Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 27 octobre 2020 à 15h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous poursuivons cet après-midi l'examen des missions budgétaires. Vous avez reçu vendredi le programme de travail de la commission, avec les dates de passage de toutes les missions. La Conférence des Présidents arrêtera demain le calendrier d'examen du projet de loi de finances en séance. Je peux d'ores et déjà vous indiquer que l'examen devrait se dérouler en séance publique du jeudi 19 novembre au mercredi 25 novembre pour la première partie, puis du jeudi 26 novembre au mardi 8 décembre pour la seconde partie. Compte tenu du temps nécessaire pour l'examen des articles de première partie, et de la discussion sur la nouvelle mission « plan de relance », qui a occupé une dizaine d'heures à l'Assemblée nationale, certaines missions budgétaires devront nécessairement être programmées le samedi 28 novembre.

Pour ce qui concerne nos réunions de commission, je vous indique que les notes de présentation des rapporteurs spéciaux sur leurs missions sont disponibles la veille du passage en commission sur l'espace intranet Demeter. Je vous invite, ainsi que vos collaborateurs, à vous y reporter, ces notes ne faisant dès lors plus l'objet d'un envoi par courriel. En cas de difficultés pour accéder à cet espace, les services de la commission sont à votre disposition.

Enfin, nous privilégions, dès lors que c'est possible, les réunions dans des grandes salles pour permettre à tous les membres de la commission d'y participer dans le respect des normes sanitaires, mais à partir d'aujourd'hui, ces réunions sont également ouvertes en visioconférence pour les sénateurs qui seraient empêchés de se déplacer en raison de la situation sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Ne voteront cependant que les membres présents physiquement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Oui, et une seule délégation de vote sera autorisée par personne.

Nous examinons désormais le rapport de M. Savoldelli sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

La mission « Remboursements et dégrèvements » retrace les dépenses budgétaires résultant mécaniquement de l'application des dispositions prévoyant des dégrèvements, des remboursements ou des restitutions d'impôt. Le caractère mécanique de ces dépenses implique que les crédits de la présente mission soient évaluatifs ; ils ne constituent pas un plafond, à la différence des missions budgétaires classiques.

La mission est composée de deux programmes, l'un consacré aux remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, l'autre aux mêmes opérations pour les impôts directs locaux.

Pour 2020, 126 milliards d'euros de crédits - c'est plus que le plan de relance annoncé par le Gouvernement ! - sont demandés au titre de la présente mission, soit une baisse significative de près de 14 milliards d'euros par rapport à la loi de finances pour 2020, Cette baisse très importante s'explique notamment, s'agissant des impôts d'État, par un ralentissement des restitutions de TVA en 2021. En effet, afin d'aider les entreprises à faire face aux difficultés de trésorerie rencontrée pendant la crise, les restitutions de TVA se sont accélérées en 2020, une baisse de 5 milliards d'euros étant prévue pour 2021. Le coût de plusieurs contentieux devrait également se réduire en 2021.

Elle s'explique également par la contraction des crédits du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » dans le contexte de la réforme de la taxe d'habitation et des impôts de production.

Au total, l'augmentation des dépenses du programme depuis 2013 devrait atteindre 55 milliards d'euros cette année. Ce montant considérable justifierait un renforcement des dispositifs d'évaluation des politiques publiques financées par le programme ainsi que l'augmentation des moyens affectés au contrôle, en particulier en matière de fraude à la TVA. À titre de comparaison, l'augmentation des crédits en sept ans correspond à la totalité des crédits dédiés annuellement à la mission « Enseignement scolaire ».

Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État sont évalués à 119,2 milliards d'euros en 2021. Ce montant est en augmentation d'1,5 milliard d'euros par rapport à la prévision pour cette année, dans le prolongement de la hausse quasi ininterrompue de ces crédits depuis 2010.

Il y a lieu de constater que l'année 2020 a été marquée par un plus haut historique, à près de 130 milliards d'euros, la consommation des crédits ayant été de plus de 11 milliards d'euros supérieure à la prévision de la loi de finances initiale.

Plusieurs paramètres permettent d'expliquer cette augmentation pour 2020. Les remboursements de crédits de TVA représentent en valeur la part la plus importante des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État et sont particulièrement dynamiques. Avec 56,6 milliards d'euros évalués pour 2021, ces opérations devraient redescendre en 2021 au niveau de 2019 après une année 2020 marquée par un record de consommation à plus de 61 milliards d'euros. En sept ans, la sous-action relative aux restitutions de TVA a augmenté de 14,2 milliards d'euros. Je considère qu'il est nécessaire de fournir une information approfondie aux parlementaires sur les causes de cette trajectoire de hausse.

D'autre part, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) continue à peser sur les remboursements et dégrèvements. Après avoir atteint quasiment 20 milliards d'euros en 2019, le coût budgétaire du dispositif en 2020 est resté élevé, et même supérieur aux prévisions initiales pour 2020. La sous-action dédiée devrait être en baisse en 2021, mais le dispositif ayant été transformé en nouvelles réductions de cotisations sociales employeurs, le coût pour les finances publiques reste conséquent.

