Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a entendu, sur l'état des comptes de la sécurité sociale, M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) et de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnam), accompagné de M. Jean-Marc Aubert, directeur délégué à la gestion et à l'organisation des soins de la Cnam.
Evoquant la certification, avec réserves, par la Cour des comptes, des comptes de la Cnam, M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de l'Uncam et de la Cnam, a salué l'esprit positif dans lequel se déroule le processus de certification, qui offre l'occasion d'améliorer la comptabilité analytique et de développer les systèmes informatiques de la Cnam.
La certification des comptes, si elle rend compte de l'effort de la Cnam pour produire des comptes sincères, ne doit cependant pas occulter le problème principal qui est celui de l'équilibre général des comptes sociaux.
Alors que le conseil de la Cnam et celui de l'Uncam sont à la veille de présenter leurs propositions sur les charges et produits d'assurance maladie pour l'année 2010, il convient de rappeler les tendances et les facteurs de l'évolution des dépenses de santé.
En fonction des évolutions tendancielles, le taux de croissance annuelle spontanée des dépenses de santé devrait être, pour la période 2009-2012, en moyenne de 3,7 % par an en volume, c'est-à-dire hors application d'éventuelles modifications du prix des prestations. Cette estimation confirme la tendance lourde à une croissance de ces dépenses supérieure à celle de la richesse nationale.
On connaît les causes de cette dynamique : la croissance plus rapide des pathologies lourdes et l'intensification des soins.
En 1992, la proportion des dépenses liées aux pathologies lourdes prises en charge au titre des affections de longue durée (ALD) représentait 50 % de la dépense totale. Cette proportion est aujourd'hui supérieure à 60 % et pourrait atteindre 70 % en 2015. Selon des études en cours, il semblerait que la stabilité du taux de prise en charge moyen observée depuis une quinzaine d'années puisse s'expliquer, en dépit de la baisse du taux de prise en charge des populations en ALD et hors ALD, par un effet de moyenne dû à la croissance des ALD.
L'intensification des soins, deuxième facteur majeur d'évolution des dépenses, est beaucoup plus rapide pour les pathologies lourdes ou chroniques, qui sont à l'origine de 84 % de la croissance totale du volume des soins, dont 30 % pour les pathologies cardio-vasculaires, 20 % pour les cancers et 14 % pour les pathologies psychiatriques et neurologiques, y compris les affections liées à l'âge et la maladie d'Alzheimer. L'augmentation en volume des médicaments tire vers le haut cette croissance : ainsi, la pharmacie représente 13 % de la croissance des dépenses pour les cancers en raison de l'apparition de médicaments nouveaux disponibles initialement dans le cadre hospitalier puis en officine de ville. Les dépenses liées aux traitements nouveaux ne se traduisent cependant pas toujours par un équilibrage plus efficace des pathologies comme on a pu le constater dans le cas de l'asthme, où les traitements nouveaux ont représenté ces dernières années des dépenses de l'ordre de 250 millions d'euros. Ceci met en évidence l'importance de la question du rapport qualité-prix, qui sera un sujet majeur dans les années à venir.
Mais l'intensification des soins tient aussi au développement de la demande. Dans le domaine de la chirurgie fonctionnelle, le nombre des prothèses de hanche a progressé de 40 % entre 1998 et 2007, celui des interventions sur les ligaments du genou de 50 %, celui des cataractes de 60 %, progressions qui excèdent largement celles que l'on peut imputer à des raisons démographiques.
On dispose donc désormais d'une vision assez claire des moteurs du développement des dépenses, ce qui constitue une bonne base pour déterminer les mesures à prendre.
a également relevé l'évolution plus rapide en ville qu'à l'hôpital des dépenses en volume de médicaments. Ce transfert de l'hôpital vers la médecine de ville, qui n'est pas en lui-même une mauvaise chose, tient au fait que pour certaines pathologies, cancers ou affections cardio-vasculaires, l'accès à certains traitements est devenu possible en officine de ville.
On assiste aussi à une nette augmentation du nombre des patients traités, qui tient, à côté de facteurs épidémiologiques - c'est le cas du diabète - à l'évolution des politiques et des pratiques de soins, comme le dépistage, et à des effets d'offre.
