Mes chers collègues, nous poursuivons cet après-midi nos auditions consacrées aux infractions sexuelles sur mineurs en recevant deux représentants de la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV) : M. Jean-Sébastien Barrault, le président de la Fédération, et Mme Ingrid Mareschal, sa déléguée générale.
Il y a quelques semaines, vous avez envoyé un courrier à la présidente de notre mission d'information, notre collègue Catherine Deroche, dont je vous prie d'excuser l'absence aujourd'hui, pour demander à être entendus par notre mission, ce que nous avons bien sûr accepté.
Votre fédération professionnelle n'est sans doute pas celle à laquelle on pense le plus spontanément lorsque l'on réfléchit aux institutions qui accueillent des mineurs. Pourtant, les professionnels des transports sont bel et bien amenés à prendre en charge des enfants et des adolescents, notamment dans le cadre des transports scolaires, mais aussi pour des activités de loisirs.
À cet égard, nous nous souvenons tous de la tristement célèbre affaire Émile Louis : c'est en travaillant comme chauffeur d'autocar de ramassage scolaire qu'Émile Louis a rencontré ses victimes, qu'il les a agressées sexuellement et pour certaines assassinées. Notre collègue Dominique Vérien, élue de l'Yonne, connaît bien ce dossier.
Elle vous a envoyé, avec les deux co-rapporteures, Marie Mercier et Michelle Meunier, un questionnaire pour vous aider à préparer cette audition.
Je vais vous laisser la parole pour une intervention liminaire, puis les rapporteures et l'ensemble de mes collègues ici présents vous poseront des questions pour approfondir certains points.
Je vous remercie d'avoir accepté notre demande d'audition. La FNTV regroupe l'ensemble des entreprises de transport routier par autocar en France, des très petites entreprises jusqu'aux grands groupes comme la SNCF ou Transdev. Notre fédération représente plus de 1 000 entreprises qui transportent chaque jour plus de deux millions d'enfants le matin et le soir pour les trajets scolaires et près de 700 000 enfants chaque année pour des voyages scolaires par autocar. Vous avez rappelé une affaire tristement célèbre et le contexte actuel explique que notre profession se sente largement concernée par le sujet sur lequel travaille votre mission.
Nous n'avons pas d'informations pour quantifier ces faits au sein de notre secteur d'activité mais la presse se fait régulièrement l'écho de dramatiques incidents. Bien que rares, ces faits demeurent trop nombreux et nous nous en préoccupons.
Concernant les exigences encadrant le recrutement des conducteurs, elles tiennent surtout à la conduite et à la sécurité routière. Nous avons de nombreuses exigences en matière de formation initiale. Nous pensons cependant que nous pouvons faire mieux, en particulier pour prévenir les risques d'agressions sexuelles sur les mineurs.
En matière de prévention, il n'existe pas d'action ou de programme spécifique sur ce sujet. Néanmoins nous allons signer prochainement avec les services de la police et de la gendarmerie une convention cadre pour organiser des échanges d'informations entre nos professionnels et les forces de l'ordre, notamment pour renforcer les signalements concernant les atteintes aux personnes. Cette convention, qui a vocation à être déclinée territorialement, prévoit des interventions des forces de l'ordre pour sensibiliser les chefs d'entreprise et les professionnels. Il s'agit d'une piste de travail que l'on souhaite concrétiser dans les prochaines semaines.
Vous évoquiez, dans le questionnaire que vous nous avez transmis, la procédure de « criblage ». Nous avons amélioré ces dernières années les contrôles lors du recrutement des conducteurs avec cette procédure d'enquête administrative de sécurité, permise par la loi du 22 mars 2016, dite « loi Savary », et son décret d'application du 3 mai 2017. Ce dispositif permet aux chefs d'entreprise de demander une enquête administrative au ministère de l'intérieur pour leurs futurs salariés. Au sein du ministère de l'intérieur, un service est dédié à ces enquêtes, le Service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS). L'entreprise transmet l'identité de la personne et la description de l'emploi au SNEAS qui dispose d'un délai de deux mois pour se prononcer sur la compatibilité de la personne avec les fonctions envisagées. Cette enquête a été plutôt mise en oeuvre dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Si la prévention des infractions sexuelles n'était pas le premier objectif visé, ce criblage pourrait être renforcé pour prévenir ces agressions. Il faut aussi que le chef d'entreprise précise que le recrutement est destiné au transport de mineurs sinon l'enquête ne portera pas sur ce point.
Lorsque le SNEAS transmet à l'entreprise un avis de compatibilité ou d'incompatibilité, cet avis n'est pas motivé. Les entreprises ne connaissent pas les raisons d'une incompatibilité, ce qui place le chef d'entreprise dans une situation délicate puisqu'il est tenu de reclasser le professionnel concerné. Il nous semble que ce point pourrait être amélioré. En outre, le SNEAS n'a pas accès au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV), ce que nous regrettons.