Les coûts des contentieux fiscaux sont retracés au sein du programme 200. Il s'agit principalement des grands contentieux fiscaux de droit de l'Union européenne, dont le coût pour l'État est très élevé. Pour fournir quelques exemples, il s'agit notamment du contentieux OPCVM, qui devrait représenter près de 11 milliards d'euros, de celui sur la taxe additionnelle sur les dividendes, pour 9,5 milliards d'euros, ou sur le précompte mobilier, pour un peu plus de 5 milliards d'euros. Je relève dans mon rapport la priorité donnée par les institutions de l'Union aux marchés et à l'égalité de traitement entre les entreprises par rapport aux objectifs qui devraient constituer des priorités pour l'Union : urgence sociale, économique et environnementale.

De plus, la course au moins disant en matière de fiscalité des entreprises, tant au niveau européen que mondial, conduit à réduire toujours davantage le niveau d'impôt sur les sociétés sans jamais conduire à s'interroger sur le niveau le plus juste d'imposition des entreprises dans une société avancée.

J'ai fait le choix de m'intéresser particulièrement à trois sujets en partie retracés sur le programme 200: la question de la TVA, celle du crédit impôt recherche (CIR) et celle des règlements d'ensemble opérés par l'administration fiscale.

Dans son rapport de décembre dernier, la Cour des comptes a estimé la fraude à la TVA à près de 15 milliards d'euros. À l'instar de la Cour, je considère qu'un chantier de grande ampleur et de long terme doit être mené afin de parvenir à une estimation fiabilisée du niveau de la fraude. La mobilisation de l'ensemble des administrations concernées doit permettre de corriger les biais de sélection et de détection qui affectent les estimations disponibles à ce jour.

Il me semble, chers collègues, que nous sommes tous d'accord pour renforcer la lutte contre la fraude fiscale. Pour ce faire, l'information doit être décloisonnée et les services doivent travailler de façon coordonnée, autant au niveau national qu'européen et international. Les moyens humains doivent être renforcés et mieux spécialisés. Ce sont les conclusions que tirait déjà la Cour des comptes dans son référé de décembre 2018.

La lutte contre la fraude doit aussi permettre de dégager de nouvelles ressources publiques. Les taux de TVA doivent être revus à la baisse pour les produits et les services essentiels aux personnes et au maintien de leur dignité. Je pense par exemple au savon, au dentifrice, au gel douche ou encore au shampooing.

J'ai bien conscience que les taux réduits font l'objet d'un encadrement strict par le droit de l'Union européenne et c'est pourquoi je considère que la France doit impérativement porter une initiative au niveau européen concernant l'extension de ces taux réduits.

Par ailleurs, concernant le crédit impôt recherche, je considère le dispositif comme inadapté pour répondre aux grands enjeux de la recherche et du développement.

En effet, la plupart des études concluent à un effet de levier très limité, voire nul : pour 1 euro de CIR dépensé par l'État, les entreprises n'engagent pas ou peu de dépenses supplémentaires. Cette absence d'effet de levier est signe d'une profonde inadaptation du dispositif. De plus, malgré un coût élevé pour les finances publiques, de plus de 6 milliards d'euros, l'outil ne permet pas à l'État de déterminer des priorités stratégiques pour la recherche et le développement afin de répondre aux grandes problématiques actuelles, notamment sanitaires, environnementales ou encore sociales.

Enfin, cette dépense est en grande partie imputable aux grandes entreprises qui utilisent souvent le CIR au sein de stratégies d'optimisation fiscale. Une étude d'Oxfam indique en effet qu'en « 2015, sur 14 000 entreprises ayant bénéficié du CIR, 42 grandes entreprises, soit 0,3 % des bénéficiaires, se sont accaparé à elles seules 31 % des créances du CIR. »

Ainsi, je plaide pour le rétablissement d'un plafonnement du bénéfice de ce dispositif à 16 millions d'euros, apprécié au niveau du groupe.

Enfin, je souhaite aborder la question des « règlements d'ensemble », qui permettent à l'administration d'accorder au contribuable une minoration du montant des pénalités dues, mais également des droits demandés. Cette pratique est utilisée lors de redressements complexes, en matière de fiscalité internationale notamment. D'après le rapport récemment remis au Parlement sur le sujet, la pratique vise à faciliter la conclusion de certains contrôles dans les cas où il existe « des difficultés à établir avec suffisamment d'exactitude le quantum des rectifications [...] ou un véritable aléa juridique. »

Dans ces affaires, l'État renonce non seulement à percevoir certaines pénalités, mais accepte également de voir les droits réduits. Sur les 116 règlements d'ensemble opérés en 2019, portant sur une remise totale 1,6 milliard d'euros, les droits ont été minorés de 1,12 milliard d'euros.

Alors que les bases légales de cette procédure ne sont pas clairement définies, le pouvoir discrétionnaire laissé à l'administration de renoncer à des droits qui devraient être perçus en vertu de dispositions législatives ne peut aucunement satisfaire le Parlement.

J'en viens maintenant au second programme de cette mission qui est consacré aux dégrèvements et remboursements d'impôts locaux. En 2021, les crédits du programme s'effondrent puisqu'ils passent de 23 milliards d'euros à 7 milliards d'euros. Deux évènements expliquent cette contraction. D'abord, la réforme de la taxe d'habitation et, ensuite, la réforme des impôts de production.

