Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 16 juillet 2013 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • BPI
  • CDC
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La réunion

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La commission procède tout d'abord à l'audition de MM. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance, et Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, sur les résultats de 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous sommes réunis pour l'audition annuelle du président de la commission de surveillance et du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui fait suite à la remise du rapport annuel au Parlement et à la présentation des résultats 2012. Voilà un an que la gouvernance bicéphale de la CDC a été renouvelée. 2012 n'a pas été une année calme, puisqu'elle s'est traduite par une perte comptable d'environ 450 millions d'euros. Quelle expérience tirez-vous de ces difficultés ?

Sur le plan institutionnel, on note la mise en place de la Banque publique d'investissement (BPI) : quel équilibre trouver pour ce nouvel acteur, sans porter atteinte à l'intégrité de la CDC ?

Cette audition est également l'occasion de nous présenter les perspectives d'avenir. De ce point de vue, le Premier ministre a récemment confirmé que l'accès des collectivités territoriales à l'emprunt sera facilité, notamment grâce aux ressources du Fonds d'épargne et dans des conditions favorables aux investissements à long terme, d'autant plus que l'on s'attend à une baisse, logique d'ailleurs, du taux de rémunération du Livret A.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

La Caisse des dépôts est placée sous la surveillance du Parlement. A cet égard, le président de la commission de surveillance, qui vous présente les résultats annuels, est un objet non identifiable, aux côtés du directeur général, avec qui, toutefois, la collaboration est toujours efficace.

J'appelle votre attention sur le fait que, désormais, les réunions de la commission de surveillance se concluent par des avis synthétiques, qui parfois sont assez vagues mais parfois très précis.

La commission de surveillance veille sur l'orientation générale, la stratégie, le modèle prudentiel et sur le montant des émissions obligataires. Notre mission est de faire en sorte que la CDC se porte le mieux possible, au service de l'intérêt général.

Malgré la perte comptable consolidée d'environ 450 millions d'euros, la Caisse des dépôts a versé plus de 500 millions d'euros à l'Etat au titre de la contribution représentative de l'impôt sur les sociétés (CRIS). Cela n'est pas sans poser problème et je pense qu'il faut revoir les termes de la convention de 2010 qui nous lie avec l'Etat. La Caisse des dépôts, qui n'a pas d'actionnaires, d'apporteurs de capitaux, ne peut augmenter ses fonds propres qu'en intégrant une partie de ses résultats. Cela devra être vu avec la direction générale du Trésor et le Gouvernement.

Nous avons connu, en 2012, trois dossiers majeurs.

Le premier est celui de Dexia, qui a coûté 4 milliards d'euros à la CDC, dont un milliard pour le Fonds d'épargne. Nous ne sommes plus engagés car le protocole de résolution, qui a abouti à la mise en place de la Société de financement local (SFIL) et de la caisse française de financement local (CAFFIL), prévoit que la CDC est présente au capital de la SFIL, à hauteur de 20 %, avec des actions préférentielles qui la mettent à l'abri de toute nécessité de recapitalisation. Si la SFIL avait besoin d'être recapitalisée, en raison, notamment, de son portefeuille difficile de prêts aux collectivités, la CDC ne pourrait pas être appelée en recapitalisation. En revanche, nous avons accordé un prêt d'un montant maximal de 12,5 milliards d'euros à la SFIL dont nous pouvons nous demander quel en sera l'amortissement. Je note toutefois que la CAFFIL a récemment réalisé une émission obligatoire qui s'est très bien déroulée.

Mais l'évolution de ce dossier dépendra également d'une décision de l'exécutif pour mettre la SFIL à l'abri d'éventuelles décisions judiciaires. Il s'agit de créer un fonds pour venir en aide aux collectivités les plus en difficulté qui cantonnerait les dégâts que pourraient faire ces crédits sur la santé financière de la SFIL. Ce fonds devrait être examiné par le Parlement à l'automne. Mon avis, sur cette question, est tranché : même si, dans certains cas l'ex-Dexia avait dépassé les bornes, je considère que, dans d'autres cas, ceux qui ont signé un contrat sont responsables.

Le deuxième dossier lourd est Veolia Transdev, qui a coûté 1,5 milliard d'euros, en raison de logiques non financières en réalité. Sans rentrer dans le détail, je souhaite seulement faire un point sur la SNCM. Elle était dans le patrimoine de Veolia Environnement et a été apportée à Veolia Transdev. A l'occasion du protocole signé avec la CDC pour reprendre la main dans Transdev, il a ensuite été explicitement prévu que la SNCM resterait dans Veolia Environnement. La finalisation du dossier devait avoir lieu fin juin, puis a été reportée à la rentrée. En tout état de cause, l'objectif de la Caisse des dépôts n'est pas de revenir dans le capital de la SNCM. Nous n'en avons pas les moyens, même si nous pouvons faciliter certaines solutions pour les territoires concernés (la région PACA, la collectivité de Corse, etc.).

Enfin, le troisième principal dossier est celui de la création de la BPI. La Caisse des dépôts a apporté 50 % des fonds propres de la BPI. La CDC a la prééminence, en termes stratégiques, sur l'action de la BPI dans la partie investissement, tandis que la partie bancaire, issue d'Oséo, sur laquelle la CDC est moins investie, est plutôt pilotée par l'Etat.

En conclusion, j'insiste sur deux points. Tout d'abord, comme je le disais précédemment, il faut revenir sur le protocole financier qui nous lie à l'Etat. Par ailleurs, nous faisons des prêts aux collectivités territoriales à des maturités allant de 20 à 40 ans, ce que le marché ne fait pas. Le taux d'intérêt, qui est celui du Livret A augmenté de 130 points de base, pourrait évoluer dans le bon sens. Nous rencontrons parfois des difficultés avec la direction générale du Trésor dont la maîtrise, justifiée par la garantie de l'Etat sur le Fonds d'épargne, nous apparaît parfois envahissante. Là aussi, les choses vont s'améliorer puisque le Trésor devrait renoncer à donner systématiquement son feu vert a priori aux prêts, ce qui permettra d'alléger les procédures.

Le Fonds d'épargne est aujourd'hui surliquide en raison d'une collecte très importante. C'est pourquoi l'on envisage une réallocation au système bancaire d'une enveloppe de 25 à 30 milliards d'euros, soit 15 milliards d'euros sur le Livret A et le LDD, ainsi qu'une dizaine ou quinzaine de milliards d'euros sur le LEP. Cela ne pose pas de problème car cela n'hypothèque pas notre politique de financement du logement social et, par ailleurs, cela pourrait nous rapporter un peu... En échange, nous espérons de la part des établissements de crédit une certaine bonne volonté pour mettre en place, à nos côtés, un fonds de retournement pour les entreprises en difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Vous aviez annoncé au moins un milliard d'euros pour un tel fonds.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Vous savez, j'ai dit cela parce que je suis du Sud-Ouest...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C'est vrai, il faut demander plus pour obtenir moins. Cela ne revient-il pas à créer au sein de la CDC ce que la BPI aurait pu faire ?

Debut de section - Permalien
Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et des consignations

En dépit des difficultés décrites par le président de la commission de surveillance, qui font que la CDC connaît, en cinq ans, la deuxième année de perte de son histoire, celle-ci s'est mobilisée pour rester un acteur du financement de l'intérêt général. Ainsi, en 2012, le Fonds d'épargne a atteint un niveau d'activité inégalé avec 24 milliards d'euros de prêts. Nos directions régionales sont restées très mobilisées pour financer des projets d'équipement territoriaux. Nos filiales ont continué à se développer. Je pense en particulier à Icade qui, par son rapprochement avec Silic, va devenir la première foncière de bureaux de France ; à CNP Assurances, qui a engagé un processus de diversification de ses produits et reste la filiale ayant la plus forte contribution aux résultats de la Caisse des dépôts ; à la SNI, qui a connu un bon niveau d'activité en 2012.

Sur le dossier de Veolia Transdev, je souligne que la perspective d'une reprise de capital par la CDC redonne des couleurs à cette société. La nomination de Jean-Marc Janaillac, ancien responsable des transports internationaux à la RATP, a permis par ailleurs de renouer les liens avec les collectivités territoriales.

Comme l'a souligné le président de la commission de surveillance, la création de la BPI a été l'événement majeur de l'année. Nous avons fait un effort important pour l'apport en capital. La BPI est désormais opérationnelle, sa doctrine d'intervention a été adoptée le 25 juin dernier par le conseil d'administration et les opérations d'apport et de valorisation ont été achevées. Les instances de gouvernance sont également en place, que ce soit le comité national d'orientation, au sein duquel siègent deux membres de votre commission, ou les comités régionaux d'orientation, une dizaine d'entre eux s'étant déjà réunis.

De façon générale, 2012 a été une année d'évolution qui a mis le modèle économique de la CDC sous contrainte. Nous devons revoir nos missions. Cela s'explique notamment par l'accroissement important du poids de nos participations stratégiques, qui équivalaient à environ 75 % de nos fonds propres sociaux en 2007, 100 % en 2009 et qui pourraient représenter 130 % en 2017. C'est un facteur de rigidité dans la gestion de la Caisse des dépôts.

Par ailleurs, notre bilan a évolué en raison d'un accroissement de notre endettement et de notre appel aux marchés financiers.

Certes, la Caisse des dépôts reste un établissement solide. Elle est classée parmi les six institutions financières les plus fiables au monde, grâce à notre capital de confiance issu de la surveillance du Parlement et à notre capital humain. Mais nos marges de manoeuvre se sont réduites et nous devons être désormais plus recentrés, plus sélectifs.

Nous devons rester un acteur important du financement des entreprises. Nous le serons à travers notre activité d'investisseur institutionnel, à travers notre capacité à élaborer des dispositifs de place. Nous venons ainsi de participer au lancement des fonds dits « Novo », fonds obligataires de près d'un milliard d'euros destinés au financement des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI). La CDC a été l'architecte de cette initiative aux côtés de dix-sept assureurs. Elle envisage d'investir à hauteur de 100 millions d'euros dans ces fonds avec l'objectif d'orienter l'épargne financière vers le financement des entreprises.

Notre groupe restera également, plus que jamais, un partenaire privilégié des collectivités locales, en tant que prêteur, investisseur, opérateur, mais aussi, à travers nos filiales, comme apporteur de solutions d'ingénierie, à l'image d'Egis ou de la SCET. La Caisse des dépôts doit être reconnue en la matière, qu'il s'agisse de nos expertises ou de nos capacités d'investissement.

Depuis le retrait de Dexia, le centre de gravité du groupe a basculé vers le financement des collectivités locales, à travers la mise en place d'une enveloppe de 20 milliards d'euros sur Fonds d'épargne et un partenariat avec La Banque Postale pour des prêts de court et moyen terme, et les accords avec la Banque européenne d'investissement signés le 13 juin dernier, pour co-financer des projets d'investissements dans l'énergie, le haut débit, la transition énergétique ou encore les transports urbains.

Nous revenons également à nos fondamentaux - notre activité de mandataire et de dépositaire - pour trouver des nouveaux mandats ou nouveaux dépôts. Par exemple, nous sommes disponibles pour gérer, comme le propose la Cour des comptes, les contrats d'assurance-vie en déshérence, qui représentent tout de même 4 milliards d'euros.

Nous sommes concernés par la réforme des retraites : la CDC doit apporter des solutions pour mieux gérer la retraite des personnes ayant commencé à travailler tôt, avec une forte mobilité et une importante pénibilité. Ce sont des régimes de retraite différents, avec une gestion délicate, et la Caisse des dépôts est à la disposition des pouvoirs publics pour s'en charger.

Malgré la baisse des transactions immobilières, les dépôts des notaires s'élèvent en 2012 à environ 20 milliards d'euros. Le rendement est cependant moins important, dans un contexte général de taux très bas.

S'agissant de la gestion et de la protection de l'épargne, le Fonds d'épargne, qui collecte aujourd'hui 65 % des fonds du Livret A et du LDD, transforme une épargne liquide en emplois de long, voire de très long terme, au service du financement de l'économie, notamment du logement social qui représente 80 % de son emploi, avec un objectif, fixé par les pouvoirs publics, de construction de 150 000 logements sociaux par an.

Quelques mots sur les priorités sectorielles de notre plan stratégique. La transition énergétique et environnementale sera un axe important de développement, en matière de rénovation thermique et de promotion des énergies renouvelables.

Notre groupe se positionnera également sur la question du numérique, que ce soit sur le développement des réseaux d'infrastructures ou la consignation des données numériques.

La CDC réaffirmera son rôle d'entraînement et de mobilisation dans la modernisation des politiques du logement. Il en va ainsi du développement des logements intermédiaires avec des co-investisseurs, mais aussi des solutions innovantes pour répondre aux enjeux d'autonomie et de vieillissement de la population en matière d'habitat.

Enfin, la Caisse des dépôts joue un rôle international, puisque 25 % de son activité est réalisée à l'étranger. Elle a vocation à attirer les fonds souverains sur des projets français. Nous avons déjà conclu en ce sens avec le Qatar un projet de fonds de 300 millions d'euros ; d'autres suivront, si la commission de surveillance nous y autorise.

En conclusion, la CDC a engagé la transformation de son modèle économique pour dégager de nouvelles marges de manoeuvre et continuer à répondre aux besoins des entreprises et des collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Je précise qu'au moment de nos apports à la BPI, nous avons dû passer des provisions énormes, en particulier sur France Télécom, qui sinon auraient dû être faites par la BPI l'année suivante. C'est une somme supérieure à un milliard, qui explique l'essentiel de notre perte sur 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Cela ne fait que renforcer le scepticisme de certains sur l'utilité de la création de la BPI...

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Avec ou sans BPI, il aurait fallu faire ces dépréciations tôt ou tard !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Vous avez malgré tout acquitté la contribution représentative d'impôt sur les sociétés.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

En effet, car nous avons un protocole - auquel, d'ailleurs, le rapporteur général de l'époque avait dû donner son accord -, qui est injuste.

Par ailleurs, Bruxelles réfléchit à un livre vert, qui correspond à un projet de directive dont on peut soupçonner qu'elle limite le rôle des « banques publiques d'investissement » présentes dans les différents Etats, comme la KfW en Allemagne ou la Cassa depositi e prestiti en Italie. Je le signale, car nous pourrions être amenés à appeler à nouveau votre attention sur cette directive.

Debut de section - Permalien
Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et des consignations

J'insiste sur le fait que, pour France Telecom, nous aurions été obligés de déprécier, cette année ou l'année prochaine, comme nous l'avons fait pour d'autres sociétés. Initialement, nous avons enregistré dans nos comptes l'action à 16 euros. Aujourd'hui, nous l'avons provisionnée à 9 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Etant membre de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts, j'ai déjà partiellement connaissance des dossiers que nous venons d'évoquer. Je m'en tiendrai donc à un propos bref.

La CDC est à un moment charnière de son existence, en phase de mutation. Avec 287 milliards d'euros de bilan consolidé, elle conserve une puissance incontestable, mais on assiste à une progressive rigidification qui réduit les marges de manoeuvre pour l'avenir, alors que la Caisse des dépôts doit rester un partenaire de l'Etat pour financer l'économie. Pouvez-vous, de ce point de vue, préciser les orientations du plan stratégique pour affirmer la vocation de la CDC en matière de financement d'intérêt général ?

S'agissant de la BPI, pouvez-vous nous préciser comment fonctionne concrètement la gouvernance partagée entre vous-même et l'Etat ?

Concernant le Fonds d'épargne, les nouvelles modalités de collecte ne tiennent pas compte d'une baisse probable du taux de rémunération du Livret A. Si cette baisse se traduit par une décollecte, quelles en seront les conséquences pour le financement de l'économie ?

Pouvez-nous nous exposer précisément dans quelle mesure la Caisse des dépôts est exposée aux prêts toxiques repris par la SFIL ?

Enfin, sur les financements aux collectivités, des ajustements sont opérés. Le ministère de l'économie s'est récemment engagé à assouplir les modalités d'attribution des prêts. En particulier, pouvez-vous nous préciser l'élargissement des champs d'intervention pour lesquels de tels prêts pourront être obtenus ?

Debut de section - Permalien
Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et des consignations

S'agissant du plan stratégique, comme je l'ai indiqué, nous devons adapter notre stratégie aux marges de manoeuvre qui sont les nôtres. Nous allons chercher à assouplir les contraintes qui pèsent sur notre bilan, étant entendu que certains choix de participations, par exemple dans La Poste, nous engagent pendant un certain temps. Et nous n'avons aucune garantie, compte tenu des difficultés de La Poste notamment sur l'activité courrier, sur le montant des dividendes qui nous sera versé. Nous allons donc mener une stratégie de diversification, en termes de participations et de liquidité.

Nous souhaitons également développer un nouveau mode d'organisation. Déjà, avec la commission de surveillance, - je dis cela sous le contrôle de son président - nous essayons de travailler davantage ensemble : cela aussi fait partie des aspects stratégiques. Nous voulons que notre organisation interne soit plus lisible, plus compréhensible, notamment par les élus sur l'ensemble du territoire. A mon arrivée, j'ai pu constater qu'il n'y avait pas toujours au sein du groupe Caisse des dépôts une coordination suffisamment bonne entre les filiales et l'établissement public.

Notre stratégie doit être déterminée au niveau global du groupe. Et, s'agissant des priorités qui ont été dégagées, comme le numérique, la transition énergétique, etc., je pense que nos différents pôles doivent devenir plus responsables : nous avons des actions qui sont par trop disséminées.

En ce qui concerne le pacte d'actionnaires au sein de la BPI, je crois que nous avons trouvé des solutions satisfaisantes avec l'Etat. Nous avons trouvé un accord sur les apports.

Au sein du conseil d'administration, siégeront quatre représentants de l'Etat, quatre représentants de la Caisse des dépôts et trois personnalités indépendantes, dont le directeur général et deux représentants des régions. Le président du conseil national d'orientation a un statut d'observateur. Dans les deux principales filiales, l'Etat aura la majorité au sein du conseil d'administration de la filiale de financement et la Caisse des dépôts aura la majorité dans celui de la filiale d'investissement, car c'est là où les plus gros apports ont été fait via le FSI et CDC Entreprises. Le directeur général dispose d'un pouvoir exécutif au niveau central et dans chacune des deux filiales.

Après des débuts un peu chahutés, nous trouvons notre rythme de croisière en matière de gouvernance. Il était bien sûr important d'avoir des discussions sur le mode de fonctionnement de la BPI, sur sa doctrine d'intervention. Désormais, je crois que tout le monde a bien compris qu'il faut s'en tenir à un mode de fonctionnement plus normal du conseil d'administration.

En un mot, le président non exécutif que je suis est satisfait des relations que nous entretenons avec l'Etat. A titre personnel, j'entretiens des relations très transparentes et très fluides avec David Azéma, commissaire aux participations de l'Etat, et sans qu'il y ait de conflit particulier. Nous avons pu le constater la semaine dernière sur le dossier Rio Tinto dans la vallée de la Maurienne. Nous avons travaillé ensemble de manière ouverte.

En ce qui concerne le Fonds d'épargne, même s'il y a une baisse de la collecte avec la diminution du Livret A, nous pourrons faire face à nos engagements. Je rappelle que nous sommes « protégés » par deux ratios : nous devons toujours disposer d'un taux de centralisation d'au moins 125 % de l'encours des prêts au logement social et à la politique de la ville et d'au moins 135 % sur l'ensemble de l'encours des prêts du Fonds d'épargne.

Même si la collecte devait être plus molle, le taux de centralisation à 65 % reste le taux de référence. Nous insistons toujours sur ce point. Si nous disposons d'un surcroît de liquidités, comme c'est le cas actuellement, nous pouvons toujours apporter un concours au secteur bancaire.

S'agissant de la SFIL, la Caisse des dépôts détient 20 % de la société et il est acté qu'elle ne participera pas à son éventuelle recapitalisation. Elle n'est donc pas exposée aux prêts toxiques que porte la SFIL. En revanche, si cette dernière avait des difficultés à se refinancer - ce qui n'est pas le cas et c'est encourageant -, là il est clair que le rythme de remboursement des prêts accordés par la Caisse des dépôts pourrait être plus lent que prévu.

Enfin, pour ce qui est de l'enveloppe de 20 milliards d'euros de prêts aux collectivités sur Fonds d'épargne, je vous confirme qu'il y a eu un assouplissement qui concerne l'eau et les réseaux d'assainissement. Nous avons trouvé un accord avec Bercy. Il est clair également, suite aux échanges que j'ai eus avec le ministre de l'économie et le directeur général du Trésor, que nous nous orientons vers un contrôle a posteriori des prêts accordés et non a priori comme cela était initialement envisagé. Notre travail va être facilité et j'ajoute que, pour avoir dirigé le Trésor, ce n'est pas sa mission que de valider chaque prêt. En revanche, la direction générale du Trésor pourra toujours nous taper sur les doigts si nous avons pris tel ou tel risque de manière inconsidérée.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Dans le pacte d'actionnaires entre la CDC et l'Etat, il n'y a pas de clause secrète. Il pourra donc être transmis à la commission des finances, si elle le souhaite.

Pour faire simple, l'Etat a la main sur toute la partie bancaire et la Caisse des dépôts sur toute la partie investissement - le haut de bilan et le capital-risque.

Un autre point sur le Livret A. Bien sûr, on peut craindre une décollecte. La baisse des taux est prévue même si nous ne savons pas si elle sera de 0,25 ou de 0,5 point. Pour ma part, je ne pense pas que ce soit de nature à créer une réelle différence pour le Livret A moyen - je ne parle pas de ceux qui sont au plafond. L'immense majorité des livrets sont modestes et la baisse ne représentera que 5 à 6 euros par an.

Je ne crois pas à une décollecte, mais il peut y avoir un frein sur la collecte. En même temps, faut-il s'en plaindre ? On ne peut pas espérer un rebond de la consommation et un accroissement de l'épargne des Français. A titre personnel, j'estime qu'il n'y a pas de danger en la demeure. Surtout, on ne voit pas ce qui pourrait remplacer l'épargne défiscalisée en France. Il n'y a pas mieux : elle n'a pas de concurrence.

Enfin, le fonds de soutien aux collectivités territoriales, annoncé ce matin par le Premier ministre, confortera la position de la SFIL et de la Banque postale. Il faut trouver une solution raisonnable à ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Ma question part d'une constatation. Il me semble qu'avec le relèvement des plafonds du Livret A et du LDD, intervenus respectivement au 1er octobre 2012 et au 1er janvier 2013, il y a eu une augmentation importante des dépôts centralisés au Fonds d'épargne. Le montant total de la collecte, au 31 décembre 2012, serait de 255 milliards d'euros, soit 34 milliards de plus qu'une année auparavant.

Parallèlement, si l'on regarde l'encours des prêts sur Fonds d'épargne, le ratio n'a jamais été inférieur à 155 % au cours des quatre dernières années et il est même remonté à 165 % en 2012, alors que, réglementairement, il est fixé à 125 %. La capacité de prêts du Fonds d'épargne s'élevait donc à 222,5 milliards d'euros et les prêts n'ont atteint que 150 milliards d'euros.

Je constate donc que la Caisse des dépôts a disposé l'année dernière d'une capacité excédentaire de prêts de 70 milliards d'euros non utilisée, qui peut-être aurait pu être affectée à des projets de développement significatifs.

La véritable question est de savoir ce qui est stratégique ? Devant la multiplication des activités, on ne le ressent pas bien. On ne voit pas la partie stratégique, au-delà de la participation dans La Poste. A quoi faut-il affecter cette capacité excédentaire de prêts ? Il se dit que la Caisse des dépôts achèterait de la dette française. Pourquoi pas ? Ce n'est pas une critique : si c'est utile, c'est tout de même convenu.

D'un point de vue stratégique, que peut faire la CDC au-delà de ce que fait déjà la BPI ?

Vous avez évoqué une politique contra-cyclique. Est-ce que, dans une économie internationalisée, nous pouvons utiliser ces instruments de politique contra-cyclique ? Nous sommes dans une période où les prêts sont très bas et, alors que les Etats de la zone euro ne disposent plus des instruments de la politique monétaire pour intervenir, que peut faire la CDC ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je partage les mêmes interrogations sur les orientations stratégiques majeures. Avec un groupe multiforme - peut-être un colosse aux pieds d'argile -, on ne les distingue pas bien.

En 2012, Dexia est responsable de pertes importantes. Est-ce terminé ? Quelles parts de ces pertes reviennent à l'Etat et à la CDC ?

Par ailleurs, je me permets une remarque de forme sur la présentation de vos comptes dans lesquels il me semble que vous avez omis de faire précéder le résultat net d'un signe « moins ».

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

On n'est pas habitués...

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je constate que la CDC et l'Agence des participations de l'Etat (APE) gèrent toutes les deux des participations dans des grandes entreprises. Quel est l'intérêt d'avoir deux structures ? N'aurait-on pas intérêt à tout regrouper ? Ce serait l'ébauche d'un fonds souverain. Mais peut-être chacun veut-il conserver son pré carré, ce qui serait stupide.

En outre, la BPI préfinance le CICE. Comment financez-vous cette ligne ? Comment serez-vous remboursés ?

J'ajoute que, s'agissant de la BPI, nous constatons des signes extérieurs dommageables. Notre capitalisme est organisé à l'image de l'organisation administrative de notre pays, c'est-à-dire que toutes les équipes sont regroupées à Paris. Ce n'est pas le cas en Allemagne. Je pensais que la BPI était plutôt construite sur ce dernier modèle. Or, voilà que les équipes déménagent du Val-de-Marne vers la capitale, dans des conditions financières qui soulèvent d'ailleurs des interrogations.

Le soutien des équipes régionales doit-il nécessairement être opéré depuis les quartiers centraux de Paris ? Ou bien l'idée de créer des équipes dans les grandes régions a-t-elle fait long feu ?

La véritable innovation de la BPI aurait été d'être au plus près du terrain dans les régions et ce n'est pas le cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Je suis également intéressé par le CICE. Quel est le taux d'évolution et vos perspectives ? On annonce toujours, dans tous les domaines, des milliards et des milliards... Finalement, on s'aperçoit que l'utilisation sur le terrain - la consommation des crédits - n'est pas toujours aussi aisée. Quels freins rencontrez-vous ?

Les responsables régionaux de la BPI semblent surtout préoccupés par l'idée d'atteindre des objectifs chiffrés, comme les préfets avec les emplois d'avenir.

Vous avez cité plusieurs participations préoccupantes : Dexia, France Telecom, Transdev, etc. Avez-vous des inquiétudes sur d'autres sujets ? Pensez-vous en avoir terminé avec le plus gros des problèmes ?

L'enveloppe de prêts de 20 milliards d'euros pourra être utilisée pour le numérique, les réseaux et les infrastructures. J'aimerais savoir si les consommations sont réelles. Y a-t-il des projets effectifs ? On s'aperçoit en effet que certaines subventions sont promises à ceux qui réalisent des projets et pourtant les financements arrivent plus tard.

Enfin, s'agissant de la variation des taux, disposez-vous d'étude d'impact ? On voit bien qu'une hausse des taux provoque un mouvement de collecte, parfois fort, qu'en est-il en sens inverse ? Quels sont les impacts de ces mouvements sur la consommation et l'investissement ? Si vous baissez les taux, peut-on espérer une forme de relance ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je voudrais évoquer le programme national de rénovation urbaine (PNRU). On est en voie d'achèvement du PNRU 1. Quel est le niveau de consommation des subventions et des prêts que vous avez accordés ?

On parle maintenant d'un PNRU 2, qui pourrait être doté de 5 milliards d'euros - contre 12 milliards pour le PNRU 1. L'effet de levier pourrait porter la somme totale du PNRU à 20 milliards d'euros.

Ceci étant dit, il y a fort peu de chance que l'Etat mette à disposition 5 milliards d'euros par le biais de crédits budgétaires. Que peut-on attendre de la Caisse des dépôts ? Est-elle susceptible d'apporter tout ou partie de cette somme ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Pour ma part, je m'interroge sur la position tenue par la CDC et le FSI dans le groupe Accor. N'y a-t-il pas eu, de votre part, une attitude aussi court-termiste que celle des fonds anglo-saxons qui se trouvaient également au capital ? In fine, on a abouti à une logique quasi-liquidative de ce groupe et à des perspectives inquiétantes alors que sa position de marché était plutôt bonne. A mon sens, ce n'est pas un bon exemple de gestion publique. Mais peut-être n'avez-vous pas été en mesure de contrarier une tendance déjà bien engagée ?

Votre branche immobilière s'est beaucoup développée. C'est une orientation extrêmement utile et féconde dans la palette d'activités de la CDC. Au demeurant, c'est assez conforme à l'histoire et vous retrouvez une des vocations d'origine de la Caisse des dépôts. Le développement d'Icade et l'opération brillante avec Silic renforcent l'intérêt juridique et fiscal du régime des sociétés d'investissement immobilier cotées (SIIC).

Désormais, la Caisse des dépôts contrôle un des intervenants principaux de ce secteur. J'aurais souhaité connaître les perspectives de développement en ce domaine, car les enjeux du marché immobilier professionnel sont très importants dans une phase, que l'on peut espérer être un jour une phase de reprise de l'économie.

Debut de section - Permalien
Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et des consignations

Sur Accor, nous étions contre la position qui a été prise, mais notre niveau de participation ne nous permettrait pas d'être décisionnaire ni sur le management, ni sur les orientations. Le FSI était opposé à la scission. Depuis, le FSI a engagé une politique de réduction de la ligne car nous avions bien conscience de la direction prise.

D'ailleurs, je reprends un instant mes anciennes fonctions, pour souligner que les problèmes de gouvernance ont conduit les groupes que vous avez mentionnés, dont l'un est anglo-saxon et l'autre pas, à disposer d'une majorité dans la gouvernance sans pour autant détenir la majorité des actions. Je reste à cet égard interrogatif sur l'évolution du système capitaliste français.

J'en viens maintenant à Icade et je répondrai à d'autres questions sur la stratégie. Certes nous avons des participations rigides mais cela ne doit pas nous dispenser de faire des arbitrages. Nous serons amenés à réaliser des arbitrages entre les actifs pour rendre une partie de nos positions plus liquides.

En tout état de cause, nous conserverons des intérêts dans ce secteur. La maîtrise du foncier est tellement importante qu'un acteur public doit rester présent, surtout dans le contexte du Grand Paris.

Pour répondre à Jean Germain, je vous trouve assez sévère avec nous. Avec le relèvement des plafonds des deux livrets, la collecte 2012 s'est élevée à 30 milliards d'euros. Le niveau des prêts, sur la même année, est lui aussi historique puisque nous avons signé pour 24 milliards d'euros de prêts, soit 2 milliards de plus qu'en 2011. L'encours de prêts a progressé de 14 milliards d'euros sur un an, soit la moitié de la collecte.

En outre, les ratios de couverture que vous mentionnez sont des minima : ce ne sont pas des cibles.

Nous n'avons pas toujours une concordance entre notre offre et la demande de prêts, notamment lors d'une année pré-municipales. En revanche, d'après nos prévisions, l'encours de prêts devrait s'accroître de 70 milliards d'euros sur cinq ans, compte tenu des besoins en logements sociaux, des 20 milliards d'euros de prêts aux collectivités territoriales et du prélèvement de 10 milliards d'euros que la BPI peut opérer sur le Fonds d'épargne. Et un niveau élevé de collecte reste nécessaire pour maintenir la liquidité du fonds.

Je vous confirme que nous achetons de la dette française et heureusement. Nous le faisons comme les autres investisseurs institutionnels, assureurs, banques et gestionnaires d'actifs.

S'agissant du caractère contra-cyclique de nos interventions, la Caisse des dépôts n'est pas immunisée face au cycle économique et boursier. Elle est sensible au niveau des marchés financiers et des taux d'intérêts. Vous avez raison, elle ne peut donc être totalement contra-cyclique. Elle s'efforce de ne pas avoir un comportement de court terme. Elle s'engage, comme l'a souligné le président de la commission de surveillance, sur le long terme. Nous nous efforçons de ne pas adopter un comportement trop pro-cyclique et nous maintenons nos efforts d'investissements et de prêts dans les périodes de crise.

Nous pouvons agir ainsi car les secteurs dans lesquels nous investissons sont peu sensibles à l'environnement international. Qu'il s'agisse du logement, des infrastructures, des universités, etc., c'est essentiellement de la demande intérieure. Je crois, pour ma part, que c'est l'ADN de la Caisse des dépôts et elle doit garder cette tradition d'investissement, y compris dans un contexte économique maussade.

En réponse à ce qu'a indiqué Francis Delattre, je voudrais être parfaitement clair. L'APE gère les participations de l'Etat les plus importantes. La CDC intervient dans le CAC 40 de manière très limitée. Nous faisons de la gestion de portefeuille. Je ne suis absolument pas favorable au rapprochement des deux entités.

Dans la situation actuelle, si nous n'avions pas une gestion de portefeuille active avec des rendements élevés, nous serions dans une situation très délicate. Ce qui nous permet de surmonter les difficultés cette année et les suivantes, c'est d'avoir une gestion optimale de notre portefeuille d'actions et d'obligations. Heureusement que nous avons des participations dans différentes entreprises, mais ce sont toujours des participations minoritaires. Dans le CAC 40, notre position la plus importante est dans Veolia, avec 9 % du capital. Et les dirigeants des entreprises préfèrent parfois avoir la CDC à leur capital plutôt que l'Etat. Nous sommes moins visibles, nous sommes engagés dans le long terme et, pour le dire clairement, notre rôle est plus neutre et notre gestion moins politique.

En ce qui concerne le CICE, nous faisons des avances et nous serons effectivement remboursés. Nous allons probablement faire moins durant le dernier trimestre car les entreprises vont attendre le 1er janvier et vont moins demander de préfinancement. Il est vrai que ce fut un succès important, y compris pour les autres intervenants bancaires.

Je vous trouve sévère sur le fait que la BPI ne soit pas régionalisée. Avec Nicolas Dufourcq, nous installons en ce moment toutes les agences régionales de Bpifrance. Les trois quart sont déjà en place. Très concrètement, 80 % des prêts seront régionalisés et, pour le financement en capital, les dossiers seront instruits au niveau régional jusqu'à 4 millions d'euros. De même, les aides à l'exportation et le soutien à l'innovation seront régionalisés. La visibilité régionale de Bpifrance sera donc très forte.

Enfin, je voudrais corriger un point sur les implantations immobilières de la BPI. Il n'y a pas du tout de déménagement depuis le Val-de-Marne vers Paris : les équipes d'Oséo restent dans l'immeuble qu'elles occupent aujourd'hui. Nous sommes installés dans un immeuble sis boulevard Haussmann, à Richelieu-Drouot - 30 mètres plus loin, nous étions situés boulevard Montmartre...

Debut de section - Permalien
Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et des consignations

On s'en rapproche !

Plus sérieusement, pour la partie investissement, il fallait regrouper les 300 personnes issues du FSI et de CDC Entreprises. La direction générale a estimé qu'il fallait les installer à Paris - et c'est ce que demandaient les syndicats de la CDC.

Pour répondre à Eric Doligé, s'agissant des participations stratégiques, nous avons fait un gros effort de provisionnement en 2012. A priori, nous n'avons pas de dépréciations significatives à effectuer sur nos participations. Les perspectives sur La Poste se sont toutefois dégradées et nous devons rester prudents, avec l'Etat, pour éviter qu'il y ait une diminution trop importante du dividende.

Les infrastructures seront un secteur d'intervention très essentiel pour la Caisse des dépôts, que ce soit dans l'énergie, les transports et la transition énergétique. Notre volonté est de rassembler les moyens dont nous disposons - ici à la CNP, ici au Fonds d'épargne, là à la Section générale - pour aller plus vite sur le terrain. Nos modes d'intervention doivent être plus lisibles.

S'agissant du numérique, les projets doivent être éligibles au Fonds pour la société numérique (FSN). Ce sont des projets lourds à mettre en oeuvre. Dans votre région, ils sont aussi financés par la Banque européenne d'investissement. Si le Fonds pour la société numérique approuve ces projets, nous les financerons immédiatement. Tout comme vous, la CDC souhaite qu'il y ait une lisibilité plus grande de l'action des pouvoirs publics en ce domaine.

En ce qui concerne les questions de Philippe Dallier, sur le PNRU 1, le volume des prêts sera de 16 milliards d'euros ; 4 milliards devraient encore s'y ajouter. En investissement, 600 millions d'euros ont déjà été consommés et 250 millions d'euros pour les subventions. En vue du PNRU 2, le Fonds d'épargne travaille avec l'Etat afin d'assurer le financement en prêts à des taux attractifs. Ces prêts devraient bénéficier au logement dans les quartiers et à la rénovation thermique. Il y a des discussions par ailleurs avec l'Etat pour assurer une continuité des moyens en fonds propres par rapport au décaissement effectif des années précédentes.

J'en termine avec la question de Vincent Delahaye sur Dexia. La CDC a provisionné à 100 % sa participation et nous n'avons donc plus d'exposition sur Dexia, qui est maintenant détenu quasi-intégralement par les Etats belge et français.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Je voudrais rebondir sur l'intervention de Jean Germain. La structure de la CDC comporte une ambiguïté. Au sein de l'établissement public, il y a le Fonds d'épargne, qui collecte les dépôts sur les livrets, et puis la Section générale.

Les sommes considérables que vous évoquez sont logées dans le Fonds d'épargne. Ce n'est pas l'argent de la Caisse des dépôts, mais bien celui des épargnants. S'il y a, aujourd'hui, sur-liquidité, c'est-à-dire une somme d'argent inemployée, c'est parce que la demande est faible. Et cet excédent d'épargne, le Fonds d'épargne n'a pas le droit de l'engager dans des projets.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Il serait possible de le restituer aux banques.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Oui, nous étudions la possibilité de le mettre à leur disposition pour qu'elles octroient des prêts aux entreprises ou à l'économie.

S'il y a sur-liquidité, c'est parce que la demande ne suit pas la croissance de la collecte. On ne refuse pas de prêts.

Debut de section - Permalien
Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

Par exemple, on n'a pas atteint encore le niveau de prêts attendu pour construire 150 000 logements sociaux.

Debut de section - Permalien
Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et des consignations

Pour aller dans le sens du président de la commission de surveillance, c'est un problème de court terme. On doit trouver un équilibre à long terme. Nous sommes engagés dans des discussions avec la direction générale du Trésor pour faciliter l'instruction des prêts.

Dans le projet de décret relatif à la mise à disposition d'une partie des ressources aux banques, il est prévu un retour rapide de ces sommes au Fonds d'épargne dès lors que ses emplois augmentent. C'est un dispositif temporaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

C'était le modèle de financement du Crédit immobilier de France...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La Caisse des dépôts reste un animal sui generis pour le meilleur comme pour le pire !

Il me reste à remercier le président de la commission de surveillance et le directeur général.

Puis la commission procède à un échange de vues dans la perspective de l'examen en séance publique du texte de la commission n° 739 (2012-2013) sur le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous avons convenu, la semaine dernière, de procéder à un échange de vues sur le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière sur lequel la commission des lois a été saisie au fond. L'objet de notre réunion est d'évoquer les principaux enjeux du texte et de passer en revue nos points d'accord et de désaccord.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Comme vous le savez, la commission des lois a adopté un texte lors de sa réunion de mercredi dernier et examinera, demain matin, les amendements en vue de la séance publique. Le texte ayant fait l'objet de l'engagement de la procédure accélérée, une éventuelle commission mixte paritaire pourrait être réunie dès la semaine prochaine, en vue d'une adoption définitive dans les derniers jours de cette session extraordinaire.

Pour commencer cet échange de vue, je vais d'abord présenter rapidement les grandes lignes du texte adopté par la commission des lois, avant d'évoquer quelques sujets portés par les amendements déposés en vue de la séance.

Le texte établi par la commission des lois vous a été distribué, ainsi que les amendements qui m'ont semblé relever du champ de compétence de notre commission. Je vous précise que la liasse d'amendements, ainsi que le dérouleur, ne constituent qu'une sélection, représentant un peu plus de la moitié des amendements déposés sur le texte, qui sont environ 150 : notre échange de vues a en effet vocation à rester dans le périmètre qui correspond au champ de compétence de la commission et ne pas s'étendre à des parties du texte, comme celle relative à la création du procureur de la République financier, qui soulèvent des questions très différentes et relèvent pleinement de la compétence de la commission des lois.

J'en viens au texte établi par la commission des lois, qui comporte 72 articles, soit 9 de plus que celui transmis par l'Assemblée nationale : le texte continue donc de croître avec l'intégration d'un certain nombre d'articles additionnels, dont ceux que nous avons adopté en commission des finances la semaine dernière. Il pourrait augmenter encore, puisque plus de 50 amendements déposés en vue de la séance publique portent articles additionnels.

La commission des lois a adopté 39 amendements, dont 19 de son rapporteur, Alain Anziani, et 10 des 12 amendements que nous avions proposés.

Le rapporteur de la commission des lois a notamment supprimé l'article 2 bis, considérant que celui-ci obligerait une personne soupçonnée de blanchiment d'apporter la preuve de l'origine licite de biens ou de revenus qu'elle détient, indépendamment de toute infraction sous-jacente, et que cette inversion de la preuve n'était pas acceptable à ses yeux.

Il a aussi supprimé l'article 11 sexies, qui proposait de faire passer de trois ans à six ans le délai de prescription du délit de fraude fiscale, compte tenu notamment de l'attachement de la commission des lois au maintien d'une certaine cohérence dans les régimes de prescription.

Dans le même esprit, la commission des lois a adopté un amendement du Gouvernement supprimant l'article 9 quater, qui tendait, en cas de dissimulation d'une infraction, à ne faire courir le délai de prescription de l'action publique qu'à compter du jour de sa découverte.

Surtout, la commission des lois a adopté deux amendements concernant des sujets importants et sur lesquels nos deux commissions ont des visions assez divergentes.

