La délégation a procédé à l'examen du rapport d'activité 2006-2007 portant, notamment, sur le thème : « Femmes et hommes dans les médias ».
a présenté à la délégation le rapport annuel d'activité, qui s'articule en deux parties : la première retrace les diverses activités de la délégation au cours de l'année parlementaire 2006-2007, tandis que la seconde rend compte des travaux sur le thème : « Femmes et hommes dans les médias ».
S'agissant de la première partie, elle a tout d'abord rappelé que la délégation avait adopté, fin novembre 2006, le rapport d'information présenté par Mme Catherine Troendle sur les propositions et le projet de loi relatifs à la parité en politique. A cet égard, elle s'est félicitée qu'aient été prises en considération, dans le texte définitif de la loi du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, deux recommandations de la délégation prévoyant respectivement la stricte alternance entre hommes et femmes sur les listes de candidats aux élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants et le remplacement du conseiller général par son suppléant, de sexe différent, en cas de démission résultant de la limitation du cumul des mandats (et non plus seulement en cas de décès).
Elle a également indiqué que le Sénat avait débattu en séance publique, le 23 janvier dernier, d'une question orale avec débat qu'elle avait posée à Mme Catherine Vautrin, alors ministre déléguée à la parité, sur le bilan de l'application de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple et sur les suites données aux recommandations formulées par la délégation sur ce sujet dans le cadre du rapport d'information présenté par M. Jean-Guy Branger.
Puis elle a brièvement retracé l'activité internationale de la délégation, en évoquant successivement :
- les travaux de la commission ad hoc sur les droits des femmes de l'Assemblée parlementaire euroméditerranéenne (APEM), auxquels elle a pu assister en qualité d'observateur, formulant à ce sujet le souhait que cette commission soit pérennisée et qu'elle puisse intégrer certains membres du forum euroméditerranéen des femmes parlementaires ;
- la dernière réunion de la Conférence des commissions parlementaires pour l'égalité des chances des femmes et des hommes de l'Union européenne, à laquelle elle a participé avec Mmes Gisèle Printz et Joëlle Garriaud-Maylam ;
- ainsi que l'accueil au Sénat de plusieurs délégations étrangères.
Enfin, elle a rappelé que la délégation avait organisé, à l'occasion de la Journée internationale de la femme, le 8 mars 2007, une rencontre au Sénat avec des lycéennes, dans un objectif de sensibilisation à la citoyenneté et d'incitation à l'engagement en politique.
En ce qui concerne le thème de réflexion retenu cette année, intitulé : « Femmes et hommes dans les médias », après avoir précisé que la délégation avait consacré à ses auditions sur ce thème, depuis le début du mois de janvier, sept réunions, Mme Gisèle Gautier, présidente, a indiqué que le choix de ce sujet, motivé notamment par les atteintes à la dignité de la femme encore trop souvent constatées dans la publicité, avait permis :
- d'une part, de traiter la question de l'image de la femme et de son utilisation dans les médias, et plus particulièrement dans la publicité ;
- d'autre part, d'évaluer la place et les responsabilités occupées par les femmes dans les professions des médias.
En premier lieu, elle a estimé qu'en dépit de l'existence d'un encadrement juridique précis et d'un système d'autorégulation, des dérives subsistaient dans l'utilisation de l'image de la femme dans la publicité, avec des atteintes persistantes à la dignité de la personne et des représentations souvent stéréotypées.
A cet égard, elle a tout d'abord rappelé l'existence d'un arsenal juridique permettant en principe d'assurer le respect de la dignité de la personne humaine et l'absence de discriminations à l'égard des femmes dans les médias et, en particulier, dans la publicité, en précisant que le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) était chargé de veiller à l'application de ces principes dans les programmes de radio et de télévision. Elle a toutefois observé qu'on ne dénombrait que très peu de décisions de justice sur ce sujet et que le système d'autorégulation des professionnels de la publicité, mis en place par le Bureau de vérification de la publicité (BVP) sur le fondement d'une recommandation de nature déontologique relative à l'image de la personne humaine, apparaissait mieux adapté dans ce domaine. Cet organisme exerce, en effet, un contrôle a priori systématique des publicités télévisées et peut être consulté préalablement à la diffusion des autres publicités. Il effectue également des contrôles a posteriori à la suite des plaintes formulées par les consommateurs, ou dans le cadre d'une autosaisine, et réalise un suivi annuel de l'application de sa recommandation relative à l'image de la personne humaine, qui fait apparaître une diminution régulière du nombre de manquements à la déontologie constatés, dont le ratio s'établit à un niveau très faible.
a toutefois souligné que, seules les publicités télévisées donnant lieu à un contrôle systématique, le contrôle du BVP était loin d'être exhaustif et son efficacité variable selon le type de média concerné et, qu'en particulier, le contrôle de l'affichage était très lacunaire. Par ailleurs, elle a constaté que certaines campagnes publicitaires étaient réalisées directement par les services de communication des grandes marques et échappaient donc au système d'autorégulation mis en place par la profession.
