Commission des affaires européennes

Réunion du 3 novembre 2016 à 8h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • RUP
  • banane
  • outre-mer
  • phytosanitaire

La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous examinons d'abord le rapport de Mme Gisèle Jourda sur la proposition de résolution européenne relative à l'inadaptation des normes agricoles et de la politique commerciale européennes aux spécificités des régions ultrapériphériques (RUP). Cette proposition de résolution européenne a été élaborée dans le cadre de la Délégation à l'Outre-mer. Elle est cosignée par MM. Magras, Doligé, Gillot et Mmes Proccacia et Jourda.

Nous avons beaucoup débattu ces dernières semaines des accords commerciaux de l'Union européenne. Je me réjouis - comme, je crois, le Sénat - de l'issue trouvée pour l'accord avec le Canada, même si l'image de l'Union européenne a souffert de cette séquence. Nous devrons en tirer les conséquences et adapter nos modes de négociation.

Cette proposition de résolution nous invite à examiner de nouveau l'insuffisante prise en compte de la spécificité des RUP, qu'il s'agisse d'ouverture commerciale ou de cadre réglementaire.

En janvier nous avions déjà réagi, non sans un certain succès, face à un accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Vietnam qui aurait pu avoir un effet très négatif sur la filière sucrière dans nos RUP. Nous l'avions fait sur la base d'une proposition de résolution de Michel Magras et Gisèle Jourda, à la suite de travaux de la Délégation à l'Outre-mer. Nous devons défendre avec vigilance les intérêts de nos collectivités d'Outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Nos agricultures d'outre-mer sont pour ainsi dire prises en étau, entre d'un côté l'ouverture croissante des marchés européens aux productions des pays tiers, et de l'autre l'inadaptation du cadre réglementaire sanitaire et phytosanitaire aux besoins des producteurs locaux. Ce qui est en jeu, c'est la stratégie de développement vertueuse, suivie dans les départements d'outre-mer (DOM) au cours des dernières années, tant en matière de respect de l'environnement que de recherche de la qualité. Notre proposition de résolution identifie des pistes que doivent suivre tant la Commission européenne que nos autorités nationales

Pourquoi l'agriculture des RUP est-elle pénalisée dans son recours aux produits phytosanitaires par rapport à la concurrence des pays tiers ? Le cadre réglementaire est rigide et inadapté : les normes nationales et européennes, très imbriquées, sont conçues pour une application uniforme et sur la base des seuls besoins d'un climat tempéré. Les entreprises agrochimiques sont peu incitées à développer une offre spécifique de produits phytosanitaires pour ces marchés de faible taille. Ainsi, seulement 29 % des besoins phytosanitaires sont couverts dans les DOM, contre 80 % en métropole. Les agriculteurs des RUP sont souvent démunis face aux ravageurs et aux dévastateurs tropicaux.

À ceci s'ajoutent les effets d'une compétition déloyale avec les pays tiers. Les filières agricoles ultramarines ont accepté la logique vertueuse du mieux-disant environnemental et s'y sont adaptées, ce qui a occasionné une hausse du prix de vente de 15 % à 20 %. A contrario, leurs concurrents des pays tiers peuvent avoir recours à une palette de produits beaucoup plus large, dès lors qu'ils respectent les limites maximales de résidus (LMR) de pesticides.

La proposition de résolution formule un ensemble très complet de recommandations en matière phytosanitaire. Deux d'entre elles présentent une importance particulière. D'abord, dans la refonte du Règlement du 28 juin 2007 relatif à la production biologique, la proposition de résolution appelle à « prévoir un volet spécifique en milieu tropical, afin d'assouplir le recours aux semences conventionnelles, d'autoriser la culture sur claies et de permettre le traitement par des produits d'origine naturelle ». En second lieu, à l'occasion de la prochaine révision du Règlement du 21 octobre 2009 concernant les produits phytopharmaceutiques, la proposition de résolution demande une « dispense d'homologation pour tous les moyens de lutte biologique, développés et validés par les instituts de recherche (...), afin de doter les agriculteurs de moyens de protection contre les ravageurs ». Plusieurs autres recommandations visent à sensibiliser les institutions européennes aux spécificités et aux besoins des agricultures ultramarines.

