La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Léonce Dupont sur le projet de loi n° 367 (2006-2007) relatif aux libertés des universités.
s'est réjoui, tout d'abord, d'avoir été désigné rapporteur de ce projet de loi, qui engage une réforme de l'université attendue depuis plusieurs années.
Evoquant la longue et complexe histoire des universités, qui a connu, depuis le Moyen-âge, nombre de transformations, il a rappelé que l'organisation actuelle de l'enseignement supérieur était régie par la loi du 26 janvier 1984, dite loi Savary, qui maintient les grands principes issus de la loi du 12 novembre 1968, dite loi Edgar Faure. Puis des textes successifs, adoptés pour les uns, morts nés pour les autres, ont montré que la Nation n'avait pas toujours été prête à engager une réforme pourtant nécessaire, que de nombreux acteurs, y compris des universitaires, appelaient de leurs voeux.
Il a salué, ainsi, le fait que l'engagement du Président de la République trouve rapidement sa traduction dans le projet de loi soumis à l'examen du Sénat, tout en reconnaissant que ce texte constitue une étape essentielle sur un chemin encore long : en effet, les autres marches de cet « escalier » vers la reconquête et la reconnaissance de l'excellence de l'université française passent également par un renforcement important de ses moyens de financement. A cet égard, il s'est félicité de la volonté réaffirmée du Président de la République de doter le budget des universités de cinq milliards d'euros supplémentaires dans les cinq années à venir, ajoutant que le Parlement veillera, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2008, à ce que se concrétise cet engagement.
s'est réjoui, par ailleurs, que la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ait lancé cinq grands chantiers, sur des sujets essentiels pour l'avenir des universités, des personnels et des étudiants, le projet de loi ne pouvant suffire à lui seul à répondre à l'ensemble des défis posés. Il a souhaité, toutefois, qu'à l'occasion de ces concertations, puissent être abordés les sujets, jusqu'ici tabous en France, de la sélection par le travail et la réussite, plutôt que par l'échec, ainsi que des frais de scolarité, en lien avec la nécessaire refonte du système d'aide sociale aux étudiants.
Il a considéré que cette politique traduisait un « nouvel engagement national pour l'université », dont le projet de loi constitue le socle.
Puis il a fait part des principales conclusions tirées de l'analyse comparée, développée dans le rapport, des dispositifs de gouvernance mis en place dans les systèmes universitaires des pays dont le système d'enseignement supérieur est développé.
a souligné que la tendance internationale allait dans le sens d'une simplification des structures institutionnelles. Si l'expression des personnels, enseignants et non enseignants, et des étudiants, s'effectue en général dans des instances collégiales tournées vers des enjeux tenant à la vie universitaire et à l'organisation concrète des études, les pays sont de plus en plus nombreux à mettre en place des structures exécutives plus légères, permettant une réelle efficacité décisionnelle. Enfin, la capacité d'initiative des établissements se renforce.
Il a considéré que le projet de loi s'inscrivait dans cette tendance générale. C'est pourquoi souscrivant à son esprit, il a appelé à soutenir l'essentiel des dispositions proposées, assorties néanmoins d'un certain nombre d'amendements.
Il a présenté, ensuite, les grandes lignes du projet de loi, déjà retracées par Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, lors de son audition devant la commission. Le texte complète, tout d'abord, les missions des universités, en leur confiant une nouvelle mission, essentielle, d'orientation et d'insertion professionnelle des étudiants. Il engage, en outre, une rénovation de la gouvernance des universités, qui repose sur quelques mesures qui seront effectives d'ici un an :
- un conseil d'administration à la composition resserrée et aux compétences renforcées, qui se voit ainsi confier un rôle de stratège ;
- un conseil scientifique et un conseil des études et de la vie universitaire aux missions redéfinies ; leur composition et leurs attributions sont revues afin de consolider leur compétence consultative et leur rôle d'appui, en vue d'éclairer le conseil d'administration dans sa prise de décision ;
- un président d'université chef d'orchestre, aux compétences renforcées, ayant vocation à devenir le porteur du projet d'établissement ; le projet de loi lui confère une légitimité et une autorité accrues, par son nouveau mode d'élection notamment ; en contrepartie, le fait que son mandat, fixé à quatre ans, puisse être renouvelable une fois, a pour but de renforcer sa responsabilité, puisqu'il pourra ainsi être jugé sur la base des résultats obtenus ;
- la création d'un comité technique paritaire au sein des universités, qui sera un nouveau lieu du dialogue social.