Tout d'abord, concernant la question de la recevabilité de la preuve, la commission des lois a souhaité revenir au texte initial du Gouvernement, c'est-à-dire de limiter la recevabilité des preuves illicites à celles transmises par la justice ou une autorité étrangère, et non dans le cadre de l'exercice, par l'administration fiscale, de son droit de communication. C'est un point important pour la portée de cette disposition, puisque le droit de communication de l'administration vise toutes les entreprises, les administrations et établissements publics, ou encore les organismes de sécurité sociale. Vous vous en souvenez, nous avons adopté, en commission des finances, un amendement élargissant la recevabilité à tout mode de preuve, de manière à permettre l'utilisation par l'administration fiscale de preuves apportées directement par un particulier, le cas échéant, comme cela a été le cas pour la liste HSBC. La commission des lois a adopté une position inverse à la nôtre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

N'était-ce pas la question des fichiers volés ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

C'est un autre problème. Du reste, le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Christian Eckert, a récemment produit un rapport qui souligne les obstacles juridiques auxquels a été confrontée l'administration fiscale pour exploiter cette liste, qu'elle ne pouvait pas opposer aux contribuables.

J'ai redéposé, comme la commission m'y avait autorisé, l'amendement qui était incompatible avec celui du rapporteur de la commission des lois, et note que notre président Philippe Marini propose en quelque sorte un amendement « de repli » : il revient au texte de l'Assemblée nationale et réintroduit donc les preuves issues de l'exercice du droit de communication par l'administration.

Sur le second amendement en débat, concernant le monopole de l'administration fiscale pour l'engagement des poursuites en matière de fraude fiscale, que d'aucuns qualifient de « verrou » de Bercy, la commission des lois a adopté un article additionnel tendant à prévoir une « brèche » dans ce principe, en permettant à l'autorité judiciaire d'engager des poursuites sans autorisation préalable, ceci lorsque les faits sont apparus à l'occasion d'une enquête ou d'une instruction portant sur d'autres faits ou bien lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou par le recours à diverses manoeuvres.

En outre, cet article ouvre la possibilité de transaction pénale, sous le contrôle du parquet, pour les faits de fraude fiscale commis dans ces circonstances.

Le rapporteur de la commission des lois, Alain Anziani, a considéré qu'il était « particulièrement regrettable que l'autorité judiciaire ne puisse avoir connaissance des faits de fraude fiscale complexe, notamment lorsqu'elle est commise par le recours à des montages sophistiqués ou à des structures implantées à l'étranger ». Il a en effet considéré, je cite, que « les faits de fraude fiscale commis en de telles circonstances peuvent souvent révéler d'autres infractions qui ne peuvent être poursuivies que par la voie pénale ».

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je comprends l'intention du rapporteur de la commission des lois. Cependant, ouvrir une brèche dans le monopole des poursuites pourrait s'avérer problématique pour les finances publiques, car l'action judiciaire est de nature à freiner le recouvrement de l'impôt éludé et l'application des pénalités fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Or, le dispositif actuel sanctionne de manière rapide et efficace les fraudeurs, avec des sanctions financières très dissuasives, tout en portant environ 1 000 affaires par an devant la justice, c'est-à-dire les délits les plus graves, après avis conforme de la commission des infractions fiscales (CIF). Je rappelle aussi que la justice peut déjà prendre l'initiative des poursuites dans les cas de blanchiment de fraude fiscale ; c'est ce qui s'est passé dans le cas de Jérôme Cahuzac.

Si l'article introduit par la commission des lois devait être voté, l'autorité judiciaire verrait son stock d'affaires augmenter substantiellement, sans qu'elle dispose ni des effectifs, ni de l'expertise nécessaire pour les traiter de manière satisfaisante. On peut donc craindre que le processus soit à la fois plus lent, moins efficient et moins efficace que le mode de fonctionnement actuel, qui a fait ses preuves.

J'ai constaté que quatre amendements, émanant d'auteurs appartenant à des groupes différents, tendaient à supprimer cet article : j'en ai déposé un, à titre personnel, de même que le président Philippe Marini et nos collègues Jacques Mézard et Vincent Delahaye.

Je précise qu'a contrario, plusieurs amendements proposent de supprimer de manière assez radicale le monopole des poursuites ; nous devrions donc avoir un beau débat en séance car il y aura la palette complète des positions.

J'en viens maintenant aux amendements déposés sur le texte. Deux d'entre eux sont des amendements que nous avions adoptés en commission : celui sur la preuve, que j'ai évoqué il y a quelques instants, et celui sur les obligations déclaratives des entreprises en matière de prix de transfert, qui a été rejeté par la commission des lois. Des doutes ont en effet été exprimés sur la pertinence du dispositif, ce qui a conduit à maintenir le texte de l'Assemblée nationale plutôt que de retenir notre rédaction que nous estimons pourtant meilleure. Nous aurons ce débat en séance, avec le choix de supprimer le dispositif ou d'améliorer celui voté par l'Assemblée nationale, étant entendu que son maintien en l'état ne paraît pas être une solution satisfaisante.

Il convient de noter que plusieurs autres amendements portent sur les prix de transfert, dont celui présenté par notre président Philippe Marini, issu de sa proposition de loi, qui a été rejoint par le groupe CRC. Il s'agit d'un sujet important pour lequel le Gouvernement a annoncé vouloir introduire des dispositions nouvelles dans le projet de loi de finances pour 2014, suite au rapport de l'Inspection générale des finances de ce printemps, rendu public en juin.

Le président Marini a également déposé un amendement tendant à renforcer l'efficacité de l'abus de droit en élargissant son champ aux montages ayant une finalité essentiellement - et non plus exclusivement - fiscale. Sur ce point aussi, une proximité de points de vue a été exprimée par le groupe CRC.

Parmi les autres sujets évoqués par les amendements que ceux déjà mentionnés, je vous propose de sélectionner quelques thèmes de manière à susciter les échanges au sein de la commission.

De nombreux amendements portent sur l'article 3, qui vise à élargir les circonstances aggravantes de la fraude fiscale et à alourdir les sanctions applicables. Ces amendements visent généralement à étendre encore le champ de ces circonstances aggravantes et les sanctions, même si, en pratique, un certain nombre d'entre eux sont satisfaits.

Plusieurs amendements tendent à créer un délit d'incitation à la fraude fiscale. La nécessité de cette création paraît difficile à établir de manière certaine, mais celle de réprimer ceux qui font profession de la fraude fiscale, et non de l'optimisation comme on le dit avec retenue, ne pose en revanche guère question.

Plusieurs amendements entendent allonger les délais de prescription, ce qui va à l'encontre de la position de la commission des lois, ou, dans le même esprit, suppriment la possibilité pour l'administration fiscale de transiger. Plusieurs amendements renforcent les obligations déclaratives des entreprises. Enfin, des amendements concernent la mise en place - probablement prématurée compte tenu de ce qui nous a été indiqué il y a peu en commission - d'une législation de type « FATCA » ou portent sur la liste des états et territoires non coopératifs.

Pour conclure, je rappelle qu'il est indispensable de proportionner les obligations déclaratives à leur utilité en termes de contrôle et donc, de rendement. Il en va de même des amendements concernant tant les durées de prescription que les sanctions : il faut bien entendu que les dispositions soient dissuasives mais aussi qu'elles restent proportionnées à la nature du délit. Enfin, quels que soient les votes en séance, il me semble que ce texte permettra à l'administration fiscale d'être mieux armée pour déceler et sanctionner les fraudes, en particulier les plus complexes. C'est un motif de satisfaction. En effet, nos concitoyens, qui sont parfois l'objet de « tracasseries » administratives, ont du mal à comprendre que l'Etat puisse être impuissant face à des fraudes de grande ampleur, parce qu'elles font l'objet de montages complexes et astucieux.