La concurrence qualitative se double d'une concurrence quantitative, occasionnée par l'ouverture du marché européen à certains produits de pays tiers. Sur ce point, je tire la sonnette d'alarme. La proposition de résolution aborde la question de l'ouverture commerciale et de la concurrence qui en résulte, qui met tout particulièrement à mal la filière de la banane communautaire.

Après les accords de libre-échange conclus en 2012 avec l'Amérique centrale et les pays andins, les droits de douane sur la banane, à l'importation dans l'Union européenne, seront passés de 176 euros par tonne en 2009 à 75 euros par tonne en 2020. Depuis la mise en oeuvre des accords avec ces pays, leurs exportations de bananes vers l'Europe ont fortement augmenté. La perte de parts de marché qui en résulte pour nos producteurs concernés met en péril l'avenir de la filière.

Des mécanismes de protection sont prévus : une clause de sauvegarde bilatérale et un mécanisme de stabilisation. La clause de sauvegarde spécifique prévoit que l'Union peut suspendre le droit de douane préférentiel si les importations de bananes depuis les pays partenaires se font « dans des quantités tellement accrues (...) et à des conditions telles qu'elles causent (ou menacent de causer) un préjudice grave à l'industrie de l'Union ». Le mécanisme de stabilisation, lui, permet à l'Union de suspendre temporairement - pas plus de trois mois et pas au-delà de la fin de l'année civile -, le droit de douane préférentiel, si les importations de bananes dépassent les seuils d'importation prévus dans les accords.

Mais la Commission européenne n'a jamais estimé utile ou opportun d'y recourir. Depuis 2013, aucun des deux dispositifs n'a été activé, alors même que l'évolution du marché pouvait, à plusieurs reprises, le justifier. D'où ma question posée en séance publique au ministre Harlem Désir lors du dernier débat préalable au Conseil européen. Mon rapport écrit présente des tableaux décrivant les dépassements répétés des seuils d'importation autorisés.

La proposition de résolution suggère quatre principales pistes d'action. D'abord, l'activation sans délai par la Commission des mécanismes de stabilisation et donc la suspension des droits préférentiels dès que les seuils de déclenchement prévus dans les accords sont atteints ; ensuite, la prorogation de ces mécanismes de stabilisation au-delà de la date butoir du 31 décembre 2019 - alors qu' il est prévu de les supprimer à cette date ; la création d'observatoires des prix et des revenus pour les grandes filières exportatrices des RUP que sont la banane et la canne pour disposer de mesures fiables, publiques et transparentes ; enfin, la réalisation systématique, par la Commission européenne, d'études d'impact préalables sur les RUP des accords commerciaux passés par l'Union européenne.

La proposition de résolution souligne que « les contradictions de la politique européenne se révèlent particulièrement préjudiciables aux RUP qu'elles enferment dans une logique fataliste de compensation financière, de dépendance et de dépérissement, qui ne conduira en aucun cas au développement économique et social de territoires frappés par le fléau du chômage ». Ce système est absurde, quand on sait combien l'Union européenne a investi en faveur de l'agriculture dans nos DOM. Quel intérêt si nous ne pouvons plus écouler leur production ?

Quant à la logique des accords de libre-échange, négociés par la commission sur mandat du Conseil et ratifiés par les États-membres, elle n'est pas sans mérite. Mais elle ne doit pas mésestimer leur impact négatif sur des productions agricoles sensibles, qui sont par ailleurs les seules ressources des populations de ces territoires ultramarins.

La proposition de résolution préconise des solutions de nature à rétablir un juste équilibre entre producteurs concurrents et une protection justifiée pour nos producteurs ultramarins. Je vous propose de l'adopter sans modification.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Belle force de conviction : l'outre-mer a trouvé au Sénat une nouvelle défenseure ! Ces problèmes sont nos problèmes, et ne doivent pas préoccuper uniquement les élus d'outre-mer. M. Raoul et moi-même nous en étions saisis. Hélas, tout ce que vous en avez dit pourrait être transposé au niveau métropolitain... Par exemple, dans notre Occitanie, les traitements autorisés ne sont pas les mêmes que de l'autre côté des Pyrénées, pour les mêmes cultures. Et c'est pire encore avec les pays extracommunautaires. Je me rappelle qu'avec notre collègue Georges Patient, en préparant un rapport sur les fonds structurels européens, nous avions visité une exploitation de canne à sucre en Guyane, à Mana, qui subissait de terribles attaques de parasites, mais ne pouvait pas utiliser certains produits phytosanitaires - ce qui est sans doute une bonne chose pour la santé publique - mais qui étaient utilisés à quelques kilomètres de là.