a détaillé, ensuite, les nouvelles responsabilités et compétences dont pourront se saisir les universités, qui s'appliqueront à l'ensemble d'entre elles, immédiatement ou dans un délai de cinq ans :
- la mise en place d'un budget global, incluant la masse salariale ;
- la possibilité de mobiliser des sources de financement diversifiées, notamment par la création de fondations, destinées à favoriser le mécénat d'entreprise et de particuliers en direction des universités ; par ailleurs, les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel sont autorisés à disposer des ressources issues de la vente de biens ;
- un renforcement du pilotage, par le biais de la contractualisation avec l'Etat ; en effet, le projet de loi rend obligatoires les contrats pluriannuels d'établissement ; par ailleurs, un comité de suivi institué auprès du ministre en charge de l'enseignement supérieur sera chargé d'évaluer l'application des dispositions du projet de loi ;
- une gestion plus active et plus réactive des ressources humaines, en termes de recrutement d'enseignants-chercheurs et de personnels contractuels, y compris étudiants ; en outre, le texte confie au président d'université la responsabilité de l'attribution des primes au personnel, et donne au conseil d'administration la possibilité de moduler les obligations de service des enseignants-chercheurs ;
- enfin, l'Etat pourra transférer aux universités qui en feront la demande la pleine propriété des biens mobiliers et immobiliers qui leur sont affectés.
Au terme de cette présentation, M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur, a indiqué que les amendements qu'il proposerait à la commission d'adopter tendent à :
- compléter et actualiser les missions du service public de l'enseignement supérieur ;
- mieux asseoir la légitimité du président du conseil d'administration ;
- conforter le conseil scientifique ;
- lutter contre le « localisme » s'agissant de la promotion des enseignants-chercheurs ;
- accorder également l'autonomie aux autres établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP) qui le souhaitent ;
- renforcer les outils de pilotage et de suivi ;
- rassurer les personnels et acteurs de l'université ;
- accentuer l'ouverture des universités vers l'extérieur.
Enfin, sous réserve de l'adoption de ces amendements, il a proposé à la commission d'adopter le projet de loi.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.
a regretté que les délais impartis pour l'examen du projet de loi ne permettent pas un travail approfondi. Il s'est inquiété de la pérennité du recours à la procédure d'urgence et de ses conséquences sur les méthodes de travail du Sénat. Il a déploré l'absence de volet budgétaire, sans lequel aucune réforme ne pourra être concrètement engagée.
a regretté les conditions de ce débat sur la réforme de l'université, qui pourtant, revêt une importance majeure pour la Nation et l'avenir de la jeunesse. Il a déploré le cadre contraint de l'examen du projet de loi, notamment dans sa phase de concertation, alors même qu'une volonté de revalorisation du travail parlementaire est à l'ordre du jour.
a indiqué que la plupart des sénateurs entretenaient, depuis plusieurs années, des relations suivies avec la communauté universitaire sur le projet de réforme et qu'ils étaient donc prêts à légiférer sur la réforme de l'université.
a souligné que le principe d'autonomie, qui recueille aujourd'hui un large consensus a connu des évolutions au cours des vingt dernières années. Il a estimé, toutefois, qu'un large débat sur l'autonomie et la gouvernance des universités était nécessaire pour que l'ensemble des positions puissent être prises en considération.
a considéré qu'à l'occasion du débat sur la réforme des institutions, une réflexion approfondie devra être engagée sur la revalorisation du travail parlementaire et notamment sur le temps nécessaire à la concertation pour le législateur.
Il s'est étonné que l'ensemble des textes présentés au Parlement lors de cette session extraordinaire fassent l'objet de la procédure d'urgence, déjà trop largement utilisée lors de la législature précédente.
a observé que les premiers mois d'un nouveau quinquennat étaient essentiels à la mise en oeuvre réussie des réformes d'envergure. Il a signalé également que ce projet de loi constituait le premier volet d'une réforme plus ambitieuse de l'enseignement supérieur.
a souhaité apporter quelques éléments de réponse. Arguant du consensus sur le dysfonctionnement de l'université française, et tout en reconnaissant le caractère extrêmement rapide de l'examen du projet de loi, il a insisté sur la nécessité d'une entrée en vigueur des nouvelles dispositions dès la prochaine rentrée universitaire.