S'agissant de la réforme de la taxe d'habitation (TH), il est utile de se rappeler que nous arrivons, en 2021, dans la deuxième phase de la réforme. Jusqu'ici, l'allègement introduit en loi de finances pour 2018 avait pris la forme d'un dégrèvement et, par voie de conséquence, son coût était retracé par la mission dont je rapporte les crédits.

La mise en oeuvre progressive de ce dégrèvement s'était ainsi traduite par une hausse importante des crédits de la mission : + 3 milliards d'euros en 2018, + 6 milliards d'euros en 2019 et + 14 milliards d'euros en 2020.

À compter de 2021, ce dégrèvement est transformé en exonération et le produit de la taxe d'habitation est perçu par l'État. Des 15 milliards d'euros de dégrèvement de taxe d'habitation retracés l'année dernière que reste-t-il à rapporter ? 700 millions d'euros composés principalement de quelques contentieux résiduels.

C'est ainsi qu'avec la taxe d'habitation sur les résidences principales, disparaissent quasiment les deux tiers des crédits du programme.

Néanmoins, si on allège la charge de votre rapporteur spécial, mes chers collègues, on renforce son inquiétude d'élu local. Il faut rappeler, en effet, qu'à compter de l'année à venir les EPCI et les départements percevront de la TVA dans le cadre de cette réforme. Une TVA inéquitable par construction et dont le produit est fortement soumis aux aléas économiques de surcroît.

Qu'on se rassure, toutefois, car le ministre de l'action et des comptes publics avait rappelé lors de nos débats sur le PLF l'an dernier qu'une contraction de la TVA était assez improbable. Cela doit nous rassurer d'autant plus que pour les départements, par exemple, ces recettes de TVA vont représenter plus de 20 % de leurs recettes de fonctionnement. En économie on appelle cela un cygne noir, c'est-à-dire un évènement dont la survenue est plutôt improbable, mais dont les effets sont dévastateurs.

Pourtant peut-on considérer comme improbable un évènement qui est survenu deux fois en un peu de plus de dix ans, c'est-à-dire lors de la crise de 2008 et au cours de cette année ? Le cygne me semble plus gris que noir.

Que penser, alors, des mécanismes de garanties - presque inexistants - qui accompagnent cette réforme ? Que dire de l'amendement introduit à l'initiative du Gouvernement à l'Assemblée nationale et qui vise à rendre contemporain les versements de TVA, c'est-à-dire à s'assurer qu'une chute de la TVA frappe bien immédiatement les collectivités locales ?

Je crois que les inquiétudes exprimées à l'encontre de cette réforme par presque chacun d'entre nous l'année dernière sont plus que légitimes et doivent être entendues.

La seconde raison pour laquelle les crédits diminuent cette année réside dans la mise en oeuvre de la réforme des impôts de production prévue aux articles 3 et 4 du projet de loi de finances. La première mesure consiste à supprimer la part de contribution sur la valeur ajoutée (CVAE) actuellement perçue par les régions. La seconde mesure consiste à réformer les modalités d'évaluation de la valeur locative des locaux industriels.

Au total, le Gouvernement s'attend à une diminution de l'ordre de 10 milliards d'euros de la CVAE, de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) acquittées par les entreprises. En conséquence, le montant des dégrèvements et des remboursements opérés au titre de ces impôts et retracés par le programme 201 diminuera également.

Là encore, j'estime que ces réformes sont contestables. D'abord, il y a le principe même d'organiser des allègements de cette ampleur sans que ne soit proposée aucune contrepartie.

Ensuite, il y a la méthode retenue pour compenser les collectivités locales. Pour les régions, un accord a été trouvé entre l'État et l'association des régions de France pour remplacer les anciennes recettes de CVAE par de la TVA.

Avant que nous n'entamions dans quelques jours le débat sur ce sujet en commission comme en séance, il me semble utile de rappeler que c'est encore le législateur qui détermine les règles de la libre administration des collectivités locales et les ressources dont elles disposent. Il me semble que nous aurions tout à fait le droit et qu'il serait utile de nous interroger sur le caractère souhaitable ou non de cet accord qu'on nous demande d'avaliser. Pour le bloc communal, on propose d'instituer un prélèvement sur les recettes de l'État. Or, il faut garder à l'esprit que ce qu'une loi de finances fait, une autre loi de finances peut le défaire. Ainsi, je pense qu'il faut être optimiste pour croire que cette compensation ne sera pas ajustée à l'avenir comme l'ont été toutes celles qui l'ont précédée.

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, je vous invite à ne pas adopter les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » ont un caractère purement évaluatif. La mission retrace des mouvements mécaniques de crédits, liés directement aux modalités des différents impôts, à des politiques publiques, comme les crédits d'impôt, ou encore à la gestion des produits d'imposition, comme les dégrèvements. Le vote de la mission revient simplement à valider la prévision proposée par le Gouvernement sur les mouvements de crédits attendus en 2021 en application des dispositions législatives, et en particulier fiscales.

J'aurais trois questions. Tout d'abord, quelles ont été les conséquences de la mise en oeuvre du prélèvement à la source sur les crédits de la mission ?

