La commission a procédé à l'examen du rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2008 de MM. Henri Revol et Jean Boyer sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
a rappelé que la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES) regroupait les crédits de douze programmes thématiques gérés par huit ministères et a précisé que, conformément au champ d'intervention traditionnel de la commission des affaires économiques, il n'évoquerait pas le programme « Vie étudiante », qui porte essentiellement sur les bourses et les logements étudiants. Il a ajouté, pour autant, qu'il suivait avec beaucoup d'attention l'évolution du mouvement actuel dans les universités ainsi que les conséquences que celui-ci pourrait avoir quant à un éventuel redéploiement des crédits au sein de la MIRES sous forme d'amendements du Gouvernement au cours de la discussion du projet de loi de finances.
Soulignant qu'il partageait cette année la rédaction du rapport avec M. Jean Boyer, il a indiqué que son intervention portait sur l'évolution globale des grandes masses financières de la mission ainsi que, plus spécifiquement, sur les crédits alloués au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et au Centre national d'études spatiales (CNES).
S'agissant des montants inscrits dans la loi de finances pour 2008, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a fait valoir que les élections du printemps 2007 n'avaient pas remis en cause l'effort historique pour la recherche initié par le Président Chirac en 2004.
Il a en outre souligné que, conformément aux engagements de l'actuel Président de la République de poursuivre la hausse des moyens de la recherche et de l'enseignement supérieur d'un milliard d'euros par an jusqu'en 2012, le budget 2008 dépassait les montants déjà ambitieux prévus par la loi de programme pour la recherche votée au début de l'année 2006, précisant que ce milliard d'euros supplémentaire était atteint sur les seuls crédits budgétaires « classiques », qui connaissent une augmentation de 4,7 % des crédits de paiement par rapport à 2007.
a indiqué que cette augmentation profitait surtout à l'université, dans la mesure où des organismes ayant le statut d'établissements publics scientifiques et technologiques (EPST) verraient la hausse de leurs crédits essentiellement affectée au financement de l'augmentation du taux de cotisation aux pensions civiles à compter du 1er janvier 2008.
a estimé qu'en dépit de cette contrainte budgétaire, les organismes de recherche et d'enseignement supérieur pourraient néanmoins maintenir en 2008 leurs effectifs après des années de fort recrutement et échapper ainsi à la règle du non-remplacement des agents partant en retraite, confirmant que la recherche et l'enseignement supérieur restent bien des secteurs prioritaires de l'action du Gouvernement, contrairement aux contre vérités professées par les organisateurs du mouvement actuel de protestation dans les universités.
Il a indiqué que la présentation des moyens des laboratoires était permise par la forte progression des financements de l'agence nationale de la recherche (ANR) de 825 millions d'euros en 2007 à 950 millions en 2008.
S'agissant de cette agence, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, s'est félicité, d'une part, de la poursuite du développement de recherche sur projet et, d'autre part, de ce que, suite à l'insistance de l'ensemble des rapporteurs du Sénat lors du vote du budget 2007, les financements de l'ANR apparaissaient dans les crédits de la MIRES pour 2008 et non plus hors du budget de l'Etat. Il a souhaité qu'il en soit de même l'an prochain pour la nouvelle entité qui naîtra de la fusion entre Oseo, chargé de l'innovation des petites et moyennes entreprises, et l'Agence de l'innovation industrielle, consacrée à la conduite des grands projets. Estimant que cette budgétisation aura pour intérêt de faire apparaître dans la loi de finances les indicateurs de performance de cette nouvelle structure, il a souhaité que soit mis en place, à cette occasion, un nouvel indicateur relatif à l'effet des actions de la future agence sur l'augmentation du chiffre d'affaires des entreprises aidées et, si possible, sur la création d'emplois.
a en outre rappelé que s'ajoutait aux moyens prévus pour l'année 2008 un effort supplémentaire sous forme de dépense fiscale qui devrait augmenter de 455 millions d'euros, dont 390 millions au titre d'une nouvelle montée en charge du crédit impôt recherche. Rappelant l'intérêt de ce dispositif dans un pays qui se situe au-dessus de la moyenne de l'OCDE pour la recherche publique et très en dessous pour la recherche privée ainsi que les termes du rapport d'évaluation du crédit impôt recherche de fin 2006, il a jugé urgent de ne plus modifier les règles de ce crédit d'impôt qui sont modifiées chaque année depuis quatre ans. Il a néanmoins estimé que les modifications apportées cette année étaient très positives bien qu'ajoutant encore à l'instabilité du dispositif.