On peut s'interroger sur l'efficacité du recours au « bouclier sanitaire » pour régler le problème de la dynamique des dépenses. Le bouclier sanitaire s'analyse en effet comme un mécanisme de réassurance au-delà d'un certain montant de dépenses, éventuellement variable en fonction du revenu, tandis que le système des ALD correspond à une réassurance fondée sur la gravité de la pathologie, en quelque sorte sur la « sinistralité ». Mais, au final, que le mécanisme de réassurance soit fonction du montant des remboursements ou de la pathologie, c'est toujours le réassureur qui supportera la dynamique de la dépense, liée aux sinistres lourds, et si les paramètres du bouclier sanitaire évoluent au même rythme que l'inflation, on ne changera pas la dynamique de la dépense.
Il ne paraît donc pas possible de rééquilibrer le régime général en recourant au bouclier sanitaire. De surcroît, tout le poids de ce mécanisme pèserait sur les personnes modestes atteintes de maladies graves, qui seraient les plus touchées par les relèvements de seuil.
Le bouclier sanitaire peut en revanche être utilisé à d'autres fins, par exemple pour alléger le reste à charge (RAC) des patients aux revenus les plus bas, mais en tout état de cause son financement reposera sur les assurés à revenus modestes, à l'instar de celui de l'impôt, toujours assuré par les classes les plus nombreuses, donc les plus modestes.
Ceci étant, s'il existe des tendances lourdes à la croissance des dépenses qu'il ne paraît pas possible de changer, cela ne veut pas dire que l'on ne peut rien faire.
a détaillé à cet égard les inflexions constatées dans l'évolution annuelle moyenne des dépenses de santé entre la période 1998-2003 et la période 2003-2009.
Pour l'ensemble des soins de ville, l'augmentation annuelle moyenne en valeur était de 7 % par an sur la première période, mais de 3,3 % seulement sur la seconde, soit, sur cinq ans, une économie comprise entre 2 et 2,5 milliards d'euros, équivalente à un point de contribution sociale généralisée (CSG). Pour les honoraires médicaux, hors dépassements (dont le rythme annuel de progression a lui-même baissé, passant de 10 % à 5 %), ces taux d'évolution ont été respectivement de 4,3 % et 2,2 % ; de 7 % et 6 % pour les honoraires des auxiliaires médicaux ; de 9,1 % et 6,5 % pour les transports sanitaires ; de 7,2 % et 2 % pour les dépenses de biologie (qui pendant trois années consécutives ont baissé de 100 millions d'euros par an) ; de 8,2 % et 1,8 % pour les arrêts maladie ; de 7,9 % et 3,3 % pour les médicaments ; de 7 % et 4,9 % pour les cliniques ; de 4,4 % et 3,3 % pour les hôpitaux publics. Le secteur médico-social est le seul dans lequel les dépenses moyennes annuelles ont crû plus vite (8,9 %) entre 2003 et 2009 qu'entre 1998 et 2003 (6,6 %).
Certes, ces progrès n'ont pas tout réglé, mais on peut estimer que si la gestion des dépenses avait été la même entre 1998 et 2003 qu'entre 2003 et 2009, le déficit de l'assurance maladie aurait été effacé : l'effort de redressement des cinq dernières années a en effet permis de le ramener de 11,7 milliards d'euros en 2004 à 4,4 milliards d'euros en 2008.
L'effondrement des recettes consécutif à la crise remet en cause le résultat de cet effort : M. Frédéric Van Roekeghem a souligné à cet égard l'importance du déficit prévu pour 2009, récemment estimé par la commission des comptes de la sécurité sociale à 9,4 milliards d'euros.
Dans ce contexte, le problème de la soutenabilité des dépenses publiques se posera avec une acuité nouvelle : certes, pour l'instant, tous les pays sont dans la même situation, mais certains réagiront peut-être plus vite que d'autres pour rééquilibrer leurs déficits publics, et la question de l'efficience du système de soins sera alors un des éléments fondamentaux que l'on ne pourra écarter.
Il existe certes des marges de manoeuvre, que l'on peut même estimer importantes, mais dont l'utilisation ne sera pas facile.
Dans le secteur de la médecine-chirurgie-obstétrique (MCO), après le débat sur la loi « HPST », on ne peut pas ne pas citer le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM), qui évalue à 26 % l'écart « facial » entre les tarifs des secteurs public et privé, l'écart entre établissements au sein de chacun de ces secteurs étant vraisemblablement du même ordre.
