Chers collègues du Parlement lituanien, Madame l'Ambassadrice, au nom de mes collègues, je suis heureux de vous accueillir pour une réunion de la commission des affaires européennes. Je salue également la présence de notre collègue Jean Desessart, président du groupe d'amitié France/Pays Baltes.
L'objet de notre réunion, ce sont les priorités de la présidence lituanienne.
Depuis le traité de Lisbonne, la présidence du Conseil a une portée un peu plus réduite qu'auparavant, mais elle reste très importante et le pays qui exerce la présidence conserve une réelle influence. Même sur le plan parlementaire, c'est une responsabilité non négligeable, car le Parlement du pays qui exerce la présidence doit organiser de nombreuses réunions interparlementaires. Il y a maintenant une dimension parlementaire de la présidence.
Nous en avons en quelque sorte une illustration aujourd'hui. D'habitude, c'est l'ambassadeur - ou l'ambassadrice - qui vient nous présenter les priorités de la présidence. Aujourd'hui, nous avons à la fois deux représentants du Parlement, dont un vice-président, et un représentant du Gouvernement, madame l'ambassadrice.
Je cède donc la parole aux représentants de la Lituanie, dans l'ordre qu'ils souhaiteront, pour nous présenter les priorités de la présidence. Ensuite viendront les questions de nos collègues.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, merci beaucoup pour votre accueil et pour l'opportunité que vous nous offrez de présenter les priorités de la présidence lituanienne de l'Union européenne. Je serai très heureux d'entendre vos impressions sur la petite COSAC et nous espérons que la grande COSAC, avec tous les acteurs majeurs, se passera bien.
Ma collègue, Mme Loreta Grauziniene est membre de la commission des affaires européennes et représente la majorité. Je représente l'opposition. Si nous ne sommes pas d'accord sur tous les sujets, en ce qui concerne l'Union européenne, nous parlons d'une seule voix.
Préparer la présidence de l'Union est un travail de longue haleine, mais nous avons conscience de notre responsabilité et nous nous sommes bien préparés. Près de 200 réunions seront organisées et 560 questions seront traitées.
Notre slogan est « Une Europe crédible, ouverte et en croissance ». Nous allons travailler sur la compétitivité de l'Europe, sur la sûreté de l'Europe et sur la croissance et l'emploi en Europe.
Concernant le cadre financier pluriannuel, un grand pas a été fait, mais une cinquantaine d'actes législatifs doivent encore être adoptés. De plus, nous voulons encore apporter des modifications à la distribution des fonds de cohésion. En outre, nous allons entamer le quatrième semestre européen et nous voulons renforcer la convergence économique en Europe.
Pour les affaires étrangères, nous allons beaucoup travailler avec la Haute représentante de l'Union européenne, Madame Ashton, et avec le Service européen d'action extérieure. Concernant l'élargissement, nous estimons que la conditionnalité est centrale. Le sommet du Partenariat oriental est important pour nous : nous mesurerons les progrès faits par chaque pays, individuellement. Concernant l'aide au développement, nous voulons renforcer le FED et les mesures d'aides. Enfin, en matière de défense, nous connaissons les attentes de la France.
Concernant le commerce international, les accords avec nos partenaires stratégiques créeront des opportunités et des emplois. C'est notamment le cas avec nos amis du Partenariat oriental.
Pour ce qui est de l'économie et des finances, nous continuerons la mise en place des réformes, notamment la supervision bancaire et le two pack. Et nous porterons une attention particulière à la lutte contre l'évasion fiscale, la contrebande et le commerce illégal.
Dans le secteur Justice et affaires intérieures, nous concentrerons nos efforts sur la mise en oeuvre du programme de Stockholm, la cybersécurité et les aspects stratégiques. En matière de protection des données, il faudra attendre les progrès des discussions sur ces textes, ainsi que sur la protection des passagers et des voyageurs.
Le sujet le plus sensible reste la création d'emplois. L'initiative pour la jeunesse doit être mise en oeuvre le plus vite possible. Nous suivrons également la question du détachement des travailleurs et l'évolution de la directive sur le tabac.
Dans le secteur de la recherche, de l'innovation, et de l'agenda numérique, nous soutiendrons l'adoption du programme Horizon 2020 et serons attentifs à la question du développement du numérique et des achats par internet.
En matière de transports et d'énergie, nous visons un accord avec le Parlement européen sur le transport routier et l'intermodalité. La sécurité énergétique sera également une priorité et notre objectif est un marché européen de l'énergie dès 2014.
La réforme de la politique agricole commune doit être achevée et des mesures transitoires adoptées. En matière d'environnement, un accord à la Conférence internationale sur le changement climatique doit être obtenu en priorité.
Enfin, en ce qui concerne l'éducation, la jeunesse, la culture et le sport, nous serons attentifs aux thématiques de l'inclusion des jeunes et de l'Europe créative.
J'ajoute que la petite COSAC est désormais derrière nous. Nous espérons que de nombreux représentants français seront présents à la grande COSAC à Vilnius à l'automne. La Seimas estime que les parlements nationaux ont un rôle important à jouer dans l'Union européenne. Ce rôle doit être renforcé et nous voulons nous rapprocher des autres parlements nationaux pour, éventuellement, réfléchir à des critères communs de contrôle des institutions européennes.
Merci mon cher collègue pour cet exposé très complet.
Nous sommes très attentifs au traitement des données personnelles. Certes, une harmonisation est nécessaire, mais elle doit se faire par le haut. Nous sommes attachés aux standards dont bénéficient les citoyens français.