En conclusion de cette présentation générale, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a constaté que le projet de budget confirmait la priorité donnée aux différentes composantes de la recherche, même si l'effort consenti en 2008 sera en grande partie grevé par l'impact de l'augmentation des cotisations de retraites sur les EPST.
Il a ensuite fait part de sa préoccupation s'agissant de la façon dont les crédits étaient parfois alloués aux établissements de recherche et des problèmes de gouvernance que soulèvent parfois les relations entre l'Etat et ces derniers.
Sur ce point, il a tout d'abord souligné que le CEA était confronté depuis plusieurs mois à une sorte de double langage de l'Etat, tenant au très net décalage entre d'une part, un contrat d'objectifs, prévoyant une stabilisation des subventions de l'Etat et d'autre part, les engagements pris par le Gouvernement précédent qui imposent au CEA une montée en charge, à la fois pour développer la quatrième génération de réacteur nucléaire à l'horizon 2020 et pour accélérer la recherche dans le domaine des énergies renouvelables, comme celle portant sur les biocarburants de deuxième génération.
a constaté que la situation créée par ce tiraillement était intenable, et ce, malgré de grands efforts de redéploiement interne et de productivité réalisés par le CEA. Il s'est néanmoins félicité de ce qu'un début de solution ait été trouvé grâce à l'engagement pris par le Gouvernement à l'Assemblée nationale d'affecter au CEA 15 millions d'euros prélevés sur les dividendes du groupe Areva.
Il a fait valoir que cette solution a le mérite de ne pas effectuer de prélèvement sur le financement des pôles de compétitivité, comme cela avait été un temps envisagé et qu'elle constitue un mode de financement innovant, la question de la répartition des dividendes et des futurs produits de cessions d'Areva étant d'ailleurs loin d'être épuisée, de nouveaux développements étant attendus en 2008.
Néanmoins, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a estimé que ces 15 millions d'euros ne suffiront toutefois pas au CEA pour remplir ses engagements. Il a donc indiqué qu'il demanderait en séance au ministre de doubler ce montant.
S'agissant ensuite du CNES, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a formulé des regrets quant à la sincérité du budget soumis au Parlement.
En effet, il a rappelé qu'outre le gel de crédits annoncé de 33 millions d'euros, le CNES a été informé la semaine dernière par un simple courrier électronique administratif que sa dotation serait diminuée de 5,3 millions d'euros par rapport au montant affiché en loi de finances, et ce conformément aux montants inscrits au contrat pluriannuel. Il a estimé qu'en plus du fait de menacer la réalisation du programme d'horloge atomique Pharao, cette diminution était choquante et il a regretté que contrairement aux gels et annulations budgétaires, la modification n'avait fait l'objet d'aucune publicité, par exemple sous la forme d'un amendement au projet de loi de finances, ce qui laisse croire aux parlementaires que le montant des crédits prévus au programme « Recherche spatiale » pour 2008 reste inchangé. Il a indiqué qu'il ferait part au ministre de son désaccord avec ce type de procédé.
Il a enfin fait part de son regret de voir la France progressivement perdre son rang de pays moteur de l'Europe spatiale, et ce, au profit de l'Allemagne dont il a précisé qu'elle nourrissait aujourd'hui de grandes ambitions, notamment quant à l'envoi, par ses seuls moyens nationaux, d'un satellite autour de la Lune.
En dépit de ces quelques réserves, M. Henri Revol a proposé l'adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » inscrits au budget 2008, crédits qui, malgré un contexte économique et financier très difficile, maintiennent le cap très ambitieux fixé il y a trois ans.
a salué le rapport présenté à la fois quant à son contenu, mais aussi quant à la franchise dont il témoigne à l'endroit de certains éléments du projet de budget de la recherche pour 2008.
Il a aussi interrogé le rapporteur pour avis sur ce que recouvrait les biocarburants de deuxième génération, tout en faisant observer que la première génération lui semblait connaître des difficultés de développement.
