Notre mission a entendu les représentants des petites villes, des villes moyennes. L'audition du président de l'AMF est l'une des plus importantes à nos yeux. Nous souhaitons avoir votre avis, Monsieur le président, et celui de l'AMF, sur l'impact de la RGPP pour les collectivités locales.
La RGPP est une politique d'Etat sur laquelle nous ne portons pas de jugement d'opportunité. Mais elle a bien sûr des conséquences sur les collectivités territoriales. Il n'y a pas eu grande concertation en amont. Cette réorganisation de l'administration territoriale d'Etat a été mise en oeuvre par les préfets. Au niveau des départements, ils ont - bien - informé les parlementaires, les maires des villes les plus importantes, les conseils généraux, mais il ne s'agissait que d'information.
Il n'est pas anormal que l'Etat veuille ajuster son organisation en fonction des évolutions démographiques ou techniques : trop longtemps la France est demeurée passive, conservant des structures du passé. La volonté des gouvernements successifs de s'adapter à un monde en mutation doit être saluée. Mais une concertation en amont aurait été souhaitable. Nous sommes en train d'obtenir du gouvernement la réactivation de la Conférence nationale des exécutifs, CNE, qui était un forum où de très nombreux participants s'exprimaient, chacun à son tour, mais sans véritable dialogue. La nouvelle formule sera plus resserrée, plus dense, avec trois représentants de l'Association des régions de France, trois de l'Assemblée des départements de France et trois de l'AMF. Des réunions plus thématiques se tiendront aussi avec les ministères compétents. Il s'agira d'une instance de concertation, non de négociation à proprement parler car le mot n'a pas été prononcé, mais d'échange sur les attentes et les préoccupations respectives. La CNE aura un rôle à jouer en amont du processus législatif et réglementaire. Ce matin, nous avons tenu une réunion avec les autres associations d'élus locaux, afin d'organiser nos positions.
Les collectivités n'ont pas eu l'occasion de s'exprimer en amont, vous l'avez rappelé. Certains maires, certains présidents d'Epci, s'inquiètent du désengagement de l'Etat et du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, qui les obligent à recruter du personnel. Dans mon département, j'ai interrogé les 350 maires : leur première difficulté tient à la moindre présence de l'Etat pour les assister dans la maîtrise d'ouvrage. On observe du reste une confusion entre les conséquences de la réglementation européenne sur la concurrence et les conséquences de la moindre présence de l'Etat. Quel est votre sentiment sur cet aspect ?
Le président de la République a récemment prôné la polyvalence des services de l'Etat, singulièrement en milieu rural. Qu'en pensez-vous ? Enfin, quel est le sentiment des maires sur la gestion des passeports biométriques et la réforme présentée initialement comme une mesure de simplification ?
La réaction n'est pas la même dans les grosses villes comme Dijon et les villes moyennes, pour lesquelles la RGPP, modifiant les effectifs dans les préfectures et sous-préfectures, a des incidences notables. Dans ma ville, la forte réduction du nombre des fonctionnaires a eu un impact sur l'activité... Et dans les zones rurales, l'ingénierie publique, assurée naguère par les directions départementales de l'équipement (DDE) ou de l'agriculture (DDA), a purement et simplement disparu ! Or ces administrations fournissaient une assistance efficace et fiable. Les conséquences sont financières. Certains départements ont créé une agence départementale au service de toutes les communes ; des bureaux d'études intercommunaux ont été mis en place. Dans mon intercommunalité, qui compte 33.000 habitants, nous avons ainsi mutualisé un bureau, mais avec un coût supplémentaire. L'Etat allège son dispositif sur le terrain : tant mieux pour les finances publiques d'Etat ; mais les finances publiques locales supportent un poids nouveau.
L'AMF est depuis longtemps l'avocat de la polyvalence. En zone rurale, elle conditionne l'équité de répartition des services publics ; mais l'émiettement, la parcellisation des services publics ne sont pas souhaitables et la réponse se trouve donc dans le regroupement et la mutualisation des services. En avril 2005, nous avons conclu un accord avec La Poste. Lorsqu'un bureau utile quelques heures par semaine est accueilli dans une mairie qui n'est pas surchargée non plus, tout le monde, le maire, les usagers, La Poste, est satisfait. Un nouveau contrat tripartite vient d'être signé avec La Poste et la dotation du fonds de péréquation postale a augmenté, 170 millions d'euros par an désormais. Les mairies deviennent des maisons de services publics et la qualité des services s'améliore.
Sur les passeports biométriques, nous nous sommes battus... avec le concours efficace du Sénat ! Les 3.000 euros proposés initialement par machine ont été portés à 5.000 ; et l'arriéré a été pris en compte dans le cadre d'une forfaitisation - 95 millions d'euros ont été débloqués pour apurer la situation. Aujourd'hui, plus de 2.500 communes sont dotées d'une station biométrique. L'inspection générale de l'administration, l'inspection générale des finances et l'AMF ont conduit ensemble une expertise pour évaluer les coûts réels, dans 2.074 communes volontaires. La dotation globale doit être de 8.830.0000 euros, soit 7,25 euros par titre - l'IGA parvenait, elle, à un coût de 7,13 euros mais elle ne prend pas en considération les congés maladie ni les RTT, qui imposent de compter 1,5 agent par station. Et si l'équilibre est presque atteint sur les passeports, lorsque s'y ajouteront les cartes nationales d'identité, le niveau actuel de compensation ne sera plus viable. J'ai donc demandé au secrétaire général du ministère une évaluation du surcoût à venir.
