La réunion est ouverte à 14 h 05.
Nous entamons aujourd'hui une semaine particulièrement chargée pour notre mission d'information, avec plus d'une dizaine d'auditions.
Je suis heureux d'accueillir les représentants de la Fédération française des télécoms, la FFT : MM. Jean-Marie Le Guen, directeur délégué aux contenus, et Alexandre Galdin, responsable des études économiques et des affaires parlementaires. Je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation.
Je vous prie d'excuser l'absence du président de la mission commune d'information, M. Jean-François Longeot, qui aura quelques minutes de retard.
La FFT comprend trois des quatre opérateurs de téléphonie mobile : Bouygues, Orange et SFR.
Je vous rappelle que notre mission d'information, créée à la demande du groupe écologiste, porte sur l'inventaire et le devenir des matériaux et composants des téléphones mobiles. Nous avons commencé nos travaux au tout début du mois de juillet et nous les achèverons à la fin du mois de septembre.
Il nous a paru indispensable d'auditionner les opérateurs de téléphonie mobile et nous sommes donc impatients de vous entendre et de vous interroger, avant d'entendre les fabricants, les éco-organismes ou encore les professionnels de la gestion des déchets ; c'est tout le cycle de vie des téléphones portables que nous souhaitons ainsi analyser.
Je vais donc vous laisser la parole, avant que Mme la rapporteure puis les membres de la mission ne vous interrogent.
Nous sommes très heureux de pouvoir nous exprimer devant le Sénat. Je vous prie d'excuser l'absence du directeur général de la FFT, M. Michel Combot, qui est en déplacement aujourd'hui.
Peut-être vous demandez-vous pourquoi c'est la Fédération, et non les opérateurs qui en sont membres, qui s'exprime. Nos adhérents partagent depuis le début des années 2000 les mêmes pratiques sur les questions environnementales et sociétales. Elles ont été initialement mises en oeuvre au sein de l'Association française des opérateurs mobiles, l'AFOM, qui ne regroupait que les opérateurs de téléphonie mobile. L'AFOM ayant rejoint la Fédération française des télécoms, qui ne s'occupait que de téléphonie fixe et d'internet, ce sujet est donc maintenant traité à l'échelon de la FFT.
Pourquoi la Fédération se charge-t-elle de ce sujet ? Parce qu'il s'agit pour ses membres non pas d'une question de nature concurrentielle, mais d'une question d'intérêt commun. Ils ont tous le souci de leur responsabilité sociale et environnementale et sont tous confrontés aux mêmes problèmes de la gestion du cycle de vie des téléphones mobiles, dont ils sont des distributeurs importants. En effet, je le rappelle, les opérateurs vendent 46 % des téléphones mobiles mis sur le marché.
Quelles ont été concrètement les actions de la FFT en ce sens ? Elle a créé en 2008 une commission sur le développement durable qui faisait suite au groupe de travail sur le recyclage de l'AFOM. Elle a lancé en 2012 une campagne nationale de communication, avec notamment la création du site spécialisé « Rapporter son mobile », toujours en service. Surtout, la Fédération a signé en 2010 avec le ministre de l'écologie une charte d'engagement volontaire des opérateurs, bien avant que des directives européennes interviennent en la matière.
On estime qu'à peu près 20 millions à 25 millions de téléphones mobiles sont vendus chaque année en France. Il s'en est vendu 24,6 millions en 2015, avec 84 % de smartphones, ou « ordiphones », comme l'on dit maintenant. La part des ordiphones augmente parmi les ventes de mobiles, remplaçant au fur et à mesure les téléphones mobiles classiques. Si l'on rapporte ces chiffres de ventes aux 72 millions de lignes mobiles recensées en 2015 par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'ARCEP, on peut en déduire un taux de renouvellement triennal ; on remplace en moyenne son téléphone tous les trois ans.
Les opérateurs peuvent avoir de leur côté des chiffres légèrement différents, car leur marché n'est pas tout à fait le même. En effet, les opérateurs ne vendent que la moitié des téléphones et nombre de leurs clients sont subventionnés. Cela étant dit, le subventionnement est de moins en moins important ; ainsi, selon l'ARCEP, plus de 60 % des 58 millions de forfaits étaient libres d'engagement au premier trimestre 2016.
