Nous entendons MM. Antoine Maucorps, chef de la mission de la tarification à la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), et Olivier Quoy, son adjoint.
Il s'agit d'une audition attendue et importante car la mission de la tarification a été désignée, par les précédents auditionnés, comme étant l'interlocuteur clé du contrat Écomouv', côté État. Nous recevrons le 11 février prochain M. Daniel Bursaux, directeur général des infrastructures, des transports et de la mer. Nous disposerons donc de deux auditions pour essayer de faire le tour des nombreuses questions que nous nous posons.
Je vous invite, tout d'abord, à nous faire une brève présentation du rôle que la mission de la tarification a tenu, en amont dans la mise en place de l'écotaxe poids lourds et le choix du contrat de partenariat, puis dans la procédure de mise en place du contrat - mise en concurrence, dialogue compétitif, négociation des clauses... -jusqu'à la décision de suspension de l'écotaxe.
Nous attendons notamment que vous nous expliquiez clairement quelle est la situation du contrat aujourd'hui, où en sont les négociations avec Écomouv' et quels sont les risques encourus par l'État à la suite de cette décision de suspension.
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, MM. Antoine Maucorps et Olivier Quoy prêtent serment.
Je vais d'abord expliquer l'organisation de l'État et le rôle de la mission de la tarification. L'équipe projet pour la conduite de l'écotaxe poids lourds, qui n'est pas une structure administrative, est composée de la mission de la tarification, au sein de la DGITM du ministère de l'écologie, et de la mission taxe poids lourds, au sein de la sous-direction des droits indirects de la direction générale des douanes et droits indirects. Les deux directeurs généraux ont désigné un directeur de projet commun, moi-même. Je suis administrativement rattaché au ministère des transports en tant que chef de la mission de la tarification.
Pour la conduite de ce projet, je dispose de deux adjoints, Olivier Quoy, ici présent, et Anny Corail, chef de la mission taxe poids lourds au sein de la direction générale des douanes, que vous avez auditionnée la semaine dernière. Cette équipe a piloté les études préalables et la procédure d'attribution du contrat avec Écomouv' et pilote aujourd'hui la première phase de ce contrat, qui consiste en la conception et la réalisation du dispositif.
Pour compléter la description de l'organisation, il faut préciser que des cabinets de conseil ont assisté l'équipe projet. Tout d'abord, pendant la phase du dialogue compétitif, avant la signature du contrat, trois conseils différents sont intervenus, l'un technique, l'autre juridique et le dernier financier. Depuis la signature du contrat, un contrat d'assistance globale a été attribué à la société Capgemini.
Je voudrais également fixer quelques points de repères chronologiques. On peut dater le démarrage du projet de la taxe poids lourds au 1er janvier 2005 puisque c'est l'entrée en vigueur en Allemagne de la LKW-Maut, qui a entraîné un report de trafic sur le réseau routier français, en particulier sur l'autoroute le long du Rhin, en Alsace. Cet événement a conduit à instaurer, mi-2005, par la loi, la taxe poids lourds en Alsace.
Dès 2006, les premiers travaux ont porté sur la nature du prélèvement en droit national. En effet, au niveau communautaire, il n'y a pas d'ambiguïté, il relève du droit des redevances kilométriques, c'est-à-dire de la directive Eurovignette, comme l'a écrit, dès janvier 2006, la Commission européenne. En revanche, en droit national, la question n'est pas simple. Les analyses conduites pendant l'année 2006 ont toutes rapidement convergé sur le fait que ce devait être une taxe. La nature fiscale découle du fait que seuls les véhicules de transport de marchandises acquittent le prélèvement et qu'il n'est pas exclusivement affecté à l'entretien de la voirie routière. Ce n'est donc pas un péage en droit français.
En 2007, alors que les perspectives d'extension de l'expérimentation se précisent, l'analyse du projet, tant d'un point de vue technique que juridique, conduisent à s'interroger sur la possibilité de confier ou non à un ou plusieurs acteurs privés les missions de collecte et de contrôle de cette taxe. Cette année de réflexion conjointe entre le ministère des transports et la direction du budget se clôturera par l'avis du Conseil d'État du 11 décembre 2007 qui va jeter les bases et le cadre de cette externalisation en l'autorisant sous de strictes conditions.
Se posera alors la question des modalités pratiques de cette externalisation, qui seront inscrites dans la loi de finances pour 2009, votée fin 2008. Ces choix vont résulter de l'analyse menée avec la mission d'appui aux partenariats public-privé - la Mappp -, et conduira au choix de recourir à un contrat de partenariat public-privé. Néanmoins, ce contrat, comme vous avez pu le constater lors de vos auditions, a certaines spécificités par rapport à d'autres contrats de partenariat ou avec les concessions autoroutières. En particulier, le montant de la rémunération prévisible d'Écomouv' et les conditions de versement de cette rémunération sont indépendants de la mise en oeuvre de la taxe et n'ont pas de lien direct avec le montant de la taxe collectée.
Ces éléments ont été fixés et exposés, dès le début de la procédure, en 2009. Ainsi, l'appel public à candidature du 5 mai 2009 indique que « la rémunération du titulaire du contrat de partenariat sera versée dès la réalisation complète du dispositif de perception et de contrôle de la taxe poids lourds nationale. Cette rémunération pourra être ajustée en fonction de l'évolution de certains paramètres et sera liée à des objectifs de performance, qui seront déterminés par l'État au cours du dialogue compétitif ». Le déclenchement du paiement de la rémunération au partenaire privé a donc été, dès le début, conditionné à la réalisation complète du dispositif. La rémunération apparaît liée, par ailleurs, à des objectifs de performance, qui est le moyen le plus efficace, pour l'État, de s'assurer que le partenaire privé remplira correctement ses obligations contractuelles, et à certains paramètres - le nombre de redevables, le nombre de véhicules, par exemple -, c'est-à-dire des indicateurs reflétant la volumétrie du contrat.
Concernant la technologie utilisée, l'État avait le choix entre la localisation par satellite ou l'utilisation d'ondes à courte portée, ces deux seules technologies étant autorisées par la directive européenne « Interopérabilité ». Les études préalables n'ont pas montré d'avantages certains entre ces deux technologies. Le choix a donc été fait de conduire la procédure de dialogue compétitif sans favoriser l'une ou l'autre de ces technologies, en laissant les industriels, acteurs les mieux à même d'en déterminer les avantages et inconvénients, de proposer dans leur solution celle qu'ils souhaitaient utiliser.
De fait, le choix d'une localisation par satellite s'est fait dans le cadre de l'établissement des offres en 2010.
S'agissant du montant du marché, sur lequel beaucoup de questions ont été posées, nous pouvons rappeler que l'avis de notification du marché du 16 novembre 2011 précise que la rémunération prévisible est de 52 millions d'euros par trimestre, en valeur constante, hors taxes et en moyenne, soit un peu moins de 210 millions d'euros par an.
Le montant total du marché était, quant à lui, plafonné à 3,41 milliards d'euros, comme indiqué dans le communiqué de presse de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) du 7 septembre 2011, suite à son conseil d'administration autorisant cet engagement. Cette somme correspond à une estimation en euros courants, TVA incluse, conformément aux règles de la comptabilité publique.
Pour remplir ses missions, la société Écomouv' a été créée le 7 mars 2011, c'est-à-dire peu après le choix du candidat le mieux placé, la société Autostrade, par cette seule société, comme l'indique son inscription au registre du commerce, accessible sous forme d'extrait Kbis. Les sociétés SFR, SNCF, Steria et Thales ont pris des participations, le 26 octobre 2011, dans le capital de la société Écomouv' après la signature du contrat de partenariat signé le 20 octobre 2011, conformément aux stipulations du règlement de la consultation et dudit contrat.
Enfin, nous souhaitons vous exposer les grands principes et le contexte qui ont guidé ce projet.
En France, la tarification de l'usage du réseau routier national par les poids lourds repose sur les péages autoroutiers pour les autoroutes concédées, la taxe spéciale sur les véhicules routiers - taxe acquittée par les véhicules français en France - et, enfin, d'autres recettes telles que les accises sur les carburants. L'évaluation de l'imputation des coûts d'usage, dont les premières études datent de 1997, a montré l'ampleur du différentiel entre les coûts occasionnés par les poids lourds et les recettes collectées à ce titre, de l'ordre d'un milliard d'euros par an pour le réseau national. Cet écart est de fait couvert, jusqu'à aujourd'hui, par le budget général, c'est-à-dire par la participation du contribuable à travers l'impôt. Ce constat a conduit à un premier projet de tarification kilométrique de l'usage du réseau, proposé en 2003 et examiné dans le cadre du débat sur les grandes infrastructures, mais qui n'a pas abouti.
Les principaux partenaires européens, notamment ceux de grand transit - la Suisse et l'Allemagne dès 1998, l'Autriche dès 2002, la République Tchèque dès 2004 puis, plus récemment, la Slovaquie, la Slovénie et la Belgique - ont mis en place des tarifications kilométriques afin, d'une part, de répondre aux besoins de financement de leurs infrastructures et, d'autre part, de tenter de réguler le trafic routier par une tarification adaptée. L'objectif de ces politiques est d'adopter un système qui soit le plus équitable possible, mettant en application le principe « utilisateur-payeur », notamment en faisant participer les véhicules étrangers circulant sur les réseaux nationaux.
Les questions de la tarification de l'usage des routes ne peuvent être abordées nationalement mais relèvent, par essence, d'un cadre européen. À cet égard, tous les candidats admis à participer au dialogue compétitif étaient européens, soit par l'association de partenaires - notamment pour la construction des équipements embarqués - soit par la composition de l'actionnariat des sociétés participantes. Il existe par ailleurs une certaine réciprocité, les acteurs français étant présents en Allemagne, Slovaquie ou Irlande.
La mise en place de la tarification de l'usage des réseaux routiers par les poids lourds est fortement encadrée au niveau communautaire, la Commission européenne s'attachant, d'une part, à garantir la libre circulation des marchandises par la directive Interopérabilité et, d'autre part, à orienter des politiques en faveur des modes non routiers avec la directive Eurovignette. L'Union européenne recherche la mise en place de systèmes unifiés de télépéage permettant aux transporteurs d'acquitter les différents péages à l'aide d'un équipement unique et d'un contrat unique. L'une des principales caractéristiques et différenciations du projet écotaxe, en comparaison de projets européens, éventuellement de taille similaire, est la prise en compte de cette interopérabilité.
Dans tous les pays, la mise en place de dispositifs de télépéage s'est révélée techniquement et juridiquement complexe, notamment en Allemagne, Autriche et Slovaquie. Dans d'autres pays, les projets n'ont pas abouti, comme au Danemark et au Pays-Bas. À l'exception de la Suisse, dont la géographie et la position juridique par rapport à l'Union européenne sont particulières, les systèmes ont été mis en place via des contrats de service très étendus, eu égard à cette complexité.
Pour prendre en compte les contraintes du système européen de télépéage - c'est-à-dire la mise en place de l'interopérabilité - la taxe doit pouvoir être acquittée via un abonnement à une société de télépéage qui est un acteur de droit privé. Cette complexité technique oriente les réflexions vers la recherche de l'externalisation d'une partie des missions de collecte. Concrètement, l'entité responsable de la collecte de l'écotaxe doit contractualiser avec des sociétés de télépéage européennes qui ne sont pas connues a priori. Là réside une des difficultés. Après avoir sollicité plusieurs avis, on a conclu sur le recours à l'externalisation, dont l'une des modalités les plus importantes est la délivrance d'une commission par l'administration des douanes et droits indirects. C'est pourquoi, aujourd'hui, l'équipe projet chargée de mettre en oeuvre le contrat a un aspect bicéphale avec, d'une part, un contrat de partenariat signé entre Écomouv' et le ministre de l'écologie, représenté par M. Daniel Bursaux et, d'autre part, une commission délivrée par l'administration des douanes et droits indirects.