Pour la Cnam, une partie de ces écarts tient à des différentiels de productivité qu'il faut réduire par une meilleure organisation des établissements publics et privés, ce qui est possible en conciliant la qualité du résultat médical et une meilleure maîtrise des coûts. La mise en place des agences régionales de santé (ARS) devrait contribuer à y parvenir. On peut ainsi envisager, suivant l'exemple des pays étrangers, un développement des interventions en ambulatoire, auxquelles 85 % des patients sont favorables et qui permettent de réaliser, avec une excellente qualité médicale, une économie annuelle de 100 millions d'euros. Il faut aussi poser la question de l'utilisation des plateaux techniques lourds, qui peut varier de un à deux selon les établissements. Les ARS seront un nouvel outil pour développer la productivité des établissements de santé publics et privés et la Cnam entend être, dans le cadre de la négociation de la convention d'objectifs et de gestion avec l'Etat comme de celui du nouveau contrat pluriannuel prévu par la loi HPST, une force de proposition pour parvenir à une meilleure gestion du risque de santé, y compris dans le domaine des soins hospitaliers.
a ensuite indiqué que la Cnam a inclus cette année dans son rapport une réflexion sur les soins de suite et de rééducation (SSR) qui sont un secteur très important pour les patients, surtout dans la perspective de la réorganisation des parcours de soins et d'une amélioration de la qualité et de la gestion des services de soins.
Ces services représentent environ 100 000 lits et places, dont un peu plus de 40 % en secteur public, un peu moins de 40 % en secteur privé à but non lucratif et 20 % en secteur privé à but lucratif.
Cette offre est très inégalement répartie entre les départements et les régions : elle varie entre 0,4 et 9,36 lits ou places pour 1 000 habitants. Cette constatation invite à la modestie sur les problèmes de démographie médicale et d'implantation des services de soins, qui sont très loin de se limiter à la répartition des professionnels libéraux et concernent d'ailleurs, dans le cas des infirmiers, aussi bien les professionnels salariés que les libéraux. Elle pose la question de savoir, quand on planifie, si on planifie bien et de manière adaptée aux besoins de la population. Une deuxième question à soulever est celle de la tarification, qui peut varier, pour des cas de gravité comparable, de plus de 50 %. L'exemple des établissements, à but non lucratif, gérés par la sécurité sociale, illustre l'effet positif sur leur compétitivité des contraintes budgétaires imposées par les agences régionales de l'hospitalisation (ARH). Pour y faire face, les établissements ont consenti des efforts d'organisation et diminué le taux d'encadrement par lit, ce qui est compatible avec un service de qualité à condition que les locaux soient adaptés et donc, en général, relativement récents. Il faut aussi que les établissements soient bien informatisés, afin de pouvoir anticiper l'arrivée des patients.
Enfin, il est nécessaire de ne pas faire obstacle au développement des établissements par des objectifs quantifiés d'offre de soins (OQOS) qui organisent parfois de façon artificielle les parts de marché et limitent souvent la capacité d'accueil des structures les plus performantes et offrant un bon rapport qualité-prix : la Cnam a d'ailleurs proposé l'an dernier, mais en vain, la remise en cause des objectifs quantifiés. Cette proposition n'avait pourtant rien de novateur : beaucoup de pays voisins ont déjà mis en place des systèmes de pilotage de l'offre fondés sur la qualité du service et le rapport qualité-prix.
Estimant inutile d'insister sur le sujet du médicament, bien connu de la commission, M. Frédéric Van Roekeghem s'est ensuite félicité du succès rencontré par le nouveau « contrat d'amélioration des pratiques individuelles » (Capi) : 30 % des médecins contactés par les délégués de l'assurance maladie adhèrent au contrat dès la première visite et 12 % seulement refusent de le faire. En réponse à une question de Mme Isabelle Debré, il a indiqué que ce refus est généralement motivé par la position prise par le conseil national de l'ordre sur ce contrat, qui « interpelle » certains médecins. Il semble donc que l'objectif de diffusion de ce contrat sera dépassé dès avant les vacances d'été.
Interrogé par le président Nicolas About sur la position des médecins qui n'acceptent ni ne refusent le contrat dès la première proposition, M. Frédéric Van Roekeghem a répondu que 20 % environ ont souhaité prendre le temps de réfléchir. Il a ensuite précisé que le Capi s'analyse comme un système de capitation aux résultats, les médecins signataires s'engageant à respecter les objectifs de prévention définis par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, en matière par exemple de dépistage du cancer du sein et de iatrogénie médicamenteuse. La rémunération, en principe de 7 euros par an et par patient ayant choisi le médecin comme médecin traitant, est fonction des résultats obtenus pour les différents indicateurs retenus. On doit noter cependant que ce n'est pas la rémunération mais l'amélioration des résultats de santé publique qui est la principale motivation de l'adhésion au Capi : ce contrat est d'ailleurs soutenu par le directeur général de la santé.
