La commission a tout d'abord entendu une communication de M. Philippe Richert, rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », sur les projets de nouveaux programmes du primaire.
Après avoir rappelé que la commission avait été saisie pour avis par le ministre de l'éducation nationale, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », a replacé la réécriture de ces programmes dans le contexte plus général de la réforme de l'école primaire. Celle-ci a fait l'objet d'un accord de principe des syndicats en novembre dernier et passe en premier lieu par la suppression des deux heures de cours du samedi matin, qui permettront de proposer un accompagnement individualisé aux élèves en difficulté.
Les nouveaux programmes de l'enseignement primaire poursuivent ce même objectif de lutte contre l'échec scolaire. C'est pourquoi trois principes ont présidé à leur élaboration :
- le choix de rédiger les textes dans une langue claire et intelligible à tous. C'est essentiel, si l'on veut que les parents puissent suivre la scolarité de leurs enfants et leur apporter toute l'aide dont ils ont besoin. Nombreux sont, en effet, les exemples dans les anciens programmes de formules particulièrement obscures pour le profane ;
- la volonté de mettre l'accent sur les fondamentaux, en reconnaissant la place éminente de l'enseignement du français et des mathématiques à l'école primaire. Quiconque ne les maîtrise pas voit en effet irrémédiablement compromises ses chances de réussir sa scolarité. Il convient donc d'en faire le coeur des apprentissages à l'école élémentaire ;
- le souci d'intégrer pleinement le socle commun des connaissances et des compétences dans les programmes de l'enseignement primaire. La réécriture opérée en 2007 était restée superficielle. Les nouveaux textes marquent un progrès évident à cet égard, même si un effort supplémentaire pourrait encore être fait.
a exprimé son intérêt pour ces grandes orientations et s'est félicité de leur adoption par le ministre de l'éducation nationale. Il a donc proposé à la commission d'émettre un avis favorable à ces programmes, en l'assortissant néanmoins de quatre réserves significatives :
- la grille horaire annexée aux programmes définitifs devra faire une véritable place aux autres matières que le français et les mathématiques. La suppression des cours du samedi matin et la décision de doubler les heures de sport conduisent en effet à s'interroger sur la possibilité de consacrer tout le temps nécessaire à ces autres matières. Dès lors, il y aurait sans doute lieu de réfléchir plus avant à l'opportunité de réserver quatre heures par semaine à la pratique du sport ;
- les programmes de sciences doivent être étoffés et détaillés, afin de préciser les conditions de mise en oeuvre de la démarche expérimentale et de remédier au déséquilibre apparent des projets de textes qui ne s'étendent que peu sur ces disciplines ;
- l'articulation entre les écoles maternelle et élémentaire doit être clarifiée, afin de renforcer la coordination et la continuité entre ces deux étapes majeures de toute scolarité. Pour autant, les nouveaux programmes ne procèdent en rien à une primarisation de l'école maternelle ;
- la publication de documents d'accompagnement doit être sérieusement envisagée. Elle permettrait en effet de dissiper les malentendus qui se sont installés depuis la publication des projets de programme et qui n'ont pourtant pas lieu d'être.
a enfin invité la commission à faire également siennes les propositions de deux de ses membres :
- en intégrant les oeuvres cinématographiques dans le programme d'histoire des arts, à la demande de M. Ivan Renar ;
- en faisant mention dans le programme de sciences de la nécessité d'une approche sensible de la nature, comme l'avait proposé Mme Marie-Christine Blandin.
Au terme de son analyse, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », a souligné la qualité des projets soumis à la commission, mais a également souhaité qu'ils évoluent afin de tenir pleinement compte de la concertation.
Un large débat s'est alors ouvert :
Après avoir remercié le rapporteur de la qualité et de la précision de son exposé, M. Jacques Valade, président, a mis l'accent sur l'impérieuse nécessité de clarifier les textes des programmes officiels et de les ordonner autour de priorités mieux définies. Il a fait part de sa totale adhésion à l'analyse du rapporteur.