Enfin, c'est une procédure globalement peu utilisée par les entreprises car elle est complexe. Seul le chef d'entreprise, ou son représentant habilité, peut faire une demande de criblage, selon des règles strictes. Dans un groupe, l'entreprise de tête ne peut pas centraliser les demandes envoyées au ministère de l'intérieur. Un assouplissement des procédures pourrait donc être également envisagé.
Notre demande est donc d'aller plus loin dans le contrôle des personnels en ayant notamment accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire. Le bulletin n° 3 peut déjà être demandé par l'employeur à un candidat en vue d'un recrutement mais cette faculté est peu connue des entreprises et donc peu utilisée. Le bulletin n° 2 n'est aujourd'hui accessible qu'à certaines administrations pour des motifs précis. Les organismes privés qui y ont accès sont limitativement énumérés par la loi et nos entreprises n'y figurent pas. Nous souhaiterions donc bénéficier de cet accès qui serait plus efficace que le criblage, dont les résultats sont obtenus au bout de deux mois, ce qui peut décourager certains chefs d'entreprise.
L'accès par nos entreprises au bulletin n° 2 du casier judiciaire présenterait l'avantage que le chef d'entreprise pourrait lui-même apprécier l'opportunité de recruter un candidat. En l'état actuel, la demande d'enquête administrative aboutit à un avis qui n'est pas motivé. Cet accès lèverait donc des incertitudes pour les employeurs.
Nous souhaiterions aussi que la profession de conducteur de transport scolaire puisse être identifiée comme une profession bénéficiant d'une information obligatoire du parquet à l'employeur en cas de contrôle judiciaire ou d'interdiction d'exercer une activité en contact avec des mineurs. Aujourd'hui il n'y a une information automatique que pour certaines fonctions énumérées par décret, telles que l'exercice d'activités d'enseignement, mais nos activités de transport par autocar ne sont pas visées. Nous n'avons donc pas d'information automatique dans le cas où une décision judiciaire serait prise à l'encontre d'un employé d'une de nos entreprises et nous souhaiterions bénéficier de cette information.
Au total, notre demande porte donc sur trois points : le renforcement de la procédure de criblage, l'accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire et l'information automatique de l'employeur en cas de condamnation d'un salarié.
Je vous remercie pour votre témoignage et d'avoir sollicité notre mission. Pourriez-vous nous préciser combien de conducteurs assurent aujourd'hui le transport de mineurs ? J'ai entendu vos demandes pour renforcer la prévention et les procédures de détection. Je voudrais aussi signaler que les conducteurs peuvent être les témoins de situations dans le cadre de leurs fonctions et les signaler aux autorités publiques, notamment les maires. Il s'agit donc d'une réciprocité, d'un échange à installer : les chauffeurs doivent pouvoir être contrôlés mais aussi sensibilisés à la remontée d'informations.
Il y a 100 000 salariés dans nos entreprises, dont la très grande majorité sont conducteurs d'autocar. Il faut, vous avez raison, sensibiliser nos conducteurs sur les signaux d'alerte et la transmission. C'est l'objet de la convention que nous allons signer avec les forces de l'ordre afin d'organiser des échanges d'informations de manière ascendante et descendante.
Votre fédération comprend-elle des entreprises de transport en taxi ou par ambulance ?
Non, ces professions ne sont pas représentées par la FNTV mais nous travaillons étroitement avec la fédération des ambulanciers car nos professions relèvent de la même branche professionnelle et nous sommes soumis à la même convention collective.
La délégation aux droits des femmes a mené des auditions sur le sujet des violences faites aux femmes handicapées et à cette occasion, nous avons constaté que les transports pouvaient être un secteur à risques, notamment les ambulances et les taxis.
Vous parliez de l'information automatique du parquet à l'employeur en cas de condamnation du salarié. Si elle n'est pas automatique, elle est aujourd'hui autorisée. Avez-vous été alertés par le ministère public de cas de conducteurs condamnés pour des faits de violences sexuelles sur mineurs ?
C'est effectivement une possibilité pour le parquet. Je n'ai pas connaissance de cas précis mais cela ne signifie pas que de tels cas ne se soient jamais produits.
Concernant la procédure de criblage, elle constitue une avancée mais elle est effectivement plutôt destinée à lutter contre le terrorisme. Pour environ 100 000 salariés, il est assez compliqué que le ministère de l'intérieur centralise les enquêtes de criblage.
Pour assurer un contrôle efficace, il conviendrait donc d'assouplir la procédure, par exemple en permettant la consultation du FIJAISV, qui serait peut-être plus simple que de demander le bulletin n° 2 du casier judiciaire. Le respect de la vie privée doit aussi être garanti, il faut donc trouver un équilibre.
Comme vous l'indiquiez, vous recevez des avis d'incompatibilité non motivés, or il est difficile de licencier sans motif. Je m'interroge aussi sur le délai de deux mois pendant lequel est réalisé le criblage : pendant cette période, le salarié est en poste. Par ailleurs, il existe des situations où un conducteur peut être remplacé au dernier moment par un autre, sans avoir fait l'objet de contrôles préalables. Faut-il alors annuler la sortie scolaire ou accepter le conducteur remplaçant ?