Ensuite, au-delà de la diminution des dégrèvements de CVAE et de CFE, quels sont les facteurs qui peuvent expliquer la réduction des crédits de l'action « Remboursements et dégrèvements d'imposition économique » ?

Enfin, quel est le montant de la provision passée au titre du contentieux lié à la contribution au service public de l'électricité (CSPE) ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je veux revenir sur le coût pour les finances publiques de la suppression de la taxe d'habitation. On constate que le coût est de + 3 milliards d'euros en 2018, + 6 milliards d'euros en 2019 et + 14 milliards d'euros en 2020, soit 23 milliards au total. Mais, inversement, il faut aussi déduire le montant des exonérations qui existaient déjà avant et que l'État compensait déjà. Au total, j'estimais le coût de cette suppression à 19 milliards d'euros. Cette évaluation est-elle bonne ?

Nombre de communes sont surprises lorsqu'elles reçoivent les états des services fiscaux qui leur notifient leurs bases de taxe d'habitation. Certaines communes, qui gagnent de la population, voient leur taxe foncière progresser, mais la TH progresse nettement moins... Il arrive parfois que la première notification de TH soit très basse et qu'elle soit suivie d'une forte correction ensuite. Avec la forfaitisation, les communes souhaitent être sûres que la totalité des bases ont bien été prises en compte. Comment s'assurer, auprès des services de l'État, que quelques centaines de millions d'euros, voire plus, ne s'évaporeront pas en 2021 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Un rapport de l'Assemblée nationale proposait il y a quelques années de faire le ménage parmi les niches fiscales. Le débat est ancien, mais la matière est mouvante. On comptait 451 niches fiscales en 2017 ; on en compte aujourd'hui 475. De petites niches peu rentables ont certes disparu, mais d'autres ont été créées. Il est donc difficile de s'y retrouver et d'estimer leur coût pour les finances publiques. Certaines niches, en outre, n'ont que des crédits estimatifs : seules 234 dépenses fiscales sur 475 font l'objet d'un chiffrage précis. Disposera-t-on à un moment ou à un autre, en loi de règlement par exemple, du coût de ces niches ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Vous avez évoqué la lutte contre la fraude à la TVA. Mais sur le terrain les effectifs des services de la direction générale des finances publiques baissent, des trésoreries ferment. Si les moyens humains se réduisent, comment lutter contre la fraude ?

Les élus sont aussi inquiets quant à la compensation de la suppression de la taxe d'habitation, alors que les recettes de TVA ne progressent pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

J'ai découvert dans le rapport que deux contribuables s'étaient vu imposer des niveaux d'imposition très élevés pour corriger des erreurs déclaratives. S'agit-il d'erreurs de traitement ou bien de contribuables particulièrement fortunés ?

Nous devons être prudents sur le CIR, qui me semble très important pour l'innovation et l'esprit d'entreprise en France. Nous avions constaté, lors des travaux de la commission d'enquête du Sénat sur la réalité du détournement du crédit d'impôt recherche, à quel point ce dispositif était apprécié par les entrepreneurs, non seulement les grandes entreprises, mais aussi les PME, qui peuvent mener une politique de recherche grâce à ce mécanisme. L'innovation est fondamentale dans l'économie d'aujourd'hui. Soyons donc prudents, pour ne pas prendre le risque de voir l'effort de recherche s'effondrer en France.

Enfin, peut-on être sûr que la baisse des impôts de production visera bien les entreprises industrielles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Meurant

À chaque déplacement de la délégation aux entreprises, la question du CIR est posée. Il s'agit de PME. La recherche permet de soutenir l'innovation et la croissance. Faut-il risquer de remettre en cause un dispositif qui bénéficie aux petites entreprises, et dont l'intérêt est clair dans l'enfer fiscal que constitue la France pour les chefs d'entreprise ? Je rappelle que la France est le pays de l'OCDE où les impôts sont les plus élevés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Vos propos contiennent des questions, auxquelles je m'efforcerai de répondre, et des appréciations, qui relèvent de l'opinion de chacun.

Concernant la mise en oeuvre du prélèvement à la source : trois éléments sont retracés sur la mission. D'une part, le crédit d'impôt de modernisation du recouvrement mis en oeuvre en 2019 pour résoudre la question de l'année blanche et éviter les doubles impositions, a représenté 6 milliards d'euros. D'autre part, à chaque début d'année, un acompte de 60 % des réductions et crédits d'impôt est versé aux contribuables, pour un coût annuel de 5,5 milliards d'euros. Enfin, les restitutions en cas de trop-perçu sont versées l'année suivante et ont représenté en 2020 un peu plus de 11 milliards d'euros.

Le Gouvernement estime que la réforme des impôts de production - CVAE, CFE et TFPB - représente une économie d'impôt de 10 milliards d'euros pour les entreprises. Quant à la provision liée à la CSPE, je vous répondrai plus précisément ultérieurement.

La suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales représente une moindre recette de l'ordre de 23 milliards d'euros ; l'estimation avancée par M. Dallier est donc juste. En 2020, les bases de TH ont évolué de 0,9 %, et non par rapport à l'inflation comme le prévoyait le droit antérieur à la réforme de la taxe d'habitation, ce qui est donc moins favorable. Nous avions posé, l'année dernière, unanimement, la question de la juste compensation, mais n'avions pas été entendus. Le montant des retours aux collectivités territoriales est d'environ 23 milliards. Toutefois, compte tenu du fait que l'État assumait le coût de certaines exonérations, la charge nette pour lui s'élèverait plutôt à 18 milliards d'euros.