Soulignant le contraste existant entre les objectifs du ministre, assurément louables, et le contenu effectif des textes soumis à la commission, M. Jean-Marc Todeschini a exprimé son opposition à ces projets et regretté qu'ils n'aient fait l'objet d'aucune réelle concertation. Ils témoignent en effet d'une vision presque mythique de l'école d'antan, qui ne saurait inspirer une véritable politique d'avenir.
Déplorant le mouvement de balancier qui anime toutes les réformes de l'éducation nationale, Mme Brigitte Gonthier-Maurin a exprimé sa désapprobation à l'endroit de programmes qui renoncent totalement à la posture de réflexion active et d'analyse autonome que les textes de 2002 avaient voulu faire naître chez les élèves. Dans ces conditions, l'école primaire ne pourra à l'avenir qu'accentuer les inégalités, et non pas les réduire. A cela s'ajoutent le refus de toute concertation et la primarisation de la grande section de maternelle, qui rendront ces textes difficilement acceptables. Leur rejet par l'ensemble de la communauté éducative ne peut donc être une surprise.
s'est étonné de voir soumis à la commission de simples projets, qui ne tiennent en aucun cas compte des résultats des concertations engagées. Par ailleurs, au-delà du simple souci de réécrire les programmes dans une langue claire, qui fait sans aucun doute consensus, la nécessité d'engager une telle réforme pose question, dès lors que les programmes de 2002 n'ont pas encore été évalués, faute d'élèves arrivés au terme de leur scolarité primaire sous leur empire. Enfin, pour qui s'attache aux textes mêmes, la primarisation de l'école maternelle semble indiscutable.
Rappelant qu'il n'y a pas de bonnes méthodes, mais seulement de bons maîtres, M. Pierre Martin a souhaité que les projets de programmes laissent une large place à l'initiative des enseignants, même s'ils permettent aussi de définir un niveau d'exigence commun à tous. Ce souci d'équilibre doit également prévaloir s'agissant des différentes disciplines. Le sport a ainsi longtemps servi de variable d'ajustement. Sa juste place lui est aujourd'hui rendue, mais cela ne doit pas se faire aux dépens des autres enseignements, tout aussi essentiels.
a déploré l'agitation qu'ont fait naître ces programmes et regretté que la concertation n'ait pas été menée en amont. Cette réforme prend en effet place dans un contexte conflictuel, suscité par la suppression massive de postes ainsi que par l'institution inutile d'un service minimum dans le primaire. Estimant qu'il n'y a pas grand sens à se prononcer sur un élément isolé de cette politique, il a déclaré, qu'à titre personnel, il s'abstiendrait.
En réponse aux interrogations des intervenants, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » a apporté les précisions suivantes :
- l'enseignant est à l'évidence la clef de toute réussite et nombreux sont les jeunes professeurs qui font preuve d'un enthousiasme remarquable. Pour autant, des programmes restent nécessaires pour définir un cadre commun à tous ;
- les nouveaux programmes doivent être analysés avec objectivité, quelle que soit la passion qu'ils suscitent. Pour ce faire, il convient non pas seulement de se référer au texte des projets, mais aussi de les comparer avec ceux de 2002. Pour qui accepte d'opérer ce rapprochement, il apparaît nettement que les nouveaux programmes ne marquent pas une primarisation de l'école élémentaire, mais se situent simplement dans le droit fil des précédents textes ;
- le succès des politiques éducatives dépend largement de la continuité avec laquelle elles sont poursuivies. Dès lors, il conviendrait de sortir d'une logique du contre-pied systématique pour engager enfin un débat serein autour de projets de programmes qui méritent que l'on s'y attarde.
A l'issue de cet échange de vues, la commission a approuvé les conclusions du rapporteur, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen votant contre.
Enfin, la commission a désigné M. Alain Dufaut, rapporteur du projet de loi n° 773 (AN) relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants.