Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, sur le projet de loi de finances pour 2008 (mission « Outre-mer »).
a fait valoir que son budget traduit concrètement les engagements pris par le Président de la République pendant la campagne électorale, tout en exprimant une vision moderne et ambitieuse de l'outre-mer. Son objectif est d'accompagner une politique de développement fondée sur la valorisation des atouts des territoires, notamment dans les secteurs du tourisme, de la biodiversité et de l'innovation technologique. Il s'agit essentiellement d'aider les économies ultramarines à lever les contraintes de l'éloignement, de l'isolement et d'une faible intégration dans l'environnement régional. Il s'agit aussi de mener une politique de solidarité sans faille, tournée vers l'égalité des chances et l'amélioration de la vie quotidienne de nos concitoyens.
Les changements de périmètre de la mission « Outre-mer » en 2008 tendent à un exercice plus efficace de la fonction d'évaluation et de coordination sans remettre en cause l'ampleur des actions conduites par l'Etat outre-mer. La meilleure gestion des crédits qui en résultera permettra non seulement de mieux prendre en compte les enjeux et les spécificités des collectivités ultramarines, mais encore de réaffecter à leur développement les économies réalisées.
L'effort global de l'Etat pour l'outre-mer sera porté à 15,3 milliards d'euros en 2008, contre 13 milliards en 2007. Dans cette masse, les crédits gérés par le secrétariat d'Etat s'élèveront à 1,73 milliard d'euros en crédits de paiement, ce qui représente, à périmètre constant, une augmentation de 3 % par rapport à 2007.
La mission « Outre-mer », en son nouveau périmètre, s'articule autour de deux programmes : l'emploi et les conditions de vie.
En ce qui concerne l'emploi, M. Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, a insisté sur l'importance des créations d'emploi dans le secteur privé depuis cinq ans en dépit du fait que le chômage représente encore 19,6 % de la population active des Dom, contre 8,4 % en moyenne nationale, en juin 2007.
Au sein des crédits de l'emploi, les exonérations de charges sociales augmenteront de 6 %. Le secrétariat d'Etat à l'outre-mer conserve la gestion de ce dispositif, dont le rôle est déterminant pour abaisser le coût du travail dans les Dom et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Ce montant prévisionnel inscrit au budget de 2008 devra être ajusté en cours d'année en fonction des créations d'emploi réalisées et en fonction de la rationalisation du dispositif susceptible d'intervenir dans le cadre de la loi de programme en cours de préparation.
L'enjeu fondamental de la politique de l'outre-mer reste de donner aux économies ultramarines une plus grande capacité de développement et les moyens de s'adapter à un marché désormais mondialisé. Les pôles de compétitivité répondent à cette préoccupation, de même que les zones franches globales d'activités qui seront instituées par le projet de loi de programme. S'agissant des mesures d'aides directes à l'embauche, un montant de 158 millions d'euros a été transféré au ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, qui va gérer désormais la plupart des contrats aidés.
Cette politique de développement économique est indissociable de l'amélioration des conditions de vie outre-mer, objet du deuxième programme de la mission « Outre-mer », vu l'ampleur des besoins à satisfaire dans ce domaine, compte tenu notamment de la démographie dans les collectivités d'outre-mer.
L'action du Gouvernement est fondée sur une solidarité active visant à l'égalité des chances. Dans cette perspective, les crédits de paiement affectés au logement social augmenteront de 14 %. Cette hausse, qui portera les crédits à 200 millions d'euros, s'ajoutera à l'effort exceptionnel consenti en 2007 pour solder les dettes de la ligne budgétaire unique.
A cet égard, M. Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, a indiqué que la dette comptable, qui représentait 56,7 millions d'euros au 31 décembre 2006, a été totalement apurée. La dette de l'exercice 2007 s'établira entre 10 et 25 millions d'euros, compte tenu du niveau important des crédits de paiement disponibles au cours de cet exercice.
Par ailleurs, certaines actions évoquées lors de la conférence nationale sur le logement outre-mer du 27 février 2007 seront mises en oeuvre. Il s'agit notamment, dans le cadre de la loi de programme en préparation, de la réorientation de la défiscalisation vers le logement social.