Passant en revue les domaines où peuvent exister des marges de manoeuvre, M. Frédéric Van Roekeghem a évoqué, hormis le secteur du médicament dans lequel existent encore des possibilités d'action, notamment en ce qui concerne la hiérarchisation de traitement, la dialyse rénale, les transports de malades et les indemnités journalières.
En ce qui concerne la dialyse, les comparaisons internationales font apparaître que la situation française se caractérise par le niveau élevé des tarifs et le faible développement de la dialyse à domicile, qui comporte pourtant des avantages en termes d'adaptation du traitement, d'autonomie et de qualité de vie du patient mais aussi de coûts : le coût moyen annuel de la dialyse à domicile (dialyse péritonéale ou hémodialyse) est de l'ordre de 50 000 euros, celui de l'autodialyse en centre de 60 000 euros et celui de la dialyse en centre d'hémodialyse de 80 000 euros. On pourrait sans doute réaliser dans ce secteur des économies de l'ordre de 100 millions d'euros par an, à condition d'organiser l'offre.
Dans le domaine des transports de malades, la dépense, qui a fortement progressé au cours la dernière décennie, est très hétérogène et les coûts annuels varient, par patient utilisateur, entre 320 et 852 euros, sans que cette diversité s'explique, comme on pourrait le penser, par des caractéristiques géographiques ou de peuplement.
Les indemnités journalières (IJ) sont accordées au titre des risques maladie et accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). L'action menée par l'assurance-maladie a été centrée, pour les arrêts maladie, sur les prescripteurs et les assurés mais entend prendre en compte aussi la dimension de l'employeur. Des analyses sont en cours sur les taux d'IJ par branche professionnelle et l'on constate, dans certaines branches, des corrélations entre les arrêts maladie et les arrêts AT.
Les IJ sont un sujet très compliqué, les risques d'arrêts de travail pouvant varier largement, par exemple en fonction du sexe : les femmes et les hommes n'ont pas d'arrêts de travail pour les mêmes raisons médicales, ni aux mêmes périodes de la vie. D'autres disparités peuvent tenir à la structure de la population active en termes d'âge, de secteur d'activité, de qualification. Mais l'on constate aussi des variétés de pratiques locales que font apparaître les analyses par pathologie : la durée d'arrêt pour une appendicectomie peut ainsi varier de dix-sept à vingt-cinq jours selon le département, de trente à plus de quatre-vingt-dix jours pour les lésions internes du genou : il y a donc des diversités relevant d'usages qu'il conviendrait d'harmoniser.
Mais il est très difficile d'élaborer des référentiels et plus encore de les rendre obligatoires : on peut fort bien comprendre que la durée d'un arrêt de travail puisse varier selon la nature et la pénibilité de ce travail. Il serait cependant souhaitable de parvenir, par voie de recommandations et en fonction de critères médicaux et professionnels, à une plus grande homogénéité de traitement sur l'ensemble du territoire, ainsi qu'à la localisation et à la prévention des abus.
a demandé des précisions sur les moyens d'améliorer le taux de réalisation des mesures de maîtrise médicalisée des dépenses, que le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de santé évalue à 60 % environ, et pour renforcer, comme l'a souhaité le ministre chargé des comptes publics, le contrôle des IJ.
Il a interrogé M. Frédéric Van Roekeghem sur le chiffrage des économies qui pourraient résulter de l'utilisation des « marges de manoeuvre » indiquées, sur ce que l'on peut attendre de l'action des ARS, qui semblent être chargées d'accomplir tout ce que la Cnam n'a pu réaliser, ainsi que sur la possibilité de parvenir, en dépit de la crise, au rééquilibrage des dépenses d'assurance maladie en 2012.
Il a également souhaité savoir quel peut être l'aboutissement de la négociation sur le secteur optionnel dans le délai imposé par l'amendement à la loi « HPST » adopté en commission mixte paritaire à l'initiative de l'Assemblée nationale.
Il a voulu connaître l'état des réflexions de la Cnam sur la prise en charge des ALD, évoquant le souhait du Président de la République de confier de nouvelles responsabilités en ce domaine aux organismes d'assurance maladie complémentaire.
