Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 1er juin 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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  • argentine
  • argentins
  • détachement
  • expatriation
  • prestations

La réunion

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La commission examine le rapport de Mme Monique Cerisier-ben Guiga sur le projet de loi n° 413 (2010-2011) autorisant l'approbation de la convention de sécurité sociale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République argentine.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

L'Argentine et la France ont signé le 22 septembre 2008 à Buenos Aires la convention de sécurité sociale qui est désormais soumise à l'approbation parlementaire.

Notre commission connaît bien ce type d'accord bilatéral destiné à faciliter le règlement des questions de protection sociale en cas d'expatriation temporaire ou de plus longue durée. Hors de la zone européenne, où s'appliquent des règlements communautaires, la France a conclu de l'ordre de 35 conventions bilatérales qui permettent notamment de déterminer les règles d'affiliation aux régimes de sécurité sociale, de lever les éventuelles restrictions relatives à la nationalité ou à l'exportation des prestations, ou encore de garantir la continuité des droits et la prise en compte des périodes d'assurance au titre du pays d'origine comme du pays d'accueil.

La convention de sécurité sociale avec l'Argentine ne présente pas de particularités notables par rapport aux accords en vigueur entre la France et d'autres pays.

Elle rappelle le principe général selon lequel les personnes qui travaillent sur le territoire de l'un des deux Etats sont exclusivement soumises à la législation de cet Etat. Ce principe a pour corollaire celui de l'égalité de traitement qui écarte toute possibilité de restriction liée à la nationalité. La convention garantit donc aux Français affiliés à des régimes argentins un traitement équivalent à celui des affiliés argentins et il en est de même pour les Argentins affiliés aux régimes français.

La convention permet toutefois, en cas d'expatriation, le maintien temporaire de l'affiliation dans l'Etat d'origine, grâce à la mise en place du détachement. Le statut de salarié détaché, à la différence de celui de salarié expatrié, permet à la personne envoyée temporairement à l'étranger de continuer à relever du régime de protection sociale de son pays d'origine et de conserver l'ensemble des droits qui s'y attachent. Il s'agit d'une disposition classique dans les accords de sécurité sociale. Elle est généralement considérée comme favorable à l'expatriation, parce qu'elle est simple à mettre en oeuvre et s'avère le plus souvent avantageuse pour les Français, compte tenu du niveau de notre couverture sociale.

Chaque convention bilatérale fixe des règles spécifiques sur la durée du détachement et le type de risques concernés. L'accord franco-argentin prévoit une procédure de détachement tant pour les travailleurs salariés que pour les personnes exerçant une activité indépendante. Durant la période de détachement, l'intéressé reste rattaché à son régime d'origine pour l'ensemble des risques maladie, maternité, vieillesse, invalidité, accidents du travail, ainsi que pour les prestations familiales.

Pour les personnes exerçant une activité salariée, le détachement est possible à condition que la durée prévisible du travail ne dépasse pas vingt-quatre mois et que le salarié concerné ne soit pas envoyé en remplacement d'une autre personne parvenue au terme d'un détachement. Une prolongation de la durée du détachement est possible, par accord entre les autorités des deux parties, dans une limite maximale de vingt-quatre mois supplémentaires, si la durée du travail à effectuer se prolonge en raison de circonstances imprévisibles dûment justifiées au-delà de la durée initialement prévue. Les personnes exerçant une activité indépendante peuvent également bénéficier du détachement, mais sa durée est limitée à douze mois, avec prolongation éventuelle de douze mois aux mêmes conditions.

Par ailleurs, le détachement est conditionné à la garantie, par l'employeur ou le travailleur indépendant, d'une couverture prenant en charge l'ensemble des frais médicaux et d'hospitalisation pendant toute la durée du séjour dans l'Etat de détachement.

La convention comporte également une série de dispositions classiques sur la totalisation des périodes d'assurances passées dans les deux pays pour le calcul des droits aux différentes prestations, qu'il s'agisse des pensions de retraite et d'invalidité, des rentes d'accidents du travail ou des indemnités journalières d'assurance-maladie. Il s'agit là d'une avancée notable pour les personnes ayant été amenées dans leur carrière à relever successivement de régimes argentins et français.

Enfin, parmi les stipulations qui définissent les modalités de coopération entre les organismes français et argentins de sécurité sociale, il faut noter que la convention prévoit un dispositif destiné à lutter contre la fraude, grâce aux échanges d'informations sur la résidence effective des personnes et l'appréciation des ressources.

Le nombre de personnes potentiellement concernées par cette convention est difficile à déterminer, mais il sera en tout état de cause limité.