Avez-vous recensé les communes touchées par la transformation des cartes militaire, judiciaire, sanitaire, scolaire ?
Non, nous ne l'avons pas fait. Nous nous sommes beaucoup mobilisés lors de la révision de la carte militaire car les conséquences étaient dramatiques pour les petites communes qui voyaient leur régiment s'en aller. Nous avons maintenu une pression forte afin qu'elles bénéficient de compensations. Nous avons peu agi, en revanche, lors de la révision des cartes judiciaire et hospitalière. Nous avons transmis les attentes globales des communes, maintien de l'offre de soins etc. La globalisation de l'offre est une réponse si l'on maintient la présence hospitalière sur l'ensemble du territoire.
La RGPP appliquée aux cartes militaire, scolaire, judiciaire, a été mal vécue par certaines communes. A-t-elle eu des contre-effets positifs ? Comment ont été traités les problèmes des collectivités, des commerces locaux ?
A la demande de l'AMF, des compensations ont été accordées : possibilité pour les communes de racheter à prix préférentiel des emprises foncières délaissées, mesures financières d'accompagnement. Aujourd'hui, nous n'avons plus guère de remontées sur ces questions.
Existe-t-il des services de l'Etat où la réduction des effectifs atteint un seuil critique, induisant désormais des problèmes majeurs ? Lors des regroupements d'administrations en une seule unité, un service a-t-il pris le pas sur les autres, la direction régionale de l'environnement (Diren), DDE ou autre ? Enfin, les nouvelles directions ainsi créées n'ont-elles pas tendance à faire du contrôle plutôt que du conseil ?
Oui, elles tendent plutôt à contrôler qu'à conseiller. Quant à la pondération au sein des nouvelles directions, tout dépend des hommes. Lorsque le pilotage est assuré par l'ancienne DDA, l'orientation est agricole et rurale ; lorsque c'est la DDE, les questions de logement ou d'urbanisme sont privilégiées. Il n'y a pas encore d'approche uniforme.
Nous sommes en queue de peloton européen pour l'encadrement dans les écoles primaires : la diminution des postes continue pourtant ! Les communes vont bientôt se révolter, je crois, car les classes sont surchargées et l'on a transféré aux collectivités les jardins d'éveil et la sécurité. Si un pépin se produit un jour, à qui faudra-t-il en imputer la responsabilité ? Des écoles ferment : les communes perdent leur avenir. De plus en plus nombreux, les hôpitaux locaux sont devenus centres hospitaliers. Certains ont été fermés. Aujourd'hui on prône les communautés hospitalières de territoire : elles auraient un intérêt si elles entraînaient une mutualisation réelle mais il n'en est pas ainsi. Comme pour la RGPP, la mise en place a été brutale. Dans le Finistère, le directeur d'un hôpital a été informé qu'il devenait sous-directeur de la structure d'à côté ; le conseil de surveillance n'avait même pas été averti, les procédures n'ont pas été respectées. Nous avons été conviés à des réunions de réorganisation hospitalière - menée à marche forcée... Dans certaines spécialités, les praticiens sont rares mais deux misères ne font pas une richesse. En gériatrie, par exemple, les manques sont énormes. Partagez-vous le sentiment que la machine est lancée et que les dépenses à consentir localement sont considérables pour gérer les conséquences dans les territoires touchés ?
Dans le secteur scolaire, on a atteint un point bas, avec à nouveau 16.000 suppressions de postes cette année. On ne peut plus raisonnablement, à partir de ce niveau, poursuivre la réduction des effectifs. L'AMF sera hostile à toute nouvelle suppression, après celle de 2011. Quant aux maternités, on ne peut aujourd'hui, pour des raisons de démographie médicale et d'impératifs de santé publique, maintenir un morcellement des lieux de soins. Chez moi, en 1989, bien avant que ne soit inventée la RGPP, coexistaient une maternité qui effectuait 200 accouchements par an, une autre à Champagney à quelques dizaines de kilomètres - 200 accouchements également - et une clinique privée, 1.200 accouchements par an. Les trois établissements ont été réunis à l'hôpital public de Lons-le-Saulnier, mais les consultations avancées et la préparation à l'accouchement ont été maintenues sur les anciens sites.
On manque aujourd'hui d'IRM, de scanners, d'équipements de médecine nucléaire : ils coûtent cher et l'on ne peut en doter tous les établissements. Du reste, on ne possède pas les compétences dans tous les établissements... En outre, les médecins doivent se côtoyer pour traiter plus efficacement le patient. Les regroupements dans une communauté hospitalière de territoire, dotée d'équipes mobiles, me paraissent intéressants. J'ajoute que le temps de communication - envoi, par exemple, des radioscopies effectuées sur un patient - a beaucoup diminué grâce à internet. Aujourd'hui, on peut regrouper les médecins et maintenir une présence territoriale et une bonne desserte des populations.