Sur la question des dépenses fiscales, la mission « Remboursements et dégrèvements » traite seulement des restitutions d'impôts et non des réductions d'impôt. C'est bien dommage, car elles ne font l'objet de quasiment aucune évaluation. Il serait sans doute pertinent que notre commission s'occupe davantage de ce sujet. Au niveau de la mission dont je rapporte les crédits, les restitutions pour l'impôt sur les sociétés représentent tout de même un montant d'un peu plus de 12 milliards d'euros.

Par ailleurs, je crois que l'on ne peut pas évaluer le CIR uniquement au regard de l'effort global de recherche et développement mais que l'on doit bien voir que la dépense n'est pas toujours efficace.

Je sais que nous sommes divisés sur la réforme des impôts productifs. Une réforme du calcul de la valeur locative cadastrale des locaux industriels est en cours. La notion me semble claire, mais il reste à savoir comment elle sera conduite ensuite sur le plan administratif. En tenant compte de cette réforme et de celle de la CVAE, l'effet sera plus diffus : on peut estimer, à ce stade, qu'elle bénéficiera à l'industrie pour 40 %.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

Chaque année le projet de loi de finances fournit une évaluation du prélèvement sur recettes du budget de l'État qui est versé au profit de l'Union européenne (PSRUE). Le montant de ce prélèvement constitue l'élément essentiel de la participation de la France au budget européen, auquel il faut ajouter les droits de douanes nets pour obtenir le montant total de notre contribution.

Si notre participation au budget de l'Union européenne constitue une obligation des traités, l'examen de ces crédits répond néanmoins à une exigence de contrôle démocratique.

Avant de vous détailler le montant du prélèvement européen, il est nécessaire de rappeler que notre contribution dépend directement de l'issue des négociations du prochain cadre financier pluriannuel (CFP).

Après deux ans de négociations houleuses, les États membres ont trouvé un accord sur le budget pluriannuel de l'Union européenne lors du Conseil européen qui s'est tenu du 17 au 21 juillet derniers. Cet accord a été obtenu dans un contexte de fortes attentes des citoyens européens sur la réponse à apporter à la crise. Dans cette perspective, l'accord de juillet constitue un tournant budgétaire et politique majeur. Il définit un CFP dit « socle » s'élevant à 1 074 milliards d'euros en crédits d'engagement, et qui sera complété par un instrument de relance, doté d'une enveloppe de 750 milliards d'euros.

L'articulation entre le CFP socle et cet instrument de relance retient un schéma inédit, marqué par le souci de l'Union européenne d'accroître sa force de frappe budgétaire dès l'année prochaine. Le plan de relance européen sera financé par des ressources levées sur les marchés financiers par la Commission européenne, au nom de l'ensemble des États membres. Il se répartira entre des prêts, à hauteur de 360 milliards d'euros, et des subventions de 390 milliards d'euros. Ces sommes transiteront par le budget européen, soit via des programmes qui existent déjà, soit par un nouveau programme intitulé « facilité pour la reprise et la résilience ». Cette facilité constitue la clé de voûte du plan de relance européen : premièrement, elle concentre la totalité des prêts de l'instrument de relance, et la majeure partie des subventions - 312,5 milliards d'euros ; deuxièmement, les modalités d'allocation et de décaissement de ses crédits diffèrent de celles en vigueur pour les fonds structurels européens traditionnels.

Au titre de cette « facilité », la France devrait bénéficier d'une enveloppe de 40 milliards d'euros courants, sur laquelle le Gouvernement compte pour financer son plan de relance, soit 37,5 milliards d'euros constants.

Toutefois, des interrogations subsistent actuellement sur la mise en oeuvre du nouveau CFP et du plan de relance.

Premièrement, les négociations entre le Parlement européen et le Conseil continuent d'achopper sur certains points, notamment l'augmentation de quelques programmes budgétaires et le mécanisme de conditionnalité des fonds liée au respect de l'état de droit, auxquels tient le Parlement européen.

Deuxièmement, des interrogations demeurent quant à la gouvernance et au décaissement des crédits du plan. En effet, si la procédure de décaissement est guidée par le souci de garantir que les sommes issues du plan relance, et donc de l'endettement commun, sont utilisées à bon escient, force est de constater que cette procédure est complexe et longue. Les États membres devront présenter un plan national détaillant leurs projets d'investissement et de réformes, qui sera évalué par la Commission européenne et validé par le Conseil à la majorité qualifiée. Ensuite, le décaissement des crédits s'étalera entre 2021 et 2026, au fur et à mesure de l'atteinte d'objectifs intermédiaires. Dans ces conditions, il apparaît évident que les plans de relance nationaux restent en première ligne pour assurer le soutien à la reprise économique. Il faut être transparent : le plan de relance européen constitue bien un remboursement a posteriori des dépenses engagées par les États membres dans leur plan de relance national.