A ce stade, il est important de distinguer l'externalisation de certaines missions du recours à un contrat de partenariat. L'évaluation préalable qui a été soumise à l'avis de la Mappp avait retenu une comparaison entre ce contrat de partenariat et un schéma de maîtrise d'ouvrage publique - marché public global -, pour lequel l'exploitation du dispositif était intégrée pour une durée équivalente à celle du contrat de partenariat et qui n'exclut pas de confier des missions de collecte et de contrôle à des prestataires privés.
L'externalisation de certaines missions a poursuivi un objectif de simplification de la gestion technique du dispositif dans un cadre européen interopérable. Elle permet aujourd'hui une garantie de recouvrement des sommes, en déchargeant l'État d'une partie de ses missions par la garantie des sommes facturées et en fournissant un appui au traitement des réclamations, les missions de recouvrement forcé étant conservées par l'État.
Le recours au contrat de partenariat assure la prise en compte des enjeux d'exploitation dès la conception du dispositif et vise à impliquer fortement les acteurs industriels en les rendant intégralement responsables de la conception et de la réalisation du dispositif - ce qui permet d'optimiser les délais de réalisation, le passage de la phase de réalisation à la phase d'exploitation se faisant immédiatement après la mise à disposition, sans changer d'acteurs. De même, le contrat de partenariat permet de recourir au préfinancement de la réalisation du dispositif. À ce propos, je rappelle qu'aujourd'hui, l'État n'a pas payé Écomouv' pour la réalisation du dispositif.
Enfin, lorsque la procédure a été lancée, le choix technologique n'était pas effectué et donc, a fortiori, l'État n'était pas en mesure de définir précisément un cahier des charges aux différents candidats. Dans cette situation, la procédure la plus adaptée pour choisir le contrat le plus favorable à l'État est le recours à un dialogue compétitif, qui a été organisé sous un contrôle étroit de l'administration. Pour cela, une équipe projet associant les deux ministères les plus impliqués a été mise en place. Un comité interministériel regroupant les différents ministères concernés s'est réuni régulièrement. Une commission consultative, créée par décret, est intervenue aux moments les plus importants de la procédure - choix des candidats, recevabilité des offres et classement des offres.
Les choix et les arbitrages arrêtés en cours de procédure, ou depuis lors, se font en réunion interministérielle. Le contrat a été signé après avoir obtenu l'ensemble des avis requis, en particulier ceux des ministres du budget et de l'économie.
L'avancement du projet a mis en exergue la nécessité d'ajuster la définition de la taxe poids lourds, au sein du code des douanes. Ces ajustements se sont opérés en lois de finances rectificatives pour 2009, 2010, 2011 et 2012, sous le contrôle du Parlement.
Par ailleurs, il convient de rappeler qu'Écomouv' est intégralement responsable de la maîtrise d'ouvrage du contrat, c'est-à-dire de la conception et de la réalisation du dispositif. L'État ne valide pas les spécifications détaillées du dispositif. Il a cependant formulé des remarques qu'Écomouv' a l'obligation de prendre en compte pendant toute la phase de conception-réalisation. En 2013, une fois le dispositif achevé, Écomouv' a fait la recette de son dispositif. L'État y a participé en observant les tests menés. Une fois la recette achevée, l'État effectue les vérifications d'aptitude au bon fonctionnement (VABF), consistant à contrôler que le dispositif permet de remplir les spécifications fonctionnelles du contrat dans le respect du cadre législatif et réglementaire. Cette phase de vérification d'aptitude s'est répétée plusieurs fois en 2013, en raison de la constatation de défauts majeurs dans le dispositif. À l'issue de cette phase, Écomouv' a la responsabilité de conduire des vérifications en service régulier (VSR), c'est-à-dire de faire des tests dans une situation représentative de la réalité, notamment en termes de volume et d'acteurs. A ce stade, interviennent, non plus des techniciens, mais les opérateurs d'Écomouv', afin de s'assurer que le dispositif est prêt à démarrer.
Aujourd'hui, le dispositif a subi de façon positive la dernière VABF qui a été prononcée le 16 janvier dernier. Le dispositif ayant mûri progressivement, Écomouv' a pu procéder, par anticipation, à des tests à l'usage de la VSR, contrairement aux clauses initiales du contrat, si bien qu'Écomouv' nous a remis son rapport de VSR, que nous avons reçu le 20 janvier dernier, les deux dernières phases de tests ayant été menées en parallèle. L'État est en phase de vérification de ce rapport et dispose d'un délai de deux mois. Le contrat, de ce point de vue technique, est conduit de façon nominale eu égard au fait qu'il y a un retard significatif, puisque la fin de vérification de ces tests aurait dû être faite avant le 20 juillet 2013.
J'ai bien compris qu'il s'agissait d'un sujet complexe, mais je persiste à ne pas bien comprendre pourquoi on l'a complexifié davantage, alors que l'enjeu était de parvenir à une mise en oeuvre rapide du dispositif. Nous avons, à la fois, eu recours à une nouvelle technologie, et intégré au périmètre du contrat la collecte et le contrôle de la taxe, ce qui pose des problèmes juridiques et pratiques puisqu'il s'agit d'une externalisation de fonctions régaliennes. J'ai bien entendu que le Conseil d'État a affirmé que c'était possible, mais je n'ai encore jamais entendu que c'était la meilleure des solutions. Nous avons cumulé les conditions de la complexité. J'ai du mal à comprendre cette articulation.
S'agissant du choix technologique, des études préalables ont examiné les deux solutions autorisées dans le cadre européen. La localisation par satellite est un équipement un peu plus complexe, mais ne nécessite pas d'infrastructures sur le terrain pour la collecte de la taxe. La technologie des ondes à courte portée, aujourd'hui déployée sur les autoroutes, n'exige qu'un simple badge mais crée un besoin d'infrastructures. Or, le réseau taxable comporte beaucoup d'entrées et de sorties. L'arbitrage entre ces deux technologies n'a pu être réalisé par l'État avant le début de la procédure, ce sont les industriels qui ont choisi leur technologie. Les quatre candidats ont tous proposé une solution satellitaire.
Il s'agit d'une nouveauté technologique en France, mais qui avait déjà été mise en oeuvre en Allemagne avec la LKW-Maut, dont les premiers principes ont été fixés dès 1998.
S'il avait fallu que l'État assume lui-même intégralement toutes les missions et qu'il définisse l'ensemble des outils, sans passer par un partenaire unique, il aurait fallu opter pour un schéma d'allotissement, comme l'ont fait nos collègues hollandais. L'évaluation préalable compare deux marchés globaux, et ne comporte pas un tel schéma d'allotissement, ce qui aurait été le cas si on avait séparé, d'une part, les systèmes de collecte, avec des prescriptions sur les équipements embarqués et, d'autre part, le système de contrôle, avec des prescriptions spécifiques. C'est ce qui avait été engagé aux Pays-Bas, où un découpage fonctionnel des différentes entités a été opéré. Mais il a posé l'énorme difficulté d'avoir à traiter les spécifications non seulement de chacun des objets, mais aussi de leurs interfaces, ce qui a entraîné un certain retard, même si la décision d'abandon a été plus politique que technique. En Hollande, l'entité chargée de rédiger ces spécifications était dotée de 270 agents, État et conseil compris pour mettre en place ce type de marché alloti.
Pour revenir sur le choix technologique, l'étude préalable chiffre l'investissement à 230 millions d'euros pour la technologie satellitaire et à 530 millions d'euros pour la technologie DSRC. Finalement, on se retrouve avec un investissement de 650 millions d'euros avec la première technologie.
En dehors du choix technologique, pourquoi avoir davantage compliqué le projet en externalisant la collecte et en passant par un contrat de partenariat, alors que notre expertise dans ce domaine est limitée ?
L'équipe projet du côté de l'État comporte trois personnes. Est-ce bien vous qui avez rédigé l'évaluation préalable ?
La mission de la tarification est composée de cinq personnes, et la mission taxe poids lourds des douanes et droits indirects de sept personnes. Cela représente un noyau dur d'une douzaine de personnes, qui bénéficie en sus d'expertises ponctuelles d'autres services, de bureaux juridiques ou de la Mieppp de la DGITM par exemple.
L'évaluation préalable a été rédigée en décembre 2008. À l'époque où j'ai rallié le projet, le 1er novembre 2007, nous étions un peu moins nombreux. Il y avait trois personnes du côté du ministère de l'écologie et, du côté des douanes, c'était le bureau F1 qui était concerné. Il n'y avait pas encore de structure dédiée. J'étais rattaché à la mission interministérielle pour la tarification routière créée au sein de la direction générale des routes à l'été 2007.
Les conseils de l'État et l'équipe de la mission interministérielle pour la tarification routière. Les conseils de l'État ont été KPMG pour les aspects financiers, Clifford Chance pour les aspects juridiques, et les sociétés Rapp Trans, Algoé et Carte blanche pour les aspects techniques. Nous tenons à votre disposition le nom de toutes les personnes concernées.
Pour revenir sur les 231 millions d'euros avancés dans l'étude préalable, l'architecture relative aux équipements embarqués, à leur financement et à leur prise en charge n'était pas exactement la même. À la page 38, une petite note sur le système de perception indique bien que le coût des équipements embarqués pour les abonnés, évalué à l'époque à 96 millions d'euros, doit être ajouté et pris en compte dans l'investissement total. Deuxièmement, le chiffrage des investissements proprement dit ne comprend pas les coûts de portage financier, qui sont inclus dans les 650 millions d'euros évoqués. On compare donc 327 millions d'euros d'un côté, et 600 millions d'euros de l'autre, si l'on retranche les 50 millions d'euros de frais financiers. L'écart se réduit, même s'il reste significatif. Cet écart s'explique par plusieurs éléments.
Premièrement, le dimensionnement du système de contrôle automatique a évolué. Le réseau taxable que nous avons pris comme hypothèse n'est pas aussi étendu que le réseau retenu. Nous sommes partis avec environ 200 points de contrôle automatique fixes, dont seulement 120 environ sur des routes à chaussée séparée. La description technique des contrôles automatiques déplaçables était relativement floue, ce qui explique la variété des éléments proposés par les industriels. Une cinquantaine seulement de dispositifs déplaçables était envisagée. Une partie de l'écart s'explique donc par des différences en termes de volumétrie du dispositif.
Deuxièmement, les coûts unitaires retenus comportent, d'une part, une composante génie civil, normée, dont l'évaluation ne pose pas de difficultés et pour laquelle aucun écart n'a été constaté et, d'autre part, une composante relative à l'équipement électronique des portiques, qui a été assez significativement sous-évaluée à l'époque, à partir de retours d'expériences divers.
Enfin, le réseau de distribution des équipements embarqués et le service mis en place pour les fournir aux non-abonnés explique aussi cet écart. Il concerne dans l'évaluation préalable environ 200 points de distribution, dont la configuration de service n'a pas nécessairement été chiffrée en détail en l'absence de retours d'expérience suffisants, dans la mesure où des solutions différentes pouvaient être proposées. Il s'agit d'une estimation à grande masse qui s'est effectivement révélée sous-évaluée. C'est le poste qui a été le plus significatif dans les propositions initiales, mais que nous avons réussi à réduire.
Il y a aujourd'hui 420 points de distribution, dont 330 sur le territoire national en dehors des autoroutes concédées, une cinquantaine sur les autoroutes et une quarantaine à l'étranger.
C'est lié à une exigence posée par la Commission européenne, pour laquelle n'importe quel véhicule doit pouvoir être équipé à n'importe quelle heure, en vertu du principe de libre circulation des marchandises. Elle exige un service à haut niveau de performance pour les utilisateurs exceptionnels.
Ces exigences n'auraient-elles pas pu être prises en compte dès le début ? Le choix de l'autre technologie aurait-il conduit à de semblables sous-évaluations ? Il me semble que non, puisqu'il ne s'agit pas du tout du même système. Il fallait peut-être plus investir d'entrée de jeu, mais il n'était pas nécessaire de fournir des équipements embarqués, n'est-ce pas ?
Le principe de libre circulation s'appliquait déjà au moment de l'évaluation préalable.