Il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles il a été facturé une journée d'hospitalisation entière à un patient admis à 23 heures 30 pour des soins chroniques et il a demandé confirmation, relayant une question de Mme Marie-Thérèse Hermange, du fait qu'une personne en arrêt de travail pendant trois années consécutives passe automatiquement au régime de l'invalidité.
a demandé à quoi correspond l'écart tarifaire entre établissements de santé publics et privés : le tarif s'entend-il du coût global de la prise en charge, de l'entrée du patient à sa sortie de l'établissement ou de la tarification d'une intervention ? Elle a noté que, selon son expérience personnelle, le montant des prestations que les établissements privés facturent à leurs clients et les économies de coûts de personnel résultant de l'entrée en début de semaine de patients que l'on fait ensuite sortir le vendredi, ou au plus tard le samedi, peuvent expliquer que le coût global pour l'assurance maladie des hospitalisations en clinique privée soit inférieur à celui des séjours dans les hôpitaux publics.
Au sujet du Capi, elle a relevé que le développement du dépistage précoce du cancer du sein peut certes représenter à terme une économie, sans parler de son intérêt pour les patientes, mais qu'il occasionne, dans l'immédiat, des dépenses supplémentaires d'assurance maladie. Elle a demandé si le Capi comporte aussi des engagements permettant de faire des économies, par exemple en évitant de multiplier sans nécessité les examens radiologiques ou les analyses biologiques.
A propos de la crise et de ses conséquences sur les recettes des régimes sociaux, elle a souhaité connaître le chiffrage des recettes supplémentaires que représenterait la remise en cause de certains choix politiques, par exemple la suppression des exonérations des heures supplémentaires ou celle des « niches sociales » dénoncées par la Cour des comptes. Elle a voulu savoir si les régions et les départements où le coût des transports de malades est le plus élevé sont aussi ceux où l'on relève certains excès en termes d'arrêts de travail.
Sur les soins ambulatoires et la dialyse à domicile, elle a noté la nécessité de prendre en compte les angoisses ou les malaises que ces pratiques peuvent occasionner à des patients âgés ou vivants seuls.
Enfin, elle a souligné le risque d'explosion des indemnités journalières qui pourrait résulter de la proposition, qui ne semble heureusement pas devoir aboutir, de permettre de faire travailler chez elles les personnes en arrêt maladie.
a évoqué le cas d'un employeur qui faisait venir travailler en taxi un salarié victime d'un accident de travail pour éviter la déclaration de cet accident et elle s'est interrogée sur la régularité de ce comportement.
a demandé si le Capi est réservé aux médecins conventionnés en secteur 1 et, si tel est le cas, pour quelles raisons.
s'est inquiété de l'importance des réductions d'emplois dans les organismes d'assurance maladie et de leur incidence sur le fonctionnement des caisses. Il a aussi voulu savoir s'il serait possible de respecter, comme l'a annoncé le ministre chargé du budget, l'Ondam pour 2009.
a déclaré admirer la constance avec laquelle la Cnam s'efforce chaque année de remonter le « rocher de Sisyphe » de la maîtrise médicalisée des dépenses et de réaliser, par-ci par-là, des économies dont le montant ne semble pas en rapport avec celui du déficit. Il a jugé impossible d'échapper à une maîtrise comptable passant par un relèvement des recettes et une réduction des dépenses.
Il s'est interrogé sur l'imputation à l'assurance maladie, relevée par la Cour des comptes, de dépenses d'hospitalisation relevant des AT-MP et il a demandé confirmation de l'information selon laquelle la Cnam finance des aides à la fourniture de médicaments aux pays en voie de développement depuis l'interdiction des collectes de médicaments usagés.
a estimé que le choix de développer les dialyses à domicile relève d'une approche technocratique qui ne tient pas compte du fait que les malades ont changé. On dialyse désormais des personnes beaucoup plus âgées qu'autrefois et on ne peut pas demander à un patient de quatre-vingts ans de s'autodialyser : la pratique actuelle correspond donc au changement des caractéristiques de la patientèle et son inversion ne serait sans doute pas réalisable dans les faits.
Il a rappelé que la Cnam a publié, en mars 2008, un bilan des dépenses en 2007 dans le domaine du médicament et il a regretté que ne soit pas paru cette année, à sa connaissance, un bilan identique portant sur l'année 2008. Par ailleurs, selon le premier bilan, 85 % de la croissance des dépenses sont imputables à de nouveaux médicaments dont 45 % n'apportent pas d'amélioration significative du service médical rendu : c'est le cas, par exemple, d'un antiépileptique, le Lyrica, inscrit sur la liste en violation, apparemment, des dispositions de l'article R. 163-5-1-2 du code de la sécurité sociale puisqu'il ne correspond à aucune amélioration thérapeutique et ne permet aucune économie, et dont le coût du traitement journalier est au contraire nettement supérieur à celui d'autres médicaments de la même classe thérapeutique. Regrettant de n'avoir pas obtenu de réponse à la question écrite qu'il avait posée sur ce sujet à la ministre de la santé, il s'est interrogé sur la possibilité de faire des économies si l'on met sur le marché des médicaments beaucoup plus chers que les produits analogues déjà disponibles.
a demandé si l'on a constaté que l'hospitalisation à domicile (HAD) permet de réaliser des économies et, dans l'affirmative, s'il est envisagé de la développer et d'élargir le champ des pathologies qu'elle couvre.
a souhaité qu'il soit possible d'éviter d'entrer à l'hôpital la veille d'une intervention si ce n'est pas absolument nécessaire.
Sur le même sujet, M. Nicolas About, président, a indiqué qu'il avait envisagé d'imposer, dans le cadre de la loi HPST, que les patients qui doivent être hospitalisés loin de chez eux puissent passer près de leur domicile la visite pré-anesthésique, au lieu d'être obligés de se déplacer ou d'être hospitalisés un jour plus tôt. Il n'y a en effet aucune raison que cette visite ne puisse avoir lieu dans un autre établissement, pourvu que l'on se conforme à un protocole rigoureux et accepté par tous, et cela permettrait des économies.
En réponse aux intervenants, M. Frédéric Van Roekeghem a notamment apporté les précisions suivantes :
- la santé est un problème médico-économique et on ne peut donc pas l'aborder de façon uniquement comptable. Cela ne veut pas dire que l'on ne puisse pas prendre de mesures tarifaires restreignant les dépenses, qui sont d'ailleurs généralement considérées comme relevant d'une maîtrise comptable, mais la Cnam préfère parler de gestion du risque et il faut tenir compte de l'économie de la santé. Si on équilibre les dépenses des établissements, mais à un niveau d'efficience très faible, on n'aura pas nécessairement gagné. Le comité d'alerte a été prudent dans son estimation du taux de réalisation des objectifs de maîtrise médicalisée et l'on peut considérer que cette prudence est raisonnable si on veut s'assurer qu'il n'y a pas de risque d'alerte. Mais la Cnam espère faire mieux et ne pas atteindre les objectifs à 100 % n'est en soi pas satisfaisant ;
- le retour à l'équilibre financier de l'assurance maladie paraît très compliqué : il est en effet difficile de mettre de côté la crise qui affecte fortement les recettes. Si on voulait en neutraliser les effets, il faudrait trouver des ressources à due concurrence. En 2009, on prévoit que la masse salariale va diminuer de 1,25 %, soit un écart de 4,25 points avec la hausse de 3 % que l'on peut attendre en période normale. Une baisse d'un point de la masse salariale diminue de 900 millions d'euros les ressources de l'assurance maladie et du double celles du régime général. Avec une baisse de la masse salariale de 1,25 % en 2009 et, selon les prévisions, de 0,5 % en 2010, il est clair que l'on va continuer à s'enfoncer dans les déficits ;
- l'effort de maîtrise des dépenses est-il suffisant ? Le tendanciel de l'Ondam l'an prochain est de 4,2 %. Chaque année, si l'on veut contenir les dépenses d'un point, il faut trouver des mesures correspondant à 1,5 milliard d'euros d'économies avant de commencer à réduire le déficit. Le rééquilibrage en 2012 de l'assurance maladie pose donc un vrai problème. Cela doit conduire à mettre en oeuvre toutes les mesures qui, sans perte de chance pour les patients, permettront de mieux gérer la ressource. Mais il est clair qu'aujourd'hui, on est confronté à une crise de recettes ;
- la mise en place des ARS demandera un peu de temps et l'année 2010 lui sera en partie dédiée. Mais l'important est moins l'outil que la manière de l'utiliser, et la question est celle du pilotage et du management qui permettront d'optimiser le système ;
- la difficulté de création du secteur optionnel n'est pas technique mais politique. Un protocole d'accord a été conclu entre les complémentaires, de nombreux syndicats de médecins et la Cnam en juillet 2008, mais il reste un léger réglage à opérer sur la question de la régulation du secteur 2 ;
- en ce qui concerne l'association des organismes d'assurance complémentaire à la gestion des ALD, le Président de la République s'est exprimé et des solutions nouvelles seront donc expérimentées dans le courant de l'année prochaine. La doctrine de la Cnam est qu'il faut être prudent avant de prendre des décisions que l'on pourrait regretter. Des expériences étrangères, aux Pays-Bas ou aux Etats-Unis, montrent que lorsque l'on met en concurrence des assureurs et en même temps des offreurs de soins, on n'aboutit pas forcément à une amélioration du service rendu aux usagers ;
- la Cnam a encore des marges de productivité. En 2008, elle a fourni un très grand effort en réduisant, en exécution, son budget administratif de 1 % par rapport à 2007. Elle va dépasser les engagements pris en matière de réduction des effectifs, les départs en retraite ayant été beaucoup plus importants que prévu après la loi de 2003 et les taux de remplacement ayant été respectés. On peut encore sans doute diminuer les effectifs dans le domaine de la production en tirant tous les bénéfices de la dématérialisation et espérer réduire aussi le coût des fonctions de support. Mais il faut que la Cnam ait la possibilité de développer les fonctions de contrôle, la gestion du risque et les services aux assurés, même si, dans ce dernier domaine, la dématérialisation permet aussi de développer les activités sans augmentation d'effectifs. La Cnam peut donc encore faire des progrès de productivité et l'Etat lui demandera certainement d'en faire dans le cadre de la prochaine convention d'objectifs et de gestion. Mais il faut les faire à bon escient et pouvoir continuer à améliorer la qualité des services : dans les caisses les plus productives, on atteint la limite de l'exercice ;
- le tarif ne représente pas un coût, mais le prix auquel l'assurance maladie rémunère un offreur de soins pour une opération, par exemple une appendicectomie. Les coûts complets d'une telle opération sont en moyenne supérieurs dans le public, ce qui n'exclut pas qu'ils puissent être dans certains établissements privés beaucoup plus élevés que dans les établissements publics. En revanche, le reste à charge est en moyenne supérieur dans le privé, en raison des suppléments d'honoraires payés aux médecins. Ceci étant, le débat public ne doit pas se focaliser uniquement sur le reste à charge. Il faut parvenir à des coûts complets raisonnablement comparables, pour des interventions comparables et des patients comparables. Il faut bien sûr définir, et rémunérer à leur juste prix, les missions de service public mais aussi avoir des tarifs adaptés et une productivité comparable dans les autres cas. Il est possible de modifier l'organisation des établissements publics, même si ce n'est pas facile, car les personnels peuvent comprendre l'intérêt de maîtriser les coûts. Mais, et c'est l'intérêt du secteur optionnel, les dépassements doivent aussi être limités, car il faut veiller à ce que l'offre de soins à tarifs opposables ou limités soit suffisante. Il faut noter qu'en moyenne les dépassements représentent 8 % du tarif global mais davantage, évidemment, rapportés à l'acte du professionnel. C'est un vrai sujet mais, au risque d'être provocateur, on peut relever qu'un radiologue exerçant en secteur 1 gagne 200 000 euros nets par an et un chirurgien 150 000 euros avec un dépassement de 100 %. On peut aussi penser qu'il faudrait plutôt chercher à harmoniser les tarifs et la productivité des établissements et resserrer les dépassements, sauf à les financer par une meilleure productivité des établissements ;
- il est vrai que les objectifs de prévention du Capi ont un coût. Mais celui-ci comporte aussi des objectifs de baisse de certaines prescriptions et de meilleure utilisation de la pharmacopée, par exemple en diminuant le traitement de l'hypertension par des sartans - beaucoup plus utilisés en France qu'à l'étranger - au profit des inhibiteurs d'enzyme de conversion qui ont une efficacité comparable ;
- la Cour des comptes a chiffré le coût des niches sociales, et le ministère des finances celui des heures supplémentaires ;
- la cartographie des dépenses importantes de transport recouvre quelquefois celle des dépenses importantes d'IJ. Mais elle est surtout liée à la structure de l'offre ;
- il est évident que l'on ne va pas imposer une autodialyse à un patient âgé sans avis médical : c'est là que l'on retrouve la distinction entre la maîtrise comptable et la maîtrise médicalisée des dépenses, qui passe d'abord par la persuasion, par des efforts de développement de l'offre mais peut aussi comporter des mesures plus contraignantes, comme la mise sous accord préalable des prescripteurs ;
