La réunion est ouverte à 9 h 35.
Le secteur de la presse traverse une triple crise qui met en jeu son existence même.
Tout d'abord, une crise financière avec des ventes, mais plus encore des revenus en chute libre. C'est la conséquence d'une transition numérique face à laquelle les journaux n'ont pour la plupart pas su se préparer.
Ensuite, une crise de la distribution, symbolisée par l'opérateur principal, Presstalis, dont le sort est encore aujourd'hui loin d'être réglé, en dépit des efforts de l'Etat, des éditeurs et du Parlement.
Enfin, une crise morale, peut-être encore plus grave. Elle se caractérise par la remise en cause du travail et du professionnalisme des journalistes, contestés de toute part, parfois menacés par des « experts » auto proclamés. Cette défiance est aussi celle envers la démocratie, et nous devons en avoir conscience.
Je vais évoquer différents sujets, au-delà de l'analyse des crédits.
Tout d'abord, la situation toujours critique de la presse, même si, et je tiens cette année à le mettre en avant, les soutiens publics sont à un niveau élevés si on prend tout en compte.
Ensuite, j'évoquerai les deux réformes adoptées par le Parlement en 2019 et qui produiront leurs effets dès 2020, réformes où le Sénat a joué un rôle majeur, la loi sur les droits voisins et la loi de modernisation de la distribution.
Une présentation du rapport pour avis ne serait pas complète sans quelques mots consacrés à Presstalis, qui nous occupe depuis trop longtemps. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la loi de modernisation de la distribution n'a en effet rien changé à la situation toujours critique de la messagerie.
Enfin, j'évoquerai de bonnes nouvelles en provenance de l'Agence France-Presse (AFP), qui semble plutôt bien engagée dans une réforme ambitieuse.
Je vais commencer mon propos par la situation de la presse écrite.
Entre 2006 et 2017, le chiffre d'affaires global de la presse est passé de 10,6 à 6,8 milliards d'euros, soit une diminution d'un tiers. Si les ventes ont baissé de 22 %, ce sont les recettes publicitaires qui ont chuté, divisées par près de 3.
Ces 15 dernières années, la baisse du chiffre d'affaires a touché tous les types de presse, mais de manière différenciée. La presse d'information locale résiste mieux que les autres familles de presse, alors que la presse d'information politique et générale (IPG) nationale est la plus touchée par la baisse des ventes.
Cette situation n'est cependant pas propre à la France. Les ventes des quotidiens les plus populaires des différents pays ont tous connu des baisses très importantes, comme le journal allemand Bild, dont la diffusion a été divisée par trois, alors que Ouest France, quotidien le plus vendu, affiche une bien meilleure résistance.
Face à ce constat assez alarmiste, il me parait important de souligner l'ampleur de l'engagement de l'État envers la presse.
L'enveloppe globale est complexe à estimer. Elle ne dépend que pour moins de 20 % du programme que nous examinons aujourd'hui. J'ai reconstitué pour cette année un montant approximatif de 540 millions d'euros que l'on peut diviser entre trois grandes masses.
Tout d'abord, les aides directes.
Elles sont rassemblées dans le programme 180 et dans le programme 134 avec la compensation versée à La Poste pour le régime d'acheminement. Le montant représente 206,8 millions d'euros en 2020. Depuis les Etats généraux de la presse écrite en 2008, l'enveloppe globale est en baisse continue - ce qui était d'ailleurs prévu-, sa variation dépend aujourd'hui essentiellement de la compensation versée à La Poste.
Ensuite, les aides fiscales.
La plus significative est le taux de TVA « super réduit » à 2,1 %, qui représente 170 millions d'euros, complété par quelques dispositifs plus modestes pour atteindre 180 millions d'euros. Enfin, les journalistes bénéficient de modalités particulières de calcul de leur impôt sur le revenu, ce qui constitue une forme d'aide à l'ensemble du secteur en améliorant l'attractivité de la profession. On peut l'estimer pour la presse écrite à environ 40,5 millions d'euros, soit un montant global de 220,5 millions d'euros.
Enfin, les aides sociales.
Elles comprennent la réduction de taux et l'abattement d'assiette sur les cotisations sociales en faveur des journalistes, estimés à un peu plus de 114 millions d'euros pour la presse écrite.
On peut donc estimer les aides à la presse à environ 540 millions d'euros. Ce montant est significatif, et montre bien la volonté de l'État d'accompagner la filière.
La tendance de ces dernières années, dans un contexte de baisse des aides directes, a été de cibler la presse IPG. Sur son périmètre, les dotations sont ainsi en hausse depuis 2016.
Pour cette année 2020, les crédits évoluent en réalité très peu. Seuls deux mouvements distinguent cette année de la précédente :
- la baisse programmée de la compensation à La Poste, qui est de nature forfaitaire et n'a donc pas de conséquence pour les publications ;
- la légère baisse de la compensation versée à la sécurité sociale pour les porteurs et vendeurs colporteurs de presse, conséquence de la baisse de leur activité.
Pour le reste, toutes les aides demeurent identiques.
Deuxième volet de cette présentation, un point d'étape sur les deux grandes réformes menées en 2019 et dans lesquelles le Sénat a joué un rôle crucial : la loi sur les droits voisins et la loi sur la modernisation de la presse.
Pour commencer, la loi sur les droits voisins.
Elle a été adoptée à l'unanimité des deux chambres, à l'initiative de notre collègue David Assouline, qui en était l'auteur et le rapporteur au nom de la commission. Elle constitue la première transposition en Europe de l'article 15 de la directive sur les droits d'auteur.
Son objectif est de mettre fin à la captation massive de revenus publicitaires opérée essentiellement par Google et Facebook. Au-delà même du sort particulier d'un secteur économique, la presse, c'est tout un pan de notre vie démocratique qui se trouve fragilisé.
Alors que nous pouvions légitimement penser que l'adoption de la directive, suivie de cette première transposition, sifflait littéralement la « fin du match », entaché par un lobbying très actif de Google à Bruxelles, il n'en a finalement rien été.
Le 25 septembre, Google a en effet annoncé son refus d'entrer en négociation avec les éditeurs. La société leur propose comme alternative de renoncer à ses droits, et de continuer à être référencé de manière attractive, ou bien d'être « dégradé », dans tous les cas, de ne pas percevoir le moindre droit. Cette position, bientôt suivie par Facebook, a montré toute la dépendance des éditeurs face au pouvoir quasi monopolistique des grands acteurs de l'internet. Tout en réservant leurs droits, ils ont été obligés de céder.
La commission a réagi par la voie d'un communiqué dès le 26 septembre, puis par un communiqué commun avec l'Assemblée nationale.
Au sens strict, il faut le souligner, Google applique bien la loi sur les droits voisins, si ce n'est dans l'esprit, au moins à la lettre.
Je pense pour ma part qu'il faut analyser cette position non pas comme une défaite, mais comme une nouvelle étape de la bataille pour reconquérir notre souveraineté numérique. Il faut donc comprendre l'attitude de Google à travers trois prismes.
Le premier : pour Google, c'est une question de principe. La société n'entend pas payer pour des contenus, car elle se considère comme un simple « outil ». A l'opposé, elle pourrait être prête à attribuer des fonds, sur le modèle du « fonds Google », mais à ses conditions, ce qui relève plus de la générosité un peu paternaliste que de la relation commerciale.
Deuxième prisme, Google cherche à diviser le front des éditeurs, en approchant certains d'entre eux pour les convaincre d'accepter de travailler avec elle.
Troisième prisme, Google a bien compris que la France était observée dans l'Europe entière et même au-delà. La société cherche donc à « marquer son territoire » et à influencer les futures législations.
Nous sommes donc au début d'une lutte qui pourrait être longue et complexe. Pour l'instant, le front des éditeurs ne craque pas, et les français ont reçu des soutiens du monde entier. Le dossier a été évoqué au plus haut niveau lors du conseil des ministres franco-allemand.
Il faut enfin tenir compte d'un retournement de l'opinion publique, qui commence à être lassée de l'influence et de l'éthique « à géométrie très variable » des géants du net. Il y a là un problème de souveraineté et de concurrence qui dépasse la seule question de la presse.
Je vais maintenant évoquer la loi de modernisation de la distribution de la presse.