Concernant l'accord commercial avec les États-Unis, le Sénat a adopté une position unanime sur l'exception culturelle, l'agriculture et les questions de défense. Nous sommes reconnaissants au Président de la République de son action et le mandat donné à la Commission européenne nous semble être le bon. Cependant, nous avons regretté la prise de parole du Président de la Commission européenne et nous considérons que son rôle est d'appliquer le mandat de négociation, mais pas de le commenter !
À propos du Partenariat oriental, nous avons beaucoup travaillé au sein de notre commission sur l'accord d'association avec l'Ukraine. J'ai moi-même reçu récemment M. Leonid Kojara, le ministre des affaires étrangères de ce pays.
Néanmoins, je voudrais rappeler que la politique de voisinage comporte deux volets et qu'il ne faut pas oublier le partenariat avec les pays du sud de la Méditerranée. Pour la grande COSAC, ne sont prévues que des interventions des membres de la troïka, dans laquelle ne figure aucun représentant d'un pays bordant la Méditerranée. Je crois qu'il serait bon qu'un parlementaire méditerranéen puisse intervenir à la COSAC - je pense par exemple à notre collègue portugais - et je serais heureux que vous interveniez en ce sens, monsieur le Président.
Je souhaite évoquer la question de la sécurité énergétique. Je constate que l'Europe est dépendante du Moyen-Orient et je pense qu'elle doit signer des accords avec l'ensemble de ses partenaires stratégiques, y compris la Russie. L'énergie fait partie de la compétitivité de l'Europe et c'est un sujet important.
J'avais par ailleurs une question concernant l'énergie nucléaire et ma région, la Bourgogne. J'ai vu qu'il y avait un projet de centrale nucléaire en Lituanie. Or, c'est en Bourgogne qu'on fabrique les centrales nucléaires françaises. Pouvez-vous nous dire un mot du projet lituanien ?
Un accord a été obtenu en juin sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020 après des discussions en trilogue longues et laborieuses. Êtes-vous satisfaits des nouvelles orientations de la politique de cohésion ? Par ailleurs, j'aurais aimé connaitre votre avis sur la convergence des aides entre les deux piliers de la politique agricole commune.
Après l'adhésion à l'Union européenne et après avoir présidé le Conseil de l'Union, la Lituanie envisage-t-elle d'adopter prochainement l'euro ?
J'ai plusieurs questions d'ordre institutionnel. Comment votre Gouvernement a-t-il préparé sa présidence ? Comment fonctionne la collaboration avec M. Von Rompuy, d'une part, et avec les autres membres de la troïka, d'autre part ? Enfin, savez-vous s'il y a, de façon institutionnelle, des gens qui réfléchissent à l'avenir de l'Union européenne ?
La protection des données est à la fois sensible et stratégique. L'échange est nécessaire, mais les garanties doivent être renforcées.
Je suis convaincu que la position du Conseil sur l'accord avec les États-Unis est la bonne approche de travail pour l'ouverture des négociations. La France est sensible à la culture et à l'agriculture, mais la Lituanie a aussi des sujets sur lesquels elle ne peut transiger comme les organismes génétiquement modifiés. La protection de notre territoire à l'égard des OGM est pour nous une question très importante. Pourtant, l'accord commercial avec les USA est primordial. Une étude allemande a montré que ce sont d'abord les grands États européens qui en profiteront, même si les effets ne seront pas à court terme, mais à long terme. Je pense que plus de secteurs seront inclus dans les négociations et plus les résultats seront importants.
Pour ce qui est de la politique de voisinage, il ne doit pas y avoir de division : une même attention doit être portée à nos partenaires de l'est et à nos partenaires au sud de l'Europe. Les voisins de l'Union sont souvent une source d'une instabilité qu'elle doit résoudre. L'Ukraine a une très bonne chance d'être un leader, mais elle doit d'abord faire ses devoirs. J'invite à la patience avec ces pays. Comme l'on dit : « deux pas en avant, un pas en arrière, on avance quand même ! ». Quant à votre demande concernant la COSAC, nous allons réagir.
Pour ce qui est de l'énergie nucléaire, notre position est simple : la Lituanie est un pays nucléaire et souhaite le rester. Nous n'avons pas le choix car nous n'avons pas d'autre ressource, mais la sécurité doit être assurée avant tout.
La Russie a une vision monopoliste et veut imposer ses prix dans le secteur de l'énergie. Elle doit se réveiller et changer son comportement. Avec notre gaz liquéfié, nous voulons l'y pousser. Mais la Lituanie se sent seule sur ce sujet et aimerait plus de soutien de l'Union européenne.
Sur les fonds structurels, un accord de compromis a été trouvé et nous acceptons les nouveaux critères. Pour les aides agricoles, nous pensons que l'Europe va dans la bonne direction mais qu'elle n'y va pas assez vite ! Nous apprécions la solidarité européenne et en échange, nous avons ouvert nos marchés. La Lituanie est un bon élève de la cohésion.
Notre Gouvernement souhaite passer à l'euro le 1er juillet 2015. Nos indicateurs économiques sont bons, à l'exception de l'inflation qui reste un problème et qui pourrait nous empêcher d'accéder à la monnaie unique. Or, cette inflation ne se décide pas à Vilnius, mais chez Gazprom !
Pour préparer la présidence lituanienne de l'Union européenne, les travaux ont été coordonnés par notre représentation permanente à Bruxelles qui a vu ses effectifs augmenter de 90 à 200 personnes actuellement. Quant à la troïka, il y a eu beaucoup d'échanges informels, mais nous avons conscience que la Grèce aura du mal à assumer la continuité nécessaire.
Concernant des réflexions sur le futur de l'Europe, je ne connais pas de réflexions stratégiques de long terme. À titre personnel, je suis pour une nouvelle convention.
Monsieur le Président, je vous remercie vivement pour cette démarche parlementaire nouvelle et pour votre venue à Paris.