A ces problèmes complexes s'ajoute le fait que la situation des RUP est de moins en moins prise en compte par l'Union européenne. Il est vrai que seuls trois pays sont concernés. Encore, le Portugal et l'Espagne, avec respectivement les Açores et les Canaries, ne le sont-ils qu'au titre de régions finalement plus européennes que nos outre-mer. Il nous faut donc mener ce combat, d'autant plus que les collectivités territoriales d'outre-mer, si elles apparaissaient dans le passé comme une charge, sont aujourd'hui perçues comme une grande chance pour notre pays, qui bénéficie grâce à elles de vastes étendues maritimes propices notamment à la pêche. Leur population doit donc pouvoir y vivre d'une agriculture ne dépendant pas uniquement d'aides. Aussi voterons-nous ce rapport avec enthousiasme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Ce que notre rapporteure a dit des RUP s'applique à la production agricole française en Europe. Oui, il faut respecter des règles, mais il faut aussi les mettre en avant face aux pays tiers. La Guadeloupe et la Martinique s'orientent vers la reconnaissance d'indications géographiques protégées (IGP). Pour vendre nos productions à un prix entre 10 % et 15 % supérieur à la concurrence, c'est une solution réaliste, qui devrait pouvoir être mise en oeuvre d'ici 2020. Je reste convaincu qu'il faut des règles, des produits de qualité, et sans doute de plus en plus de contractualisation, pour sécuriser les revenus des agriculteurs. En 1998, le ministre de l'agriculture a interdit le chlordécone, mais il semble que la production de bananes en plein champ en répande moins que ce que l'on en trouvait dans les jardins privés.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Je me félicite que ce rapport suscite un très large consensus. Édicter des normes et des règles est une chose - et l'Union européenne y excelle - encore faut-il pouvoir en suivre l'application. Aux Caraïbes, la circulation illégale des produits entre les îles est considérable. M. Fekl nous a expliqué récemment que, si 3 000 personnes travaillaient à Bruxelles sur l'élaboration des traités commerciaux bilatéraux, le suivi de la mise en oeuvre et l'évaluation des traités déjà passés faisaient complètement défaut.

Le point 40 de la proposition de résolution « préconise de procéder à la révision du règlement sur les pesticides de 2009 pour dispenser d'homologation les phéromones et les extraits végétaux, et en général tous les moyens de lutte biologique, développés et validés par les instituts de recherche implantés dans les RUP, afin de doter les agriculteurs de moyens de protection contre les ravageurs, efficaces et conformes à la mutation agroécologique ». En France, la récente loi d'avenir pour l'agriculture prévoit déjà cette dispense d'homologation, mais le ministère de l'agriculture tarde à l'appliquer, et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ne sait pas comment la mettre en oeuvre.

Le point 45 « préconise d'autoriser la certification de l'agriculture biologique par un système participatif de garantie (SPG), comme en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, en rendant facultatif le recours à un organisme certificateur pour les exploitations implantées dans les RUP ». Mais qui certifiera ? C'est très flou.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Nos collègues MM. Doligé et Gillot et Mme Procaccia, dans le cadre de la Délégation à l'Outre-mer, ont consacré des mois à auditionner les parties prenantes, et se sont penchés de très près sur la question des phytosanitaires dans les RUP. Ils se sont rendus sur place pour prendre conscience du danger : l'homologation des deux produits les plus utilisés est en passe de disparaître, ce qui fera s'étioler comme peau de chagrin les 29 % que j'évoquais.

La piste des indications géographiques protégées (IGP) fait l'objet de travaux de la délégation aux outre-mer et d'autres organisations. Mais les difficultés qui existent sur ce point dans l'hexagone sont encore amplifiées outre-mer. Voyez par exemple ce que devient la labellisation du litchi !

En tous cas, nous ne devons pas négocier d'accords commerciaux à perte, car les premières victimes sont toujours nos collectivités d'outre-mer, dont on oublie les spécificités au cours de la négociation.

Le point 45 a suscité des débats entre nous, en effet. Mais il faut choisir entre la peste et le choléra ! La solution retenue n'est pas parfaite, mais je crois que c'est la seule envisageable. Nous aurons le débat lors de la discussion en séance publique.