Cette évolution globale du marché a un impact positif sur le réemploi des mobiles dans la mesure où les clients qui souscrivent à une offre avec carte SIM seule et qui achètent par ailleurs un téléphone nu auront plus tendance à réutiliser leur téléphone que les clients subventionnés. On observe donc une tendance à l'allongement de la durée de vie des téléphones mobiles, du fait même de l'évolution des pratiques des consommateurs.
Abordons maintenant la responsabilité environnementale des opérateurs, commune à l'ensemble des membres de la FFT. Tous nos adhérents procèdent à un affichage environnemental sur les mobiles qu'ils commercialisent, que ce soit en ligne ou dans les espaces de vente, avec des notes de comportement environnemental tenant compte de plusieurs critères - quantité consommée de ressources non renouvelables, quantité d'eau utilisée ou encore impact sur l'effet de serre. Conformément à la loi, tous les opérateurs adhèrent à un éco-organisme agréé par l'État pour la collecte et le traitement des équipements électriques et électroniques, ou EEE. Il s'agit en l'occurrence d'Éco-systèmes.
Quand ils sont considérés comme producteurs et non comme distributeurs, les opérateurs versent directement à ces organismes l'éco-participation relative à chaque équipement mis sur le marché. D'ailleurs, tandis que Samsung facture ses mobiles en France, Apple facture les siens depuis l'Irlande. Cela pourrait intéresser vos collègues de la commission d'enquête sur l'évasion fiscale, car vous pouvez imaginer l'impact que cela peut avoir sur les recettes fiscales liées à l'impôt sur les sociétés...
En ce qui concerne la collecte des mobiles par les opérateurs, tous nos adhérents appliquent la règle dite du « un pour un ». Cela représente aujourd'hui un élément clef du parcours du client ; quand un consommateur entre dans une boutique, on lui demande tout de suite s'il souhaite que l'on reprenne son ancien téléphone, pour le réutiliser si celui-ci a encore de la valeur ou pour le recycler dans le cadre de la collecte citoyenne. Cela est fait systématiquement par les opérateurs ; malheureusement, les clients ne donnent pas souvent suite.
La reprise payante s'est aussi généralisée chez les opérateurs qui proposent sur leur site un service permettant de revendre son ancien téléphone. Cela s'applique surtout aux smartphones, qui gardent une valeur supérieure.
Par ailleurs, les opérateurs appliquent également la règle du « un pour zéro » ; si l'on souhaite déposer son téléphone usagé dans une boutique de l'un des opérateurs, les vendeurs sont tenus de le récupérer. Cela étant dit, cette démarche est relativement rare.
Pour doper la collecte des mobiles, les opérateurs ont mis en place plusieurs initiatives, dans l'esprit de la charte d'engagement volontaire. Il s'agit notamment de collectes au domicile par les techniciens - cela n'est pas toujours concluant -, d'organisation de journées du recyclage avec des salariés volontaires venus en boutique pour collecter les mobiles, de mises en place de matériel de collecte spécifique pour les collectivités territoriales ou les entreprises partenaires, d'animations dans les écoles pour sensibiliser les plus jeunes au recyclage de ces équipements et à l'économie circulaire.
À l'étape de la collecte succède celle du réemploi des téléphones, qui fait cohabiter deux filières.
Le premier débouché réside dans le réemploi, ou reconditionnement, visant à réutiliser les mobiles, à les remettre sur le marché français par le biais des opérateurs eux-mêmes ou de partenaires - les membres de la Fédération ont tous un partenariat avec une entreprise solidaire, les Ateliers du bocage, qui émane d'Emmaüs.
Cette initiative, prise très tôt - les opérateurs ont anticipé toute forme de régulation, y compris européenne -, a permis de construire une filière qualitative. Ainsi, on assure certaines garanties, notamment en ce qui concerne le sort des données présentes sur le téléphone - il s'agit d'une des sources de la difficulté à collecter les téléphones -, la traçabilité des terminaux et le pourcentage de réemploi. En outre, cela permet de développer l'emploi dans des entreprises du secteur protégé favorisant l'insertion. Cette charte correspond donc à une stratégie globale de responsabilité sociale et environnementale des opérateurs.