Certes, on ne peut maintenir un plateau technique dans chaque commune. Mais la gériatrie par exemple exige une prise en charge de proximité ; or, avec la création de ces pôles, les hôpitaux locaux ne peuvent plus survivre. Ils ne sont pas, pourtant, des établissements coûteux. Les regroupements de médecins dans un seul pôle, pourquoi pas, mais je ne vois pas comment on créera des équipes itinérantes, car les praticiens seront déjà débordés de travail au sein du pôle ! Localement, on ne trouve pas de spécialistes et les médecins ne sont pas remplacés quand ils partent en vacances. On a alors recours à des entreprises d'intérim et les médecins qu'elles envoient sont payés 1.100 euros par jour !
Les populations finiront par migrer pour se rapprocher des centres de prise en charge. Pendant ce temps, on dit aux maires : si vous voulez maintenir une offre de santé sur vos territoires, libres à vous de créer des pôles de santé.
Mais chaque fois qu'un plateau technique est supprimé, il est remplacé par un pôle gériatrique, installé au plus près des lieux où les personnes accueillies ont passé leur vie. On n'a pas besoin, dans ces centres, d'une réactivité médicale rapide, les patients peuvent être transférés vers le pôle hospitalier en cas de nécessité.
Les « mercenaires médicaux », en particulier dans certaines spécialités, anesthésie par exemple, sont payés des sommes considérables. Ils sont très mobiles, et l'un d'eux à qui je proposais une sédentarisation dans l'hôpital de ma ville m'a ri au nez car les rémunérations n'ont rien à voir avec ce qu'ils perçoivent en se déplaçant et les fidéliser est par conséquent impossible.
Nous avons auditionné de nombreuses personnalités : plusieurs ont évoqué l'idée de généralistes de l'administration dans des maisons d'Etat. On n'a pas besoin de disposer partout de toutes les spécialités ; un généraliste doté des moyens de communication modernes peut répondre à bien des sollicitations.
On a besoin d'une administration compétente. Je ne reviens pas sur l'ingénierie, je l'ai déjà évoquée. Mais je souhaite le maintien des services des finances publiques, direction générale des impôts, direction du Trésor, direction des finances publiques, la fusion ne nous posant pas de problème si les services rendus aux maires sont de bonne qualité. Les maires ont besoin d'aide dans la construction de leurs budgets. Le trésorier principal n'était pas toujours « au top ». Je préfère un responsable hautement compétent, qui se déplace, à un maillage trop serré mais sans compétences pointues. La nouvelle organisation n'a pas suscité de dysfonctionnements, je n'ai enregistré aucune remontée à ce sujet.
Longtemps, les maires ont souhaité recevoir une assistance en matière budgétaire ou d'ingénierie. Et ils en ont toujours besoin : une commune de 30 ou de 80 habitants ne peut se doter des compétences correspondantes ! Et pourtant, sur bien des sujets, les réponses aux questions se font attendre longtemps car le préfet ne dispose pas des moyens humains suffisants. Les départements ont été maintenus au fil des lois votées. Mais l'Etat a choisi de régionaliser ses services. Dans les communes des départements les plus éloignés du chef-lieu de région, on attend, on attend...
La gestion de proximité et le conseil sont des points importants. C'est pourquoi il me semble essentiel de maintenir un bon maillage de sous-préfectures. Le sous-préfet est le bon interlocuteur des communes concernant les actions de l'Etat ; et il lui revient de faire remonter les besoins. Les intercommunalités aussi jouent un rôle de plus en plus important. L'instruction des documents d'urbanisme, des permis de construire, relève de la compétence communautaire, même si le maire conserve la signature. La gestion de proximité va gagner en puissance.
Les sous-préfectures comptent généralement deux agents, le sous-préfet et sa secrétaire...
Les préfectures et sous-préfectures vont être impactées directement par la diminution des effectifs. Mais pour retrouver sa compétitivité, notre pays doit veiller à une meilleure efficacité de la dépense publique.
L'Etat doit se réformer, certes. La décentralisation a également changé la répartition des tâches et provoqué une remise en cause de certains blocs de compétences. Mais le Médiateur M. Delevoye hier a brillamment souligné la souffrance de nos concitoyens face au manque non seulement de services publics mais de biens publics. L'analyse de M. Delevoye rejoignait parfaitement un ressenti que nous connaissons bien.
Dans la région que je préside, l'Etat nous a demandé de mettre aux normes les lycées, salles de classes, laboratoires, matériel. Et cette année il annonce : « on ferme la filière » ! Nous allons tout faire pour réutiliser ces équipements au profit des jeunes et de l'apprentissage, mais quel manque de coordination, quel dysfonctionnement ! On ne gère pas un territoire avec un esprit notarial... Dés lors nous nous posons la question : faut-il investir dans le lycée agricole de Château-Chinon ? Ne va-t-on pas le fermer ?