En réponse, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a précisé que les biocarburants de la deuxième génération résultaient de la transformation en gaz de l'ensemble de la biomasse des végétaux, et non de leurs seules graines.
Il a, par ailleurs, rapporté les estimations du haut commissaire à l'énergie atomique, pour qui une vingtaine de réacteurs nucléaires permettraient de fournir l'énergie nécessaire à une production de biocarburants équivalente à l'ensemble de la consommation française de pétrole.
De plus, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a évoqué les perspectives vraisemblablement très intéressantes offertes par les biocarburants de la troisième génération, obtenus à partir d'algues.
est intervenu pour préciser que le bois ne pourrait contribuer que marginalement au développement des biocarburants, prenant l'exemple de l'usine de Clamecy qui met en évidence le coût relativement élevé de la ressource sylvicole. Aussi, a-t-il estimé que ces carburants devraient essentiellement provenir de biomasse cultivée.
Sur ce point, M. Jean-Paul Emorine, président, a rappelé qu'il y avait lieu de s'interroger sur le coût relatif des différentes ressources possibles, car il se pose la question de la concurrence dans l'utilisation des surfaces disponibles entre les cultures, alimentaires d'une part et les cultures industrielles d'autre part.
Il a illustré ce propos par les enseignements tirés de la mission de la commission conduite au Brésil au mois de septembre.
a pris acte du fait que les montants inscrits dans le projet de budget 2008 de la MIRES traduisaient un des engagements pris par le Gouvernement, tout en estimant nécessaire de bien distinguer ce qui relève de l'application de mesures déjà acquises et de l'impulsion d'une volonté politique nouvelle.
Il a toutefois émis des doutes sur la sincérité de ce budget, estimant que des diminutions de crédits dès le début de l'année 2008 étaient hautement probables.
a exprimé, à son tour, de fortes inquiétudes quant à la sincérité de ce budget notant, en outre, que le projet du budget de la MIRES faisait apparaître une augmentation réelle des moyens budgétaires limitée à 200 millions d'euros.
a tenu, pour sa part, à souligner le fait que les problèmes liés à la gestion des crédits en cours d'exercice n'étaient pas nouveaux. Il a, en revanche, fait valoir que l'effort budgétaire réalisé en faveur de la recherche était très appréciable.
Puis la commission a entendu le second rapporteur sur les crédits de la MIRES, M. Jean Boyer.
Déclarant partager pleinement l'appréciation d'Henri Revol sur les crédits de l'ensemble de la mission « Recherche et enseignement supérieur », M. Jean Boyer, rapporteur pour avis, a souhaité centrer son propos sur un aspect de la politique d'innovation lui tenant à coeur, à savoir les pôles d'excellence rurale, même si du point de vue strictement budgétaire, ces pôles relèvent aujourd'hui de la mission de la loi de finances relative à la « politique des territoires », dont l'examen avait été confié par la commission à MM. Jean-Paul Alduy et Dominique Mortemousque.
a rappelé comment, dans le cadre du système de gestion désormais simplifié, 175,5 millions d'euros de crédits budgétaires nouveaux devraient contribuer au financement des 379 pôles d'excellence rurale, via le fonds national de l'aménagement du territoire (le FNADT).
Eu égard à ces crédits, M. Jean Boyer, rapporteur pour avis, a tout d'abord regretté l'absence d'intervention du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche au profit des pôles d'excellence rurale. Il a déploré cette carence, tout comme celle du ministère de l'éducation nationale, alors même qu'onze ministères sont mobilisés au travers du fonds interministériel.
Il s'est déclaré surpris par cette absence de concours, alors même que l'innovation et la formation figuraient parmi les raisons d'être des pôles d'excellence rurale, illustrant son propos par le fait qu'une part, plus de soixante pôles portaient sur des projets concernant l'utilisation des technologies au service des entreprises industrielles et artisanales, et que d'autre part, les universités, les IUT ou les structures comparables avaient une triple vocation de formation, d'innovation et d'expertise au profit des territoires.