Plus généralement, la prochaine loi de programme devra porter remède à la pénurie du foncier aménagé, renforcer le partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales en vue d'un meilleur pilotage de la politique du logement, sécuriser et diversifier les financements afin d'accroître l'offre de logements à loyers et prix maîtrisés.
Quant aux autres leviers d'amélioration des conditions de vie, M. Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, a rappelé l'exigence croissante de continuité territoriale, qu'il s'agisse de la desserte aérienne ou de la couverture numérique. Les crédits en faveur de cette politique s'élèveront en 2008 à 54,2 millions d'euros en crédits de paiement. Le financement du passeport mobilité, qui permet la prise en charge de billets d'avion vers la métropole pour les étudiants et les jeunes en formation, intervient dans ce cadre. Toutefois, l'augmentation régulière du coût de ce dispositif, en particulier sur le volet étudiant, justifie le lancement d'une évaluation qualitative au vu de laquelle des modifications seront envisagées dans le cadre de la loi de programme.
D'autres préoccupations seront majeures, comme l'accès de tous à la santé, l'accès à l'éducation et à la formation, en particulier le combat contre l'illettrisme, ainsi que l'accès facilité aux concours afin de permettre à la jeunesse d'outre-mer de saisir les chances qui s'offrent à elle.
La nomination, en juillet 2007, d'un délégué interministériel à l'égalité des chances des Français d'outre-mer illustre la volonté gouvernementale de ne pas accepter les inégalités de traitement et les discriminations.
a demandé si l'augmentation des crédits du logement social sera suffisante pour financer les objectifs de construction fixés à l'article 23 de la loi instituant le droit au logement opposable, si la remise à niveau du forfait charges spécifique des Dom est envisagée en ce qui concerne le barème de l'allocation logement et si l'attribution de l'allocation logement aux personnes âgées ou handicapées résidant en logement-foyer est possible dans les Dom comme en métropole.
a indiqué que le gouvernement accorde un caractère prioritaire à la réalisation de l'ambitieuse programmation physique prévue dans la loi instituant le droit au logement opposable. Le montant des crédits inscrits dans le budget, indicatif, peut être abondé au cours de l'année par redistribution de crédits non consommés pour des raisons diverses. Un volet spécifique de la prochaine loi de programme réorientera la défiscalisation vers le logement social et mettra à la disposition des collectivités des outils de maîtrise de l'espace.
L'indivision, notamment pour les logements insalubres, est une autre difficulté récurrente de la politique du logement social outre-mer. La loi de programme abordera cette question en s'inspirant des solutions déjà mises en oeuvre en Corse.
Par ailleurs, une réflexion a été lancée sur le forfait charges spécifique des Dom : celui-ci est pénalisant dans la mesure où il ne prend pas en compte l'évolution de la qualité des logements. L'attribution de l'allocation logement aux personnes âgées ou handicapées résidant en logement-foyer répondrait à un besoin légitime : ce chantier est à ouvrir dans le cadre de la préparation de la loi de programme.
a demandé si l'étalement des déplacements des bénéficiaires de congés bonifiés, préconisé par Patrick Karam, délégué interministériel à l'égalité des chances des Français d'outre-mer, offre une alternative réaliste à l'instauration de prix plafonds, solution traditionnellement soutenue par les représentants des régions et collectivités d'outre-mer pour maîtriser les coûts du transport aérien.
rappelant le succès et le coût croissant des dispositifs favorisant la continuité territoriale, a indiqué avoir ouvert des discussions avec les compagnies aériennes en vue d'obtenir un lissage des tarifs sur l'ensemble de l'année. Il serait opportun, dans cette perspective, de parvenir en contrepartie à un étalement des congés bonifiés.
a jugé nécessaire, pour combattre l'addiction au tabac, de taxer outre-mer le tabac à rouler et de soumettre la vente de tabac à la possession d'une licence, comme c'est le cas en métropole. Elle a évoqué le numerus clausus insuffisant des étudiants en médecine réunionnais, a souhaité la défiscalisation des services à la personne ainsi que celle des opérations d'aménagement du foncier réalisées outre-mer, et a demandé comment seront financées les exonérations de charges sociales compte tenu de l'écart entre le crédit prévu en 2008 et le niveau prévisionnel de la dépense.
a rappelé que le régime fiscal et douanier du tabac est identique en métropole et dans les Dom. Une réflexion est en cours sur l'intensification de la politique de lutte contre l'addiction au tabac.