Il a indiqué, par ailleurs, que la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche n'avait pas encore déterminé les modalités exactes de l'accroissement de la dotation budgétaire affectée aux universités. Il a fait remarquer que d'ores et déjà avait été décidée une revalorisation des bourses de l'enseignement supérieur.
Enfin, M. Jacques Valade, président, a estimé que les cinq chantiers lancés par la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche devraient permettre de poursuivre les réformes.
La commission a procédé ensuite à l'examen des articles du projet de loi.
Au titre premier (Missions des universités), la commission a adopté un amendement tendant à modifier l'intitulé de cette division, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen ayant indiqué qu'ils ne prendraient pas part au vote sur l'ensemble des articles du projet de loi, se réservant pour la séance publique.
A l'article premier (Insertion d'une double mission supplémentaire : orientation et insertion professionnelle), la commission a adopté deux amendements tendant, d'une part, à actualiser la terminologie et d'autre part, à inscrire parmi les missions de l'enseignement supérieur la participation à la construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche.
La commission a adopté sans modification l'article 2 (Modalités d'adoption des décisions statutaires au sein du conseil d'administration), l'article 3 (Section relative à la gouvernance) et l'article 4 (Administration de l'université).
A l'article 5 (Election et compétences du président), la commission a adopté quatre amendements tendant :
à prévoir que l'ensemble des membres du conseil d'administration participent à l'élection du président ;
à préciser que le président prépare le contrat pluriannuel d'établissement ;
à soustraire les personnels recrutés par concours national d'agrégation au « droit de véto » du président en matière d'affectation des enseignants-chercheurs ;
et à substituer le titre de directeur général des services à celui de secrétaire général des services, dans un souci d'harmonisation terminologique avec le code de la recherche.
A l'article 6 (Révision de la composition et des compétences du conseil d'administration), la commission a adopté cinq amendements. Outre un amendement de cohérence et un amendement de précision, elle a adopté trois amendements tendant :
à organiser la désignation des personnalités extérieures afin qu'elles puissent participer à l'élection du nouveau président ;
à préciser la qualité des personnalités extérieures à l'établissement proposées au titre des entreprises ;
à renforcer la représentation des collectivités territoriales.
A l'article 7 (Révision de la composition et des compétences du conseil scientifique), la commission a adopté un amendement tendant à prévoir la représentation des personnes bénéficiant de la formation continue au sein du conseil scientifique.
A l'article 8 (Révision des compétences du conseil des études et de la vie universitaire), la commission a adopté un amendement tendant à garantir la nomination d'un vice-président étudiant au sein du conseil des études et de la vie universitaire, en charge des questions de vie étudiante, et à préciser les relations qu'il devra entretenir avec les organismes concernés par ces questions.
Elle a adopté sans modification l'article 9 (Nouvelles dispositions relatives au conseil scientifique et au conseil des études et de la vie universitaire).
A l'article 10 (Nouvelles modalités de désignation des membres élus des trois conseils), outre un amendement de précision, la commission a adopté un amendement tendant à assurer la représentation des grands secteurs de formation au conseil d'administration.
A l'article 11 (Evolution des modalités de création des composantes des universités), la commission a adopté un amendement tendant à prévoir la création des écoles et instituts par arrêté plutôt que par décret, dans un souci de simplification.
A l'article 12 (Unités de formation et de recherche de médecine, pharmacie et odontologie), la commission a adopté deux amendements tendant, d'une part, à indiquer que les conventions hospitalo-universitaires respectent les orientations stratégiques du projet pluriannuel d'établissement, notamment dans le domaine de la recherche biomédicale, et d'autre part, à préciser les nouvelles modalités proposées pour l'affectation des emplois hospitalo-universitaires.
A l'article 13 (Elargissement des responsabilités et compétences), outre un amendement de clarification, la commission a adopté un amendement tendant à étendre les comités techniques paritaires à tous les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.
A l'article 14 (Renforcement de la contractualisation), elle a adopté un amendement tendant à faire figurer dans le cadre du contrat pluriannuel d'établissement les modalités d'une participation éventuelle d'un établissement à un pôle de recherche et d'enseignement supérieur.
Après l'article 14, la commission a inséré un article additionnel tendant à doter les universités d'un outil de gestion et d'aide à la décision afin de leur permettre d'assurer l'ensemble de leurs missions, compétences et responsabilités et d'assurer le suivi du contrat pluriannuel d'établissement.