Cette démarche présente des avantages pour tout le monde : cela fait baisser le coût du recyclage grâce au réemploi, cela allonge la durée de vie des terminaux et cela permet à des clients d'avoir accès à certains terminaux qui seraient inabordables pour eux dans d'autres circonstances - on peut en effet trouver des terminaux relativement récents à des prix très intéressants via ces filières de réemploi. En outre, cela favorise la relocalisation d'activités en France, dans le secteur protégé. Enfin, cela présente évidemment des vertus pour les opérateurs, qui peuvent ainsi diminuer leur éco-contribution. Cette filière bénéficie donc largement à tous.
Le second débouché réside bien sûr dans le recyclage. Les mobiles récupérés non revendus sont considérés comme des déchets et sont donc recyclés. Ils sont remis à l'éco-organisme, en l'occurrence Éco-systèmes, qui porte la responsabilité du recyclage et de la revalorisation des déchets des mobiles collectés. Les matières dangereuses sont traitées par un sous-traitant d'Éco-systèmes ou par lui-même, et les métaux récupérés peuvent être réutilisés comme matière première.
Pour la téléphonie, les opérations ont lieu uniquement en France. D'ailleurs, de nombreux téléphones mobiles africains, revendus notamment par les filiales africaines d'Orange, sont ensuite réacheminés pour être recyclés en France, via Le Havre. Contrairement à ce qui a pu être dit lors d'auditions précédentes, le réemploi n'est donc pas forcément anti-environnemental. Cela peut être vertueux dès lors que ces terminaux sont ensuite recyclés dans le cadre d'un grand circuit mondial du recyclage.
Quel bilan peut-on tirer de ces initiatives et de cette collecte ? Il est difficile d'inciter les consommateurs à rapporter leurs téléphones mobiles, car ils les laissent souvent dormir dans leurs tiroirs, pour diverses raisons. Ils pensent que cela peut resservir, par exemple en cas de panne du terminal actuel ; d'ailleurs, ces outils prenant peu de place, on a tendance à oublier leur existence. Se pose aussi la question des données présentes sur le téléphone, qui doivent être exportées quand il s'agit de messages ou de photos personnelles ; en outre, on veut être certain qu'elles soient effacées - je rappelle toutefois que la filière garantit l'effacement de toutes les données personnelles. Enfin, il peut y avoir un attachement à la valeur des téléphones, et ce même s'ils peuvent être subventionnés. Les initiatives de reprise et de revalorisation des téléphones peuvent diminuer ces freins, mais pas les faire totalement disparaître.
Ainsi, malgré les efforts des opérateurs, seulement 1,59 million de terminaux ont été collectés en 2015 par les trois opérateurs membres de la FFT, chiffre qu'il faut rapporter aux 11 millions de mobiles vendus. On en déduit donc un taux de collecte proche de 15 % ; le taux de collecte s'établissant en Europe autour de 14 %, on se situe légèrement au-dessus de la moyenne européenne. Par ailleurs, l'ensemble des opérateurs partage l'objectif d'un taux de collecte de 30 % d'ici à 2020. Le réemploi varie, selon les opérateurs, entre 40 % et 88 % des mobiles collectés.
Enfin, il faut rappeler que tout cela s'inscrit dans une stratégie globale des opérateurs relative à leur responsabilité environnementale. En effet, les opérateurs sont également distributeurs de boxes pour internet ou pour la télévision, pour lesquelles le taux de réemploi est bien supérieur puisqu'il atteint un pour un. En outre, les boxes sont de plus en plus éco-conçues. Par ailleurs, notre charte contient également des initiatives relatives à la consommation globale des opérateurs dans leur activité quotidienne.
Vous avez évoqué les clients subventionnés ; pouvez-vous préciser de quoi il s'agit ?
Je me suis mal exprimé ; il s'agit des terminaux subventionnés : lorsqu'un client s'engage pour une durée déterminée dans le cadre d'un forfait, il bénéficie en contrepartie d'une réduction sur prix du terminal.
Pouvez-vous nous préciser quels matériaux sont recyclés et lesquels ne le sont pas ?