Au-delà des aspects normatifs précis, la philosophie européenne doit être que chacun trouve satisfaction dans un accord commercial. Nos collectivités d'outre-mer connaissent un chômage élevé, et nous leurs imposons les normes sanitaires de l'hexagone, inadaptées pour des pays tropicaux. À nous, parlementaires, de tout faire pour susciter une prise de conscience. Sur le sucre, nous avons obtenu une belle avancée.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Tâchons de parvenir au même résultat pour la banane. Restera le litchi, et l'ananas...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Les IGP sont menacées par les traités commerciaux d'un côté, et de l'autre, c'est l'Union européenne qui bloque leur création. À nous de faire avancer les choses. Pour une IGP, il suffit que le produit passe dans la région concernée : il n'y a pas de raison que le processus dure dix ou quinze ans. Si nous ne débloquons pas la situation, l'agriculture française, qui représente 20 % de la production européenne mais 1 % de la production mondiale, risque de dépérir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Bravo pour ce gros travail. La logique de compensation financière relève d'une vision à court terme, et non d'une stratégie vertueuse. Aussi ne peut-elle être que transitoire - l'Union européenne doit en prendre conscience. J'ai toujours alerté les ministres successifs de l'agriculture sur le problème des petites filières, et des maladies orphelines, que les entreprises phytosanitaires négligent faute de retour sur investissement. La commission des affaires économiques devrait se pencher sur ce sujet, qui ne touche pas que les RUP. Ainsi, j'ai été saisi de la situation de la filière de l'ail, dont les producteurs, dans la Drôme, ne disposent plus d'aucun produit phytosanitaire en France. Il y a là un outil à inventer. Pourquoi pas un crédit d'impôt recherche spécifique ?

Je demande aussi au groupe de travail sur la propriété intellectuelle, que M. Yung anime, d'étudier la question des IGP. Leur mise en place ne doit pas être inutilement compliquée, car le temps économique va plus vite que le temps politique. Je me rappelle qu'il a fallu sept ans pour créer l'appellation d'origine protégée (AOP) « Prés-salés du Mont-Saint-Michel » ! À l'époque du numérique, c'est beaucoup trop.

Le principe de réciprocité figure de plus en plus explicitement dans les traités, tant les tensions commerciales s'accroissent. Cette proposition de résolution européenne sera débattue en séance le 22 novembre. Comme le lui permet le règlement, notre commission exercera les compétences attribuées aux commissions saisies pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Il y a un travail important à faire sur les IGP et les appellations d'origine contrôlées (AOC)...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

C'est un bon sujet pour le groupe de travail sur la propriété intellectuelle.

À l'issue du débat, la commission des affaires européennes a conclu, à l'unanimité, à l'adoption sans modification de la proposition de résolution européenne.

(1) Le Sénat,

(2) Vu l'article 88-4 de la Constitution,

(3) Vu les articles 206, 207 et 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

(4) Vu le règlement (CE) du Parlement européen et du Conseil n° 396/2005 du 23 février 2005 concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d'origine végétale et animale et modifiant la directive 91/414/CEE du Conseil,

(5) Vu le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91,

(6) Vu le règlement (CE) n° 669/2009 du 24 juillet 2009 de la Commission portant modalités d'exécution du règlement (CE) n° 882/2004 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contrôles officiels renforcés à l'importation de certains aliments pour animaux et certaines denrées alimentaires d'origine non animale et modifiant la décision 2006/504/CE,

(7) Vu le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil,

(8) Vu le règlement (UE) n° 283/2013 de la Commission du 1er mars 2013 établissant les exigences en matière de données applicables aux substances actives,

(9) Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques, présentée le 24 mars 2014,

(10) Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 19/2013 portant mise en oeuvre de la clause de sauvegarde bilatérale et du mécanisme de stabilisation pour les bananes prévus par l'accord commercial entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part, et le règlement (UE) n° 20/2013 portant mise en oeuvre de la clause de sauvegarde bilatérale et du mécanisme de stabilisation pour les bananes prévus par l'accord établissant une association entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et l'Amérique centrale, d'autre part, présentée le 26 mai 2015,

(11) Vu le projet de rapport n° 2015/0112(COD) du 18 juillet 2016 de Mme Marielle de Sarnez au nom de la Commission du commerce international du Parlement européen sur la proposition de règlement précédente,

