Déposé le 21 octobre 2022 par : MM. Pellevat, Calvet, Tabarot, Mme Marie Mercier, M. Chasseing, Mme Lassarade, MM. Charon, Burgoa, Mme Demas, MM. Cambon, Guerriau, Sol, Mme Goy-Chavent, MM. Laménie, Longeot, Anglars, Mmes Joseph, Borchio Fontimp, Jacquemet.
Alinéa 2
Après le mot :
démissionné
insérer les mots :
et avoir rompu abusivement son contrat au sens des articles L. 1237-2 et L. 1243-3
Trop souvent, des entreprises sont lourdement impactées par des abandons de postes, puisqu’elles se retrouvent du jour au lendemain sans employé et n’ont pas pu prévoir son remplacement.
Considérer un salarié comme démissionnaire est assurément une avancée pour dissuader les salariés d’avoir recours à cette pratique, mais, toujours dans l’optique de dissuader les salariés d’abandonner leurs postes, il serait utile de prévoir qu’un abandon de poste est présumé constitutif d’une rupture abusive du contrat, qui ouvre donc droit à des dommages et intérêts pour l’employeur.
L’article L1237-2 du code du travail prévoit d’ores et déjà qu’une rupture abusive d’un contrat de travail à durée indéterminée à l’initiative du salarié peut ouvrir droit à des dommages et intérêts pour l’employeur. Pour ce faire, l’employeur doit d’abord passer par une procédure de conciliation auprès du juge, qui devra chercher à trouver un accord entre l’employeur et le salarié, ce qui permet d’éviter un engorgement des conseils prudhommaux. De même, une rupture d’un contrat à durée déterminée à l’initiative d’un salarié peut être considérée abusive et ouvrir droit à des dommages et intérêts pour l’employeur au titre de l’article L 1243-3 du code du travail lorsqu’elle ne rentre pas dans les motifs de rupture anticipée prévus à l’article L 1243-2.
Cependant, la jurisprudence de la Cour de cassation limite les cas dans lesquels la rupture peut être considérée comme abusive et exige cumulativement une intention de nuire de la part de l’employé ou un abus de droit ; une cessation brutale de l’activité de la part du salarié ; que la rupture engendre des dysfonctionnements dans l’entreprise et
que l’entreprise subisse un préjudice. Il revient à l'entreprise de prouver que ces conditions sont remplies. Or, un abandon de poste est par nature brutal, l’employé arrêtant du jour au lendemain de venir sur son lieu de travail, le plus souvent sans même prévenir son employeur. Que l’employeur ait à prouver cette cessation brutale de l’activité semble donc plutôt absurde. Pareillement, cette cessation brutale d’activité a forcément un impact sur l’entreprise, puisqu’elle n’est pas prévenue en amont de l’absence de son salarié et ne peut donc pas organiser son remplacement par un nouveau recrutement, ni avoir le temps de former correctement cette nouvelle recrue. De même, elle ne peut pas adapter ses plannings en amont pour remplacer son salarié par un employé qui est déjà dans l’entreprise puisqu’elle n’est pas prévenue de son absence.
L’idée de l’amendement est donc de renverser la charge de la preuve, qui incombe désormais au salarié, et qui devra prouver que son départ n’était pas abusif et/ou n’a pas impacté l’entreprise. Cela dans le but de faciliter la démarche dans l’employeur, ces derniers ayant souvent peur de s’engager dans une démarche juridique longue et coûteuse lorsqu’il existe un risque de perdre, qui est en l’espèce important du fait des critères très restrictifs appliqués en jurisprudence.
Il s’agit également d’une question de principe et de dissuasion. Abandonner son poste n’est pas une manière de faire acceptable, l’employé pouvant démissionner et même demander une dispense de préavis, ou encore demander une rupture conventionnelle. Il faut donc mieux sanctionner ce type de comportement. En outre, savoir que leur employeur pourra plus facilement obtenir des dommages et intérêts dissuaderait davantage les salariés d’avoir recours à cette pratique délétère.
Il restera toutefois nécessaire que l'employeur saisisse le conseil des prudhommes, et les dommages et intérêts ne sont pas automatiquement attribués à l’employeur en cas d’abandon de poste. Si celui-ci ne souhaite pas en demander, le salarié ne sera pas tenu de les verser, et ce dernier peut toujours apporter des preuves que son abandon n’a pas nuit à l’entreprise lors de la procédure.
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