Les opérateurs envoient des questionnaires à leurs fournisseurs pour déterminer la liste des composants du téléphone et leur masse.
Cela dit, les constructeurs et les éco-organismes sauraient mieux vous répondre sur ce point. Le métier de l'opérateur ne consiste pas, je le rappelle, à vendre des téléphones, mais à construire un réseau de télécommunications. La vente de téléphones n'est qu'une activité complémentaire des opérateurs, non leur raison d'être. Il faut interroger les constructeurs et organismes chargés du recyclage.
Nous avons entendu lors d'auditions précédentes que des mobiles partent pour l'étranger ; or vous affirmez que certains d'entre eux reviennent pour en assurer le recyclage. Cela est très intéressant.
Vous nous avez fourni peu de chiffres. Vous mentionnez des collectes à domicile, des journées de ramassage de terminaux, des opérations scolaires. Est-ce anecdotique du point de vue des volumes ? Ce sont les chiffres qui nous intéressent, sinon, internet peut répondre à nos questions...
Nous n'avons pas de données chiffrées détaillées ; nous ne disposons que des chiffres globaux de collecte.
Ne savez-vous donc pas combien de journées de recyclage les opérateurs organisent, combien de salariés sont impliqués ?
Orange, Bouygues et SFR n'ont pas souhaité accepter notre invitation - alors qu'ils disposent de badges de lobbyistes pour pénétrer au sein du Sénat et fournir des amendements à nos collègues -, ils ont préféré vous envoyer à leur place. Nous comptions donc sur vous pour tout nous dire.
Ils n'ont pas refusé de venir, ils considèrent que cette question est traitée depuis longtemps au niveau de la Fédération.
C'est peut-être un sujet collectif pour eux, mais je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites que cette question n'a pas de lien avec la compétitivité ; cela touche en effet à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, qui en fait partie. Nous sommes très fâchés qu'ils ne soient pas venus - passez-leur ce message - et l'on attend de vous des chiffres précis.
Vous avez parlé de réemploi des téléphones par les Ateliers du bocage. Y a-t-il d'autres entreprises partenaires ?
Il y a quelques entreprises sur le marché, comme Recommerce Solutions, qui a un partenariat avec l'un de nos membres.
Pouvez-vous nous préciser lequel ? Nous avons besoin de données précises.
Il y a également Weston Technology Solutions, qui assure 20 % du volume de reconditionnement de l'un de nos membres. Néanmoins, l'essentiel du travail est assuré par les Ateliers du bocage, avec lequel travaillent tous les opérateurs.
C'est donc par cet organisme que transite la partie la plus importante des flux, est-ce bien cela ?
Oui, pour le recyclage.
Vous nous avez indiqué ne pas savoir exactement quel était le contenu des téléphones ; pourtant la responsabilité relève des distributeurs, non des constructeurs, puisque ce sont eux qui mettent sur le marché les différents composants, comme le béryllium.
C'est pour cette raison que les opérateurs envoient des questionnaires à leurs fournisseurs.
Les constructeurs pourront vous donner ces éléments. Je ne les ai pas.
Vous représentez donc la Fédération française des télécoms, qui regroupe trois opérateurs, mais vous ignorez ce qui compose le téléphone...
Tous les téléphones sont différents.
Les opérateurs ne construisent pas de téléphone.
Sans doute, mais, bien que nous disposions de quelques éléments, les constructeurs sont plus à même de vous répondre.
Pourrez-vous nous envoyer ces éléments ? Ce sont tout de même les opérateurs qui en ont la responsabilité légale en tant qu'acteurs de mise en circulation dans le public.
En ce qui concerne l'opération d'Orange qui consiste à récupérer les mobiles ayant eu une deuxième vie en Afrique pour les recycler, quel volume cela représente-t-il ?
Environ 1,5 million de mobiles collectés en Afrique et recyclés en France, soit 250 tonnes de déchets.
Quand ces mobiles reviennent en France, ils ne fonctionnent plus. Ce sont donc des déchets destinés au recyclage, est-ce correct ?
Oui.
Il s'agit surtout d'une démarche environnementale, éthique. Je ne vois pas d'intérêt commercial dans cette démarche.