Les communes vivent cela aussi. Elles rénovent l'école, la cantine, et elles apprennent que l'établissement est menacé. Nous avions, dans un document signé en 2006 avec le ministre concerné, obtenu - arraché, devrais-je dire - un délai de deux ans, en cas d'investissement accompagné par l'Etat, avant toute décision de modification du nombre de postes. Ce n'est pas suffisant.
Soit on choisit une organisation beaucoup plus verticale, secteur par secteur, en modifiant la répartition actuelle des compétences ; soit on opte pour une concertation fine, à valeur prescriptive pour le moyen terme et non seulement le court terme. La CNE représente me semble-t-il la première pierre dans la voie de la concertation, pour éviter à l'avenir les situations que vous évoquez. Dans mon département, l'Etat a imposé des équipements, laboratoires, paillasses, lors de la création d'une filière de gestion des déchets. Ils n'ont jamais servi...
En matière de permis de construire, il y a une contradiction : l'Etat menait l'instruction des permis de construire, il s'occupe aujourd'hui de contrôle de légalité. Il faut clarifier les choses... Que pensez-vous de l'orientation vers un contrôle de légalité focalisé sur les actes les plus importants ? Quelles en sont les conséquences au quotidien sur nos délibérations ?
Les contrôles semblent moins nombreux mais le plus souvent pointilleux - et pas toujours intelligents... Avec les réformes de 1982, 1994, 2010, on est passé d'un Etat qui s'occupait de tout et contrôlait tout à des pouvoirs locaux pour l'instant mal articulés avec les moyens financiers locaux. La question des compétences et du financement de ces compétences est encore en chantier ! Votre mission amorce un cheminement essentiel pour notre communauté nationale.
Monsieur Canepa, en tant que préfet de région et président de l'association du corps préfectoral, pouvez-vous faire le point sur la première phase de la RGPP ? A-t-elle été menée en concertation avec les collectivités ? Ce n'est pas le sentiment du président de l'association des maires de France que nous venons d'auditionner... Les objectifs, notamment financiers, ont-ils été remplis ? Comment envisager la deuxième phase de cette réforme ?
Je remercie le Sénat d'avoir invité le président de l'Association du corps préfectoral. Sa liberté de ton sera plus grande que celle du préfet de région...
Contrairement à une idée reçue, la réforme de l'administration territoriale de l'État, engagée depuis 2007, ne constitue pas une rupture. Les expérimentations menées depuis 2004 poursuivaient des buts proches, sinon identiques. Premier objectif de cette réforme, améliorer la lisibilité de l'administration territoriale de l'État et, donc, la cohérence de son action. La multiplication des services avait des effets pervers ; sur un même dossier, chacun y allait de sa vision, ce qui jetait le trouble... Dès 2004, on a expérimenté la fusion des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) et directions régionales de l'environnement (DIREN), des directions départementales de l'équipement (DDE) et des directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) et, enfin, le rapprochement des services de l'emploi et des trésoriers-payeurs généraux, notamment, à Lille. Cette dernière expérience n'a pas abouti ; toutefois, peut-être a-t-elle eu le mérite d'inspirer le rapprochement des finances et de l'emploi dans le Gouvernement de 2007... Les résultats sont-ils au rendez-vous ? Sans aucun doute, puisque six directions seulement, en sus des rectorats et des agences régionales de santé, siègent désormais à la table du « conseil d'administration » de l'État.
Deuxième objectif, le renforcement de l'échelon régional dans la continuité des efforts régulièrement poursuivis depuis les années 1970. Il s'est traduit par le décret de 2004, qui a accru le rôle du préfet de région dans la conduite des politiques publiques, et le décret de 2010 qui a fixé l'organisation territoriale de l'État et les relations entre préfets de région et de département. L'administration territoriale fonctionne, maintenant, selon deux logiques : au niveau régional, la déclinaison des politiques nationales par les services des différents ministères ; au niveau départemental, une démarche intégrée et interministérielle. En 2008 et 2009, les préfets de département ont craint un court-circuitage du niveau départemental par les élus. Une circulaire de 2010, qui a limité le droit d'évocation du préfet de région aux questions générales et de principe, a apaisé ces craintes.
Troisième objectif, l'adaptation de l'organisation de l'administration territoriale de l'État aux besoins des territoires et aux demandes des populations. Cette recherche, intéressante, constitue une rupture avec notre droit administratif : assurer une égalité d'objectifs, et non plus une égalité de moyens. Ces efforts restent modestes, en raison de la volonté de certaines administrations centrales de maintenir une organisation identique en tout point et en tout lieu. Pour autant, l'organisation territoriale tient désormais compte de certains critères : l'importance démographique du département détermine le nombre de ses directions interministérielles -deux pour les moins peuplés, trois pour les autres- ; les facteurs géographiques, avec la création d'une direction départementale des territoires et de la mer pour les départements littoraux ; des difficultés spécifiques à certains territoires, avec la mise en place d'une direction régionale de l'hébergement et du logement en Île-de-France. L'Association du corps préfectoral souhaite avancer sur ce chemin. Dans l'ensemble, la réforme de l'administration territoriale de l'État est plutôt un succès : une meilleure coordination, une meilleure lisibilité, bien que les sigles restent incompréhensibles -un travers bien français !-, une meilleure adaptation de l'organisation aux territoires.