(12) Vu la communication « Les régions ultrapériphériques de l'Union européenne : vers un partenariat pour une croissance intelligente, durable et inclusive » présentée par la Commission européenne le 20 juin 2012,

(13) Vu le document d'orientation du 4 mars 2016 destiné à harmoniser les études de dissipation des pesticides chimiques en milieu terrestre au champ, mis au point par l'Agence européenne de sécurité des aliments, par l'Agence américaine de protection de l'environnement et par l'Agence Santé Canada,

(14) Vu la réponse du 23 février 2015 apportée par M. Phil Hogan au nom de la Commission européenne à la question écrite E-011032-14 du 18 décembre 2014 de M. Younous Omarjee, posée en application de l'article 130 du Règlement du Parlement européen, sur les conséquences de la suppression des quotas sucriers sur le marché du sucre de l'Union européenne,

(15) Vu la réponse du 17 mai 2016 apportée par M. Vytenis Andrukaitis au nom de la Commission européenne à la question écrite E-001040-16 de Mme Mireille d'Ornano du 3 février 2016, posée en application de l'article 130 du Règlement du Parlement européen, sur la révision du règlement sur les pesticides de 2009,

(16) Vu la réponse du 3 juin 2016 apportée par Mme Corina Creþu au nom de la Commission européenne à la question écrite E-003154-16 du 20 avril 2016 de Mme Cláudia Monteiro de Aguiar, MM. Gabriel Mato, Younous Omarjee, Louis-Joseph Manscour et Maurice Ponga, Mme Sofia Ribeiro, M. Ricardo Serro Santos, Mme Liliana Rodrigues et M. Juan Fernando López Aguilar posée en application de l'article 130 du Règlement du Parlement européen, sur la fermeture de l'unité spéciale de la Commission pour les régions ultrapériphériques,

(17) Vu la réponse du 23 juin 2016 apportée par M. Phil Hogan au nom de la Commission européenne à la question écrite P-003927-16 du 11 mai 2016 de M. Louis-Joseph Manscour, posée en application de l'article 130 du Règlement du Parlement européen, sur la filière canne-sucre des RUP face aux négociations commerciales,

(18) Vu la résolution du Sénat n° 105 (2010-2011) du 3 mai 2011 tendant à obtenir compensation des effets, sur l'agriculture des départements d'outre-mer, des accords commerciaux conclus par l'Union européenne,

(19) Vu la résolution du Sénat n° 68 (2015-2016) du 26 janvier 2016 relative aux effets des accords commerciaux conclus par l'Union européenne sur les économies sucrières et la filière de la canne des régions ultrapériphériques,

(20) Considérant que les régions ultrapériphériques (RUP) constituent un atout pour l'Union européenne et qu'il est dans son intérêt de soutenir ces territoires « dans l'exploitation de toutes les possibilités de croissance intelligente, durable et inclusive sur la base de leurs atouts et de leur potentiel endogène », conformément aux orientations de la Commission européenne dans sa communication de 2012 exposant sa stratégie pluriannuelle pour les RUP,

(21) Considérant que l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) permet l'édiction de mesures spécifiques aux RUP afin de prendre en compte leurs contraintes propres, notamment « leur éloignement, l'insularité, leur faible superficie, le relief et le climat difficiles, leur dépendance économique vis-à-vis d'un petit nombre de produits »,

(22) Considérant que les filières agricoles des RUP jouent un rôle économique et social vital dans ces territoires et constituent, au sein de leur environnement régional, des modèles porteurs des valeurs de l'Union européenne en matière sociale et environnementale,

(23) Considérant que les normes et les procédures applicables à l'agriculture des RUP françaises en matière sanitaire et phytosanitaire trouvent leur origine pour l'essentiel dans des règlements européens d'application directe qui y imposent les mêmes dispositifs et les mêmes procédures qu'en Europe continentale, sans aucune prise en compte des caractéristiques de l'agriculture en contexte tropical,

(24) Considérant que l'application uniforme de la réglementation conçue pour des latitudes tempérées, sans forte pression de maladies et de ravageurs, conduit à une impasse qui menace directement la survie des filières agricoles des RUP,

(25) Considérant que les filières agricoles ultramarines souffrent de la prégnance des usages phytosanitaires orphelins, de la fragilité de la couverture phytopharmaceutique menacée par des retraits soudains d'homologation de substances actives, de l'absence de réponse contre des ravageurs dévastateurs comme la fourmi manioc, d'un encadrement inadapté des conditions d'utilisation des produits phytosanitaires en climat tropical et de dérogations difficiles à mettre en oeuvre,