Je ne connais pas en détail les conditions d'accès au FIJAISV. A ma connaissance, le SNEAS n'a pas accès à ce fichier et il ne peut pas non plus consulter directement le bulletin n° 2 du casier judiciaire. Ce service doit en faire la demande et attendre la réponse du service du casier judiciaire. Les agents du SNEAS nous ont également fait part d'erreurs dans la transmission des noms ou des dates de naissance des personnels à contrôler, ce qui conduit à la multiplication d'échanges avec le service du casier judiciaire afin d'obtenir les bonnes informations. Le SNEAS n'a par ailleurs pas accès au fichier des titres électroniques sécurisés. Ils ont toutefois accès au fichier des personnes recherchées et au système de traitement des infractions constatées de la police nationale.
Dès lors, la réception par le chef d'entreprise du bulletin n° 2 du casier judiciaire simplifierait les démarches et raccourcirait les délais.
La loi Savary impose le reclassement du salarié qui fait l'objet d'un avis d'incompatibilité et il ne peut être licencié qu'à condition que l'entreprise ne puisse pas le reclasser.
Effectivement, sans possibilité de reclassement, le salarié est licencié pour cause réelle et sérieuse, à la charge de l'entreprise. Il s'agit donc d'une procédure assez lourde pour l'entreprise, et plus encore s'il s'agit d'un salarié protégé.
Le FIJAISV est consultable par certaines collectivités par l'intermédiaire du préfet, qui répond normalement dans le mois. Si vous pouviez effectuer cette demande auprès de la préfecture, vous pourriez obtenir ces informations pendant que le salarié est encore en période d'essai. Sauf que si l'on multiplie les demandes auprès des préfets, les délais pourraient s'allonger.
Nous allons étudier ces pistes d'amélioration avant de formuler nos préconisations. Une demande auprès des préfets pourrait en effet être plus souple qu'une centralisation au ministère de l'intérieur.
Je tiens à souligner que nos entreprises ont des relations très satisfaisantes avec le SNEAS et que les contrôles s'effectuent dans de bonnes conditions.
Je ne pensais pas que les procédures étaient si compliquées pour les entreprises afin d'obtenir des informations sur les salariés. Compte tenu du contexte et des risques, je pensais même que la consultation du casier judiciaire était exigée pour le recrutement des conducteurs.
L'attention est d'abord portée sur les capacités de conduite ou encore sur les risques liés à l'alcoolémie et à la consommation de stupéfiants, de sorte que le sujet des violences sexuelles passe après ces préoccupations. Certes les faits sont rares, mais toujours trop nombreux. Pour revenir sur les propos de notre collègue Dominique Vérien, les taxis et ambulanciers sont amenés à transporter des enfants handicapés : nous devrons être vigilants sur ces transports individuels de voyageurs.
Nos professionnels assurent aussi le transport de personnes à mobilité réduite.
Concernant la demande auprès du préfet pour la consultation du FIJAISV, elle s'ajouterait à la demande de criblage à effectuer auprès du ministère de l'intérieur, ce qui pourrait complexifier les procédures de contrôle.
La saisine du préfet pourrait peut-être se substituer à celle du ministère de l'intérieur.
Cependant, nous ne pouvons pas nous passer de l'actuelle procédure de criblage en saisissant le ministère, essentielle dans la lutte contre le terrorisme.
Tout pourrait être centralisé auprès du préfet, à charge ensuite pour les services de l'État de se coordonner pour effectuer les contrôles et transmettre les informations à l'employeur.
Ce qui me surprend, c'est la difficulté dont vous avez fait part de se séparer du salarié en cas d'avis d'incompatibilité. Le salarié peut-il saisir le conseil de prud'hommes dans un tel cas ?
Oui, c'est une possibilité mais elle est rare car les salariés concernés viennent en général d'être embauchés. Nous considérons que le licenciement de ces salariés en cas d'avis d'incompatibilité ne devrait pas être à la charge de l'entreprise.
Nous parlons là des candidats à l'embauche mais il y a aussi la possibilité de demander un criblage sur les salariés en poste pour lesquels le chef d'entreprise a un doute. Un avis d'incompatibilité peut donc aussi concerner un salarié avec plusieurs années d'ancienneté ou un salarié protégé et, dans ce cas, je ne sais pas comment serait géré le licenciement.
Vous indiquez qu'il est compliqué de se séparer d'un salarié au bout de deux mois. Ce constat repose-t-il sur des cas qui se sont déjà produits ou sur un risque que vous avez identifié ?
Pour compléter cette question, vous indiquiez que le criblage était complexe et peu utilisé. Cette procédure est-elle compliquée pour le chef d'entreprise en raison du choix des cas dans lesquels une enquête administrative mérite d'être demandée ? Ce choix peut être délicat pour les chefs d'entreprise. Disposent-ils d'une liste de critères leur permettant de se déterminer ?
Il serait plus logique que lors de l'embauche, il y ait une systématisation du contrôle, éventuellement par le biais des préfectures, avec la consultation des fichiers, sans distinction des candidats.