Ces exigences ne sont effectivement pas neuves mais leur chiffrage était délicat. Le déploiement en termes d'investissement sur le terrain peut se faire de différentes manières, et le choix était complètement ouvert. Pour distribuer les équipements embarqués, vous pouvez vous appuyer sur des bornes de distribution ou sur des services, via des garages, des stations-service, etc. Bien entendu, les coûts sont différents. Dans un cas, il y a beaucoup d'investissement, dans l'autre, c'est surtout du fonctionnement. Au départ, pour l'évaluation préalable, nous étions plutôt sur des services existants. Cela étant, en ce qui concerne ce service, la distinction entre la solution satellitaire et celle des micro-ondes à courte portée n'avait pas véritablement d'impact. Dans les deux cas de figure, si l'on est dans une logique de distribution d'équipements embarqués, il faut les infrastructures pour les distribuer.
Fallait-il avoir un système partiellement déclaratif, comme en Allemagne par exemple ? La distribution des équipements embarqués peut s'anticiper lorsqu'elle concerne la totalité des véhicules immatriculés en France, comme cela a été prévu. Dans le système allemand, qui permet au transporteur de déclarer un trajet sans avoir d'équipement embarqué à bord du véhicule, cette déclaration lui impose de s'arrêter à des bornes, de déclarer son trajet et ensuite de circuler dans un créneau horaire et sur un itinéraire préalablement déterminés. Cette solution nécessite l'implantation de bornes à tous les points d'entrée et de sortie du réseau. Il y en a à peu près 3 300 en Allemagne. En revanche, dans le cas français, il y en aurait eu un nombre plus élevé en raison de la structure du réseau, qui est plus hétérogène et qui n'a pas les caractéristiques autoroutières en termes d'entrée-sortie. Le système de déclaration personnelle n'est pas apparu comme pertinent car il aurait encore accru les coûts.
Si j'ai bien compris, nous sommes « embêtés » avec les véhicules étrangers : s'ils trichent, nous ne pouvons pas leur faire payer d'amende ou la taxe est éludée. N'aurait-il pas mieux valu avoir recours à des systèmes déclaratifs ou plus coercitifs aux entrées et sorties du territoire ?
Le système déclaratif n'aurait rien résolu, puisque la non-déclaration est tout à fait équivalente à l'absence d'équipement embarqué : de toute façon, il n'est pas envisageable dans le cadre européen d'arrêter les véhicules à l'entrée ou à la sortie du territoire pour vérifier les déclarations effectuées.
Vous avez été au coeur de l'évaluation des différentes offres. Je ne vais pas entrer dans la technique, mais nous pouvons imaginer que la solution satellitaire était la plus logique.
Vous êtes-vous posé la question de l'égalité de traitement entre les transporteurs, les gros et les petits, en ce qui concerne l'accès au système ? Avez-vous vu et analysé correctement cette dimension ?
Dans l'évaluation de projets aussi lourds, l'impact industriel ne peut pas ne pas être évalué, même si cela relève du non-dit. A-t-on envisagé de revendre ce produit ? Cette question a-t-elle été clairement abordée et comment ?
En ce qui concerne l'égalité de traitement, on peut démultiplier le problème. Nous n'avons pas étudié toutes les cas de figures possibles, mais c'est un point sur lequel la Commission européenne est très vigilante. Elle analyse toutes les discriminations possibles et toutes les modalités par lesquelles des distorsions pourraient être créées. L'avis de la Commission sur le projet remis à la fin de l'an dernier rappelle que nous avons fait un certain nombre d'études et de projets sur le traitement des abonnés et des non-abonnés, des étrangers et des Français, des conditions économiques de mise à disposition des équipements embarqués...
La totalité des coûts inhérents aux équipements embarqués n'est pas à la charge des transporteurs. Nous avons eu de nombreuses discussions avec les organisations professionnelles à ce sujet. Il peut y avoir des coûts annexes, d'immobilisation du véhicule dans un atelier lorsqu'une installation fixe est souhaitée ou des coûts de trésorerie en raison de la caution. Mais il s'agit de coûts très marginaux par rapport aux coûts des équipements embarqués, qui ne sont pas à la charge des redevables.
Il y a quand même une différence de 10 %, que vous avez estimée acceptable.
Le montant refacturé aux transporteurs par les différentes sociétés habilitées au télépéage (SHT) de la taxe est le même pour tous. Il n'y a pas de différence en fonction du nombre de kilomètres parcourus. La remise de 10 % est valable pour tous, elle ne dépend pas de la taille des abonnés. La France bénéficie d'une situation favorable parce que quatre sociétés de télépéage interviennent sur les quinze concessions autoroutières. Aujourd'hui s'ajoutent deux acteurs supplémentaires. L'objectif de l'État a été de favoriser la concurrence entre les différentes SHT.
Si vous favorisez la concurrence entre les SHT, elles vont d'abord cibler les gros et non les petits, ce qui est une incitation à la concentration du secteur routier.
Il existe des abonnements dont le coût est nul pour le redevable.
Sur les autoroutes, la remise liée à un abonnement est d'ordre commercial. Ici, elle est fixée par la loi dans la mesure où il s'agit d'une taxe.
Qui a décidé du montant de douze centimes par kilomètre ?
Je reprends la page 38 de l'évaluation préalable. Il serait intéressant que nous disposions du coût de déploiement et de mise en service, des résultats obtenus avec la même ventilation.
Nous avons le montant décomposé actualisé et nous vous le transmettrons.
Nous vous communiquerons les éléments les plus détaillés avec le même découpage en grands postes.
Concernant l'impact industriel sur lequel M. Dantec nous a interrogé, il est bien évidemment inenvisageable, dans le cadre d'une procédure de dialogue compétitif à visée européenne, d'avoir la moindre priorité nationale. Le choix qui a été fait de s'inscrire pleinement dans la directive Interopérabilité permet en revanche aux industriels français de se développer puisque la France est le premier et le seul pays à avoir mis en place un système interopérable. Dès 2007, lorsque le télépéage inter-sociétés poids lourds se met en place, certes de manière commerciale et non réglementaire, des sociétés françaises s'organisent pour permettre le paiement unifié sur la quinzaine de domaines à péages constitués par nos autoroutes concédées ; c'est l'embryon de l'architecture interopérable au niveau européen. Ces sociétés de télépéage sont historiquement chez nous des acteurs français, même si le système concédé s'est ouvert aujourd'hui. C'est par le choix de l'ouverture que nous pouvions favoriser le développement d'acteurs français dans ce domaine. Et c'est aujourd'hui pour ces acteurs, qui ont fait des investissements considérables, que la situation est la plus critique. Pour permettre à ces acteurs de se développer au niveau industriel, il a été décidé de ne pas figer les exigences en matière d'équipements embarqués, la fourniture et la conception sont donc libres. Aujourd'hui, il y a trois fournisseurs d'équipements embarqués et non uniquement ceux d'Écomouv' sur le marché. Les industriels ont investi dans une technologie dans le but d'aller au-delà, cet au-delà étant l'Allemagne, mais pas forcément tout de suite.
Les études préalables sur la motivation de mettre en place cette redevance suivant le principe de l'« utilisateur-payeur » sont parties du constat assez ancien que les taxes payées par le transport routier de marchandises ne couvraient pas l'ensemble des coûts d'usage, avec un manque à gagner d'un milliard d'euros. Selon un des principes mis en place par la directive Eurovignette, il n'est pas possible, en mettant en place une telle redevance, de dépasser les coûts d'usage. En France, l'évaluation transmise à la Commission européenne a reçu un avis favorable à la fin de l'année dernière, et conduit à un coût de 16 centimes environ par kilomètre, montant maximum qui pourrait être affecté aujourd'hui à l'écotaxe. Le montant choisi en 2008 de 12 centimes par kilomètre correspondait à une recette de 1,2 milliard d'euros, qui était le montant nécessaire pour mettre en place, de la façon la plus proche possible de la réalité, le principe « utilisateur-payeur ». Aujourd'hui, après réévaluation, le montant des tarifs moyens à partir du 1er janvier 2014 est de 13 centimes, pour une recette attendue globale de 1,15 milliard d'euros.
Les chiffres ont été publiés par arrêté.
Il est très important d'obtenir des explications sur les écarts de coûts constatés par rapport aux évaluations initiales. Une autre solution technique n'aurait peut-être pas coûté moins cher à la collectivité, mais pouvez-vous revenir sur la comparaison entre l'externalisation et le marché global ? Quelles sont les conditions formulées par le Conseil d'État dans son avis sur l'externalisation et ont-elles été scrupuleusement respectées ?
Les éléments présentés en termes de coût du dispositif correspondent à des évaluations unitaires, c'est-à-dire le coût d'un équipement embarqué, d'un portique, chiffrées indépendamment de la manière dont les éléments allaient être réalisés. Que les blocs soient pris globalement ou séparément, le coût unitaire du bloc ne change pas. Ce qui change est la durée de passation, les coûts de contractualisation... Les seules différences sont visibles après, dans le cadre du financement global car, dans un contrat de partenariat, il y a un préfinancement et donc, un coût de portage financier qui apparaît et s'ajoute. Au niveau purement technique, la comparaison bloc à bloc, quel que soit le mode de réalisation contractuelle, n'a donc pas d'incidence.
Sur les autres solutions, il n'y a pas d'alternative tant qu'on reste dans le principe « utilisateur-payeur ». Si on s'écarte de ce principe, on peut retomber sur les accises sur les carburants, sur les vignettes qui ne nécessitent pas la même technologie pour la collecte, mais on ne collecte alors pas la même chose. En particulier, les vignettes encadrées par la directive Eurovignette et plafonnées conduisent à des ressources très nettement inférieures. S'agissant des accises sur les carburants, nous ne sommes pas sur les mêmes coûts de déploiement car nous ne sommes pas sur le même principe. Le principe « utilisateur-payeur » nécessite des technologies qui visent à identifier de manière précise les trajets, ce sont les technologies que l'on connaît.
Pourquoi avoir demandé l'installation de six portiques sur le réseau non taxable ?
C'est une partie de la réponse sur le contrôle des étrangers. Pour assurer la perception auprès des redevables étrangers, l'interopérabilité avec les sociétés de télépéage est un premier élément de réponse. Aujourd'hui, une majorité de véhicules étrangers ont des abonnements de télépéage. Via les abonnements, avec le schéma de responsabilité qui est mis en place, la taxe sera collectée. Elle est garantie par les SHT et Écomouv'. Il n'y a pas de problème de non-recouvrement pour les abonnés. Subsiste le problème des non-abonnés qui peuvent ne pas prendre d'équipements embarqués ou ne pas se déclarer, ce qui est exactement la même chose. Pour ces véhicules-là, il est difficile de les poursuivre. Il faut donc faciliter le contrôle manuel de ces véhicules non immatriculés en France, que les agents des douanes, de la police, des contrôleurs de transports terrestres (CTT) auront pour mission d'intercepter. Le procédé retenu au niveau technique est d'installer des dispositifs de contrôle automatique à certains points stratégiques, en proximité d'une barrière de péage, c'est-à-dire de points où les véhicules peuvent être arrêtés plus facilement. Les portiques donnent un moyen d'information rapide, visuel, sur la nature éventuelle d'anomalies qui auraient été repérées précédemment. C'est une aide au ciblage de véhicules qui est fournie aux agents et améliore l'efficacité du contrôle à pied. Ces dispositifs de contrôle automatiques ne fonctionnent pas en continu et en temps réel. Ils n'ont que pour objet d'informer les agents à pied d'une anomalie par l'émission d'un signal visuel.
Il y a en effet six portiques de ce type aux principaux points d'entrée du territoire et éventuellement décalés comme sur l'A8 dans le sud de la France car la frontière est complexe au niveau géométrique.
Pourquoi refaire des portiques et ne pas mettre ce système de contrôle directement aux barrières de péage ?
Au péage, il n'est plus possible de retenir les véhicules. Il est nécessaire d'avoir l'information visuelle avant l'arrivée à la barrière pour éventuellement intercepter le véhicule. En outre, le développement du péage sans arrêt est bien engagé pour les poids lourds. Si on mettait un système de contrôle directement aux barrières de péage sans portique placé avant, l'interception des véhicules obligerait les concessionnaires à stopper le péage sans arrêt, ce qui est problématique.