(26) Considérant que les agriculteurs des RUP subissent de surcroît les effets d'une politique commerciale de l'Union européenne très favorable aux pays tiers, tant en termes de conclusion d'accords de libre échange qui mettent en péril les grandes filières exportatrices comme la banne, le sucre et le rhum, qu'au regard du faible degré d'exigence des normes alimentaires imposées aux denrées importées depuis ces pays,

(27) Considérant que, face à la concurrence des pays tiers dont la compétitivité-coût est insurpassable, du fait de niveaux de salaire et de conditions de travail nettement moins élevés et onéreux que dans les RUP, la préservation des barrières tarifaires et non-tarifaires est indispensable pour protéger les marchés des RUP,

(28) Considérant que les clauses de sauvegarde et les mécanismes de stabilisation inscrits dans les accords de libre-échange ont fait la preuve qu'ils étaient actuellement inopérants, en particulier lors de l'application des accords sur la banane avec la Colombie et le Pérou et avec les pays d'Amérique Centrale, dans la mesure où la Commission européenne a décidé de ne pas déclencher ces dispositifs malgré des dépassements répétés des quotas d'importation,

(29) Considérant que l'adhésion de l'Équateur à l'accord avec la Colombie et le Pérou ne peut manquer de porter préjudice aux producteurs de banane des RUP, alors que l'Équateur est déjà le premier exportateur de bananes vers l'Union européenne et qu'il bénéficiera désormais du même démantèlement tarifaire massif qui a déjà permis au Pérou de tripler ses exportations,

(30) Considérant que les outre-mer doivent tenter de résister sur leurs marchés traditionnels à l'export, comme sur leurs marchés locaux, en endossant un handicap normatif dont l'Union européenne exonère les pays tiers,

(31) Considérant que les denrées des pays tiers, dès lors qu'elles respectent les limites maximales de résidus (LMR) de pesticides, même si elles ont été traitées par des substances interdites pour les producteurs de l'Union européenne, sont acceptées sur les marchés européens, où elles concurrencent sévèrement les productions des RUP,

(32) Considérant que, pour rétablir une concurrence saine et loyale, les normes de commercialisation dans l'Union européenne doivent exiger des conditions de production excédant le seul respect des LMR,

(33) Considérant que les contrôles des importations de denrées alimentaires dans les RUP, même selon les modalités renforcées prévues par les règlements européens, sont insuffisants et régulièrement contournés, ce qui aboutit à la commercialisation frauduleuse de produits ne respectant pas les LMR sur les marchés ultramarins,

(34) Considérant que les producteurs ultramarins sont engagés dans une stratégie de montée en gamme et de certification qui ne pourra porter ses fruits tant que certaines productions des pays tiers bénéficient parallèlement de labels de qualité européens sans pour autant respecter pleinement les exigences communautaires,

(35) Considérant que les perspectives de développement de la production biologique, qui constitue une voie d'avenir possible pour les agricultures ultramarines, sont bridées par une réglementation européenne défavorable et par le cumul des normes sur l'agriculture biologique et sur les produits phytosanitaires, qui avantage à nouveau les pays tiers par rapport aux RUP,

(36) Considérant que la réglementation européenne sur l'agriculture biologique n'a jamais été élaborée en tenant compte du contexte tropical des RUP, alors que leurs concurrents comme la République dominicaine et le Brésil ont défini des règles d'agriculture biologique adaptées au climat tropical et que la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, grâce à leur statut d'autonomie, ont su également élaborer une norme d'agriculture biologique en harmonie avec leur environnement régional océanien,

(37) Considérant que certaines productions biologiques des pays tiers, moins vertueuses du point de vue environnemental et de la santé des agriculteurs que leurs homologues conventionnelles des RUP, envahissent le marché européen en profitant d'un étiquetage biologique qui entretient une confusion trompeuse pour le consommateur européen,

(38) Estime nécessaire de garantir la cohérence des politiques agricole, sanitaire et commerciale de l'Union européenne, conformément à l'article 207 du TFUE, aux termes duquel « il appartient au Conseil et à la Commission de veiller à ce que les accords négociés soient compatibles avec les politiques et règles internes de l'Union »,

