 2014, la contribution de 0,3 % sur les revenus des retraités y pourvoira mais, bien entendu, seulement partiellement. Vous pouvez cependant compter sur mon imagination qui est, comme celle de mes collègues, sans limites, pour trouver le reste. J'ai reçu l'assurance du Premier ministre : nous aurons des moyens pour que cette réforme ait un impact réel sur la vie des Français, qui sont concernés à 100 %. Tout le monde est pleinement conscient de l'importance de l'enjeu et les Français sont préparés à cet effort.
Monsieur Milon, vous me pardonnerez de vous taquiner un peu : vous avez raison, pendant cinq ans quelque chose a été fait : vous avez fait naître beaucoup d'attentes...
et beaucoup de prises de conscience. Attention, je n'ai jamais dit que vous n'aviez pas travaillé sur le sujet : j'ai moi-même été présidente d'un groupe de travail sur la politique de l'âge, et je connais les efforts accomplis dans ce domaine, notamment par Mme Bachelot qui a pris le sujet très à coeur et a évolué, si j'ose dire, dans notre direction. Les travaux menés pendant ces années sont importants : les rapports sont sur nos bureaux et nous les utiliserons. Mais il est vrai, et c'est ce que j'ai voulu dire, que pendant cinq ans, on promettait sans cesse un projet de loi pour le trimestre suivant, et que finalement rien n'a été conclu.
Sur la convergence, je n'ai pas grand-chose à ajouter : les deux mille emplois pour le service public, les Ehpad publics notamment, ne sont pas confirmés, mais nous y serons très attentifs lors de la discussion générale sur la tarification.
Je partage le souhait de M. Laménie de valoriser le travail des personnels intervenant auprès des personnes âgées, à domicile ou en établissement. Effectivement, ces emplois requièrent un fort engagement et les possibilités actuelles de carrière sont limitées : notre plan de restructuration vise aussi à accroître leur professionnalisation et revaloriser les carrières, de même, madame Archimbaud, qu'à impliquer davantage ces équipes dans le domaine de la prévention.
J'embrasserais presque M. Teulade pour avoir évoqué la nécessité de changer l'image des personnes âgées et souligné l'immense progrès que constitue l'allongement de la durée de la vie. Disons le haut et fort : les personnes âgées, dont je fais partie et j'en suis fière, constituent une force dans tous les domaines, elles sont la colonne vertébrale de la cohésion sociale. Sans elles, comment se porteraient et agiraient le pays, les familles, les partis politiques, de droite ou de gauche ? Ayons tous la volonté de changer notre image et de dire « nous »... même s'il existe une petite réticence du côté de ces messieurs !
Je tiens à remercier M. Laménie de soutenir l'action du Gouvernement pour la création et le développement des services à domicile. Le Gouvernement engagera 50 millions d'euros pour l'emploi dans ce secteur qui vient d'être sinistré : entre 2010 et 2011, l'aide à domicile dans le secteur associatif a perdu 5 % de ses effectifs, soit 16 000 emplois. Cette aide exceptionnelle devrait lui permettre de passer ce cap. Elle a été décidée compte tenu du formidable gisement d'emplois que constitue le secteur, qu'il s'agisse de prévention ou d'accompagnement spécialisé pour les personnes en perte d'autonomie, qu'elles soient âgées ou en situation de handicap. Bien sûr, il faut aussi créer des places en établissement : mais n'opposons pas les uns aux autres, travaillons plutôt à des passerelles. A la fin de l'année 2012, nous réaliserons une évaluation des besoins et, en 2013, nous procéderons au rattrapage dans les deux secteurs, aide à domicile et création de postes en établissement.