Un numerus clausus insuffisant aboutit à empêcher des étudiants réunionnais ayant parfois de meilleures notes que leurs camarades métropolitains d'accéder à la seconde année d'études de médecine. Une amélioration sensible de cette situation est en bonne voie.
La défiscalisation des aménagements fonciers est envisagée dans le cadre de la future loi de programme.
La défiscalisation des services à la personne est envisageable dans le même cadre, dans la mesure où les zones franches globales d'activités ne concerneront pas seulement les secteurs économiques les plus importants.
En ce qui concerne le financement des exonérations de charges, les prévisions de crédits devront être révisées en fonction des créations d'emplois effectivement réalisées dans l'année et en fonction de la rationalisation du dispositif par la future loi de programme.
évoquant les annonces du Président de la République concernant l'amélioration de la situation des détenus, le co-développement, le dialogue social, l'offre de soins, la prise en charge des personnes âgées et des handicapés, les écoles de la deuxième chance, le logement social, et notant l'existence d'avancées sur un certain nombre de points, a regretté que l'ensemble des questions ne soit pas abordé dans le cadre de la préparation de la loi de programme. Le cas du logement social - vingt-sept mille demandes sont en attente à la Réunion - et le problème de l'acquisition du foncier lui semblent symptomatiques. La programmation pluriannuelle de la ligne budgétaire unique constitue une priorité à cet égard.
Elle a réclamé l'ouverture de chantiers sur l'ensemble de ces sujets.
Elle a ensuite estimé que la négociation des futurs accords de partenariat économique avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) doit tenir compte des préoccupations exprimées par nombre de responsables politiques et consulaires dans les Dom. Mentionnant la conclusion, le 15 novembre dernier, d'un accord intermédiaire entre l'Union européenne et les pays de l'ESA (Afrique de l'est et australe), elle a souhaité que le gouvernement fasse un point public sur l'état des différentes négociations, a demandé si la Réunion bénéficiera d'une clause de sauvegarde dans l'accord définitif et a souhaité savoir quand le Parlement sera saisi des évolutions législatives éventuellement nécessaires.
Elle a enfin insisté sur les besoins croissants de la Réunion en matière de services publics et d'agents publics de qualité, compte tenu de l'évolution démographique de l'île, et s'est enquise des intentions de l'Etat sur l'évolution des effectifs de la fonction publique ainsi que des moyens mis en oeuvre pour former les jeunes Réunionnais.
a indiqué, en ce qui concerne le dialogue social, qu'un processus est en cours afin de mettre en place un dispositif de prévention des conflits.
Sur la situation des détenus, la construction de cinq cent cinquante places de prison, dont quatre cents à la Réunion et cent cinquante en Polynésie, est d'ores et déjà prévue.
Un plan de rattrapage est en cours par ailleurs dans le domaine de l'hébergement d'urgence.
La programmation pluriannuelle de la ligne budgétaire unique sera traitée dans le cadre de la réforme du budget de l'Etat. Une programmation 2009-2011 est envisagée.
Dans la négociation des accords de partenariat économique, le gouvernement encourage le développement durable et l'ouverture régionale des économies des Dom. La Commission européenne recherche de son côté la conclusion d'un accord avant la fin de 2007 pour être en conformité avec les règles de l'organisation mondiale du commerce. En ce qui concerne la négociation avec les Etats du Cariforum (zone caraïbe), actuellement la plus avancée, la France vient d'obtenir de la Commission européenne la non-remise en cause de l'octroi de mer, la mise en place d'une clause de sauvegarde régionalisée permettant de protéger les productions locales pendant une durée limitée en cas de perturbation des marchés, la protection des marchés des Dom contre certains produits des ACP et le maintien des droits de douane sur les produits sensibles en cas de perturbation des marchés concernés.
S'agissant de l'évolution des effectifs de la fonction publique dans le cadre de la réforme de l'Etat, l'outre-mer recevra un traitement conforme à ses besoins, notamment au regard du principe de l'égalité des chances. La réforme ne sera donc pas linéaire.