Quand le véhicule est déjà sur autoroute, les douanes doivent savoir l'arrêter.
Le portique ne fait pas de distinction entre véhicule français et véhicule étranger. Il signale tout véhicule en anomalie. Il appartient ensuite aux agents sur place de compléter leur ciblage.
Nous avons été assez peu diserts jusqu'à maintenant sur les méthodes de contrôle qu'on envisage. Il n'est en effet pas de l'intérêt de l'État de rentrer trop dans le détail des différentes stratégies de contrôle mises en place. Il est toutefois public que l'on a cinq types de contrôle différents. Il y a les contrôles automatiques fixes, les portiques que tout le monde connaît. Il y a des dispositifs de contrôle automatique déplaçables qui, pour un investissement moindre, permettent d'avoir une couverture de points de contrôle divers sur le territoire avec une moindre prévisibilité pour les éventuels fraudeurs. Ces deux dispositifs de contrôle automatiques sont exploités par Écomouv'. Ensuite il y a deux formes de contrôle sur le terrain : le contrôle à pied avec les quatre forces qui contrôlent les poids lourds et le contrôle manuel mobile avec un dispositif qui doit équiper certains véhicules des douanes et qui pourra contrôler des véhicules en circulation. Il faut rappeler que le contrôle à pied présente comme limite la nécessité d'arrêter les poids lourds, ce qui est une opération extrêmement lourde. Le cinquième dispositif de contrôle est le contrôle a posteriori en entreprise par les douanes et les CTT, mais qui ne concerne que les redevables français. Enfin, pour compléter ce point sur le contrôle vis-à-vis des étrangers, les douanes développent des accords inter-administrations avec les douanes européennes. Évidemment, ces accords ne sont envisagés que pour des montants significatifs. En cas de fraude systématique de véhicules étrangers, le contrôle automatique enregistrant les plaques d'immatriculation permettra de déclencher des interventions, y compris à l'étranger si nécessaire.
Il y avait une question à laquelle nous n'avons pas répondu sur l'encadrement d'Écomouv'. Je ne pense pas avoir dit qu'il y avait trois conditions dans l'avis du Conseil d'État du 11 décembre 2007. Il impose également un encadrement du prestataire. Il a bien évidemment été suivi, d'abord dans la description, qui est dans l'article 153 de la loi de finances pour 2009, des missions externalisables et de celles qui ne le sont pas, comme, en particulier, le contrôle physique qui reste aux forces de l'ordre ou le recouvrement forcé qui reste du domaine des douanes. Ensuite, ce commissionnement a été précisé par un décret en Conseil d'État, à l'instar de la quasi-totalité de la vingtaine de décrets pris en application de la loi sur l'écotaxe. Ce décret sur la définition du commissionnement a été revu et en partie rerédigé par le Conseil d'État qui nous a beaucoup aidé à bien préciser ce qu'il était possible de faire et la façon dont l'État devait contrôler. Un des points notables est que les missions externalisées au partenaire privé titulaire du commissionnement ne peuvent pas être sous-traitées par ce même partenaire privé. Cela recouvre notamment toutes les missions qui nécessitent d'avoir accès aux données fiscales, y compris le centre d'appel puisqu'un redevable peut demander des informations sur son cas précis et peut demander à payer un manquement. Cette obligation du partenaire privé à assurer lui-même ces fonctions explique le nombre de personnels embauchés ou en prévision d'embauche par la société Écomouv'.
Je voudrais revenir sur le coût global de ce dossier. Vous avez proposé de nous faire un tableau avec les dérives et le pourquoi des dérives à partir du chiffre de 231 millions d'euros avec la technologie satellitaire. Je suppose que vous pouvez nous produire la même chose avec l'autre technologie étudiée, qui a dû subir le même type d'investigations, modifications et avenants au cours du dialogue compétitif. Aura-t-on les mêmes informations pour l'autre technologie ?
Non. Il faut bien comprendre que toute la procédure de dévolution du contrat, y compris le dialogue compétitif, reposait sur des spécifications ouvertes. Les candidats étaient libres de choisir la technologie avec laquelle ils voulaient répondre. Il se trouve que nous n'avons eu que des réponses en technologie satellitaire. Tout au long du dialogue, nous avons permis un retour en arrière et laissé possible un changement de technologie. On ne l'a pas observé. Au cours du dialogue compétitif, nous n'avons eu exclusivement que des éléments sur la technologie satellitaire.
Mon autre question porte sur les loyers versés à Écomouv'. Lors de leur première audition publique, ils ont ainsi réparti le montant du loyer annuel : 96 millions d'euros de rémunération fixe, 47 millions d'euros de frais de maintenance, 8 millions d'euros de gros entretien et 64 millions d'euros de rémunération variable. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quels sont les éléments de variabilité de cette rémunération de 64 millions d'euros ?
La rémunération variable vise à couvrir les coûts, et notamment les coûts d'exploitation du dispositif. Ce qui détermine les coûts d'exploitation dans le dispositif satellitaire, c'est en premier lieu le volume de communications entre les équipements embarqués et les systèmes centraux. À chaque franchissement de points de tarification, il y a un volume de transmission d'informations qui est l'un des principaux coefficients directeurs des coûts d'exploitation. Ensuite, vous avez les équipements embarqués qui sont rémunérés pour le service qu'ils procurent, et évidemment dans la mesure où ils fonctionnent. Aucune rémunération n'est due à Écomouv' pour un équipement embarqué qui est laissé dans un garage. En ce qui concerne le système de distribution, c'est-à-dire la délivrance des équipements embarqués aux redevables, chaque opération (délivrance, retrait, récupération) a un coût qui est aussi couvert par cette rémunération. Ensuite, nous avons les coûts des garanties exigées de la part d'Écomouv' vis-à-vis des sociétés de télépéage et de la part de l'État vis-à-vis d'Écomouv'. Ce sont des garanties financières à première demande qui sont calées sur le volume de la taxe, en règle générale les encours mensuels. Les coûts de ces garanties sont liés à ces encours et varient en fonction des volumes, des transactions, etc. Enfin, vous avez une dernière partie qui concerne le volet performance. L'État paye à Écomouv' des bonus ou pénalités qui sont dimensionnés en fonction de l'atteinte ou non des objectifs de performance prévus au contrat. Voilà schématiquement la part variable de la rémunération liée à l'exploitation.
Il y aurait beaucoup à dire. Il faudrait qu'on parle de la créance « Dailly » qui a été sensiblement accrue au cours du dialogue compétitif. C'était une observation de la Mappp dans son deuxième rapport du 13 octobre 2011 dont il n'a pas été tenu compte. On y reviendra après. Je voudrais profiter de la présence du Président Sueur pour qu'il puisse vous interroger.
Merci, madame la présidente. Je reviendrai sur certains points évoqués par vous-même et par madame le rapporteur. Vous avez tout à l'heure dit qu'en quelque sorte, il y avait des incertitudes quant aux manières de procéder qui avaient conduit à mettre en place un dialogue compétitif. Traditionnellement, on considère que quand la puissance publique veut mettre en oeuvre un projet, elle définit celui-ci, puis s'emploie à trouver des acteurs pour le réaliser. Avec le dialogue compétitif, tout change. Il n'y a pas une règle du jeu au départ et des concurrents. Il y a des concurrents qui sont coproducteurs de la règle du jeu. À chaque moment, la règle peut changer. C'est la nature du dialogue compétitif. Je ne réussis pas à savoir ce qui s'est exactement passé. Vous allez nous éclairer. Le dialogue compétitif suppose que les candidats puissent faire des propositions. Nous allons avoir le calendrier global du processus nous expliquant comment chaque proposition nouvelle a été faite et comment elle a été signifiée à l'ensemble des concurrents, de telle manière que chaque concurrent soit, à chaque étape, au même niveau d'information, comment, par un processus itératif, on a avancé de suggestion en suggestion jusqu'à une décision finale. Certains auditionnés nous ont dit que les différentes propositions des différents candidats avaient été examinées successivement. D'autres nous ont dit qu'il en avait été tenu compte et que l'État avait in fine présenté un cahier des charges corrigé eu égard aux propositions faites. Qu'en est-il exactement ?
Deuxièmement, êtes-vous intimement persuadés que le partenariat public-privé en l'espèce était une bonne méthode ? Quels sont les arguments décisifs qui ont fait que ex ante, alors qu'on ne savait pas qui serait candidat au PPP ou qui serait candidat à un marché classique, il a été décidé que le mieux serait qu'il y eût un partenariat public-privé ? Êtes-vous à l'aise avec cela ? N'était-ce pas un pari pascalien ?
Enfin, dernier mot, j'ai appris au fil des séances que les fameux portiques servaient uniquement à contrôler, mais en rien à percevoir la taxe. Était-il absolument nécessaire d'installer tous ces portiques pour contrôler ? Ne pouvait-il pas y avoir divers types de contrôle, ne serait-ce par les forces de la police nationale ou de la gendarmerie, qui eussent épargné à notre vue ces portiques, à ceux qui veulent les éliminer la tentation de le faire et à la collectivité publique de dépenser quelques sommes que l'on eût pu investir dans d'autres champs ?
S'agissant du choix du dialogue compétitif et sur la façon dont il a pu être conduit, sans rentrer dans le détail, puisque nous vous communiquerons des éléments écrits plus précis sur le déroulé, je rappellerais simplement qu'il permet de faire évoluer la règle du jeu et même d'avoir un cahier des charges différent entre les acteurs, ce qui peut rendre la comparaison des offres particulièrement difficile.
C'est possible, mais ce n'est pas ce que nous avons fait.
C'est grave car, personnellement, j'avais compris que le dialogue compétitif permettait aux différents concurrents de faire des suggestions, qui étaient retenues ou non, mais que, à tout moment, les candidats, étaient à égalité. Il n'y avait donc pas une solution sur mesure pour chaque candidat mais une solution soumise à l'ensemble des candidats, fût-elle évolutive.
Le dialogue compétitif est une procédure très souple, néanmoins, nous n'avons pas utilisé toute la souplesse offerte par ce mécanisme. Nous aurions pu l'envisager si nous avions eu des offres avec des propositions technologiques différentes. Dans ce cas, nous aurions peut-être pu avoir besoin d'un cahier des charges plus fin ou plus compliqué. Mais cela ne s'est pas passé ainsi.
La publication de l'appel à candidature date du 5 mai 2009. Nous avons reçu les candidatures en juin. Nous avons choisi les candidats à l'automne. Nous avons eu une première rencontre avec l'ensemble des candidats. Quatre candidats ont participé à la procédure de bout en bout. Nous avons tenu à ce que chaque audition se fasse dans des délais courts, en deux jours, soit une demi-journée par candidat. Chaque réunion s'est déroulée dans les mêmes conditions : même durée, mêmes sujets et même ordre du jour pour tous les candidats.
Nous avons demandé, à la fin de l'année 2009, une proposition initiale, qui a été remise en janvier 2010 par chacun des quatre candidats. À partir de là, nous avons fait des auditions thématiques sur les sujets techniques pour comprendre leur offre et corriger certaines incompréhensions et en vue d'adapter notre cahier des charges, comme par exemple sur les dispositifs de contrôle automatique, dont nous avons constaté qu'ils étaient plus chers que prévu. Nous avons donc optimisé notre cahier des charges en réduisant le nombre de portiques jusqu'à obtenir un compromis qui nous paraissait le plus efficace possible par rapport à une « pression de contrôle » souhaitable. Il faut noter que si l'on réduit trop la « pression de contrôle » et que l'on a 1 % de fraude supplémentaire, on va perdre 10 millions d'euros de recettes par an, soit un peu plus de 115 millions d'euros sur la durée du contrat.
Nous avons également dû effectuer un arbitrage entre le temps passé à conduire la procédure et la précision du cahier des charges. Le dossier de demande pour les offres finales était strictement identique pour les quatre candidats. Il leur a été remis en juillet 2010. Nous avons alors pu établir le classement entre trois offres, la quatrième offre n'étant pas recevable.