Au-delà de la réorganisation des services de l'État, l'essentiel est, pour moi, de passer d'une administration de guichet et d'exécution à une administration de conseil, d'orientation et de matière grise en nous appuyant sur les nouvelles ressources technologiques comme l'ont fait les réseaux bancaires il y a vingt ans... Ne faut-il pas en faire un des objectifs de la deuxième étape de la réforme ? Prenons deux exemples de nature différente : la modernisation de la fabrication des passeports et des cartes nationales d'identité de même que la possibilité ouverte à des tiers, qui agissent comme collaborateurs du service public, de faire établir les cartes grises, ont permis de rapprocher le service du consommateur tout en réalisant des économies aussitôt réinvesties ; la création d'une plate-forme pour le contrôle de légalité afin de répondre à la difficulté grandissante des questions posées. Si l'on veut réussir dans cette voie, il faut investir dans la formation des personnels B et C pour leur confier d'autres tâches et leur faire gravir des échelons. C'est la seule manière d'avoir suffisamment de matière grise pour répondre aux demandes des administrés.
Passer d'une administration de guichet à une administration de matière grise ; voilà une bonne formule ! En attendant, lorsque j'appelle la préfecture en fin d'après-midi ou en soirée, j'entends : « tapez 1, puis 2, puis étoile... ». Il me faut au moins cinq minutes pour arriver à parler à quelqu'un... Autre exemple, ma petite commune a notifié sa décision de réviser le PLU début janvier. Hier matin, j'ai contacté ma préfète pour me renseigner sur l'avancement de ce dossier : la secrétaire générale m'a répondu que l'instruction débutera en avril, faute de moyens... Les administrés devront attendre !
Lorsque les organisations syndicales s'inquiètent de la diminution des effectifs et des moyens, je leur réponds qu'elle n'est pas liée à la réforme ; de toute façon, les effectifs auraient été réduits. Certes, il eût été plus facile de mener la réforme à moyens constants, de ne pas manger son blé en herbe en évitant d'utiliser les économies avant même de les avoir réalisées... La réduction des effectifs est-elle trop rapide ? Je serais tenté de répondre oui. En tant que président de l'Association du corps préfectoral, je note que l'administration territoriale de l'État, au sein du ministère de l'intérieur, subit une très forte diminution d'effectifs, compte tenu du faible nombre de ses agents : 30 000 agents contre, par exemple, 200 000 policiers. Et, à cause des contraintes budgétaires de plus en plus fortes, nous ne sommes pas en mesure de faire appel à des compétences extérieures ou de recruter pour mener à bien des actions rapides et immédiates. En bref, dans les préfectures et les sous-préfectures, il n'y a plus de « gras » ; le muscle est déjà atteint.
La survie passe par la mutualisation. Pour exemple, les départements ont mutualisé le standard avant qu'il ne soit automatisé -ce qui a permis de réaliser des gains considérables sur les soirées et les nuits. Enfin, l'absence de révision des missions. Celles-ci progressent, les moyens diminuent. De quoi donner le grand frisson aux élus, mais surtout au corps préfectoral dont on connaît le sens du service public ! De nouvelles réductions d'effectifs dans les préfectures et sous-préfectures signifieraient que l'os est atteint. Je le dis clairement, avec l'Association, il faudra se poser la question de la carte préfectorale. Elle n'a pas évolué depuis 1926...
Réforme et réduction des effectifs ne sont pas liées, avez-vous dit. Pourtant, les ministres, lorsque nous les avons auditionnés, ont cité parmi les objectifs de la RGPP un service public de meilleure qualité et une productivité renforcée avec le non remplacement d'un départ sur deux à la retraite. Pourriez-vous nous apporter des éclaircissements supplémentaires ? La RGPP, qui renforce l'échelon régional, est inspirée du rapport Balladur. Or la réforme des collectivités territoriales n'a pas suivi cette voie, elle a plutôt réaffirmé l'importance des départements. Cela ne constitue-t-il pas une difficulté ? La mission des préfets de coordonner les services départementaux dans une logique horizontale ne se heurte-t-elle pas au maintien d'une organisation verticale ? De fait, les agents continuent de dépendre des ministères... La simplification du contrôle de légalité se traduit, nous a dit le président de l'association des maires de France, par des contrôles aléatoires et tatillons. Quid de l'assistance à la maîtrise d'ouvrage ? Le sujet préoccupe les maires... Enfin, pouvez-nous dire quelques mots de la RGPP en Île-de-France ?
La RGPP, facteur de productivité ? Oui, si l'on parle de la réforme de l'organisation territoriale. Rechercher davantage de productivité en améliorant la qualité du service rendu est une équation délicate à résoudre, mais un équilibre peut être trouvé. Les économies doivent être la conséquence d'une meilleure organisation -les mutualisations et les suppressions de services redondants-, et non le postulat.