A l'article 15 (Responsabilités et compétences élargies en matière budgétaire et de gestion de ressources humaines), elle a adopté un amendement de précision concernant le plafond d'emplois « budgétaires ».
A l'article 16 (Gestion des ressources humaines), outre un amendement de précision, elle a adopté un amendement tendant à prévoir que les primes scientifiques sont accordées après avis du conseil scientifique.
A l'article 17 (Orientation pour l'accès au premier cycle universitaire), la commission a adopté un amendement tendant à améliorer l'information des étudiants en matière d'orientation et d'insertion professionnelle.
A l'article 18 (Possibilité pour le président de confier certains emplois à des étudiants), la commission a adopté un amendement tendant à étendre la possibilité de recrutement d'étudiants à tous les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.
Elle a adopté sans modification les articles 19 (Information et formation au bénéfice des élus étudiants) et 20 (Association des chercheurs à la mission d'enseignement).
A l'article 21 (Nouvelles modalités de nomination des nouveaux enseignants-chercheurs), outre un amendement de cohérence et de coordination, la commission a adopté deux amendements tendant respectivement :
à préciser que les recrutements d'agrégés, qui font l'objet d'une procédure spécifique ne doivent pas être visés par le texte lors de leur première affectation ;
à prévoir une obligation de mobilité pour toute promotion dans le corps des professeurs des universités.
Elle a adopté sans modification les articles 22 (Elargissement des possibilités d'investissement et de partenariat) et 23 (Possibilité de créer des fondations).
A l'article 24 (Faculté de demander le transfert de la propriété des biens mobiliers et immobiliers), la commission a adopté un amendement tendant à préciser que les dispositions de cet article s'appliquent exclusivement aux biens appartenant à l'Etat.
Elle a adopté sans modification les articles 25 (Possibilité de vendre des biens) et 26 (Contrôle de la légalité des actes des universités).
A l'article 27 (Autonomie des conférences représentant les établissements), la commission a adopté deux amendements tendant à conférer à la Conférence des présidents d'université et à la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs la personnalité morale.
Elle a adopté sans modification l'article 28 (Encouragement du mécénat en direction des universités).
Après l'article 28, la commission a inséré deux articles additionnels. Le premier tend à donner une valeur législative aux dispositions relatives au médiateur de l'éducation nationale, aux médiateurs académiques et à leurs correspondants, et à élargir les compétences de ces organes à l'enseignement supérieur. Le deuxième propose une harmonisation de la terminologie avec le code de la recherche, en substituant au titre de secrétaire général celui de directeur général des services.
A l'article 29 (Application des dispositions à l'outre-mer), la commission a adopté quatre amendements tendant à rectifier des erreurs matérielles et à étendre les dispositions de l'article 24 du projet de loi à Mayotte.
A l'article 30 (Dispositions transitoires applicables aux conseils d'administration en exercice), outre un amendement rectifiant une erreur matérielle, la commission a adopté deux amendements tendant, d'une part, à organiser les conditions dans lesquelles un président en exercice reste en fonction lorsque la durée de son mandat restant à courir est supérieure à six mois, et d'autre part, à préciser la nouvelle règle relative au renouvellement du mandat du président en fonction de la date de l'élection du nouveau conseil d'administration.
Elle a adopté sans modification l'article 31 (Délai d'application des dispositions du projet de loi).
A l'article 32 (Délai d'application des dispositions du chapitre 1er du titre III), elle a adopté un amendement de précision.
Après l'article 32, la commission a inséré un article additionnel tendant à étendre à tous les établissements publics à caractère scientifique culturel et professionnel qui le souhaitent les dispositions relatives aux responsabilités et aux compétences élargies en matière budgétaire et de gestion des ressources humaines.
A l'article 33 (Création d'un comité de suivi), la commission a adopté un amendement tendant à proposer une nouvelle rédaction de cet article afin, d'une part, de préciser que les représentants du Parlement sont désignés par leurs assemblées respectives, et d'autre part, de prévoir que le comité de suivi transmet chaque année au Parlement un rapport sur ses travaux.
Enfin, la commission a modifié l'intitulé du projet de loi pour y ajouter le terme de « responsabilités ».
La commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi amendé, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen ne prenant pas part au vote.