Nous vous transmettrons le calendrier exact de toutes les réunions qui ont été tenues. Le fait de recourir à un dialogue compétitif nous a permis de faire une demande d'offre finale en juillet 2010 et non en mars 2009 au moment où nous avons lancé la procédure.
Vous avez insisté sur l'importance des sociétés de télépéage, y compris dans une logique industrielle. Dans les offres, y avait-il des différences notables dans le lien entre le prestataire à qui l'on confie la perception de la taxe et les sociétés de télépéage ? Dans certains consortiums, y avait-il des sociétés privées qui auraient pu se retrouver des deux côtés, à la fois dans le consortium de perception et dans la société de télépéage ?
La société de projet, aujourd'hui Écomouv', n'a pas le droit d'avoir de participation dans une autre société, en particulier une société de télépéage. En revanche - et ce n'est pas interdit -, une société de télépéage et le collecteur peuvent avoir des actionnaires en commun. Cela aurait été le cas quel que soit le candidat retenu.
Nous souhaitons par ailleurs que la majorité des transporteurs recourent au service d'une société de télépéage. Autrement dit, du jour au lendemain, 600 000 véhicules seront abonnés en majorité et le marché va se figer. Dès lors, si on laisse ce marché trop libre, trop ouvert, nous aurions pu constater, a posteriori, des dérives. C'est pourquoi, le cahier des charges prévoyait que le titulaire du contrat de partenariat avait l'obligation de signer un contrat cadre s'il était demandé par une société de télépéage. C'est ce que l'on appelle aujourd'hui le contrat type qui existe sous trois options différentes, suivant que l'équipement est fourni ou non par Écomouv'.
Le contrat type était le même, au dossier de demande d'offres finales (DDOF), pour les quatre candidats. La différence est le montant de la rémunération, mais ce montant, toutes choses égales par ailleurs, est désormais le même pour toutes les sociétés de télépéage.
Je viens de l'industrie où l'on m'a appris que la précision coûte cher. À cet égard, une déclaration faite lors d'une précédente audition me trouble. Il m'a semblé comprendre que l'on demandait un minimum d'erreurs, de l'ordre de un pour un million. Est-ce exact ? Cela rejoint la question du président Sueur : est-il bien utile de construire des portiques pour obtenir des taux aussi faibles ?
Le taux de un pour un million ne concerne pas les véhicules en infraction, mais les impulsions, c'est-à-dire le franchissement d'un point de tarification.
Effectivement, il y a un taux d'erreur qui doit être inférieur à un pour un million. Ce taux-là apparaît dans le cadre de l'homologation du dispositif - car le système est homologué, comme celui des radars automatiques - afin de pouvoir assurer l'inversion de la charge de la preuve. Ce taux n'est pas le taux de fraude visé.
En cas de doute dans le dispositif, on ne va pas notifier de manquement au redevable. En réalité, à chaque fois que l'on va notifier un manquement, on sera sûr - à raison d'un pour un million - que ce manquement est réel. Ce taux assure au redevable que la facture qu'il reçoit sera juste.
Vous avez évoqué la vérification en service régulier (VSR) et vous avez parlé de « vérification dans des conditions de volume normales ». Qu'entendez-vous par là et estimez-vous qu'elles sont aujourd'hui réunies ?
Ce dossier a connu beaucoup de modifications. La Mappp a émis des réserves lors de la remise de ses deux avis. En avez-vous tenu compte ?
Avec la récente suspension, compte tenu de la complexité et de l'importance de ce dossier, je suppose que les ministres ont dû se tenir informés. Avez-vous rédigé des notes ? Sur quels sujets ? Pourrez-vous nous les transmettre ?
Des paiements sont-ils intervenus d'Écomouv' vers l'État, notamment dans le cadre de l'occupation des locaux de Metz ?
La VSR reste une phase de tests. On ne demande pas aux futurs redevables de faire les tests. C'est une situation qui est représentative de la réalité, ce sont donc plutôt des tests en volume. Pour ce qui est, par exemple, du nombre de données remontées au système central, cela se fait par des simulations. Pour vérifier la capacité du système central, il n'est en effet pas nécessaire de disposer de 600 000 véhicules équipés et émettant des données. Sur ce sujet, nous sommes en train d'étudier le rapport remis par Écomouv'. Nous allons y répondre dans quelques semaines mais, à ce stade, il n'y a pas d'inquiétude particulière sur la qualité du travail réalisé par Écomouv'.
Nous avons suivi l'avis de la Mappp relatif à l'étude préalable sur les deux points précités. Le premier point portait sur la criticité du délai de réalisation, notamment l'incitation permettant à l'État de trouver, dans le cadre du dialogue compétitif notamment, les moyens de responsabiliser les candidats en termes de délai de réalisation et de trouver toutes les optimisations possibles.
Le deuxième point concernait l'autorité chargée d'émettre un avis au nom du ministre des finances et du budget, sur le contrat de partenariat, avant sa signature. En 2008, au moment de la rédaction de l'évaluation préalable, nos analyses juridiques ont conclu, sur le fondement des circulaires de 2005 et 2006 du ministère des finances, qu'il revenait au contrôleur budgétaire et comptable ministériel de donner l'avis final avant la signature du contrat. Lorsque, peu de temps avant la signature, ont été posées les questions de couverture et de sécurisation des établissements financiers en cas de nullité du contrat - sujets auxquels la Mappp a bien entendu été associée en réunion interministérielle - est apparue la nécessité de saisir formellement cette dernière pour qu'elle donne un avis. Cette modalité, prévue par un décret de mars 2009, nous avait échappée d'autant plus que rien ne figurait en ce sens sur le site Internet de la Mappp et ce point n'avait d'ailleurs pas été soulevé lors de nos échanges avec celle-ci. Cette saisine n'a pas posé de problèmes particuliers dans la mesure où la Mappp disposait de tous les éléments relatifs au contrat à toutes les phases du dialogue, y compris les offres finales - la Mappp étant le service instructeur des mécanismes financiers de garantie de l'État, dans le cadre du plan de relance de 2009, qui lui avait permis d'instruire certains éléments puisque le recours à cette garantie était permis dans le dossier d'offres finales.
Nous nous sommes retrouvés dans une situation un peu délicate dans la mesure où certains éléments au sein de la Mappp n'ont pas pu être complètement suivis. Un certain nombre de questions, dont certaines sont mentionnées dans l'avis du 13 octobre 2011, n'avaient pas lieu d'être puisqu'elles avaient déjà trouvé des réponses. C'est le cas, en particulier, de la mise à disposition et de son lien avec la cession « Dailly ». Cette question ne figure pas à l'article 22 du contrat, qui fixe la date de mise à disposition du dispositif mais ne précise pas les conséquences qu'emporte l'atteinte de cette date. C'est à l'article 41, relatif à la cession de créances, que le contrat indique que la cession est irrévocable dès l'achèvement des travaux, constaté par la mise à disposition qui a lieu à la fin de la VSR, destinée à s'assurer de la complétude du dispositif. Dans les actes d'acceptation de cession de créances « Dailly », vous retrouverez tous les éléments qui affermissent complètement la structure contractuelle. Nous étions effectivement confrontés à un délai court - je le reconnais tout à fait -, nous avons eu une réunion avec la Mappp, le 14 octobre 2011, pour clarifier un certain nombre de points, répondre à tous ces éléments et démontrer qu'il n'y avait plus de sujets majeurs. Par ailleurs, il convient de rappeler qu'entre l'offre finale et la signature du contrat, l'État ne peut modifier substantiellement les grands équilibres du contrat. En d'autres termes, un certain nombre de clauses résultant de l'offre des candidats ne pouvaient plus être revues. Nous estimons toutefois avoir répondu aux différentes questions soulevées par la Mappp.
S'agissant des clauses de refinancement, au-delà du fait qu'elles figuraient dans le dossier d'offres finales, cette question a fait l'objet de discussions avec la Mappp, dès le début de la procédure. Cette question met en jeu la durée du contrat. En l'espèce, il s'agit d'un contrat à durée relativement courte ; la question se pose différemment sur un contrat portant sur une trentaine d'années.
Nous ne sommes pas d'accord sur ce point. L'article 9 de l'ordonnance du 17 juin 2004 prévoit une consultation obligatoire de la Mappp. Lorsque nous les avons auditionnés, ils nous ont indiqué avoir bénéficié d'un délai d'à peine 48 heures pour formuler leurs remarques sur le contrat. Ils ont fait des observations, non pas par rapport aux offres comme vous tentez de le dire, mais par rapport à la rédaction du contrat. Il est surprenant que vous n'ayez pas tenu compte des remarques de la Mappp, alors qu'il s'agit d'un PPP souscrit par l'État. On reviendra sur cette question par écrit, afin que vous nous donniez des éléments complémentaires. C'est un point qu'on ne peut pas éluder comme cela.
Nous disposons de tous les éléments de réponse nécessaires. Je ne les détaillerai pas maintenant.
D'autant plus que la Mappp nous a indiqué ne pas être du tout associée à la décision de suspension du contrat. Vous-même êtes-vous associé à cette décision ?
Vous n'avez pas répondu à ma question relative aux notes adressées aux ministres sur les dérives et les modifications substantielles du contrat.
J'ai évoqué précédemment l'organisation de réunions interministérielles sur les points les plus importants. On pourra vous communiquer les comptes rendus. À notre niveau, nous rédigeons régulièrement des notes à notre direction générale. Une partie d'entre elles remontent ensuite au cabinet du ministre. Au-delà, je n'ai pas la visibilité nécessaire.
Généralement oui.
La marge d'erreur possible était d'une sur un million, ce qui est supérieur aux exigences imposées à l'industrie automobile, afin d'obtenir l'homologation. Sur les marchés passés en Allemagne, Pologne ou Autriche, a-t-on demandé le même taux d'erreur ?
Vous avez indiqué que le délai de livraison prévu initialement au 20 juillet 2013 n'a pas été respecté. Comment voyez-vous la sortie ?
Sur le taux d'erreur, ce n'est pas l'ensemble du dispositif qui est soumis à cette exigence mais certains éléments précisés par décrets et arrêtés. Il s'agit, par exemple, de s'assurer qu'une photo prise sur un portique parvienne bien dans le système central sans être déformée. Ce taux d'erreur, impressionnant mais ne portant que sur certains points du dispositif, a été obtenu puisque, aujourd'hui, les principales chaînes du dispositif sont homologuées.
Mais à quel prix ? Ma question est de savoir si on est plus exigeant que d'autres sur les mêmes systèmes.
Je n'ai pas la réponse sur les systèmes étrangers. Je communiquerai à la commission les éléments demandés.
Sur le retard, le contrat de partenariat prévoit une réalisation jusqu'à la date de mise à disposition qui marque donc l'achèvement complet du dispositif et qui se matérialise par la fin de l'étude, par l'État, du rapport de VSR. Aujourd'hui, on en est à cette dernière étape de vérification du contrat. La mise à disposition n'est toujours pas prononcée. On a aujourd'hui un peu plus de six mois de retard. Nous sommes en contact avec Écomouv' et je ne peux pas prédire la façon dont ceci va se terminer.
Je n'ai toujours pas eu de réponse sur le fait qu'Écomouv' a ou n'a pas, à l'heure actuelle, payé des loyers pour les locaux occupés.
Aujourd'hui, au titre du contrat de partenariat qui est la partie visible des échanges avec Écomouv', celle-ci n'a pas payé l'État et l'État n'a pas payé Écomouv'.
Pour la mise en oeuvre de ces dispositifs, Écomouv' a contractualisé avec les autorités locales de Metz. J'ai compris qu'ils avaient signé un bail avec Metz Métropole.
Metz Métropole n'est pas propriétaire des locaux. Écomouv' bénéficie d'une autorisation d'occupation temporaire de la part du ministère de la Défense.
Vous avez eu la gentillesse de nous communiquer cette question auparavant. N'ayant pas les éléments pour y répondre, nous avons saisi le préfet de Moselle pour avoir ces informations.
Écomouv' nous a indiqué avoir payé un loyer à l'État au titre d'une autorisation d'occupation temporaire.