Elle a considéré que subsistaient beaucoup de publicités choquantes et dévalorisantes pour l'image de la femme, notamment à travers le phénomène dit du « porno chic », et a illustré son propos en présentant aux membres de la délégation plusieurs exemples récents de publicités attentatoires à la dignité de la femme.
Elle a, par ailleurs, estimé que les publicités continuaient à véhiculer des représentations encore trop souvent stéréotypées des rôles respectifs des hommes et des femmes et s'est alarmée des dérives préoccupantes qui sont constatées sur Internet.
En conséquence, Mme Gisèle Gautier, présidente, a annoncé qu'elle proposerait à la délégation d'adopter des recommandations tendant à renforcer le contrôle du BVP, à accroître les moyens d'action des associations dans ce domaine et à faciliter les réactions des consommateurs confrontés à des publicités choquantes.
Par ailleurs, elle a évoqué le culte de la minceur excessive diffusé par la publicité et les médias, entraînant une banalisation des comportements anorexiques qui ne va pas sans risques pour les mannequins, mais aussi pour la santé publique en général. Elle a donc suggéré que soit établie une Charte du mannequinat prévoyant, notamment, d'interdire aux mannequins excessivement maigres de participer aux défilés de mode.
s'est demandé si le rapport de la délégation ne constituerait pas une occasion propice pour donner un « coup de projecteur » sur cette question, en évoquant la situation de certaines jeunes filles mannequins qui souffrent et dont l'entourage est parfois constitué de personnes peu scrupuleuses.
a fait observer que ce problème affectait également certaines jeunes filles qui se présentent aux concours de « miss » dans les villages.
a indiqué qu'il existait un encadrement juridique précis de l'emploi de jeunes filles mineures comme mannequins et a souligné la responsabilité incombant à leurs parents.
a précisé que, d'après le professeur Jean-Pierre Poulain, coprésident du groupe de travail mis en place par le ministère de la santé sur ce sujet, il existerait des « zones d'ombre » concernant l'emploi de mannequins mineurs, notamment en provenance d'Europe de l'Est, et que la législation actuelle aurait peut-être besoin d'être « toilettée » sur ce point.
a estimé, sur la base de son expérience et de ses déplacements à l'étranger, que dans d'autres pays, comme les pays arabes ou africains, ces problèmes ne se manifestaient pas, tout en précisant qu'elle ne s'était cependant pas rendue en Europe de l'Est. Elle en a conclu que les jeunes filles étaient peut-être mieux protégées à l'égard de telles dérives dans certains pays étrangers.
a cependant fait observer que, dans des pays comme l'Italie ou l'Espagne, les mannequins semblaient connaître les mêmes difficultés qu'en France. En outre, elle a souligné le rôle de « vitrine » joué par la France en matière de luxe et de haute couture.
a noté qu'un certain nombre de jeunes filles mineures en provenance des pays de l'Est se livraient à la prostitution, mais qu'il était particulièrement difficile de détecter leur âge lorsqu'elles étaient en possession de faux papiers.
a ajouté que le rêve de devenir mannequin tournait parfois au cauchemar pour certaines jeunes femmes en provenance des pays de l'Est, évoquant les risques de basculement vers la prostitution.
Puis Mme Gisèle Gautier, présidente, a présenté les développements du rapport consacrés à la place et aux responsabilités occupées par les femmes dans les professions des médias.
Rappelant que le journalisme est désormais une profession largement féminisée, et, en particulier, que les femmes « grand reporter » sont très présentes sur le terrain, y compris dans les zones du monde les plus dangereuses, elle a regretté que les journalistes femmes soient, plus souvent que les hommes, pigistes ou en situation précaire.
a fait observer que les femmes « grand reporter » semblaient être de moins en moins bien rémunérées, Mme Christiane Kammermann confirmant ce propos.
a ensuite indiqué que la situation professionnelle des femmes, comparativement à celle des hommes, apparaissait plus inégalitaire dans les médias que dans d'autres activités de service, en précisant que l'étude des organigrammes des principaux médias français montrait que la proportion des femmes était inférieure à 10 % dans les postes de direction « stratégiques ». Elle a souligné que s'il existait bien quelques présentatrices vedettes de la télévision, le phénomène du « plafond de verre » jouait à fond dans ce secteur et que cette situation, exceptionnelle en Europe, mettait en évidence le retard français dans ce domaine. En outre, elle a fait observer que les femmes étaient souvent cantonnées dans des spécialités moins prestigieuses que celles des hommes, ainsi que dans des médias moins convoités : presse professionnelle ou technique, « presse people », presse féminine...
Elle a observé que la présence des femmes plus marquée à la télévision que dans la presse écrite, s'expliquait par le fait que celles-ci étaient désormais assez nombreuses parmi les présentateurs de journaux ou de magazines télévisés, sans pour autant y exercer des fonctions d'encadrement, ajoutant que l'on pouvait même parfois se demander si elles n'avaient pas été recrutées en fonction de leur apparence physique, ou utilisées comme faire-valoir d'un homme.
Afin de remédier à cette situation, elle a tout d'abord préconisé de veiller à l'application concrète de l'arsenal législatif existant, déjà très développé, qu'il s'agisse des lois contre les discriminations à l'égard des femmes, ou sur l'égalité salariale.