On constate que 2 % des dossiers qui ont fait l'objet d'un criblage sont déclarés incompatibles. En ce qui concerne les critères, vous avez raison, il faut veiller à ne pas faire de discrimination. Il y a par ailleurs une obligation d'information du salarié par l'employeur lorsqu'une décision de criblage le concernant est prise. Le choix est effectué par le chef d'entreprise en cas de doute sur la personne, s'il constate par exemple des signes de radicalisation.
La part des dossiers déclarés incompatibles s'élève à 2 %, mais combien de dossiers donnent lieu à une enquête ?
En juin 2018, un an après la mise en place de la procédure, ce taux de 2 % était basé sur l'examen de 4 241 demandes.
L'Éducation nationale a procédé à des vérifications pour l'ensemble de son personnel afin de détecter d'éventuelles situations à risques. L'exercice de fonctions en contact avec des mineurs pourrait devenir la condition du déclenchement d'un contrôle systématique, que ce soit pour le personnel en place ou pour les nouvelles embauches.
Nous avons la chance, dans notre secteur, de bénéficier du criblage qui permet de réduire un certain nombre de risques pour les voyageurs. Nous avons déjà un point d'entrée par ces demandes d'enquête auprès du ministère de l'intérieur. Notre demande serait donc, pour renforcer cette procédure, que le SNEAS puisse avoir accès à tous les fichiers. En outre, l'employeur devrait recevoir un avis motivé, car l'obligation de reclassement est très compliquée à réaliser sans connaitre la raison de l'incompatibilité du salarié.
Nous vous remercions d'avoir anticipé notre demande d'audition. Vous avez pointé un sujet très important pour prévenir les infractions sexuelles sur mineurs dans tous les secteurs. Les prédateurs étant difficilement identifiables, la systématisation des contrôles faciliterait sans doute la tâche des entreprises et permettrait de ne pas pointer du doigt certains salariés. La systématisation des contrôles simplifierait en outre vos démarches, qu'il s'agisse du criblage ou de l'accès au casier judiciaire, par la présentation d'une demande unique adressée à l'administration. Merci à vous.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Pour cette deuxième audition, nous recevons deux représentantes de la direction de l'administration pénitentiaire : Mme Audrey Farrugia, adjointe au sous-directeur des missions, et Mme Lucie Charbonneau, référente nationale santé au sein de la direction.
Notre mission d'information s'intéresse à la répression des infractions sexuelles sur mineurs et à la prévention de la récidive. C'est pourquoi il nous a paru indispensable d'entendre votre direction afin de mieux comprendre comment sont pris en charge en prison les auteurs d'infractions sexuelles et quel traitement peut être mis en oeuvre pendant la durée de leur incarcération pour tenter de diminuer le risque de récidive. Nous aimerions que vous nous précisiez le cadre juridique applicable, les moyens dont vous disposez et la manière dont vous organisez la détention des auteurs d'infractions sexuelles.
Pour vous aider à préparer cette audition, nos rapporteures, Marie Mercier, Michelle Meunier - qui est excusée aujourd'hui - et Dominique Vérien, vous ont adressé un questionnaire. Je vais vous céder la parole pour une intervention liminaire, puis nous aurons un temps d'échanges avec l'ensemble des sénateurs présents, de manière à approfondir certains points.
Merci de nous recevoir. Je vais commencer par vous donner quelques éléments de cadrage sur le parcours pénitentiaire des auteurs d'infractions à caractère sexuel (AICS), puis sur leur prise en charge médicale.
À titre liminaire, je précise qu'il n'y a pas à proprement parler de prise en charge spécifique au profit des AICS sur mineurs, mais une prise en charge des AICS au sens large.
En ce qui concerne leur parcours pénitentiaire, les AICS peuvent être orientés vers des établissements spécialisés. C'est un enjeu important et cette affectation est présentée comme prioritaire parce qu'ils sont alors pris en charge par des professionnels rompus à cet exercice. Pour autant, l'affectation des AICS dans ce type de prison peut entrer en concurrence avec d'autres principes de la détention, et notamment la nécessité de maintenir les liens familiaux. En effet, on ne compte que vingt-deux établissements de ce type sur tout le territoire national (dont un en Corse et un en outre-mer), et ils ne couvrent donc pas tous les départements.
Pour l'affectation initiale d'un AICS, on privilégiera naturellement ce type d'établissement. En revanche, en cas de changement d'affectation d'un détenu, on prendra davantage en compte les critères plus habituels de la détention, ce qui peut conduire la personne incarcérée à poursuivre son parcours pénitentiaire dans un établissement classique.
D'après les statistiques disponibles en janvier 2019, on compte 37 % d'AICS parmi les détenus dans les établissements spécialisés, contre 10 % dans le reste de la population carcérale. Il faut avoir conscience que le regroupement de ces profils dans des établissements spécialisés présente l'avantage de les préserver des stigmatisations, voire des agressions dont ils peuvent être victimes dans les prisons ordinaires.
Des programmes de prévention de la récidive sont régulièrement organisés en direction des AICS, à travers des ateliers comme des groupes de parole. L'idée est de permettre aux AICS de parler de leurs actes et de les aider à déterminer le sens de leur passage à l'acte.