Il a en outre estimé que cette absence de concours du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche était aussi sensible sur le terrain et il a souhaité évoquer le cas du pôle d'excellence rurale des volcans d'Auvergne, au sein duquel a été développé un projet de relance et de modernisation de l'ensemble de la filière concernant la pierre de lave, de l'extraction des pierres jusqu'à leur utilisation comme matériaux de construction. Exposant comment ce projet était mené à bien grâce à une collaboration étroite entre les collectivités et l'Ecole départementale de Volvic, institution privée formant des techniciens dans ce secteur, il a souligné le caractère vertueux de la démarche engagée, qui contribuait à former les jeunes de la région dans la perspective d'emplois pérennes et qualifiés, tout en développant une industrie et des services à forte valeur ajoutée. Il a malheureusement constaté qu'un tel exemple de coopération aurait été très difficile à réaliser avec un lycée technique, un IUT ou un organisme relevant du ministère de l'éducation nationale ou de celui chargé de l'enseignement supérieur.
Il a estimé que cette difficulté participait d'un des problèmes structurels de l'innovation en France, à savoir la trop grande séparation entre, d'une part, les structures publiques d'innovation et de formation et, d'autre part, les PME, hormis dans les secteurs de très haute technologie. M. Jean Boyer, rapporteur pour avis, a rappelé combien ces coopérations étaient pourtant nécessaires, la France se classant derrière l'Allemagne et l'Italie en la matière.
Puis il a déploré que rien ne soit prévu dans le budget pour le financement du fonctionnement des pôles d'excellence rurale. Evoquant l'action positive de la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité du territoire en vue de mobiliser plusieurs réseaux professionnels pour assurer l'ingénierie de certains pôles, M. Jean Boyer, rapporteur pour avis, a souligné qu'elle reposait quasi exclusivement sur la base du volontariat et ne réglait pas la question de l'animation du pôle lui-même, alors même que ces pôles étaient portés par des acteurs locaux de taille modeste ne disposant pas des facilités et moyens importants mis au service des pôles de compétitivité.
Au-delà de ce regret, M. Jean Boyer, rapporteur pour avis, a conclu en déclarant partager l'avis favorable d'Henri Revol sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » demandés pour 2008.
en remerciant le rapporteur pour sa présentation, a rappelé qu'il avait participé avec lui au Comité de sélection des pôles et contribué à porter le nombre de pôles à 379.
Il a indiqué qu'il regrettait lui aussi que les pôles d'excellence rurale ne bénéficient d'aucun financement pour leur fonctionnement au contraire de ce qui existe pour les pôles de compétitivité prenant, sur ce dernier point, l'exemple du pôle nucléaire bourguignon.
a estimé que les pôles d'excellence rurale constituaient une bonne initiative qui favorisait l'émergence de projets qui n'auraient sans doute pas vu le jour spontanément.
Dans ce contexte, il s'est interrogé sur les raisons du développement relativement modéré de la filière bois, alors même que ce matériau devrait connaître un certain succès du fait des nouvelles attentes environnementales.
est intervenu pour apporter quelques éléments de réponse à cette question. Il a tout d'abord fait valoir que la filière bois était dans une situation globalement satisfaisante, comme en témoigne le fait qu'elle soit parvenue à maintenir ses effectifs constants au cours de ces trente dernières années à la faveur d'un net effort de modernisation et de développement de productions variées telles que papiers journaux ou des paquets.
Il a toutefois indiqué qu'une croissance rapide du secteur était peu probable pour deux raisons essentielles :
- d'une part, le fait que la maison de bois de type nord-américain ne rencontrait que peu de succès sur le marché français ;
- d'autre part et surtout, la limitation de la production réelle à environ 40 % des capacités théoriques de coupes évaluées à 100 millions de mètres cubes. Il a expliqué ce décalage par le morcellement et la mauvaise organisation d'une partie de la forêt française.
a ensuite demandé si le processus de labellisation des pôles d'excellence rurale était arrêté.
lui a répondu par l'affirmative, M. Jean-Paul Emorine, président, précisant qu'aucune labellisation supplémentaire n'était aujourd'hui annoncée, du moins dans l'attente des résultats obtenus par les 379 pôles existants.
a souhaité savoir si les montants annoncés par le rapporteur correspondaient à l'ensemble de la dotation d'ensemble du FNADT ou aux moyens spécifiquement affectés aux pôles d'excellence rurale.
En réponse, M. Jean Boyer, rapporteur a précisé qu'il s'agissait du seul financement des pôles.
Puis la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », les groupes Union pour un mouvement populaire et Union centriste-UDF votant pour, le groupe socialiste s'abstenant.