Constatant que l'idée d'instaurer des mesures contraignantes de discrimination positive - c'est-à-dire des quotas - ne faisait pas l'unanimité, Mme Gisèle Gautier, présidente, a jugé préférables des mesures incitatives destinées à favoriser l'accession des femmes aux postes de responsabilité.
A cet égard, elle a annoncé qu'elle proposerait à la délégation d'adopter des recommandations tendant à une généralisation rapide, dans toutes les entreprises de médias, d'accords d'entreprise destinés à assurer de manière concrète l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans tous ses aspects, à l'instar de l'accord sur l'égalité professionnelle récemment signé à Radio France, précisant que de tels accords pourraient en particulier prévoir une programmation pluriannuelle des objectifs d'évolution de la représentation des femmes dans les fonctions de responsabilité et les instances décisionnelles. En outre, elle a suggéré la création d'un prix institutionnel récompensant l'entreprise de médias assurant la place la plus large aux femmes dans les fonctions de responsabilité, en excluant toutefois de l'éligibilité à ce prix les entreprises de la presse dite « féminine ».
A propos de l'insuffisance de la place des femmes dans les professions des médias, soulignée par la présidente, Mme Catherine Troendle a évoqué, en sens inverse, la féminisation parfois jugée excessive de la magistrature et de l'éducation nationale, Mmes Sylvie Desmarescaux, Christiane Kammermann et Françoise Henneron acquiesçant à la nécessité d'un rééquilibrage dans ces secteurs d'activité.
Enfin, Mme Gisèle Gautier, présidente, a estimé que la place insuffisante faite aux femmes dans les professions des médias n'était pas sans incidences sur le contenu de l'information, en précisant que, d'après une enquête de l'Association des femmes journalistes, la proportion de femmes parmi les personnes mentionnées dans la presse française ne serait que de 17 %, soit un pourcentage nettement inférieur à la moyenne mondiale et à peu près stable depuis dix ans.
En outre - a-t-elle indiqué - l'information concernant les femmes n'est pas traitée de la même façon que celle relative aux hommes : les premières apparaissent dans les médias, le plus souvent, de façon anonyme, en position de victime, ou comme ayant un lien familial avec un homme, alors que les hommes sont très majoritairement cités avec leurs propres fonctions, et une préférence est donnée aux sujets dits « masculins ».
a observé que la représentation des femmes dans les grands quotidiens nationaux était beaucoup moins importante que dans la presse « people » ou féminine.
a insisté sur la nécessité de rechercher un équilibre entre hommes et femmes dans l'ensemble des professions, y compris celles qui, comme la médecine, peuvent apparaître excessivement féminisées.
s'est également déclarée favorable à la recherche d'un équilibre entre hommes et femmes dans tous les domaines, plutôt qu'à une revendication systématique d'une présence accrue des femmes.
Puis la délégation a procédé à l'examen des propositions de recommandations présentées par la présidente, qui a suscité un large débat au cours duquel sont intervenues Mmes Jacqueline Alquier, Sylvie Desmarescaux, Françoise Henneron, Christiane Kammermann, Gisèle Printz, Catherine Troendle et Gisèle Gautier, présidente.
A l'issue de ce débat, la délégation a adopté l'ensemble du rapport d'activité et les sept recommandations suivantes :
1. Renforcer l'efficacité du contrôle du Bureau de vérification de la publicité (BVP) à l'encontre des publicités attentatoires à l'image de la femme :
- étendre l'obligation de consultation préalable du BVP, déjà prévue pour les publicités télévisées, aux campagnes publicitaires nationales d'affichage ;
- recommander aux agences de publicité de demander un conseil préalable au BVP avant toute campagne publicitaire susceptible de poser des problèmes déontologiques.
2. Imposer à l'ensemble des marques, y compris celles qui réalisent leurs propres campagnes sans passer par les agences de publicité, d'adhérer aux règles déontologiques et au système d'autorégulation mis en place par le BVP.
3. Accroître les moyens d'action des associations de défense des droits des femmes en matière de lutte contre la publicité sexiste :
- élargir à ces associations la composition de la commission de concertation qui réunit des représentants des consommateurs et des professionnels de la publicité auprès du BVP ;
- permettre à ces associations de demander au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) d'engager la procédure de mise en demeure prévue à l'encontre des éditeurs et distributeurs de services de radio ou de télévision ne respectant pas leurs obligations.
4. Dans un souci de protection de la santé publique et de prévention de l'anorexie, établir une Charte du mannequinat, prévoyant notamment l'interdiction de participer aux défilés de mode pour les mannequins dont l'indice de masse corporelle est inférieur à un seuil défini par des experts médicaux.
5. Réaliser des statistiques officielles détaillées sur la présence des femmes au sein des professions des médias, particulièrement au niveau des postes de responsabilité.
6. Mettre en place, dans le cadre de la formation dispensée dans les écoles de journalisme, un module d'enseignement consacré à la question d'une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les médias.
7. Prévoir dans les programmes scolaires une sensibilisation aux stéréotypes véhiculés par les médias sur les rôles respectifs des femmes et des hommes.