Ce versement, s'il a eu lieu, ne fait pas partie du contrat de partenariat.
Il s'agit effectivement d'une autre question. Nous souhaitons connaître quel rôle l'État a joué dans cette installation. Êtes-vous intervenus pour favoriser l'installation d'Écomouv' à Metz ? Tout ceci ne nous paraît pas très clair. Pourquoi Écomouv' a-t-elle choisi de s'installer à Metz ?
Le choix d'implantation du service taxe poids lourds des douanes à Metz a probablement favorisé cette installation. Il existait la volonté de développer ou de maintenir des emplois publics à Metz. Je ne veux pas répondre à la place de la direction générale des douanes et droits indirects sur cette question. Il est vrai également qu'il a été indiqué à Écomouv' que, si leur centre d'exploitation était proche de ce service centralisé des douanes, c'était un avantage. Ensuite, Écomouv', comme elle nous en a informés, a comparé différents sites d'implantation possibles, a conduit des discussions avec les collectivités locales concernées et, au final, a choisi de s'implanter à Metz. La disponibilité de la base aérienne 128 et la proximité du service décentralisé des douanes ont probablement été des facteurs en faveur de ce choix mais rien n'a été imposé.
Le choix d'Écomouv' était de bénéficier de la proximité avec le service des douanes, ce que je comprends bien.
Pouvez-vous nous indiquer si l'État a une part de responsabilité dans les deux premiers reports de la mise en oeuvre de la taxe poids lourds ? Estimez-vous que l'ensemble des décrets et arrêtés ont été publiés dans les délais ?
Dans la conduite de ce type de projet, plusieurs chantiers sont conduits en parallèle. La question du retard se pose essentiellement au regard des pénalités de retard dues au titre du contrat. Ce point n'a pas été tranché. Il a été abordé avec Écomouv' avec laquelle nous avons des positions différentes sur ce sujet-là.
Exactement. L'enjeu est de 8 millions d'euros par mois de pénalités, renforcé par le fait que le retard est supérieur à six mois ce qui est un élément important dans le cadre de ce contrat.
Il faut distinguer le retard technique éventuel et le retard administratif, avec la publication des décrets et des arrêtés nécessaires. C'est une question sur laquelle il conviendra d'être précis.
Écomouv' a-t-elle déposé une garantie bancaire à la date d'entrée en vigueur du contrat ? Si oui, à combien s'élève cette garantie ?
Il y a plusieurs niveaux de garantie.
La première, et la plus importante, est la garantie de recouvrement des sommes facturées, qui doit en principe être mise en place deux mois avant la mise en service. Il a été considéré que cette garantie devait être établie avant même le début de l'enregistrement des redevables, c'est-à-dire en juillet 2013. Cette garantie se monte à 100 millions d'euros, soit un mois d'encours de la taxe. Du fait de la suspension, l'État a accepté qu'Écomouv' lève cette garantie, pour réduire les frais financiers. Cette garantie a aujourd'hui disparu.
Vient ensuite la garantie pour l'application des pénalités de retard, soit environ 48 millions d'euros. Cette garantie a été mise en place dans les temps par Écomouv' et subsiste encore aujourd'hui.
Enfin, existent d'autres garanties, dont les garanties de parfait achèvement, qui servent en cas de besoin pour corriger des défauts. Toutes ces garanties ont été mises en place par Écomouv'. Elles ne sont pas levées car tout ce qui concerne l'achèvement du dispositif n'est pas réglé.
Ces garanties sont calées sur la date de mise à disposition. La suspension...
Aujourd'hui, la seule modification concerne la garantie des sommes recouvrées. Cette garantie sera rétablie avant la nouvelle mise en service de la taxe.
Avez-vous été consulté sur la suspension et ses conséquences sur le contrat de partenariat qui, lui n'est pas suspendu ?
Nous informons régulièrement nos autorités de la situation et nous avons communiqué tous les éléments qui nous avaient été demandés. Nous n'avons jamais eu de question sous cette forme-là.
Avez-vous indiqué les conséquences précises, financières d'une telle suspension ? Je pense notamment à la créance « Dailly ».
Nous avons fourni des éléments détaillés sur ces points-là dans une certaine chronologie qui n'est pas forcément très antérieure à la suspension.
Nous avons cependant besoin de votre point de vue, de votre réponse écrite sur les sommes en cause si cette suspension continue. Je pense notamment à la créance « Dailly », aux investissements, aux loyers, aux pénalités. Il faut que vous nous répondiez très précisément. La plupart des personnes auditionnées vous ont cités. Vous avez tous les éléments d'appréciation, sur les engagements des uns et des autres et la manière dont ils sont exécutés. Aujourd'hui, la commission d'enquête ne peut s'arrêter au contrat de partenariat et nous devons rajouter les conséquences de la suspension sur ces questions-là.
L'État doit répondre d'ici le 20 mars 2014 sur la mise à disposition.
Le second avis de la Mappp spécifie qu'il y a des clauses avec « des incertitudes génératrices d'ambiguïté » et demandait à ce que soit rétabli « ce qui peut parfois apparaître comme un déséquilibre au détriment de la partie publique ». Nous avons besoin d'éléments précis sur ces questions et les réserves émises par la Mappp.
La suspension de l'entrée en vigueur de la taxe poids lourds n'a pas d'effet direct sur le déroulé du contrat. La créance « Dailly » est calée sur la date de mise à disposition qui est différente de la date d'entrée en service de la taxe et nécessairement antérieure. Si le dispositif est bien mis à disposition, le contrat est assez clair sur ce qui se passe après, mais on vous l'exposera.
Vous nous le direz, car il y a des sommes, je le répète, qui sont considérables. J'ai le compte rendu d'Écomouv' devant l'Assemblée nationale il y a quelques jours. Ils déclarent qu'ils ne sont pas en mesure de tenir ad vitam aeternam même si la mise à disposition a été clarifiée. Et comme nous l'a dit la direction générale des douanes et droits indirects, si l'on modifie en termes d'environnement administratif les décrets et arrêtés, cela demande des délais considérables, soit quatre à cinq mois. Nous avons besoin d'une réponse écrite sur l'application du contrat. La commission d'enquête doit vérifier la pertinence du choix d'un PPP, les engagements des uns et des autres, la réalisation de ces engagements de part et d'autre, ainsi que les implications en termes de finances publiques par rapport à la suspension.
Le contrat prévoit de mémoire que les entreprises puissent vérifier la facturation. La facture globale est illisible et assez invérifiable car très sommaire. La facture détaillée l'est tout autant par la somme d'informations qu'elle délivre sur une dizaine de pages, pour un seul camion. Je vois mal les entreprises contrôler les factures. Ce point a-t-il été abordé avec Écomouv' ?
Il n'y a pas à ma connaissance d'obligation dans le contrat de fournir un service de vérification de la facture. Le montant n'est pas celui d'une facture commerciale mais d'une taxe. L'homologation, telle que définie par la loi, impose que le montant émis fasse foi jusqu'à preuve du contraire. Les informations qui sont des franchissements de point de tarification sont la description précise de la façon dont cette taxe est calculée.
Par ailleurs, la proposition que nous avons faite a été soumise à l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Si nous avons l'obligation de donner des informations pour que le redevable puisse vérifier le montant de sa taxe, qui est un droit qu'on ne remet pas en cause, la CNIL est attentive au fait qu'on ne puisse favoriser l'usage de ces données à d'autres fins que l'établissement de la taxe. Aujourd'hui, je vous concède que les informations données ne permettent pas de le faire.
C'est important tout de même. Même si ce n'est pas textuellement dans ce contrat, il me semble que tout contrat se doit de respecter la loi et tout contribuable doit pouvoir vérifier la taxe à laquelle il est assujetti. Aujourd'hui, les transporteurs routiers ne peuvent pas vérifier les montants de taxe qu'ils reçoivent.
C'est pour cela qu'a été mise en place une forfaitisation pour la répercussion. Sinon, il aurait fallu embaucher beaucoup de personnes pour analyser la taxe payée et la façon de la répercuter sur le consommateur.
Sur la répercussion qui est un sujet un peu éloigné du contrat de partenariat, quelle que soit la qualité des informations données, le sujet est intrinsèquement compliqué car les transporteurs chargent et déchargent leurs camions. Il est donc difficile de savoir à un instant donné quel client utilise le camion et pour quelle part.
C'est pour cela que la forfaitisation a été choisie pour la répercussion.
M. Michel Cornil, vice-président d'Écomouv' nous a dit, lors de son audition, que le contrat prévoit que des factures détaillées sont transmises aux entreprises qui en font la demande, sous format papier ou électronique. C'était une des spécifications de l'État sur la structure de la facture.
Aujourd'hui, nous considérons que cette demande du contrat est satisfaite par Écomouv'.
Nous entendrons les transporteurs sur ce point. Il est certain qu'il n'a pas été tenu compte de cette difficulté pour les petites et moyennes entreprises qui ne pourront rien vérifier sans que cela leur coûte très cher.
Qui a défini le réseau routier national et le réseau routier local soumis à l'écotaxe ?
La mission de la tarification a défini ces réseaux. Il y a plusieurs niveaux. Pour le réseau routier national, le choix initial résulte de la loi. La non-inclusion des autoroutes concédées à péages est une application stricte de l'encadrement communautaire qui ne permet pas de récupérer plus que les péages autoroutiers.
L'établissement du réseau routier local est fort de l'expérimentation alsacienne de 2006. Même s'il n'y a pas eu de collecte, cette expérience a jeté les bases de toute la réflexion sur le dispositif et, en particulier, du fait qu'on ne pouvait envisager la taxation d'un réseau sans se préoccuper des reports de trafic. Dès l'origine, dans la loi, apparaît ainsi la possibilité d'intégrer le réseau des collectivités locales. La loi fixe ce principe en s'appuyant sur la notion de report significatif qui nécessitait d'être précisée ultérieurement. Ces travaux ont été menés sous l'égide de la mission de la tarification, en partenariat avec les services déconcentrés du ministère de l'écologie, les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) notamment et ont donné lieu à une concertation avec les collectivités territoriales, pilotée par les préfets de région.
Le 24 août 2009, le ministre de l'écologie a adressé un courrier aux préfets de région leur demandant d'engager un premier processus de concertation locale visant à associer le maximum d'acteurs, non seulement les collectivités locales, mais également les professionnels, les associations, éventuellement promoteurs de ce type de tarification. Carte blanche a été donnée aux préfets de région qui ont mené ces concertations en tenant compte des spécificités locales. À la fin de l'année 2009, nous avons eu, via les DREAL, des retours de ces échanges, qui ont permis à l'État de définir le réseau routier local à partir de modèles de trafic qui ont été partagés, et nous en avons utilisé trois. Le cadrage général est issu du commissariat général au développement durable (CGDD) avec le modèle « Modev ». Le service d'études sur les transports, les routes et leurs aménagements (Sétra) a mis en place un modèle national et la mission de la tarification, un troisième modèle. Dans un deuxième temps, en mai 2010, les collectivités territoriales ont été saisies sur la base de propositions de délimitation du réseau local taxable, établi à partir des critères de la loi. Enfin, ont été menées des discussions avec les collectivités pour déboucher sur un décret en Conseil d'État mi-2011.
Je rappelle les grandes règles de cet arbitrage. Lorsqu'une collectivité était opposée à la taxation d'une de ses voies, alors même que les études montraient un risque de report, l'État n'allait jamais contre cette volonté - au moins deux collectivités étaient dans ce cas. D'autre part, nous n'avons pas toujours suivi systématiquement l'avis des collectivités, afin de sécuriser le décret constituant le réseau local. Les discussions, échanges, études ont duré deux ans. Le résultat final s'est fait aussi sous l'égide de l'Assemblée des Départements de France (ADF).
Notre réseau a des trous, mais il est relativement cohérent, avec ses 15 000 km - 10 000 km de voies nationales, 5 000 km de voies locales -, et semble avoir bien répondu à l'impératif de la loi d'essayer de limiter au maximum les reports de trafic.