Ces programmes conduits par les services d'insertion et de probation (SPIP) s'appuient souvent sur l'expertise des centres ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles (CRIAVS), qui existent dans chaque région. Ces structures bénéficient d'intervenants spécialisés et du matériel pédagogique nécessaire. Elles présentent des déclinaisons diverses au niveau local. Les SPIP travaillent également sur la sortie de la détention et sur la continuité des soins, de façon à garantir un lien entre la prise en charge à l'intérieur de l'établissement et celle qui se fera ensuite à l'extérieur. C'est essentiel pour les profils « AICS ».
La loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs a mis en place le médecin coordonnateur des soins qui joue un rôle de suivi. Le suivi socio-judiciaire qui peut être imposé aux auteurs de ces infractions permet d'assurer la continuité des soins.
La prise en charge médicale relève avant tout de la compétence et de la responsabilité du ministère de la santé et des solidarités, avec lequel nous travaillons étroitement. Un protocole élaboré en 2011 rappelle le caractère prioritaire de cette prise en charge. Plusieurs circulaires ont décliné les grands axes de travail. Les établissements spécialisés dans l'accueil des AICS disposent de moyens dédiés du ministère de la santé pour les mettre en oeuvre. Pour autant, la direction de l'administration pénitentiaire n'a qu'une vision limitée de l'aspect médical et de son application concrète.
Une enquête a été réalisée en 2015 dans la perspective de l'élaboration d'une première stratégie « santé-justice », qui a abouti en 2017. Cette même enquête de 2015 a servi pour la préparation de la stratégie « santé-justice » déclinée pour la période 2019-2022 : on constate une affectation inégale des moyens selon les territoires, notamment s'agissant de la disponibilité des professionnels de santé.
Hormis ces bilans limités, nous avons peu de visibilité sur les actions menées au sens strictement sanitaire pour la prise en charge des AICS.
Merci pour ces éléments de cadrage. Je vais céder la parole aux co-rapporteures qui vont vous poser des questions.
Vous avez évoqué vingt-deux établissements spécialisés. Nous en comptons un dans mon département de l'Yonne, celui de Joux-la-Ville. Disposez-vous d'informations sur la prise en charge médicale des AICS au sein de cet établissement ?
De façon générale, la prise en charge médicale est souvent plus difficile dans les territoires ruraux, à l'image de mon département, en raison de la pénurie de professionnels de santé.
Je peux vous indiquer que la prison de Joux-la-Ville est assez exemplaire en matière de suivi des AICS. La structuration du suivi de ces détenus y est intéressante, fondée sur une réflexion qui implique une phase d'évaluation, de travail sur le sens de la peine et de responsabilisation dans la commission de l'acte. Il me semble également que les surveillants référents bénéficient d'un module de formation spécifique et que des ateliers sont organisés sous l'égide d'une psychologue spécialisée affectée à l'établissement.
J'insiste sur le fait que les AICS sont un public qui craint la stigmatisation parmi les autres détenus, et qui nécessite donc une surveillance accrue. A Joux-la-Ville, il y a un personnel dédié et sensibilisé, affecté à la surveillance de ce public. Des groupes de parole réguliers existent aussi, ainsi qu'un groupe de suivi. Ce travail pluridisplinaire permet de dresser un bilan qui associe aussi l'autorité judiciaire pour la prise en charge des détenus les plus dangereux du point de vue des risques de récidive.
En revanche, je ne crois pas qu'il existe une approche spécifique aux AICS sur des mineurs. La prise en charge des AICS est globale, mais aussi adaptée, à travers un volet de soins en lien avec l'unité de suivi psychiatrique. Des groupes thérapeutiques sont mis en place au profit de ce public et se déclinent selon la capacité de verbalisation des détenus, car les profils sont variés. Ils travaillent sur l'hygiène de vie, le respect du corps et la réinsertion sociale.
Nous entendrons prochainement la direction générale de l'offre de soins (DGOS) pour aborder de façon plus précise la question de la prise en charge médicale des AICS. Si c'est une décision de justice qui décide de cette prise en charge médicale, il existe plusieurs niveaux de soin. Appartient-il aux services pénitentiaires de définir les soins les plus adaptés à chaque détenu ?
Vous avez évoqué la nécessité de conserver un lien avec la famille en ce qui concerne le parcours pénitentiaire. Cette condition me surprend, dans la mesure où la grande majorité des violences sexuelles sur les mineurs sont commises dans un cadre intrafamilial. Certes, il faut aider les détenus et le maintien du lien familial a aussi une vocation de prévention de la récidive. Pour autant, comment peut-on justifier par exemple de conserver un lien entre un père incestueux et son enfant victime ?
Je dresserai à cet égard un parallèle avec la situation des violences conjugales, où l'on constate que l'autorité parentale est rarement retirée au parent ayant commis des violences sur les enfants.
J'abonderai dans le même sens que ma collègue. Comment orientez-vous ces détenus ? Le maintien du lien avec la famille est-il indispensable dans des situations d'inceste ?