Comment le plan de relance européen est-il financé, et dans quelle mesure la France devra-t-elle participer à son financement ? Cette équation budgétaire comporte encore plusieurs inconnues. En effet, les sommes empruntées seront remboursées à partir de 2028, ce qui permet de ne pas peser sur les finances publiques des États membres dans les premières années. Toutefois, en l'absence de nouvelles ressources propres, le remboursement sera effectué par les États membres, en fonction de leur part dans le revenu national brut (RNB) de l'Union européenne. Pour la France, cela signifie que le remboursement du plan de relance européen pourrait s'élever à 2,5 milliards d'euros par an.

Toutefois, le pessimisme n'est pas encore totalement à l'ordre du jour, puisque le Conseil européen a fait de l'introduction de nouvelles ressources propres une priorité. Ainsi, dès 2021, sera introduite une nouvelle ressource fondée sur le taux de recyclage de déchets plastiques. La Commission européenne devra également présenter des propositions relatives à un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, à une taxe numérique, un système révisé d'échange de quotas carbone, et éventuellement une taxe sur les transactions financières. Dans ces conditions, l'accord du 21 juillet a apporté, dans l'urgence, une réponse budgétaire novatrice, mais qui occulte de façon préoccupante la question du financement du plan de relance. Le coût in fine pour la France dépendra de la nature des nouvelles ressources qui seront mises en oeuvre. Il faudra être particulièrement vigilant à ce qu'elles ne soient pas vécues comme la création d'un impôt supplémentaire par nos concitoyens.

Ces négociations viennent percuter la procédure d'examen du projet de budget européen pour 2021, qui suit son cours, mais dépend de l'issue des négociations du règlement du CFP. Dans ce contexte, l'évaluation du montant de la contribution de la France pour 2021 constitue un exercice de haute voltige.

Pour 2021, l'article 31 du projet de loi de finances évalue à 26,9 milliards d'euros le montant du PSRUE, soit une hausse de 15 % par rapport à la dernière prévision d'exécution pour 2020. Pour rappel, le montant de ce prélèvement est évalué à partir, d'une part, du besoin de financement de l'Union européenne pour 2021, qui dépend du budget pour cet exercice, qui lui-même dépend de l'adoption du nouveau CFP et du solde de 2020 qui sera reporté sur 2021 ; et, d'autre part, à partir des données prévisionnelles des ressources propres de l'Union assises sur la TVA, le RNB, et les droits de douane.

Compte tenu de ces hypothèses, l'évaluation de ce montant est très incertaine cette année. En effet, les perspectives économiques dégradées rendent les ressources propres de l'Union volatiles, et le règlement sur le CFP n'a pas encore été formellement adopté.

La hausse du PSRUE anticipée en 2021 résulte essentiellement de quatre facteurs : le retrait du Royaume-Uni du budget européen, alors qu'il faisait partie des contributeurs nets ; le niveau de dépenses de l'Union pour 2021 qui devrait être supérieur avec l'entrée en vigueur du nouveau CFP ; les conséquences économiques de la crise sanitaire, qui réduisent les ressources propres de l'Union européenne ; et les modifications des règles de calcul des contributions nationales pour le prochain CFP.

Sur ce dernier point, il convient de souligner que l'accord du 21 juillet dernier constitue un renoncement de la France sur la question des rabais. La France, comme la Commission européenne, défendait la suppression des rabais dans le prochain CFP, à la faveur du départ du Royaume-Uni. Or, non seulement les rabais forfaitaires ont été maintenus, mais ils ont également été augmentés. Un rabais a également été introduit sur la nouvelle ressource « plastique ». Par ailleurs, contrairement à la position de la Commission européenne et de la France, le taux de retenue pour frais de perception appliqué aux droits de douane a été augmenté de 20 % à 25 %.

Ainsi, la nécessité de parvenir à un accord a constitué une priorité supérieure à la préservation d'une partie des intérêts budgétaires de la France. Toutefois, si le coût budgétaire aurait pu être mieux maîtrisé, il est certain que le coût politique d'une absence d'accord aurait été beaucoup plus élevé.

En outre, la France a quand même réussi à faire prévaloir certaines de ses positions sur le plan des dépenses, notamment en matière de politique agricole commune (PAC).

Concernant le prélèvement sur recettes, en l'état actuel des données disponibles, je recommande donc à la commission l'adoption sans modification, de l'article 31 du projet de loi de finances pour 2021.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

On constate les difficultés à évaluer le montant du PSRUE et l'important aléa que le Brexit continue de constituer pour l'Union européenne et ses États membres.

Le plan de relance européen est important, en dépit de l'incertitude quant au calendrier de distribution des sommes annoncées aux États et nécessaires pour financer leurs actions. N'avez-vous pas le sentiment toutefois que les États membres se sont un peu engagés sans connaître précisément la charge budgétaire que nos finances publiques devront assumer au titre du remboursement du plan de relance européen à partir de 2028 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Je suis satisfait de constater que notre rapporteur fait la distinction entre euros constants et euros courants. C'est essentiel, d'autant plus lorsque les échéances sont lointaines. Nous en verrons demain tout l'intérêt dans le projet de loi de programmation de la recherche.

Nous avons tous été surpris de l'ampleur de la hausse de la contribution française au budget européen cette année. Avons-nous pris conscience que les 40 milliards constituent une bombe à retardement, car il faudra bien un jour rembourser ? Finalement, au-delà du plan de relance, je crains que notre relation à l'Europe ne change pas fondamentalement, en dépit du Brexit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

Il est vrai que les États membres se sont, d'une certaine manière, lié les mains en s'engageant sur un plan de relance, sans savoir s'il pourra être financé par l'introduction de nouvelles ressources propres.

Monsieur Rapin, la forte hausse de notre contribution est due en partie au retrait de la contribution britannique au budget européen, qui occasionne un surcoût de 2,1 milliards d'euros par rapport à 2020. S'agissant du remboursement du plan de relance européen, celui-ci n'interviendra qu'à partir de 2028, donc il n'a pas encore d'effet direct sur la contribution française au budget européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

J'ai entendu à la radio ce matin, que les 40 milliards d'euros dévolus à la France tardaient à arriver. Qu'en est-il ?

En ce qui concerne les ressources propres, nous ne pouvons que nous féliciter des pistes avancées, comme la taxation des géants du numérique à l'échelle européenne. La taxe sur les transactions financières est une arlésienne dont on parle depuis 2011 : tout le monde trouve l'idée intéressante, mais on n'arrive pas à s'entendre sur ses modalités ; pourtant, une telle taxe, avec un taux de 0,1 %, dégagerait des recettes de 36 milliards d'euros par an ; ce n'est pas rien ! Il semblerait que la France et l'Allemagne soient enfin d'accord, mais la fiscalité relève de la règle de l'unanimité. Où en sommes-nous en Europe sur ce sujet ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Nous avons été nombreux à nous réjouir de l'annonce du plan de relance européen et de l'enveloppe de 40 milliards pour la France. Cela a permis d'éviter que le doute ne s'installe sur la santé économique de certains pays et que les taux d'intérêt n'augmentent. Toutefois, les 40 milliards d'euros, comme l'a expliqué notre rapporteur, constituent en fait un remboursement de notre plan de relance, et ce remboursement devra être remboursé, contrairement à ce que beaucoup ont cru : l'argent ne tombe pas du ciel ! De plus, on risque de toucher une enveloppe budgétaire inférieure à ce que nous devrons rembourser : c'était le prix à payer pour la France pour que cet accord voie le jour. Soit les États auront à rembourser, soit il faudra créer des impôts européens qui pèseront sur les particuliers, les entreprises ou les banques. Donc il conviendrait de faire de la pédagogie sur cet accord, qui risque, in fine, de nous coûter cher.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Enfin, quelle sera la maturité de la dette à partir de 2028 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Segouin

Je voulais poser la même question ! On contracte encore de la dette que l'on remboursera à partir de 2028. J'ai l'impression que l'on entre à nouveau dans un mécanisme de crédit, dans lequel on remboursera uniquement l'intérêt de la dette chaque année et où l'on devra faire un nouvel emprunt pour rembourser le capital. Cette méthode de gestion de la dette, jusque-là particulière à la dette française, deviendra-t-elle sa manière de gérer sa dette européenne ? Avant de souscrire un prêt, les ménages ou les entreprises commencent par se demander comment ils le rembourseront. Je suis surpris que l'on ne sache pas encore quelles recettes supplémentaires on mobilisera pour rembourser cet emprunt à l'échelle de l'Europe. Si ce remboursement doit être effectué au niveau des États, la France, comme l'a expliqué Philippe Dallier, sera clairement pénalisée en raison de l'écart entre le montant du remboursement et celui de la dette qu'elle a réellement contractée.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Notre contribution à l'Union européenne augmente nettement, passant d'une vingtaine de milliards à 26,9 milliards pour le prélèvement sur recettes européen. Le changement de taux de retenue pour frais de perception de douane qui passe de 20 à 25 % est-il déjà intégré ? Cette hausse est-elle exceptionnelle ou pérenne ? De même, comment évoluera l'écart entre notre contribution et ce que l'on perçoit du budget européen ? Les élus des territoires ruraux et littoraux sont inquiets quant à la manière dont seront gérés les crédits destinés au monde rural et à la pêche. La gestion sera-t-elle décentralisée ? La tendance ne semble toutefois pas être celle-là ...

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Sautarel

L'accord trouvé soulève bien des interrogations. Le plan de relance devra être remboursé. Je partage les remarques de mes collègues. De même, les rabais ont non seulement été maintenus, mais ils ont augmenté. À tel point que l'on peut s'interroger sur le bénéfice réel de cet accord pour notre pays : notre contribution au budget européen s'élèvera à 26,9 milliards d'euros, alors que les dépenses européennes réalisées en France se sont élevées à 15,1 milliards d'euros en 2019... On manque aussi de lisibilité sur la manière dont les programmes seront répartis. Des plans stratégiques nationaux devront être définis parallèlement à la renationalisation de la politique agricole commune, avec des risques de pénalités si les objectifs, comme le verdissement de la politique agricole commune (PAC) par exemple, n'étaient pas tenus. Nous devons donc faire preuve de vigilance. Les citoyens et contribuables doivent être mieux éclairés. Un effort de pédagogie s'impose pour bien faire comprendre le lien entre notre pays et l'Union européenne et l'effort de notre pays en faveur de l'Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Ne pensez-vous pas finalement que la France consent à un effort net supplémentaire parce qu'elle est la mauvaise élève de l'Union européenne en matière de finances publiques ? N'est-ce pas, somme toute, une manière d'acheter la bienveillance des autres États ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Le Parlement est né de la nécessité de consentir aux impôts. Nous sommes étonnés de découvrir, mais c'est un bon rappel à l'ordre, que l'accord du Conseil européen du 21 juillet devra être ratifié par le Parlement européen. Cet accord risque-t-il d'être modifié à cette occasion ?

La France touchera peut-être 40 milliards d'euros. En général, qui paie, commande. Or, en l'occurrence, nous sommes gouvernés par une Commission que nous rembourserons ultérieurement. C'est un petit peu difficile à comprendre sur le plan politique. Je me suis réjoui, en raison de mes convictions européennes, qu'il y ait eu un accord, mais si l'on multiplie de tels accords, qui nous placent en situation d'être contrôlés pour gérer une somme que nous rembourserons, les convictions européennes, déjà contestées en France, risquent d'être affaiblies...

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Féraud

Notre rapporteur a bien montré que les incertitudes étaient nombreuses. On présente les milliards comme des additions, alors qu'il s'agit plutôt de transferts et de substitutions.... Les rabais ont été maintenus et ce système, qui ne profite pas à la France, bénéficie aux pays les plus riches de l'Union européenne. Quelle est la part de la hausse de notre contribution liée au maintien de ces rabais ?

Ensuite, ces 40 milliards font, si j'ai bien compris, partie du plan de relance français, alors que l'on a parfois eu le sentiment que le plan de relance français était présenté comme étant beaucoup plus important. Nous avions pourtant déjà été nombreux à estimer qu'un plan de 100 milliards d'euros n'était pas suffisant. Il est dommage que le plan de relance européen ne s'ajoute pas aux plans de relance nationaux. En tout cas, il est dommage que le Gouvernement n'ait pas présenté les choses clairement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Je partage ce qui vient d'être dit. On peut raisonnablement se poser la question du lien entre le budget européen et l'État de droit. En outre, si le versement des 40 milliards était retardé, cela entraînerait une vraie question démocratique. Cela vaut pour la France, comme pour tous les autres pays.

Je m'interroge aussi sur les déficits. On nous demande de respecter les règles budgétaires européennes communes. Pourquoi pas, mais le déficit budgétaire des pays de la zone euro avoisinera les 1 000 milliards d'euros à la fin de l'année, soit 8,9 % du PIB selon les calculs du Financial Times. C'est dix fois plus qu'en 2019 ! Ne faudrait-il pas, dès lors, modifier la procédure de déficit excessif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

L'accord doit maintenant être approuvé par le Parlement européen. Peut-on vraiment s'attendre à ce que l'enveloppe de 40 milliards soit débloquée rapidement ? Et je ne parle pas de la clause liée au respect de l'État de droit...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

La somme de 40 milliards d'euros n'est qu'une estimation. Elle sera calculée selon une clé de répartition intégrant des critères dynamiques visant à tenir compte des effets économiques de la crise, et pour lesquels les données ne seront disponibles qu'en 2022. 70 % des sommes seront engagés avant 2023 et les paiements interviendront avant 2026. Ceux-ci seront conditionnés, car les États auront à mettre en place des programmes nationaux de réformes, qui devront être validés par la Commission et les autres États membres, en raison des suspicions des États frugaux, qui redoutent que les autres États ne procèdent à des dépenses inutiles. Les États devront atteindre des objectifs précis. Autant d'obstacles qui compliquent la délivrance de ces fonds.

Monsieur Dallier, la maturité de la dette est de trente ans. Les remboursements commenceront en 2028 et s'étaleront jusqu'en 2058.

Le changement de taux de retenue pour les frais de perception de douane est déjà intégré dans la contribution en 2021. La France reste une contributrice nette au budget européen, mais est, en même temps, le deuxième bénéficiaire des fonds européens derrière la Pologne. La PAC reste une politique importante. La France, conformément d'ailleurs aux résolutions que nous avions votées en ce sens au Sénat, avait insisté pour qu'elle ne soit pas oubliée dans le cadre de la révision du prochain CFP.

L'accord sur le CFP obtenu entre les États membres n'entrera en vigueur que s'il est approuvé par le Parlement européen qui ne dispose pas du droit d'amendement en l'espèce. Je partage vos doutes sur le calendrier... Le Parlement européen insiste sur le respect de l'État de droit, mais vu la position des Polonais et des Hongrois, il semble difficile de trouver une solution.

Les rabais ont été maintenus et même augmentés, et un nouveau rabais a de surcroît été introduit sur la ressource plastique. La hausse de la contribution française en raison de l'ensemble des modifications des règles de calcul des contributions nationales actées dans l'accord de juillet dernier sera de 700 millions d'euros en 2021.

Enfin, les règles budgétaires européennes sont appelées à être modifiées. La Commission a déjà initié une réflexion pour les simplifier et la crise rappelle la nécessité de progresser sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous vous remercions pour ce rapport qui montre qu'il reste encore de nombreuses inconnues sur le plan de relance européen.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 31 du projet de loi de finances pour 2021.

La réunion est close à 16 h 25.