Le non remplacement d'un départ sur deux à la retraite ? Les 30 000 agents de l'administration territoriale pèsent peu de poids par rapport aux autres bataillons de la fonction publique. Combien faudrait-il supprimer de postes ailleurs pour atteindre cet objectif ?
J'ai eu la chance et l'honneur de participer aux travaux du comité Balladur. Certes, il existe un décalage. Mais les communes ont la liberté de fixer leur organisation interne ; pourquoi n'en serait-il pas de même pour l'État ? Le maintien d'une organisation verticale pose effectivement difficulté aux préfets de région. Les administrations centrales, si elles vivent mal la perte de tout ou partie de leurs compétences, doivent réaliser des économies sur les territoires pour atteindre leurs objectifs. Le système sophistiqué des budgets opérationnels de programme, introduit par la LOLF, permet une discussion entre préfet de région et administrations centrales. Il m'est arrivé d'émettre un avis négatif ; on en a tenu compte.
Sur la question des effectifs, je vous fournirai un argument supplémentaire : au sein des administrations, la répartition des effectifs entre le niveau territorial et central est-elle satisfaisante ? Pour des questions de lisibilité, on crée parfois des agences et des établissements publics. Leur applique-t-on l'objectif d'un départ en retraite sur deux non remplacé ? Non !
Quant au contrôle de légalité, il est ciblé, en fonction d'une stratégie définie en début d'année -par exemple, les marchés compris entre telle et telle somme, une catégorie de collectivités, un type de délégation de service public. Tatillon ? Sans doute, j'ai tendance à le penser aussi lorsque je suis contrôlé par la Cour des comptes ! Ensuite, l'administration est composée d'hommes et de femmes qui ont, chacun, leur particularité ; c'est sa richesse, mais aussi sa faiblesse...
J'en viens à l'assistance aux communes. La réduction du nombre de postes décourage les ingénieurs des ponts et chaussées, avions-nous indiqué, M. Folz et moi-même dans notre rapport, lesquels travaillent de plus en plus pour les collectivités. Un jour, ce seront peut-être les communes qui porteront assistance à l'État !
Sur la RGPP en Île-de-France, permettez-moi une confidence : je n'étais pas un fanatique des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, les DREAL. Je préconisais plutôt une fusion de la direction de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) et de la DIREN et un maintien de la direction régionale de l'équipement. Le champ des DREAL me semble un peu excessif. Étant têtu, j'ai obtenu gain de cause en Île-de-France. Il y existe donc une direction régionale de l'équipement et de l'aménagement, qui intègre la direction des routes ; une direction régionale de l'hébergement et du logement et la réconciliation de l'environnement et de l'énergie au sein d'une même direction régionale. Autre spécificité, l'Île-de-France est une zone extrêmement urbanisée partageant des problèmes communs ; d'où des directions régionales interdépartementales, notamment pour les trois départements de la petite couronne. Enfin, dernière originalité : la préfecture de Paris intègre, en son sein et dans le même lieu physique depuis un mois, les unités territoriales de l'aménagement et de l'équipement et la direction de la cohésion sociale sous l'autorité du préfet sur le modèle de l'expérimentation conduite dans le Lot, soit l'intégration au sein d'un service unique comme dans les conseils généraux.
J'aurais aimé en savoir plus sur les agences, dont le nombre a cru et embelli ces dernières années. Depuis que l'État s'est recentré sur sa mission régalienne de contrôle, c'en est fini de la période faste où les services de l'État accompagnaient les communes dans la maîtrise d'ouvrage. Pour autant, contrôle et conseil sont-ils incompatibles ? N'est-ce pas dans l'intérêt de tous de diminuer les risques d'erreur ?
En Bretagne, la situation est inquiétante. Quel est le devenir des sous-préfectures ?
Le renforcement des pouvoirs des collectivités territoriales ne pose-t-il pas un problème psychologique aux agents des préfectures et sous-préfectures ?
L'objectif de la réforme de l'administration est de changer de culture, de passer d'une logique de guichet à une logique de conseil. L'assistance à la maîtrise d'ouvrage est donc au coeur du sujet. Les intercommunalités peuvent certes mutualiser les moyens, mais ce n'est pas toujours suffisant, vu la complexité des exigences auxquelles il faut nous conformer pour respecter la législation. L'État ne gagnerait-il pas à adopter une approche de coproduction et de conseil, plutôt que de se limiter à l'instruction et à la censure ? Une intervention de l'État en amont éviterait de perdre du temps, des financements, et limiterait les difficultés en aval !
Attention aux effets pervers. Si les sous-préfets sont toujours prêts à nous accompagner, les directions spécialisées, en revanche, s'empressent de juger impossibles tous nos projets... Ces fonctionnaires compenseraient-ils une perte de pouvoir par un contrôle excessivement strict ?
S'agissant de l'assistance à la maîtrise d'ouvrage, complexité signifie rareté des hommes, et donc nécessité de regrouper. Or les élus ont besoin de proximité ; c'est possible, avec un sous-préfet comme pilote et un droit de tirage sur la capacité en matière grise, regroupée au niveau régional.