En ce qui concerne les soins aux personnes détenues, je rappelle qu'on ne peut pas forcer un individu à se soigner, même s'il est incarcéré. Il y a une décision de justice qui est rendue, qui comporte ou non une obligation de soins, un suivi socio-judiciaire ou une injonction de soins. L'administration pénitentiaire se soumet à l'autorité judiciaire et ne s'y substitue pas.
Les moyens de contrainte de l'autorité judiciaire pour obliger un détenu à se soigner sont également limités. Par exemple, le juge d'application des peines peut prendre la décision de ne pas octroyer de réduction de peine supplémentaire face à un détenu réticent à suivre son obligation de soin, mais ce n'est pas forcément très persuasif.
Il n'y a pas d'intervention de notre part, car nous n'avons pas vocation à orienter les soins, ni au niveau du surveillant pénitentiaire qui suit le détenu en prison, ni au niveau du SPIP qui a pour préoccupation la réinsertion du détenu dans la vie sociale à l'issue de sa peine. Aucun des deux ne peut venir se substituer à l'avis du médecin. Nous menons un travail commun et permanent avec le ministère de la santé sur la stratégie « justice-santé » que j'ai précédemment évoquée, mais chacun reste dans son rôle.
Même si la loi parle d'injonction de soins, la réalité ne permet pas de contraindre un détenu à la respecter. De même, la rétention post-peine est très peu mise en oeuvre dans les faits.
L'injonction de soins nous paraît très importante pour lutter contre la récidive ; votre réponse n'est guère rassurante, même si nous savons que la loi n'est pas toujours appliquée de la façon dont on le souhaiterait...
En ce qui concerne la victime, le SPIP a connaissance du dossier, AICS ou pas. Il connaît les circonstances de l'agression. C'est une nécessité pour travailler sur les faits et orienter au mieux le détenu, mais ce n'est pas propre aux AICS. Cela fait partie du cadre de l'intervention du SPIP.
Il y a un double enjeu sur les permis de visite. À cet égard, je rappellerai que l'administration pénitentiaire ne se résume pas à un trousseau de clés et à des portes ! Elle investit la période de détention pour mener un travail de réinsertion, même si la peine de prison est là aussi pour protéger la société. En effet, il faut être conscient que même si le condamné n'exécute pas l'injonction de soins, il finira de toute façon par sortir de prison car l'incarcération a un terme. Nous travaillons donc avec l'objectif de limiter la récidive et de favoriser l'insertion du détenu dans la vie sociale, voire professionnelle, à sa libération. Dans certains dossiers impliquant des AICS commis par le père sur son enfant, c'est l'épouse elle-même qui demande un droit de visite. Qui sommes-nous pour lui dire : « vous n'avez pas le droit de rendre visite à votre mari » ?
Je comprends néanmoins votre réaction. En conclusion, la réponse n'est pas évidente et ne peut être générale.
S'agissant des conditions de détention des AICS, je souhaiterais savoir s'ils subissent l'hostilité des autres prisonniers. Quel bilan peut-on dresser des établissements spécialisés de ce point de vue ? Sur la sortie de la détention, y'a-t-il une poursuite des soins en milieu ouvert quand ils ont débuté en prison ?
L'enquête précitée de 2015 permet d'avoir quelques informations sur les conditions de détention. Les AICS sont indéniablement des profils davantage victimes de stigmatisation, de pressions et de violences. Ils ont tendance à se mettre en situation d'isolement ou bien c'est le chef d'établissement qui peut proposer un isolement pour les mettre à l'abri du reste de la population carcérale. C'est une réalité.
Pour autant, nous ne disposons pas de statistiques fines et une étude resterait sans doute à mener sur ce sujet.
En ce qui concerne l'orientation des AICS vers les établissements spécialisés, l'idée est de les regrouper pour limiter le risque d'incidents. Dans les vingt-deux établissements spécialisés, on ne compte pas que des AICS. Il n'y a pas de cloisonnement total avec le reste des détenus. Même s'il y a moins d'incidents, il y en a quand même. Les données dont nous disposons montrent que les AICS sont généralement plus impliqués dans des incidents en tant que victimes.
Toutefois, le regroupement de ces détenus dans des établissements dédiés présente aussi des inconvénients. Par exemple, lorsqu'on travaille sur les projets de sortie autour de ces centres de détention, l'information circule vite dans les environs. Certains partenaires, tels que des employeurs potentiels pour les prisonniers, se montreront alors plus réservés à collaborer avec des programmes d'insertion dans ces prisons, au détriment de tous les détenus. C'est le risque d'une autre forme de stigmatisation. Il y a indéniablement une réflexion à mener sur les enjeux associés à la détention des AICS.
En ce qui concerne la poursuite des soins en détention, je dirais que l'enjeu n'est pas spécifique aux seuls AICS. On trouve en prison beaucoup de profils psychiatriques problématiques et la continuité des soins est souvent difficile lorsqu'ils sont passés dans des établissements à soins contraints dans le cadre du code de la santé publique. Quand ils se sont stabilisés, ils rechutent généralement à leur retour en prison car ils ne sont plus obligés de se soigner. Voilà un autre enjeu en termes de récidive. Nous travaillons sur ce sujet avec le ministère de la santé.
