Déposé le 25 mars 2015 par : M. Commeinhes.
Supprimer cet article.
Selon l’article L.334-1 du Code de l’Environnement, 88 000 km2 de zones côtières sont classées « aire marine protégée » en métropole et 240 690 km² en tenant compte des territoires ultramarins. Cela représente 23, 6% du littoral métropolitain et plus de 50% du littoral corse. En ajoutant à cela l’objectif gouvernemental de créer 10 parcs naturels marins à l’horizon 2020, une part de plus en plus importante du littoral risque d’entrer à terme dans le champ de la taxe.
Le dispositif envisagé est directement comparable à la taxe qui avait été instaurée en mai 2006 sur l’ensemble du littoral sarde pour les navires de plaisance supérieurs à 14 mètres faisant escale ou mouillant entre le 1er juin et le 30 septembre.
Or, cette taxe a été supprimée en mai 2009 en raison de ses conséquences désastreuses sur la fréquentation des côtes sardes (-42% du nombre d’escales dès l’année 2006) et sur les économies littorales.
En outre, dans un arrêt (C-169/08) du 17 novembre 2009, la Cour de justice des Communautés européennes a considéré que la taxe sarde enfreignait le droit communautaire et était contraire au principe de la libre prestation des services.
Le dispositif envisagé par l’amendement concernerait une très grande majorité des 512 000 plaisanciers français dont 90% possèdent des bateaux de moins de 8 mètres. Contrairement à certaines idées reçues, la plaisance reste un loisir populaire et familial qui touche toutes les catégories socio-professionnelles (cf. Répartition des immatriculations par CSP - DAM).
Même si le nouvel amendement prend soin de dissimuler le montant de la taxe en renvoyant son établissement au décret d’application, le niveau de taxation envisagé est tel qu’aucun plaisancier ne prendra plus le risque (fiscal) de jeter l’ancre dans les zones concernées.
Rappelons que dans le premier amendement, le gouvernement annonçait une taxe de 20 euros par mètre de longueur de coque et par jour, soit à 100 euros par mouillage et par jour pour un petit bateau à moteur de 5 mètres, 300 euros pour un voilier de 15 mètres…
Si cette proposition, contraire aux engagements du Président de la République de ne pas créer de nouvelles taxes, devait aboutir, elle reviendrait à faire supporter aux plaisanciers le coût d’une mission d’intérêt général (la protection du littoral), alors même que ces derniers financent déjà aujourd’hui chaque année à travers le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) le Conservatoire du Littoral à hauteur de 37 millions d’euros.
En outre, le projet de taxe remet en cause le principe de la gratuité applicable aux domaines publics naturels sans aucune contrepartie en termes de services (pontons, corps morts, collecte des déchets des bateaux, etc.) ni critères de zonage autres que le classement en AMP.
Bien que l’amendement parle de redevance, il s’agit en réalité bel et bien d’un nouvel impôt imposé aux plaisanciers.
Derrière le traitement ponctuel d’un cas corse avance masquée la perspective de faire financer les coûts des aires marines protégées par les plaisanciers au moment où l’Etat envisage de se désengager. Il n’est sans doute pas anodin que le Président du Conseil Exécutif de Corse, Monsieur Paul Giacobbi, avocat de la taxe corse, soit en même temps Président du Conseil d’Administration de l’Agence créée par l’Etat en 2006 pour animer et gérer les aires marines protégées.
Son application porterait un coup sévère à la pratique de la plaisance sur le littoral national et aurait des conséquences dramatiques sur l’ensemble de la filière nautique française, ses 4 915 entreprises, ses 415 ports de plaisance et ses 40 326 emplois directs. Ceci au moment où cette filière se relève difficilement d’une crise profonde, marquée par la baisse de 50% des ventes de bateaux neufs en France.
Avec 10 emplois indirects pour 1 emploi direct, la plaisance représente un poids économique considérable pour l’ensemble des collectivités littorales. En dissuadant fiscalement les plaisanciers français de pratiquer leur loisir et en éloignant les plaisanciers étrangers des côtes françaises, la mesure envisagée impacterait lourdement l’hôtellerie traditionnelle et de plein air, la restauration, le commerce et les services. Pour les collectivités, le manque à gagner serait sans commune mesure avec les hypothétiques recettes fiscales attendues.
C’est l’attractivité même du littoral français qui est menacée au moment où l’Italie et l’Espagne prennent des mesures fiscales incitatives pour attirer les plaisanciers étrangers sur leurs côtes.
Le recouvrement de la taxe et les opérations de contrôle seraient d’une complexité telle qu’ils nécessiteraient des moyens importants dont les coûts absorberaient une part significative de la recette fiscale. Cette perspective est en contradiction totale avec la volonté annoncée du gouvernement de moderniser, simplifier et optimiser la rentabilité des dispositifs fiscaux.
Par cet impôt, la conséquence induite est de faire supporter aux plaisanciers le coût d’une mission d’intérêt général (la protection du littoral), alors même que ces derniers financent déjà, chaque année le Conservatoire du littoralà hauteur de 37 millions d’Euros.
Il est bien compréhensible que les Aires marines protégéesrestent protégées et que le Conservatoire du littoraldispose de moyens à la hauteur de sa tâche. Personne ne le discutera. Par contre, le financement ne peut provenir de dispositions arbitraires, incompatibles avec la réalité (organisationnelle et pratique) du terrain.
Pour ces raisons, il convient de supprimer cet article.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.