Le sous-préfet doit être maître Jacques : il n'a pas tous les moyens à disposition, mais doit pouvoir les mobiliser ; les directions régionales doivent se plier à ses orientations.
Je pense avec vous que l'État doit jouer un rôle de coproduction et de conseil auprès des collectivités, et non seulement de censeur. Je m'efforce qu'il en soit ainsi. Il sera toutefois amené à rendre des décisions ou des avis emportant un jugement. Au préfet de piloter les directions régionales et interministérielles dans ce sens. Seule limite, les moyens...
L'Association du corps préfectoral estime qu'il faut ouvrir le dossier de la réorganisation des sous-préfectures. Sur ce point, nous sommes en décalage avec le ministère de l'Intérieur... Il faut dire que les villes vivent la perte de leur sous-préfecture comme une atteinte intolérable à leur standing ; lorsque j'avais suggéré que Boulogne et Montreuil-sur-mer se partagent un sous-préfet, les élus avaient demandé ma tête !
Je ne pense pas qu'il y ait des services en souffrance, mais il peut y avoir des agents en souffrance. Le rôle du management est aussi de redonner confiance et d'accompagner le changement. Celui-ci peut être douloureux, mais il n'y a pas de raison de laisser un agent continuer à faire ce qu'il fait depuis vingt ans si cela ne sert plus à rien !
Merci de venir nous entretenir de votre vision et de votre expérience en matière de réforme de l'État. Je ne vous poserai qu'une question : quel bilan le CSATE tire-t-il de la réforme des administrations territoriales ?
Le CSATE est un organisme peu connu. Créé par le décret du 29 novembre 2006, il a succédé au préfet en mission extraordinaire chargé de l'évaluation des préfets, instauré en 1999. Nous ne sommes pas un corps d'inspection : notre coeur de métier est l'évaluation des préfets et sous-préfets - cent à cent-vingt par an -, non des outils de l'administration.
Du fait de la diversification du recrutement du corps préfectoral, le CSATE, composé essentiellement de préfets, a également une fonction de tutorat, de transmission de pratiques et d'informations.
Enfin, nous rendons au ministre de l'Intérieur un avis confidentiel sur l'évaluation de la fonction de préfet à l'égalité des chances, créée à la suite des émeutes urbaines de 2005. Nous n'avons pas à nous prononcer sur les choix d'organisation, nationale ou territoriale, mais uniquement sur l'équation humaine. Le préfet ou le sous-préfet conduit-il la réforme en optimisant les compétences, en valorisant ses équipes ? Quid des nouveaux profils de représentants de l'État ?
La réforme des administrations territoriales est très récente ; changer des habitudes de travail prend du temps. Nous interrogeons les partenaires du préfet, ses collaborateurs. Les directeurs disent avoir perdu en autonomie mais gagné en intelligence : ils sont désormais de réels interlocuteurs du préfet, et comprennent mieux les enjeux. Bref, le resserrement quantitatif s'est traduit par plus de cohérence et de réactivité.
Nous interrogeons également les présidents de conseils généraux, les maires de grandes villes sur leurs relations avec le représentant de l'État. Pour que le préfet demeure leur interlocuteur privilégié, il lui faut de nouveaux savoir-faire. Cela suppose de changer de pratiques, d'aller chercher l'expertise, de construire un réseau d'influence pour faire entendre les attentes du territoire, de travailler en équipe autour du préfet de région... Le préfet a-t-il bien appréhendé le nouveau mode opératoire, pour garantir une réponse de l'État de qualité, et donc crédible ? À nous de mesurer sa capacité à évoluer, qualité dont le corps préfectoral a su faire preuve après la décentralisation.
Je ne porterai pas d'appréciation sur la réforme des administrations territoriales ; le CSATE délibère sur les dossiers d'évaluation individuels, pour donner au ministre un avis sur la capacité du corps préfectoral à évoluer. Les élus ont besoin d'une simplification du paysage institutionnel, de lisibilité, d'un État proche, accessible, qui les accompagne et les aide tout en garantissant le respect de la loi.
J'ai compris que vous ne vous sentiez pas autorisé à nous donner votre avis sur la RGPP... Quels sont les critères d'évaluation du corps préfectoral ? Si le ministre de l'Intérieur attend de ses serviteurs qu'ils mettent en place la RGPP, sans doute a-t-il donné des instructions sur les méthodes de travail et défini des priorités ? La règle du non remplacement d'un départ sur deux entraîne une réduction des moyens, et donc un recentrage sur des priorités.
Sans trahir le secret du confessionnal, que pouvez-vous nous dire des difficultés que disent rencontrer les préfets, et de leurs attentes ?
Enfin, quel est le climat relationnel entre le préfet de région, qui coordonne, et les préfets de département, qui peuvent sembler relégués au statut de sous-préfet ?
Notre évaluation est simple. Le préfet ou le sous-préfet a-t-il une aptitude à la pédagogie ? Sait-il faire comprendre la réforme et susciter l'adhésion ? Est-il capable de conduire un vrai dialogue social, de sorte que la volonté de l'État se traduise dans la réalité avec un minimum de tension ? Par exemple, le schéma immobilier n'est pas indifférent pour les agents : le préfet doit concilier la recherche d'économies et le maintien de conditions de travail satisfaisantes. Le dialogue social, avec notamment le nouveau comité technique paritaire interministériel, est un outil structurant de la réorganisation.