La communauté française en Argentine compte parmi les plus importantes d'Amérique latine, avec près de 15 000 inscrits et plusieurs milliers de personnes non enregistrées auprès des services consulaires. L'une des particularités de cette communauté est de comprendre une forte proportion de descendants des quelque 350 000 Français ayant émigré en Argentine tout au long de la seconde moitié du 19ème siècle, et jusqu'à la première guerre mondiale. Nés en Argentine, ces Français ont conservé la nationalité de leurs ancêtres sans nécessairement continuer à cultiver des liens réguliers avec notre pays. Largement issue des classes moyennes, cette communauté a été durement frappée par la crise économique du début de la décennie. L'Argentine est le quatrième pays au monde pour le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale versée aux Français établis hors de France.

S'agissant de la communauté argentine en France, elle se situerait, selon les estimations, entre 8 000 et 12 000 personnes.

Parmi les expatriés des deux pays, la convention apportera des améliorations significatives pour deux catégories principales de personnes.

Tout d'abord, celles ayant tour à tour résidé dans l'un et l'autre pays. Grâce à la levée de la clause de résidence, certains Français ayant travaillé en Argentine pourront percevoir à ce titre le versement d'une pension de retraite argentine en France. Par ailleurs, la totalisation des périodes d'assurances dans les différents régimes français et argentins permettra d'élargir la base de calcul des pensions. Il faut noter que cette disposition profitera à certains Argentins revenus dans leur pays après avoir résidé en France durant la période de dictature.

Les personnels en expatriation temporaire constitueront la seconde catégorie de bénéficiaires, puisque le statut de détachement leur permettra de conserver le bénéfice des régimes de sécurité sociale du pays d'origine dans une limite de durée. Cette possibilité est particulièrement intéressante pour les expatriés français qui seront placés sous statut de détachés, étant donné le niveau inférieur des prestations des régimes argentins, qui impliquait la souscription d'une assurance complémentaire, par exemple auprès de la Caisse des Français de l'étranger. Je signale cependant que nos grandes entreprises expatrient relativement peu de cadres vers l'Argentine. Elles trouvent en effet sur le marché local des personnels de même niveau, souvent d'ailleurs parmi les binationaux. A l'heure où certains mettent en cause la bi-nationalité, il faut souligner l'atout qu'elle représente pour les entreprises françaises dans de nombreuses régions du monde.

En 2007, la commission des Affaires sociales du Sénat avait publié un rapport d'information sur la protection sociale en Argentine, suite à une mission sur place. Il en ressortait qu'une forte proportion de la population ne disposait que d'une couverture maladie minimale, et que globalement, les régimes sociaux avaient été fortement affectés par la crise économique et financière du début des années 2000. Dès lors, le niveau des prestations y est notablement inférieur à celui dont nous bénéficions en France.

Pour conclure, je dirai que si le nombre de personnes intéressées demeure relativement modeste, ce type de convention bilatérale permet une réelle amélioration de leurs droits sociaux tout en contribuant à faciliter les courants d'échanges, notamment les investissements, qui nécessitent souvent l'expatriation de cadres ou de techniciens. Après un reflux consécutif à la crise, les investissements français en Argentine sont repartis à la hausse, environ 250 sociétés françaises étant implantées dans ce pays.

Jusqu'à présent, le Chili était le seul pays d'Amérique latine auquel nous étions liés par une convention de sécurité sociale, qui est entrée en vigueur en 2001. Il était important que nous puissions en faire de même avec l'Argentine. Je signale également que nous avons signé une convention de même nature avec l'Uruguay en décembre dernier et que des discussions sont en cours avec le Brésil.

Je vous invite donc à adopter ce projet de loi.

La commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

La commission procède à la nomination de rapporteurs :

Joëlle Garriaud-Maylam est désignée rapporteur pour le projet de loi n° 372 (2010-2011) autorisant la ratification de l'accord entre la République française et la République fédérale d'Allemagne instituant un régime matrimonial optionnel de la participation aux acquêts.

Bernadette Dupont est désignée rapporteur pour le projet de loi n° 534 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la restauration du patrimoine architectural de la ville de L'Aquila.

Bernard Piras est désigné rapporteur pour le projet de loi n° 3390 (AN - 13e législature) autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan dans le domaine de la protection civile, de la prévention et de l'élimination des situations d'urgence.

Jean Besson est désigné rapporteur pour le projet de loi n° 402 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'arrangement concernant les services postaux de paiement, en remplacement de M. Rachel Mazuir.