Une réflexion doit être menée, en particulier sur le rôle du médecin coordonnateur des soins institué par la loi de 1998. Outre le relai auprès de l'autorité judiciaire, il est aussi censé faire le lien avec les structures de soins, dans l'hypothèse où le suivi socio-judiciaire est prononcé.
Il y a effectivement un problème de démographie médicale. C'est une vraie difficulté dans tous les territoires, particulièrement en zone rurale, où les personnes peuvent attendre parfois plusieurs mois avant d'être reçues par un professionnel.
Plusieurs rapports récents - notamment au Sénat - ont insisté sur la problématique des détenus présentant des problèmes psychologiques, profils pour lesquels l'incarcération n'est pas une solution adaptée.
Vous avez parlé des territoires ruraux. Avez-vous également des informations plus précises s'agissant de la situation dans les outre-mer ?
J'ai peu de données sur les territoires ultramarins, et je vous parle de mémoire. Il existe un établissement spécialisé à la Réunion, ce qui est peu.
D'où l'importance de prendre en compte les autres critères dans l'affectation d'un détenu à un centre de détention, notamment le maintien des liens familiaux. Ce point est régulièrement mis en avant par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).
De plus, nous avons sollicité la mission outre-mer qui gère les établissements ultramarins. La cartographie est comparable à celle de la métropole. Le SPIP met en oeuvre des programmes de prévention de la récidive dans presque tous les établissements. En revanche, les difficultés de maillage des professionnels de santé sont encore plus prégnantes en outre-mer qu'en métropole.
Par ailleurs, on peut avoir davantage de problèmes d'addiction dans ces territoires. Ces éléments sont également identifiés par le ministère de la santé.
A la délégation aux droits des femmes, nous avons mené quelques auditions sur la question des violences faites aux femmes dans les outre-mer, et on a constaté que ces territoires sont loin d'être épargnés. C'est aussi l'une des conclusions de l'enquête Virage réalisée par l'Institut national d'études démographiques.
Vos informations sur la prise en charge des AICS dans les outre-mer manquent de précisions. Je souhaiterais disposer d'éléments plus approfondis et fiables, notamment en ce qui concerne les programmes mis en oeuvre par les SPIP.
On ne constate pas de différence entre les programmes mis en place par les SPIP en métropole et dans les territoires ultramarins. Ce sont les mêmes types de programmes de prévention de la récidive que ceux que j'ai présentés tout à l'heure.
Disposez-vous d'éléments d'évaluation ? Je vais creuser cette question dans mon territoire, car contrairement à ce que vous affirmez, on me signale régulièrement que la prise en charge des AICS est le parent pauvre des politiques mises en place dans les établissements pénitentiaires ultramarins.
Il est évident que l'existence d'un seul établissement spécialisé pour les outre-mer à la Réunion ne peut être suffisante.
Comme je l'ai déjà expliqué, nous ne disposons pas d'éléments d'évaluation, ni pour la métropole, ni pour les outre-mer. La seule source d'information est l'enquête de 2015 que j'ai citée tout à l'heure, mais elle reste partielle.
Le SPIP de Martinique ne prévoit pas de dispositifs spécifiques pour les AICS sur les mineurs, mais il existe des programmes à destination des auteurs de violences sexuelles en général, quel que soit l'âge des victimes (prise en charge psycho-sociale individuelle et groupale, faite en milieu ouvert).
Il y a neuf territoires outre-mer, répartis sur trois océans, pour vingt-deux établissements spécialisés, dont vingt en métropole, un en Corse et un à la Réunion. Vous constatez le caractère inéquitable de la situation faite aux outre-mer. On aurait pu avoir au minimum un établissement par région océanique, ce qui n'est même pas le cas.
C'est bien pour cela que, en dépit des réserves que vous avez exprimées, le maintien des liens familiaux est souvent privilégié dans l'affectation d'un condamné dans tel ou tel centre de détention.
Oui, mais sans prise en charge adaptée au profil des AICS ! Je connais bien ce sujet pour travailler avec les établissements concernés. Je connais les prédateurs sexuels, surtout intrafamiliaux, et je peux vous dire que rien n'est fait pour prévenir la récidive chez ces individus.
Je remercie notre collègue de pointer les difficultés spécifiques aux outre-mer. C'est important de le préciser, même si nous ne pourrons régler la question aujourd'hui. Mais il ne faudra pas les oublier lorsque nous formulerons nos propositions. Nous avons bien compris que ce n'est pas tout à fait de votre ressort...
Je tiens à préciser que, même dans un établissement pénitentiaire non spécialisé pour les AICS, il existe une prise en charge psychiatrique par l'unité sanitaire, si le détenu manifeste la volonté d'entamer une démarche de soins. Mais cela reste conditionné à la volonté d'entrer dans une telle démarche, établissement spécialisé ou non.