Les philanthropes sont rares, d'où ma question. Il y a peu de monde pour ramasser des « cochonneries » à l'autre bout du monde ; n'existe-t-il pas de valorisation suffisante pour justifier l'opération ?
Vous avez pu constater, lors d'auditions précédentes, que la valeur de ces déchets est très faible.
On nous dit surtout que c'est une question de volume. Il pourrait donc s'agir pour Orange d'une tentative d'amorçage de la pompe, si je puis dire.
Il est vrai qu'il existe en France une filière de recyclage qu'il faut alimenter afin de réduire ses coûts marginaux par l'augmentation des volumes, à défaut de pouvoir en atteindre le point mort.
Les téléphones portables envoyés en Afrique sont donc réutilisables, n'est-ce pas ?
Oui, c'est cela, ils sont reconditionnés et revendus. On n'envoie pas de déchets en Afrique, c'est interdit ; les téléphones peuvent en revanche revenir ensuite sous forme de déchets.
De quelle manière les téléphones de deuxième main partent-ils pour l'étranger, par exemple pour l'Afrique ? Les opérateurs organisent-ils eux-mêmes des filières de revente ?
À notre connaissance, il n'existe pas de filière organisée par les opérateurs. Ils font appel à des ateliers ou à des partenaires sur place.
Ils passent beaucoup par Emmaüs International.
C'est ce que nous avons également lu sur internet, mais nous espérions en apprendre davantage de votre part...
Vous avez parlé de l'opération d'Orange en Afrique. Cible-t-elle certains pays en particulier ?
Emmaüs International nous a indiqué que six ateliers ont été ouverts depuis mars 2010 : au Burkina Faso, au Bénin, au Niger, à Madagascar, en Côte d'Ivoire et au Cameroun, ce qui a créé des emplois localement.
Ce sont des ateliers de réhabilitation.
Un contrat a également été signé au Mali pour la gestion des batteries et un autre au Sénégal pour la collecte de déchets électroniques.
Nous n'avons pas encore évoqué la question du chargeur universel, qui est un sujet important en termes de déchets. Déjà dans la charte de 2010, nous nous étions engagés à nous battre pour cet équipement, qui a été récemment mis en oeuvre sous la pression de la Commission européenne. Malheureusement, tous les constructeurs ne s'y sont pas encore mis. On peut, par exemple, citer Apple, qui fait de la résistance...
Par ailleurs, les batteries sont aujourd'hui inamovibles, ce qui pose également un problème, puisqu'on ne peut pas en changer et en utiliser une autre. Il est vraiment dommage, aussi bien pour les consommateurs que pour la société dans son ensemble, de ne pas disposer de batteries universelles.
Si le Sénat proposait une recommandation en faveur de batteries systématiquement amovibles et universelles, sur le modèle de ce qui existe pour les chargeurs, les opérateurs seraient-ils d'accord ?
Oui, absolument.
Tout à l'heure, vous sembliez expliquer, au moins partiellement, le phénomène de rétention des téléphones par une peur de la panne. Les opérateurs ne pourraient-ils pas imaginer, pour décourager cette rétention, un système de prêt de téléphone en cas de panne ?
Ce type d'initiatives existe déjà, en particulier sur le segment des entreprises, et des garanties allant dans ce sens peuvent aussi être offertes pour certains téléphones, que ce soit de la part du constructeur ou de celle de l'opérateur.
Pour autant, les motivations sont multiples et il est compliqué de mesurer leur importance respective.
On peut aujourd'hui copier facilement des images ou des informations privées de son téléphone portable vers son ordinateur. Si les opérateurs communiquaient là-dessus de manière plus importante, les gens se sépareraient peut-être plus aisément de leur téléphone portable.
Les opérateurs ne sont pas les seuls dans ce bateau. Par exemple, il faut aussi prendre en compte la capacité de la clientèle à maîtriser les outils technologiques. Ce n'est pas si évident.
En ce qui concerne le réemploi, les taux sont assez différents d'un opérateur à l'autre, de 40 % à 88 %. Le profil de la clientèle peut avoir un fort impact sur cette question. Tout le monde n'est pas encore complètement à l'aise avec les outils numériques, notamment pour la récupération des données. Ces outils sont plutôt simples à utiliser, mais les utilisateurs doivent acquérir une certaine confiance dans leurs propres capacités.