Je vous ai donc rendu compte des positions tranchées sur les questions du monopole et de la licéité des preuves.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je voudrais apporter des précisions sur la question des fichiers communiqués aux fins de poursuites. La Cour de cassation interdit toute poursuite dès lors que les éléments de preuve auraient été volés et non achetés. Dans ce dernier cas, il ne doit pas y avoir de problème. Mais je vous mets en garde ici sur l'inconstitutionnalité qui ne manquera pas d'être soulevée à l'encontre de la prise en compte de fichiers dérobés.

Ensuite, je m'élève contre la suppression de l'article 2 ter qui prévoit d'atténuer le monopole exercé par l'administration fiscale en matière de saisie de l'action publique pour des faits de fraude fiscale. Ceci remettrait en cause l'efficacité des groupements interrégionaux (GIR) dans la lutte contre l'économie souterraine. Je rappelle que cette levée partielle du « verrou de Bercy » prévoit la possibilité d'engager des poursuites judiciaires à deux conditions : d'une part, lorsque les faits sont apparus à l'occasion d'une enquête portant sur d'autres faits, je pense notamment au trafic de stupéfiants ; d'autre part, lorsque les faits ont été commis en bande organisée.

Ces cas me semblent suffisamment encadrés et supprimer l'article 2 ter reviendrait à empêcher le recours aux GIR dont je salue l'efficacité. Je suis d'autant moins défavorable à l'ébrèchement du monopole de l'administration fiscale dans le déclenchement des poursuites que, comme vous le savez, les GIR font également intervenir des inspecteurs des impôts et des douanes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

La commission des lois aborde ce projet de loi avec son propre point de vue, ce qui est d'ailleurs bien normal, c'est-à-dire avec comme première optique de défendre des principes civilistes et les droits individuels.

L'autonomie de la loi fiscale s'intègre mal dans un tel schéma. Pourtant, le domaine fiscal n'est pas le domaine civil : le domicile fiscal n'est pas le domicile civil, l'administration fiscale peut être amenée à taxer des activités illégales, etc.

Or dans un cadre médiatique souvent simplificateur, nos concitoyens peuvent ne pas bien saisir cette différence d'approche, néanmoins bien réelle.

S'agissant de l'article 2 ter, sa suppression ne supprimerait pas les GIR. Actuellement, ces groupements font montre de leur efficacité dans le cadre d'une législation accordant une certaine primauté à l'administration fiscale.

A mes yeux, le vrai sujet est que le droit fiscal est exorbitant du droit commun. Or le rapporteur de la commission des lois aborde ce texte avec des yeux d'un avocat civiliste, qui a le sentiment de défendre un peu plus la personne humaine à travers ses propositions. De plus, dans la période actuelle, certains de nos collègues « sortent une kalachnikov » dès qu'on prononce les mots « fraude fiscale ». Prenons garde, toutefois, à ne pas nous lancer dans le « concours Lépine » de la fiscalité et contre la fraude fiscale car nos concitoyens sont, eux, à fleur de peau dès que l'on parle d'impôt.

La commission des finances doit donc faire preuve de pédagogie afin d'expliquer la logique du droit fiscal, y compris sur la question des transactions : la fiscalité n'est pas qu'affaire de morale, mais aussi de rendement...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je crois, en effet, qu'il faut être prudent car confier certaines expertises à l'autorité judiciaire reviendrait à prendre un risque majeur. La justice n'en a tout simplement pas les moyens, l'expertise se trouvant objectivement au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP) qui doit évaluer et, dans certains cas, trouver un compromis avec le contribuable.

Par ailleurs, je réclame le soutien de la commission sur un amendement que j'ai déposé visant à lutter contre une dérive de la grande distribution. Afin de lutter contre les règles en vigueur sur les marges arrière, ces groupes ont établi des officines à l'étranger pour prélever des redevances calculées en fonction du chiffre d'affaires. Ainsi les fournisseurs établis en France qui livrent ces groupes doivent payer des ristournes à ces entités. Ces pratiques me paraissant contestables, j'ai déposé un amendement aux termes duquel les revenus correspondants doivent être déclarés et soumis à l'impôt en France.

Il faut sortir de l'omerta sur ce sujet, les enseignes profitant de leur position dominante.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le rapporteur général, savez-vous quel accueil le Gouvernement réservera à cette initiative que la plupart d'entre nous devraient soutenir ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je soutiendrai la proposition de Jean Arthuis, le Gouvernement devant peut-être s'exprimer quant à sa faisabilité technique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Mettons ce texte, peut-être imparfait en l'état, dans la navette !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Cela pourrait constituer de la « monnaie de commission mixte paritaire (CMP) »...

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je souhaiterais apporter une précision sur la question des listes, qu'a abordée Francis Delattre. Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, Christian Eckert, a publié récemment un rapport sur l'exploitation du fichier communément appelé « liste HSBC ». Il montre bien que l'administration fiscale peut se trouver désarmée face à certains contribuables ayant des comptes à l'étranger. Or quand l'Allemagne achète des listes, elle traite bien avec des gens qui les ont dérobées. Le transit par la justice ou une autorité nationale peut les « blanchir ». Mais le réalisme devrait nous commander de pouvoir traiter avec des personnes comme l'ex-informaticien de HSBC Hervé Falciani.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Vous risquez de vous heurter à la jurisprudence de la Cour de cassation !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Un problème de constitutionnalité pourrait aussi survenir. Cela étant, mon principal souci demeure votre amendement de suppression de l'article 2 ter du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je vous assure que cette suppression n'altérerait en rien les moyens d'action actuels des GIR, à laquelle vous êtes légitimement attaché.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Ne nous méprenons pas ! Quand on saisit une bande dans un quartier, l'affaire est complexe. On ne saurait retirer le volet fiscal du dossier car les dealers craignent l'amende davantage que la prison. La presse en rend bien compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous sommes d'accord sur l'intention mais pas sur l'interprétation de l'article 2 ter. En conscience, la suppression de l'article 2 ter, qui vise à sauvegarder l'autonomie du droit fiscal et celle des poursuites fiscales, ne retirerait rien - peut-être même au contraire - à l'efficacité de ces actions répressives.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Les intéressés devraient donc discuter avec l'administration fiscale depuis leur prison ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous proposons de ne pas faire évoluer le droit existant donc, par définition, de conserver le statu quo.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

En tout cas, ne cassons pas des instruments efficaces !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L'un des griefs de la commission des lois au droit actuel, qui a motivé l'insertion de cet article, est le manque de transparence des pratiques de l'administration fiscale s'agissant des transactions, des remises, etc. Pour couper court à cette critique, il est proposé de maintenir l'autonomie du droit fiscal tout en levant cette opacité au moyen de la remise au Parlement d'un rapport annuel de la commission des infractions fiscales et d'un autre sur la politique de remise et de transactions. Ces deux rapports pourront d'ailleurs donner lieu chaque année à un débat au sein de notre commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Merci au rapporteur général ainsi qu'à vous, mes chers collègues. Le débat en séance publique s'annonce riche.