Pourriez-vous nous indiquer comment a été établie la cartographie des établissements spécialisés ? Quand on sait que la prévalence des violences intrafamiliales est significative dans les outre-mer, il paraîtrait important de privilégier ces territoires.
La cartographie date de plus de dix ans. Je ne suis pas en mesure de répondre à votre question car je ne connais pas les critères qui ont présidé à l'époque au choix des territoires accueillant les établissements spécialisés.
Encore une fois, je répète que dans l'affectation d'un AICS à un centre de détention, plusieurs critères comme le maillage territorial des soins et le maintien des liens familiaux doivent être pris en compte, et pas seulement le souhait d'une prise en charge spécialisée.
S'agissant de la cartographie des établissements, une réflexion a été amorcée pour mieux concilier la nécessité d'une prise en charge spécifique avec le maintien des liens familiaux. Mais cela soulève toujours la question de la disponibilité de professionnels de santé spécialisés et formés à ce type de prise en charge.
On ne peut que souhaiter la création de nouveaux établissements, dont certains hors métropole.
Étant entendu que cela ne relève pas que d'une décision de l'administration pénitentiaire, sur la base de ses seuls moyens humains et immobiliers, mais d'une chaine de décisions plus vaste impliquant aussi le ministère de la santé.
Une telle décision ne relève pas que d'un seul ministère, nous vous avons bien comprises.
On ressent pleinement votre professionnalisme sur ces sujets. Je souhaiterais revenir sur les programmes de soins. Vous êtes très attentives au sens du passage à l'acte et à l'importance des groupes de parole. Avez-vous entendu parler de l'association PedoHelp ?
Il s'agit d'une petite association, puisqu'elle comprend seulement un président, que nous avons auditionné, et une secrétaire, qui conduit des actions de prévention à l'égard de ceux qui ressentent une attirance sexuelle pour les mineurs sans être passés à l'acte ou qui se sentent susceptibles de récidiver.
Le contact s'effectue par le biais d'Internet, c'est bien ça ?
Exactement, ils ont un site Internet : une personne qui ressent de telles pulsions, dont elle perçoit bien le caractère anormal, peut prendre contact par ce site. Une charte lui est proposée. L'association offre une oreille attentive et échange avec ces personnes qui n'auraient pas l'occasion sinon de confier leur crainte de passer à l'acte.
Ils n'ont pas évoqué avec vous un travail qui serait effectué localement avec un établissement ?
Du tout, mais je souhaitais évoquer leur action dans le cadre de notre échange sur les actions de prévention.
Cette association travaille en revanche avec certains CRIAVS. Elle joue un rôle préventif tandis que vous intervenez davantage après la commission de l'infraction, ce qui peut expliquer que vous n'ayez jamais eu de contacts avec eux.
Avez-vous connaissance de cas d'agressions sexuelles sur des mineurs incarcérés qui auraient pu être commises par des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ou des surveillants pénitentiaires dans l'exercice de leurs fonctions ?
Mme Audrey Farrugia. - Je n'ai pas connaissance de l'existence de tels cas.
En revanche, il existe des mineurs auteurs d'infractions à caractère sexuel (AICS), pris en charge.
Il existe, d'une part, des établissements qui n'accueillent que des mineurs, et d'autre part, des quartiers qui accueillent uniquement des mineurs au sein de certains établissements. Ce sont des établissements qui relèvent de la direction de l'administration pénitentiaire, même si bien entendu ce travail se fait en lien avec la protection judiciaire de la jeunesse.
J'imagine que les surveillants en contact avec des mineurs sont passés au crible du fichier des délinquants sexuels, comme le sont les enseignants, c'est-à-dire dans le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) ?
Le casier judiciaire des surveillants pénitentiaires fait bien entendu l'objet d'un contrôle. En revanche, à ma connaissance, mais je vérifierai, le FIJAISV n'est pas interrogé au moment d'une embauche. Il s'agit d'un fichier qui comporte les condamnations assorties de mesures de suivi, comme des obligations de pointages au commissariat. Je pense que les vérifications pour le recrutement des surveillants pénitentiaires, s'agissant d'un concours, sont les mêmes que pour les autres fonctionnaires et n'incluent pas le FIJAISV, mais une vérification du casier judiciaire. J'ignore en revanche à quel rythme des vérifications du casier sont effectuées en cours de la carrière.
J'imagine quand même que selon que les surveillants sont en contact ou non avec des mineurs, les vérifications effectuées sont différentes ?
Je ne le pense pas. Des vérifications sont effectuées comme pour tout recrutement par concours dans la fonction publique. Puis les surveillants sont affectés dans différents établissements au cours de leur carrière et ils peuvent donc être en contact avec des mineurs à certains moments, mais les formalités de recrutement sont les mêmes. Je ne pense pas que soit opéré un contrôle plus poussé sur les surveillants pénitentiaires au contact de mineurs, mais je vérifierai.
Il nous reste à vous remercier, Mesdames, pour la qualité de votre intervention et pour la passion que vous témoignez dans l'exercice de vos fonctions.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 18 h 20.