On pourrait imaginer que, lorsqu'un utilisateur va en boutique pour changer son téléphone, on lui propose de copier ses données sur une clef USB ou sur un autre support simple. Cela m'est arrivé et la personne que j'ai vue en agence a copié toutes mes données, carnet d'adresses compris, en quelques minutes. Cela pourrait faciliter la restitution de son téléphone, donc le recyclage.
Le réseau des boutiques des opérateurs est en effet très compétent sur ces sujets et fait volontiers ce genre de choses. Je ne sais pas ce qu'il en est pour les constructeurs.
L'opération « Les journées du recyclage » représente, chez Orange, 1 600 journées de volontariat et 1 200 salariés mobilisés.
- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -
Vous avez indiqué qu'environ 1,59 million de téléphones ont été collectés lors des opérations « un pour un » et « un pour zéro ». Pouvez-vous nous donner des chiffres pour chacune de ces opérations séparément ?
Non. Nous disposons de données par opérateur et nous les avons consolidées.
Il serait nécessaire de le leur demander.
Ce n'est pas très facile, puisqu'ils n'ont pas voulu venir. Je vous remercie donc de bien vouloir le faire et de nous indiquer les ventes correspondantes, sinon cela n'a pas d'intérêt.
Il y a sûrement des questions de concurrence derrière ces chiffres.
C'est bien ce que je vous disais tout à l'heure ! Et le but du rapport que nous préparons est justement de vous pousser un peu...
Par ailleurs, nous avons dû retravailler ces chiffres, car ils ne reposaient pas nécessairement sur la même base.
Enfin, nous ne disposons pas des chiffres des constructeurs.
Oui, mais eux vont venir...
Au total, vous ne nous avez pas donné beaucoup d'informations précises sur les différents sujets que nous avons évoqués et je vous sollicite pour en avoir plus, avec l'accord des opérateurs, bien sûr. Il ne s'agit pas de les mettre en difficulté, mais plutôt de mettre en valeur les opérations qu'ils mènent.
Le taux de 15 % est tout de même alarmant et justifie, en soi, notre rapport. Il va falloir faire mieux ! Certes, vous avez évoqué un objectif de 30 % pour 2020.
La progression du nombre de smartphones sur le marché va contribuer naturellement à augmenter le taux de réemploi, car leur valeur plus élevée favorise leur réutilisation.
Je voudrais juste revenir sur l'évolution du marché et la tendance à l'allongement de la durée de vie. Que vouliez-vous dire exactement ?
Différents facteurs concourent à cette évolution, par exemple l'émergence d'offres incluant uniquement une carte SIM. Dans ce cas-là, les utilisateurs sont incités à garder leur ancien téléphone.
Je voudrais aussi ajouter que la loi Chatel limite à 24 mois la durée d'engagement pour le consommateur. Aller au-delà, par exemple jusqu'à 36 mois, comme dans certains pays européens, favoriserait l'allongement de la durée des terminaux. C'est un effet pervers non anticipé de la loi Chatel, qui a des qualités par ailleurs.
Je vous le dis à nouveau en conclusion, nous souhaitons que vous fassiez part de notre mécontentement aux opérateurs, d'autant qu'ils ne sont pas les derniers à nous envoyer des listes d'amendements sur un ton presque comminatoire. D'ailleurs, les médias se font régulièrement l'écho de ce mode de relations entre les parlementaires et les lobbys. Ces derniers bénéficient de badges leur permettant d'accéder à nos locaux ; la moindre des choses aurait donc été qu'ils se déplacent. Je suis désolée que ce soit vous qui entendiez notre courroux et je vous remercie des informations que vous nous avez apportées.
C'est aussi la raison d'être d'une fédération professionnelle, qui vous permet de disposer d'un seul interlocuteur plutôt que d'être assaillis de tous côtés.
Absolument, et cela justifiera que l'on ne donne qu'un seul badge de lobbyiste au lieu de trois...
Je souhaite également vous remercier, en vous priant d'excuser mon retard.
La réunion est levée à 14 heures 55.
- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -