Déposé le 12 décembre 2022 par : Mme Berthet, M. Babary, Mme Blatrix Contat, M. Le Nay, Mme Billon, MM. Bouchet, Canévet, Capus, Chasseing, Chatillon, Mme Chauvin, MM. Daniel Laurent, Devinaz, Duffourg, Hingray, Mandelli, Moga, Rietmann.
Supprimer cet article.
La transposition de la directive « CSRD » doit être effectuée par le Parlement et non par voie d’ordonnance.
« Cette directive est un élément essentiel à l'atteinte des objectifs de transition vers une économie durable de l'Union européenne » estime l’exposé des motifs du projet de loi.
Il n’existe donc aucune raison objective de soustraire la transposition d’une telle directive à la procédure législative ordinaire. Celle-ci a en effet été préparée par un important travail d’information préalable engagé par la Délégation aux entreprises du Sénat, dans un premier temps consacré à la responsabilité sociétale des entreprises (« Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) : une exemplarité à mieux encourager », rapport d'information de Mme Élisabeth LAMURE et M. Jacques LE NAY, n° 572 (2019-2020) du 25 juin 2020) et dans un second temps, consacré en grande partie aux enjeux, pour les entreprises, de la directive CSRD (rapport de la Délégation aux entreprises du Sénat : « Faire de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) une ambition et un atout pour nos entreprises », rapport d'information de M. Jacques LE NAY et de Mmes Martine BERTHET et Florence BLATRIX-CONTAT, n° 89 (2022-2023) du 27 octobre 2022).
L’étude d’impact du projet de loi rejoint les conclusions du rapport précité du Sénat lorsqu’elle souligne qu’actuellement « le corpus français relatif à la publication d'informations extra-financières pour les sociétés commerciales se compose d'une accumulation de dispositifs disparates, pensés séparément et sans réelle cohérence entre eux. Il s'agit notamment des dispositions relatives au rapport de gestion, au rapport sur le gouvernement d'entreprise, aux obligations RSE des organes de gouvernance. Pour la plupart issus du droit européen, ces dispositifs recourent à des seuils, des définitions, des obligations et des sanctions différentes alors qu'ils poursuivent un objectif commun : améliorer le comportement de l'entreprise en matière environnementale, sociale ou de gouvernance d'entreprise. Ce manque d'articulation entre les différents dispositifs apparaît ainsi doublement préjudiciable : d'abord pour les entreprises assujetties, en entrainant un manque de lisibilité, des coûts administratifs importants et une perte d'efficacité économique ; ensuite pour les personnes bénéficiaires de ces dispositifs qui y voient un manque de lisibilité et in fine une difficulté à appréhender les risques liés aux dimensions non financières de l'activité de l'entreprise ».
Il rejoint également les conclusions du rapport de la Délégation aux entreprises en actant que l'accès à l'information sera facilité, pour les entreprises financières, concernant les données des sociétés européennes, « en particulier grâce à la digitalisation prévue par la directive qui permettra à l'avenir la construction d'une base de données publique européenne », le rapport sénatorial ayant plaidé pour confier à l'Autorité européenne des marchés financiers l'évaluation publique de l'information ESG.
Toutefois, l’impact de ces nouvelles obligations pour les entreprises et singulièrement les PME et même certaines ETI n’est pas suffisamment étudié, l’étude d’impact se contentant de constater que « Les dispositions qui en seront issues, conduiront les entreprises à fournir davantage de données dans le cadre de l'exercice de transparence imposé par la directive, et faire certifier les informations par un tiers indépendant. Cet exercice s'élargira aussi à de nouvelles entreprises ».
La directive CSRD multiplie en effet par cinq le nombre des grandes entreprises concernées en Europe, mais impactera également indirectement ETI et PME situées dans leur chaîne de valeur. Elle accroît la quantité d'informations à publier, qui devront être certifiées par un tiers indépendant, autour du concept de double matérialité, que l’Union européenne défend lors de négociations internationales pour définir un standard commun.
Il manque une évaluation du coût financier et organisationnel précis, par catégorie d’entreprises, des informations extra-financières qui seront demandées. Ces éléments auraient pu être obtenus dans le cadre de la procédure législative ordinaire. Ils ne seront pas connus avec une transposition de la directive par ordonnance.
Il faudra par ailleurs :
- accompagner les ETI et PME par une simplification des normes de reporting extra-financier et une approche sectorielle différenciée ;
- appliquer progressivement les nouveaux référentiels RSE dans les ETI et PME après avoir réalisé un test d'opérationnalité par un tiers indépendant ;
- assurer un traitement identique de reporting extra-financier pour les entreprises non européennes ;
- poursuivre les efforts d'harmonisation des standards par catégorie d'entreprises en promouvant le concept de double matérialité, financière et extra-financière.
Le législateur doit pouvoir s’assurer de la prise en compte de ces garanties dans la transposition, ce que pourrait permettre un projet de loi de transposition, alors que le choix de l’ordonnance reviendrait à signer un « chèque en blanc ». Il s’agit d’un sujet stratégique majeur pour l’avenir de nos entreprises, relevant de la responsabilité du Parlement.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.