(39) Invite la Commission européenne à acclimater les normes européennes réglementant l'agriculture et l'élevage aux contraintes propres des RUP en tenant compte des spécificités des productions en milieu tropical,

(40) Préconise de procéder à la révision du règlement sur les pesticides de 2009 pour dispenser d'homologation les phéromones et les extraits végétaux, et en général tous les moyens de lutte biologique, développés et validés par les instituts de recherche implantés dans les RUP, afin de doter les agriculteurs de moyens de protection contre les ravageurs, efficaces et conformes à la mutation agroécologique,

(41) Recommande à la Commission européenne d'établir une liste positive de pays dont les procédures d'homologation de produits phytopharmaceutiques sont équivalentes à celles de l'Union européenne afin de permettre aux autorités françaises d'autoriser directement un produit homologué dans un des pays de la liste pour la même culture et le même usage,

(42) Propose d'autoriser pour les RUP, à titre dérogatoire, la culture locale de variétés végétales résistantes aux ravageurs tropicaux mais non-inscrites au catalogue européen des variétés,

(43) Demande à l'Agence européenne de sécurité des aliments de compléter les référentiels pédoclimatiques et d'habitudes alimentaires qu'elle utilise afin de prendre en compte les caractéristiques propres des RUP au moment de l'évaluation des risques,

(44) Recommande, à l'occasion de la refonte du règlement sur la production biologique de 2007, de prévoir un volet spécifique pour la culture biologique en milieu tropical afin d'assouplir le recours aux semences conventionnelles, d'autoriser la culture sur claies, de raccourcir le délai de conversion et de permettre le traitement post-récolte par des produits d'origine naturelle,

(45) Préconise d'autoriser la certification de l'agriculture biologique par un système participatif de garantie (SPG), comme en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, en rendant facultatif le recours à un organisme certificateur pour les exploitations implantées dans les RUP,

(46) Invite la Commission européenne à assurer la cohérence des normes de production et des normes de mise sur le marché pour résorber le handicap normatif des RUP tout en veillant à la protection du consommateur européen,

(47) Demande à la Commission européenne de supprimer les tolérances à l'importation pour les denrées traitées par une substance active interdite dans l'Union européenne,

(48) Recommande à la Commission européenne d'établir une liste noire pour interdire les importations de produits de la pêche et de légumes-racines depuis les pays qui ont traité massivement par le passé leur production avec des substances polluantes rémanentes dans le sol et l'eau,

(49) Préconise l'interdiction de l'étiquetage biologique pour les produits importés de pays tiers lorsqu'ils ne respectent pas les mêmes normes que les producteurs biologiques européens,

(50) Demande à la Commission européenne d'activer les mécanismes de stabilisation inscrits dans les accords commerciaux et, ainsi, de suspendre les droits préférentiels octroyés aux pays tiers, dès que les importations en provenance de ces derniers dépassent les seuils de déclenchement fixés dans l'accord,

(51) Incite la Commission européenne à prolonger au-delà de 2019 les mécanismes de stabilisation prévus dans les accords sur la banane avec les pays d'Amérique latine afin d'assurer aux producteurs ultramarins une visibilité et une protection pérenne,

(52) Souhaite la création d'observatoires des prix et des revenus pour les grandes filières exportatrices des RUP, la banane et la canne, afin de disposer de mesures fiables, publiques et transparentes des effets des importations en provenance des pays tiers avec la périodicité pertinente et ainsi d'alerter rapidement la Commission européenne et les États membres en cas de perturbation grave du marché européen et des marchés locaux, pour déclencher sans délai les clauses de sauvegarde et les mécanismes de stabilisation,

(53) Appelle la Commission européenne à évaluer systématiquement les effets sur les RUP des accords commerciaux qu'il lui revient de négocier en menant des études d'impact préalables et recommande au Gouvernement d'exercer la plus grande vigilance sur la définition du mandat de négociation et sur le suivi de l'application des accords commerciaux, dont les Parlements nationaux doivent être tenus précisément informés,

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous devons examiner le Paquet « Droits d'auteur ». Colette Mélot et Richard Yung pourraient s'en charger. Ils travailleront en étroite concertation avec Philippe Bonnecarrère qui sera le rapporteur de la commission de la Culture.

Simon Sutour pourrait nous faire un point sur l'état d'avancement de la négociation d'un accord commercial avec le Mercosur.

Il en est ainsi décidé.

La réunion est levée à 10 heures.