Comme ces éléments sont par nature imparfaits et non définitifs, il a été prévu dans le décret du 27 juillet 2011 fixant la consistance du réseau local et pour appliquer un engagement du Gouvernement, que ce réseau local puisse être révisé, environ un an après l'entrée en vigueur de la taxe. Le Sétra - maintenant le Céréma (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) - en charge de la collecte de ces études a déjà réceptionné un nombre assez important de comptages réalisés par les collectivités territoriales sur leurs réseaux.
Sachant que la mission de la tarification, en accord avec le Sétra, a lancé une méthode permettant aux collectivités territoriales de disposer d'un guide pour réaliser ces comptages.
La Mapp, toujours elle, avait suggéré que des services annexes soient associés aux investissements réalisés pour l'écotaxe. Cela a finalement été abandonné. Pour quelle raison ?
En fait, cela n'a pas été abandonné. Il y a deux éléments. D'abord, formellement, cela n'est pas abandonné puisque cela reste prévu dans le contrat, même s'il n'y a pas d'engagement initial de la part d'Écomouv'. Ensuite, pour nous, la notion de services annexes est plutôt orientée sur l'interopérabilité. Il est vrai que nous n'avons eu aucune proposition de services annexes rémunérés, que ce soit dans l'évaluation préalable ou lors du dialogue compétitif. Mais, à nos yeux, le premier service annexe, qui doit aussi avoir un bénéfice en termes de rémunération, c'est l'interopérabilité. Les échanges que nous avons eus avec la Mappp ont été dans ce sens. Pourquoi ? Plus l'interopérabilité se développera avec le mécanisme de rémunération que nous avons proposé, plus les équipements embarqués seront amortis par différents gestionnaires de réseau et donc, moins la charge résiduelle de ces équipements sera importante au niveau purement français. C'est pour cela que la principale mesure imposée dans le contrat - qui est traduite dans les contrats avec les sociétés de télépéage - est, après trois ans de fonctionnement en service courant, la réalisation par Écomouv' d'un audit des coûts des services de télépéage. L'objectif est de proposer des réductions de la rémunération de ces services, ces réductions étant compensées par un développement de cette interopérabilité et d'autres services, afin de nous permettre de réduire le coût de collecte. C'est prospectif, on ne peut préjuger de l'avenir. Mais dans les travaux auxquels nous participons au niveau européen, cette architecture est promue, justifiée et débattue. D'ailleurs, la Commission européenne défend ce principe puisque, s'il n'y a pas un intérêt économique à développer l'interopérabilité, alors celle-ci ne sert pas à grand-chose. Et cet intérêt économique ne peut passer que par le fait que les équipements embarqués sont mutualisés. Aujourd'hui, c'est le schéma qui a été construit au fil des réflexions et du dialogue et dont on espère tirer les fruits, mais dans un second temps.
J'avais pourtant compris que le contrat de partenariat public-privé nous imposait un loyer fixe. Donc, où cela va-t-il se répercuter positivement pour l'État si le partenaire privé réalise des bénéfices supérieurs ou des moindres dépenses ?
La rémunération du service de télépéage est fixée dans le cadre du contrat, pour tout le monde et après avis de l'État. Ce n'est pas Écomouv' qui en tirera un bénéfice directement, c'est l'État qui révisera les prix du service, en traitant tout le monde de la même manière à service équivalent, et qui en tirera un bénéfice direct. On est sur la rémunération du service aux abonnés telle que prévue dans le contrat et telle qu'elle se répercuté sur les sociétés de télépéage.
Il est important de noter que c'est le même montant qui est payé par l'État à Écomouv' et qu'Écomouv' reverse aux sociétés de télépéage. À l'inverse, quand ce dernier montant baisse, la remise revient à l'État.
Et l'effet d'aubaine des autoroutes, l'avez-vous chiffré ? Manifestement, ils vont bénéficier d'un trafic supérieur dans la mesure où il n'y aura plus d'intérêt pour les poids lourds à passer sur le réseau taxable écotaxe et à éviter les autoroutes.
Oui, madame la Présidente. Un certain nombre d'évaluations ont été faites. Le volume net d'augmentation des péages peut approcher quelques centaines de millions d'euros, peut-être 300 millions. Le chiffre de 400 millions d'euros qui a été avancé nous parait un peu exagéré. Cela dit, il faut le relativiser parce qu'il y aura des coûts supplémentaires engendrés par l'accroissement de la circulation des poids lourds. Évidemment, ces accroissements de coûts ne compensent pas la recette supplémentaire, j'en conviens. Après, la réflexion quant à la possibilité pour l'État de récupérer une partie de ces recettes supplémentaires se heurte à un certain nombre de questions juridiques et techniques. Là-dessus, je n'ai pas de pistes particulières.
En ce qui concerne la remise à disposition de l'équipement à l'État à la fin du contrat de partenariat, je n'ai pas trouvé de trace dans le contrat de la vérification de sa mutabilité. Certes, il est dit que l'équipement doit être « non-obsolescent », c'est-à-dire que l'on doit toujours trouver sur le marché les pièces nécessaires pour le maintenir en état, mais cela est loin de signifier qu'on a toujours un matériel performant. J'ai l'impression que l'État va payer excessivement cher un matériel technologique de pointe qui ne sera plus vraiment de pointe quand on le récupèrera, à l'instar du dispositif allemand installé en 2004 et qui n'est plus aux normes d'interopérabilité.
Ce point-là est bien traité dans le contrat à travers un certain nombre d'aspects. Tout d'abord, dans l'article 61 qui concerne la remise à l'État en fin de contrat, une exigence est posée en termes fonctionnels : le dispositif doit être remis en l'état d'atteindre les performances qui lui sont imposées. Par ailleurs, tout au long de la vie du contrat, un programme et un plan de gros entretien et renouvellement sont prévus dont Écomouv' a la charge. Un audit du dispositif est prévu quelques temps avant la fin du contrat qui doit permettre à l'État d'avoir une idée précise de l'état du dispositif et, éventuellement, d'imposer à son partenaire les corrections ou les remises à niveau qui s'imposeraient. Ces clauses-là sont bien prévues.
Qui conduira cet audit ? Qui choisira l'organisme en charge ? L'État, un organisme privé ? Est-ce Écomouv' elle-même qui choisira ou qui réalisera ?
Le choix est précisé, mais je vous répondrai par écrit ultérieurement. L'État est de toute façon associé à cet audit et le suivra. À chaque fois, il y a toujours des mécanismes d'échanges en cas de désaccord.
Nous entendons M. Laurent Trévisani, directeur général de SNCF Participations et directeur de la stratégie du groupe SNCF. Nous avons souhaité vous auditionner afin de comprendre, d'une part, quelles ont été les circonstances, les conditions et les motivations de l'entrée de la SNCF dans le consortium Écomouv' et, d'autre part, quelles sont ses relations avec la société de projet Écomouv', à la fois en tant qu'actionnaire et en tant que cocontractant, et notamment comment la SNCF est rémunérée.
Enfin, nous avons noté avec intérêt qu'Écomouv' a déclaré le 29 janvier dernier, à l'Assemblée nationale, qu'elle pourrait assumer un report du système de l'écotaxe « jusqu'à la fin de l'année ». Qu'en pensez-vous ?
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Laurent Trévisani prête serment.
Je souhaiterais tout d'abord présenter brièvement SNCF Participations, dont je suis le directeur général. Le groupe SNCF est constitué d'un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) et d'environ 900 filiales qui portent l'ensemble des activités du groupe. Ces filiales sont majoritairement rassemblées et placées sous une holding commune qui s'appelle SNCF Participations et qui est détenue à 100 % par l'EPIC SNCF.
SNCF Participations est une société dont les fonds propres sont supérieurs à 2 milliards d'euros et dont l'actif principal est constitué par la détention dans les différentes filiales. C'est donc la structure la plus appropriée, compte tenu de sa mission, pour porter la participation de la SNCF dans la société Écomouv' SAS.
Courant 2009, la SNCF a été approchée par la société Autostrade per l'Italia, qui souhaitait s'entourer de différents partenaires, notamment industriels, pour participer à la procédure de dialogue compétitif engagée avec l'État. Nous avons étudié la proposition qui nous a été faite et avons considéré que, sur un plan stratégique, il y avait un intérêt à poursuivre.
Cet intérêt stratégique repose sur plusieurs raisons. SNCF souhaite être un acteur du développement de nouvelles opportunités dans le secteur de la mobilité et pas seulement dans son activité historique, le transport ferroviaire. Elle souhaite également acquérir un savoir-faire auprès d'entreprises européennes de premier plan en matière de conception et de déploiement de collectes électroniques et, en l'occurrence, Autostrade est un leader européen dans ce domaine.
Notre dialogue s'est poursuivi tout au long des années 2009 et 2010. Au sein de notre groupe, nous avons mené une instruction détaillée sur ce projet. Nous avons ensuite considéré que nous avions un intérêt à prendre une participation de 10 % dans la société Écomouv' SAS. En revanche, nous n'avons pas souhaité prendre une participation dans la société Écomouv' D&B, qui a conçu et construit le système.
Notre participation est minoritaire, conformément au règlement de la consultation, qui prévoit qu'Autostrade reste majoritaire à hauteur de 70 %. Compte tenu des montants des investissements à réaliser, une participation de 10 % conduit à un engagement de notre part à hauteur de 15 millions d'euros en fonds propres et quasi-fonds propres.
Il faut préciser qu'au sein de la SNCF, nous avons institué un process de validation des engagements. Ainsi, la prise de participation au sein d'Écomouv', en tant qu'opération d'acquisition de titres, doit faire l'objet d'une validation par le comité des engagements de l'entreprise. Ce comité est présidé par le directeur général délégué stratégie développement. Il assure un premier niveau de validation. En outre, conformément à un décret de 1983, les opérations de périmètre sont soumises à l'avis d'une mission de contrôle économique et financier. Enfin, le conseil d'administration de SNCF Participations a délibéré sur cette prise de participation. À votre requête, nous vous avons transmis le procès-verbal de la réunion lors de laquelle il s'est prononcé.
Au cours des années 2009, 2010 et 2011, le comité des engagements a validé cette participation à deux reprises, d'abord au stade de l'appel d'offres puis une fois que le consortium dont nous faisions partie s'est vu attribuer le marché, ce qui nous a conduits à prendre une participation dans la société de projet qui a, alors, été créée.
Au sein d'Écomouv', le groupe SNCF a deux rôles. D'abord celui d'actionnaire avisé, à hauteur de 10 %, mais aussi celui de sous-traitant. Deux de nos filiales effectuent des opérations, directement ou indirectement, pour Écomouv'. Geodis assure la logistique des équipements embarqués, pour un montant d'environ 6 millions d'euros. SNCF Infra, en sous-traitance de Thales, assure la maintenance des dispositifs de contrôle fixes, pour un montant de 36 millions d'euros. Au total, la SNCF perçoit environ 42 millions d'euros sur la durée d'exploitation du dispositif.
La rémunération de la SNCF a donc deux composantes. En tant qu'actionnaire, nous avons vocation à percevoir des dividendes, mais également des intérêts au titre des apports d'actionnaires, la dette dite subordonnée. En tant que sous-traitant, nous réalisons une marge sur les contrats commerciaux signés par nos filiales.
Dans le cadre des intérêts stratégiques de votre participation au sein du consortium, vous avez affirmé vouloir développer votre savoir-faire en matière de déploiement des systèmes électroniques, avec une visée européenne. Pourtant, vous n'avez pas souhaité entrer dans le capital d'Écomouv' D & B qui a conçu le système. Je ne comprends pas bien ce choix. Vous souhaitez vous consacrer à la maintenance des systèmes et non à sa conception, est-ce cela ?
La SNCF souhaite être un acteur de la mobilité et pas uniquement un opérateur de transport ferroviaire. Être acteur de la mobilité signifie vouloir maîtriser et développer des business dans le domaine de la multimodalité avec, à la fois, des opérations physiques de transport, de distribution, de collecte électronique et de paiement. Nous devons développer nos compétences dans ces domaines. On le fait, pour partie, en interne, et pour partie, en s'associant avec différentes sociétés. À travers cette opération de prise de participation dans Écomouv' SAS, nous avons souhaité acquérir ce savoir-faire auprès du groupe Autostrade, qui est un acteur européen important en la matière.
Pourquoi ne sommes-nous pas dans Écomouv' D & B ? Les contrats de sous-traitance sont directement liés à nos coeurs de métier, à savoir la logistique - transports de marchandises - et la maintenance - notamment d'infrastructures. Nous ne disposons pas de compétences spécifiques en matière de conception du système. Or, Écomouv' D & B devait regrouper les sociétés directement liées à la conception de système. Ainsi, il convenait de concilier, d'une part, notre volonté d'intégrer ce partenariat pour les raisons déjà évoquées et, d'autre part, la volonté de nos partenaires qui souhaitaient connaître la valeur ajoutée que nous pouvions leur apporter en étant actionnaire. Notre valeur ajoutée en matière de conception est relativement faible car ce n'est pas notre coeur de métier.
Quelle est la rémunération nette de la SNCF dans le cadre de ce contrat ?
L'ensemble de ce projet apporte un taux de rendement supérieur au niveau de rentabilité que nous exigeons à travers nos investissements. Nous avons fixé à 8 % le niveau de rentabilité minimum pour prendre des investissements. Le projet dégage donc une rentabilité supérieure à ce taux.
Je ne l'ai pas en tête.
Y-a-t-il eu des facturations, notamment auprès des sous-traitants ? Avez-vous été payé par Écomouv' ?
Compte tenu de la situation actuelle, la société Écomouv' a suspendu le paiement de l'ensemble de ses fournisseurs actionnaires en raison d'une trésorerie tendue.
Depuis quand date cette suspension des paiements ? Avez-vous pu bénéficier d'une partie des paiements ?
Nous avons reçu une partie des paiements. Ces derniers sont suspendus depuis novembre ou décembre dernier.
Bien sûr.
Les reports et les retards constatés relèvent en partie de la responsabilité d'Écomouv'. Dans le contrat qui vous lie au consortium, comment êtes-vous protégé par rapport à cette situation ?
Nous sommes liés à Écomouv' SAS par les statuts que nous avons signés et par un pacte d'actionnaires. Nous sommes actionnaires minoritaires à hauteur de 10 % ce qui nous laisse peu de droits et peu d'influence sur la prise de décision. Nous sommes certes protégés par les clauses classiques d'un pacte d'actionnaires. Ainsi, la majorité qualifiée s'élève à 84 % des actions. Nous ne pouvons pas atteindre, seuls, la minorité de blocage nécessaire pour les décisions relevant d'une majorité qualifiée.
La contrepartie de cette situation est que nos engagements sont limités à notre mise de fonds initiale - 15,1 millions d'euros. En d'autres termes, notre risque en tant qu'actionnaire dans cette société est capé à 15,1 millions d'euros.
A quoi correspond le montant de 787,5 millions d'euros indiqué dans la délibération du conseil d'administration autorisant la prise de participation de la SNCF au sein de Écomouv' ?
Cette somme - 15,1 millions d'euros - correspond aux fonds propres et quasi-fonds propres de la société Écomouv' pour 100 % des titres.
Sur les différents documents que nous avons signés et soumis à la validation du conseil d'administration, notre quote-part ne porte que sur 10 % du montant des fonds propres et quasi-fonds propres. Les 787 millions d'euros représentent la totalité du financement du projet - capitaux propres et dette.
Cette somme représente donc la partie « capital » et la participation.
En tant que sous-traitant, vous avez participé à la définition du projet. Dans ce cadre, qu'avez-vous facturé ?
Nous n'avons pas participé à cette phase du projet puisque la définition et la conception relèvent de la société Écomouv' D & B dont nous ne sommes pas partie prenante. Il existe, au niveau juridique, une frontière étanche entre Écomouv' D & B et Écomouv' SAS.
A quel stade intervenez-vous ? Lors de la mise en service du dispositif ? Quel est votre rôle avant la mise en service ?
Nos contrats de sous-traitance concernent la distribution des boîtiers qui relève de notre filiale Geodis, pour le compte d'Écomouv'. Nous ne participons pas à la conception des produits.
Ce contrat de 6 millions d'euros a connu un commencement de facturation, notamment pour les prestations qui ont commencé à être réalisées. Mais nous ne sommes pas encore payés de la totalité en raison de la suspension des paiements liée à la situation de trésorerie du consortium.
En plus des opérations que nous assurons via notre filiale Geodis, nous avons également signé un contrat de maintenance du dispositif au sol via SNCF Infra qui s'appliquera pendant la période d'exploitation, pour un montant de 36 millions d'euros sur une période de onze ans. Cette prestation n'a pas encore commencé.
La situation actuelle de la suspension ne vous crée-t-elle pas trop de soucis ?
Le montant des impayés, à ce jour, s'élève à 800 000 euros pour Geodis.
L'extrait du procès-verbal du conseil d'administration du 27 septembre 2011 qui nous a été remis ne nous donne que le résultat du vote final mais aucun élément de la discussion, ni les positions des uns et des autres. Pourrions-nous avoir l'intégralité du document ? Pourrions-nous également disposer de tous les avis des échelons précédents, notamment la mission du contrôle économique et financier, etc., pour comprendre tous les tenants et aboutissants ?
J'ai aussi du mal à comprendre la relation entre 15,1 millions et 787 millions d'euros, la première somme ne représentant pas 10 % de la seconde. Il serait intéressant que vous nous donniez, par écrit, des éléments complémentaires.
Bien sûr, sans aucun problème.
Comment pouvez-vous souhaiter devenir un acteur de la mobilité dans la collecte électronique au niveau européen tout en investissant dans Écomouv' SAS qui est complètement étanche d'Écomouv' D & B ? C'est plutôt une prise de participation dans un process capitalistique.
Vous dites que vous bénéficiez d'une rémunération de sous-traitant de Thales dans ce projet. Or, Thales appartient également à Écomouv' SAS. Quel type de rémunération bénéficiez-vous auprès de cette entreprise ?
L'étanchéité dont je parlais entre Écomouv' SAS et Écomouv' D & B est juridique. Écomouv' SAS porte le contrat de partenariat signé avec l'État et Écomouv' D & B construit le dispositif. C'est dans cette deuxième entreprise que réside le savoir-faire du dispositif.
Cette participation constitue, pour nous, un premier pas pour acquérir un savoir-faire dans la collecte, en s'associant avec Autostrade. C'est une manière de tisser des liens capitalistiques avec cette entreprise.
Quand une entreprise souhaite participer à un consortium, les autres partenaires évaluent la valeur ajoutée qu'elle peut apporter. À l'époque, nous avions relativement peu de savoir-faire sur la conception et le déploiement d'un système embarqué si bien que nous avions peu de valeur ajoutée à apporter à Écomouv' D & B.
De votre point de vue aujourd'hui, en raison de la suspension de l'écotaxe, la société en difficulté est celle à laquelle vous participez, à savoir Écomouv' SAS ?
Tout à fait. Les deux sont en difficulté. La première est impactée dans la mesure où c'est celle qui a signé en amont le contrat de partenariat avec l'État, mais la seconde l'est aussi.
Pour répondre à M. Filleul, la branche Infra a passé un contrat de sous-traitance avec Thales, avec des engagements réciproques. Nous assurons une prestation pour laquelle nous sommes rémunérés, avec une marge.
Dans les 36 millions d'euros de chiffres d'affaires, nous avons intégré une marge.
Comment réalisez-vous la prestation de logistique ? À quel endroit, suivant quelles modalités ? Avez-vous dû investir ou s'agit-il de votre matériel propre ? Qu'en est-il du personnel ? Que vous apporte cette opération ?
La prestation est réalisée par une filiale de Geodis dans un entrepôt que nous possédons déjà : nous utilisons nos moyens propres et nos personnels. Pour la distribution, nous avons utilisé les moyens de distribution de Geodis. Pour mémoire, cette filiale a un chiffre d'affaires de sept à huit milliards d'euros, dont trois à quatre milliards d'euros en France. Elle a les moyens de réaliser ce contrat.
En ce qui concerne la question de savoir ce que ce contrat nous apporte, il y a une augmentation du volume d'affaires qui s'ajoute à celui réalisé par Geodis.
Thales, Steria et SFR.
À ma connaissance, non.
Il me semble, oui.
Dans votre réponse sur les raisons de la participation de la SNCF, vous avez évoqué l'intérêt stratégique de la SNCF. Cet intérêt est-il si fort que cela pour la SNCF ? Ne s'agissait-il pas d'éviter qu'un concurrent, un autre grand opérateur ferroviaire européen par exemple, accepte si vous refusiez ? Est-ce une interprétation soutenable ou est-elle totalement erronée ?
Nous allons sur un terrain délicat. Je vais prendre une précaution en vous informant que je n'étais pas à ce poste en 2009, au moment des discussions avec Autostrade. Mais à ma connaissance, la raison que vous indiquez n'est pas un argument qui valait et a prévalu. Sur d'autres sujets, peut-être, mais sur celui-là, à ma connaissance, non.
Je repose ma question sur la situation de 2014. Combien de temps peut-on tenir comme cela ? Écomouv' a parlé d'un an devant l'Assemblée nationale : de quelle société s'agissait-il, la première ou la seconde ? Comment vivez-vous cette situation ?
Compte tenu des décisions de gestion et du pilotage resserré en matière de trésorerie, nous pouvons tenir jusqu'à fin mars 2014. Si j'ai bien compris les propos de M. Castellucci, c'est la position qu'il partage aussi. Si aucune décision n'est prise sur la réception, nous aurons un problème de trésorerie. Les banques prendront leurs dispositions et nous pourrions entrer dans un cas de défaut.
Oui. Depuis courant janvier, ont lieu des discussions tripartites avec l'État, les banques et les actionnaires, qui devraient aboutir à la signature d'un protocole avec des engagements réciproques. Dès que nous connaîtrons la date de réception, nous pourrons discuter avec les banques pour éviter le cas de défaut. Mais ces discussions sont toujours ouvertes et non finalisées. En attendant, nous pouvons tenir jusqu'à fin mars.
Auriez-vous éventuellement la capacité financière et l'autorisation de votre tutelle ou de vos associés pour recapitaliser Écomouv' en cas de problème ?
C'est un sujet, mais nous n'en sommes pas là aujourd'hui.
Non. Il est difficile de travailler sur des schémas de refinancement tant que nous ne connaissons pas la date de mise à disposition, qui marque le début du versement de la rémunération. Une fois qu'elle sera connue et que le coût du retard pourra être évalué, nous pourrons qualifier et quantifier le schéma de refinancement et modifier le schéma de remboursement de la dette, par étalement si cela est possible ou par une recapitalisation. C'est un travail qui est devant nous.
Avez-vous eu connaissance des défauts majeurs constatés lors des vérifications d'aptitude au bon fonctionnement (VABF) ? Qu'en pensez-vous ?
Il y a eu quelques défauts. Nous ne sommes qu'actionnaires minoritaires, et pas dans Écomouv' D & B, mais je ne pense pas que tout le retard pris est imputable à ces défauts. Sur un tel projet, avec une période très courte de construction, de deux ans, et la mise en oeuvre d'une technologie innovante, quelques mois de retard peuvent s'expliquer, même s'ils ont un coût.
Certes, il y a eu des difficultés. Mais la VABF a tout de même été reçue le 17 janvier 2014 ce qui ouvre le délai de deux mois durant lequel la mise à disposition et la réception doivent aboutir.
Vous êtes actionnaire minoritaire à hauteur de 10 %. Mais cela induit-il que Geodis soit directement entraîné dans cette opération ? Y a-t-il eu un appel d'offres ou bien est-ce le contrat que vous avez passé avec Écomouv' SAS qui permet à Geodis de travailler dans ce projet ?
La contractualisation s'est faite via la société Écomouv' qui met en oeuvre les règles de passation qui s'appliquent à ce type de structure et qui ne sont pas celles de la commande publique. À ma connaissance, Écomouv' a certes accepté de contractualiser avec Geodis, après avoir fait un benchmark pour s'assurer que la prestation était du niveau de qualité requis et au prix du marché.