Déposé le 6 février 2018 par : M. Montaugé, Mme Sylvie Robert, M. Kanner, Mme Artigalas, MM. Martial Bourquin, Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis, Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Joël Bigot, Mmes Préville, Lubin, MM. Bérit-Débat, Carcenac, Daudigny, Devinaz, Mmes Espagnac, Grelet-Certenais, Harribey, M. Patrice Joly, Mme Lienemann, M. Madrelle, Mmes Meunier, Perol-Dumont, M. Roux, Mmes Taillé-Polian, Tocqueville, MM. Vaugrenard, Kerrouche, Antiste, Mme Conway-Mouret, les membres du groupe socialiste, républicain.
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le gouvernement remet un rapport au Parlement sur la manière de valoriser et de garantir dans l’enseignement supérieur et la recherche, la richesse que constitue la diversité des écoles de pensée en économie, notamment par la création d’une nouvelle section du Conseil national des universités qualifiée d’ « Économie, société et territoire » et la création d’une nouvelle section du Conseil national de la recherche scientifique qualifiée d’ « Économie et société ».
Depuis plusieurs années de nombreux universitaires se sont inquiétés de la disparition du pluralisme en économie. Aujourd’hui, la situation serait devenue critique au point que« le maintien d’un minimum de pluralisme intellectuel dans l’enseignement supérieur et la recherche en économie » serait remis en cause[1].
L’actuel mode de recrutement des professeurs ou des directeurs de recherche est tel qu’il marginalise les économistes qui ne s’inscrivent pas dans le cadre de la pensée économique dominante.
Or, la tradition hétérodoxe française riche en diversité a toujours participé dans ce domaine au rayonnement international de la France. Certains de ses représentants avaient anticipé la crise financière de 2007-2008. Et force est de souligner qu’aujourd’hui, face à l’incapacité pour la théorie dominante d’envisager la possibilité de crises financières, certains de ses adeptes et non des moindres réclament « une réévaluation majeure de la pensée et des politiques macroéconomiques »[2].
La disparition du pluralisme en économie se traduit également par un appauvrissement de l’enseignement de l’économie à l’université. L’offre universitaire en économie de moins en moins diversifiée ne répond plus aux attentes des étudiants qui réclament de façon récurrente un enseignement ancré sur l’analyse du monde réel et des enjeux économiques et sociaux actuels[3]. En 2001, ces revendications ont débouché sur le rapport de Jean-Paul Fitoussi : L’enseignement supérieur des sciences économiques en question[4]. Ce rapport considérait que l’aspect formation par l’économie devait être privilégié en premier cycle et que l’enseignement « devait être incarné dans les faits, les politiques, l’histoire et les débats de société ». D’autres rapports avaient déjà abouti à de telles conclusions, et en juin 2014, le rapport[5]de Paul-Cyril Hautcoeur reconnaissait nécessaire « de proposer aux étudiants de premier cycle une formation pluridisciplinaire, avec spécialisation progressive, et plus tournée vers la compréhension des faits et des institutions économiques ».
Pour autant, force est de constater que ces débats et ces rapports n’ont pas débouché sur la mise en œuvre de mesures concrètes permettant d’enrayer le processus de marginalisation de l’hétérodoxie à l’université et dans les laboratoires de recherche.
Aujourd’hui, la domination d’une pensée dominante en économie se traduit de fait par un tarissement des financements de la recherche sur certains territoires avec une concentration des flux financiers vers les universités et laboratoires « mainstream», conduisant à de fortes inégalités territoriales, particulièrement pénalisantes pour ces universités et laboratoires de recherche, généralement constituées de petites et moyennes structures.
Pour toutes ces raisons, de nombreux universitaires proposent la création d’une nouvelle section du Conseil national des universités qualifiée « d’Économie, société et territoire » afin de valoriser les perspectives pluridisciplinaires et institutionnalistes sur l’économie. Ces économistes proposent également de créer une nouvelle section « Économie et sociétés » au sein du CNRS pour favoriser le pluralisme et la pluridisciplinarité de la recherche en économie.
Cette solution peu coûteuse permettrait de préserver la diversité des écoles de pensée en économie au sein même de l’université, lieu a priori par excellence du pluralisme de la recherche et de l’enseignement.
[1]Cf. Philippe Batifoulier, Bernard Chavance, Olivier Favereau, et alii, A quoi servent les économistes s’ils disent tous la même chose ? Manifeste pour une économie pluraliste, Éditions les liens qui libèrent, février 2015.
[2]Cf. Olivier Blanchard et Lawrence Summers, Rethinking Stabilization Policy, Peterson Institute for Internationnal Economics, octobre 2017.
[3]Les mouvements étudiants post-autisme et PEPS (Pour un Enseignement dans le Supérieur en économie sont partis des écoles normales supérieures et ont gagné les universités ; cf. « Lettre ouverte des étudiants en économie », Le monde, juin 2000 ; cette tribune a été suivie d’un manifeste pour une réforme de l’enseignement en économie.
[4]Rapport remis au ministre de l’Éducation nationale, Fayard 2001.
[5]L’avenir des sciences économiques à l’Université en France, Rapport à Monsieur le ministre de l'Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et à Madame la secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur et à la Recherche, juin 2014.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
Déclaré irrecevable au titre de l'article 45, alinéa 1, de la Constitution par la commission saisie au fond
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