- demander de travailler à domicile à un salarié en arrêt de travail, idée à laquelle il s'est déclaré hostile, pourrait créer la tentation de faire financer le travail salarié par la sécurité sociale. En revanche, on peut envisager, dans l'entreprise, l'adaptation du poste de travail et aussi, dans certains cas, le travail à domicile ;
- les médecins généralistes conventionnés constituent la cible des Capi mais, sous réserve de vérification, ce contrat n'est pas exclusivement destiné aux praticiens du secteur 1 ;
- on s'oriente vers un respect de l'Ondam, qui a été construit à partir d'une base 2008 sincère. L'évolution des dépenses de ville n'est pas mauvaise, mais une incertitude demeure en ce qui concerne les dépenses hospitalières pour lesquelles une variation de 1 % se traduit par 500 millions d'euros. Le vrai problème est celui des recettes ;
- compte tenu de la situation de sa trésorerie, le régime général aurait du mal, si l'Etat n'était pas son financeur ultime, à en trouver un autre. Faut-il imposer des mesures d'économies plus dures ? Ce sera à l'Etat d'en décider mais le ralentissement des dépenses de ville a été appréciable. En ce qui concerne le déficit hospitalier, le HCAAM pourrait proposer que l'évolution des dépenses MCO soit inférieure à celle de l'Ondam. Il faut rappeler qu'il existe des marges de manoeuvre en matière de dépenses hospitalières mais, si on les utilise, il faudra en tirer les conséquences au niveau des équipes ;
- il est vrai que des dépenses hospitalières relevant des AT-MP sont mises à la charge de l'assurance maladie. C'est l'hôpital qui devrait veiller à leur facturation correcte mais il n'y a pas de sanction s'il ne le fait pas et l'on peut aussi comprendre que sa première préoccupation soit plutôt de soigner les malades, d'autant plus que cette erreur de facturation est neutre pour lui ;
- il est exact que depuis l'affaire Cyclamed, la sécurité sociale finance à la demande de l'Etat et pour des montants limités, de l'ordre de 4 millions d'euros par an, les associations spécialisées dans la fourniture de médicaments aux pays qui en ont besoin ;
- le bilan des dépenses 2008 dans le domaine du médicament sera publié. Les chiffres principaux figureront déjà dans le rapport qui sera transmis officiellement au Parlement avant le 10 juillet prochain. On constate une baisse des dépenses des médicaments de soins aigus de plus de 100 millions d'euros et l'augmentation la plus importante reste celle des médicaments de spécialité. Les dépenses de vaccins enregistrent également une progression liée à la montée en puissance du vaccin contre le cancer du col de l'utérus ;
- sur le dossier Lyrica, il faudra demander l'opinion du président du comité économique du médicament. Pour sa part, la Cnam compte demander, comme elle l'a déjà fait l'an dernier, que l'assurance maladie puisse s'opposer à l'inscription de médicaments ;
- la HAD représente vraisemblablement une économie, qui n'a pas encore été suffisamment étudiée, surtout si elle bénéficie à des patients qui auraient été hospitalisés plutôt qu'à des personnes qui peuvent être traitées en ambulatoire. Il faut aussi mettre un terme à la pratique consistant à faire sortir les patientes de maternité deux ou trois jours après l'accouchement pour les hospitaliser ensuite en HAD. Il serait préférable de prévoir un accompagnement par une sage-femme.
a ensuite apporté les réponses suivantes :
- la facturation par journée entière d'hospitalisation, même en cas d'admission tardive, résulte de la réglementation, qu'il serait possible de modifier pour prévoir des facturations par partie de journée. L'on pourrait aussi appliquer des réfactions de tarifs en fonction de l'heure d'admission ;
- l'organisation de la dialyse en France résulte, comme c'est souvent le cas, de facteurs structurels. On peut se demander pourquoi l'offre de dialyse à domicile est très variable selon les régions, sans que cela s'explique par des différences au sein des populations concernées, ou pourquoi elle est plus élevée dans des pays où elle s'adresse aux mêmes types de population qu'en France. Il faudrait aussi, pour développer la dialyse à domicile, pouvoir proposer un accompagnement, ce qui rejoint la question plus générale de l'accompagnement des soins à domicile et de l'évolution des techniques de prise en charge hospitalière en France, où les soins ambulatoires restent peu développés : la situation française contraste sur ce point avec ce que l'on constate ailleurs. Ainsi, en Vénétie et dans des pays d'Europe du Nord, 50 % des opérations de la cataracte sont réalisés dans des centres ambulatoires, ce qui est quasiment interdit en France, bien que cette formule présente toutes garanties en matière de qualité, réduise les risques d'infection nosocomiale et soit beaucoup moins coûteuse.