Outre la réduction des moyens touchant les fonctions de production de cartes d'identité et de passeports, le préfet doit préserver le niveau de compétence et d'expertise en matière de contrôle de légalité. Nous évaluons comment le préfet s'organise pour garantir un niveau de compétence pertinent.
Les préfets ne se confient guère à nous, car nous sommes dans un rapport d'évaluation.
Sans doute considèrent-ils qu'exprimer des doutes serait un signe de faiblesse...
S'ils s'interrogent, c'est sur leur faculté à trouver dans l'appareil de l'État les expertises pointues dont ils ont besoin, compte tenu de la complexité des sujets. Un préfet peut ainsi être amené à s'adresser au conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). L'expertise est aussi une garantie, par exemple pour décider d'une hospitalisation d'office. Pour rester crédible, le représentant de l'État doit maintenir ce niveau d'expertise, au niveau régional ou zonal - ce dernier étant trop oublié alors que c'est l'échelon de gestion des crises. Les acteurs publics et les usagers ne doivent pas avoir à pâtir de la complexité de l'architecture institutionnelle ; au préfet de la décoder.
Nous évaluons les capacités de décision, notamment dans l'engagement des forces de l'ordre, épreuve à laquelle tout préfet est confronté. Nous fournissons au ministre des éléments d'appréciation pour valider le choix de représentants de l'État qui doivent être en première ligne, trouver le ton juste, apporter des réponses à la population. Management, rapport avec les médias : les compétences prises en compte ne sont pas que techniques. Le préfet doit instaurer un rapport de confiance avec les collectivités locales afin de conduire avec elles les politiques publiques, dans l'intérêt général. Bref, nous mesurons ce qui fait le charisme, la carrure, l'identité d'une personnalité.
À entendre les avis contraires émanant des différentes directions, on pouvait penser qu'il y avait plusieurs États dans un même département ! La logique voudrait que le préfet soit coordonnateur : est-ce la solution retenue ?
Par ailleurs, la multiplication des agences ne va-t-elle pas à l'encontre de la volonté d'offrir un guichet unique de l'État ?
La RGPP vise précisément à résoudre ces problèmes. Il est vrai que les avis des différentes directions, sur la révision des documents d'urbanisme par exemple, n'étaient pas toujours cohérents... La direction départementale des territoires sera désormais tenue de faire la synthèse des points de vue. Elle n'englobe toutefois pas tout ; le préfet conserve toute sa légitimité pour assurer la coordination, y compris avec les agences. Par le décret de février 2010 et la circulaire du Premier Ministre, le préfet est le délégué de chaque agence, et leurs unités territoriales sont placées sous sa responsabilité.
Les agences de l'eau ont une part d'autonomie, surtout quand elles ont des ressources fiscales et que le périmètre de leur bassin diffère de celui de la région. La collégialité est toutefois de mise quand il s'agit d'arrêter la politique de l'eau. Il y a des cordes de rappel pour assurer la cohérence des différents démembrements de l'État, même s'il faudra sans doute du temps pour que les comportements s'adaptent. Les décisions d'extension des exploitations agricoles en Bretagne n'étaient pas en phase avec la stratégie défendue par la France à Bruxelles... Il s'agit avec la RGPP de donner plus de force et de cohérence aux politiques publiques portées par le Parlement.
Il est désormais possible de retirer sa carte grise auprès du concessionnaire automobile, qui toutefois la facture. Faute de moyens, certains continuent donc de se rendre à la préfecture, où il faut faire la queue pendant des heures... L'agent de la préfecture, seul à son guichet, dit ne pouvoir faire face ; dans le même temps, un concessionnaire me demande d'intervenir auprès du préfet car il n'a pas reçu son lot de cartes de grises ! Les préfets vous disent-ils être à l'os, et ne pouvoir assumer leurs missions ?
Préfet des Hauts-de-Seine, j'ai connu les files d'attente devant la préfecture dès le petit matin...
L'objectif est que les usagers aient un guichet unique. Pour l'acquéreur d'une automobile, c'est le garagiste. Nous sommes en phase de transition : 20% des cartes grises sont encore émises dans les préfectures. Il est hors de question d'imposer aux concessionnaires de devenir chargés de mission de service public, surtout en zone rurale. Une opinion est un fait, disait Edgar Faure : certes, mais la réforme n'est pas encore aboutie. On cumule les inconvénients : les moyens ont baissé dans les préfectures, alors que les garagistes ne sont pas encore formés. Obtenir tous les éléments lors d'un même rendez-vous sera un indéniable progrès. Les garagistes sont ouverts le samedi ; pour retirer sa carte à la préfecture, il faut prendre une demi-journée de congé ! C'est un surcoût non négligeable. La véritable égalité républicaine sera que chacun ait accès à un service équivalent ! L'interlocuteur unique, voilà la modernité.