La loi « Bichet » de 1947 a contribué à l'épanouissement de la presse en France depuis la Libération, avec un système unique au monde, mais qui est depuis plusieurs années à bout de souffle. Il est victime à la fois de l'attrition des ventes et de la situation de crise « perpétuelle » de Presstalis.
Attendu depuis longtemps, le projet de loi de modernisation a été déposé en premier lieu sur le bureau du Sénat, ce qui constitue je crois une reconnaissance du travail de longue haleine de notre commission.
L'équilibre atteint par la loi permet d'envisager avec plus de sérénité l'avenir du secteur. D'ailleurs, la profession accueille cette loi très favorablement, ce qui doit d'autant plus être souligné que les positions étaient très tendues l'année dernière. Le nouveau système conserve les grands équilibres de la loi de 1947, avec en particulier le maintien du principe coopératif. Il est mis fin à l'auto régulation du secteur, avec une régulation confiée à l'Arcep, qui sera également chargée de définir le cahier des charges des nouvelles sociétés agréées.
Le nouveau système offre enfin aux diffuseurs de presse la place centrale qui aurait toujours dû être la leur. Il serait mis fin aux « montagnes de papiers » que nous voyons trop souvent envahir les kiosques à journaux.
Le Sénat a apporté de très nombreuses modifications au texte, notamment l'avis du maire pour l'implantation d'un diffuseur de presse ou encore la transparence des tarifs des sociétés agréées.
Cependant, le nouveau système ne rentrera pleinement en application qu'en 2023. Dans l'intervalle, un important travail doit être fait. Je retiens trois grands défis pour cette année.
Le premier est de donner les moyens à la nouvelle régulation.
L'Arcep a pu bénéficier de crédits qu'elle estime suffisants en 2020 pour mener à bien cette nouvelle mission. Elle doit cependant faire les efforts nécessaires pour appréhender un secteur complexe, non pas en raison de sa surface financière, mais des relations « historiques » entre les différents acteurs.
Le deuxième défi est pour les acteurs historiques. Presstalis et les MLP doivent se préparer aux nouvelles règles et à l'ouverture à la concurrence. Une première étape va arriver très rapidement avec la mise en place des nouvelles conditions d'assortiment, qui vont nécessiter une informatique enfin au niveau.
Enfin, troisième chantier, les acteurs économiques potentiellement intéressés par l'accès à ce marché vont devoir également préparer des plans industriels. Compte tenu de la structure baissière du marché, je crois que les plus intéressés seront les entreprises déjà présentes dans la logistique, voire le niveau 2 qui pourrait être tenté de monter des sociétés agréées.
Pour résumer, le cadre ouvert par la loi est prometteur et, je le souligne une nouvelle fois, bien accueilli par la profession. Il reste cependant à bien préparer les conditions du succès.
Je vais maintenant évoquer la situation de Presstalis
Je ne reviens pas sur les raisons évoquées l'année dernière de la crise structurelle, depuis plus de 10 ans, de la messagerie Presstalis. Il y a une combinaison de facteurs : mauvaise gestion, masse salariale déconnectée de la productivité, choix stratégiques hasardeux, concurrence avec les MLP. La désormais ancienne Présidente Michèle Benbunan a réalisé un travail remarquable, en dégageant plus de 55 millions d'euros d'économie, avec un plan social pour 240 personnes. La situation financière s'est logiquement améliorée de 20 millions d'euros, même si Presstalis est toujours en déficit.
L'équilibre de la société repose cependant sur la combinaison de trois facteurs : la poursuite du plan d'économie, le développement commercial, mais également, et peut-être surtout, le soutien de l'Etat et des éditeurs, qui ont contribué dans des proportions très importantes au sauvetage de l'entreprise en 2018.
L'Etat a ainsi consenti, en plus des aides à la diffusion, à un prêt de 90 millions d'euros aujourd'hui débloqué.
En dépit de ces efforts, la situation de la société reste toujours critique, et il est bien difficile de prévoir comment va se dérouler l'année 2020. Presstalis est victime d'une crise de confiance de la part de ses clients, les éditeurs, ce qui est inquiétant dans l'optique de renouvellement des contrats.
Dans ce contexte, le nouveau Président doit s'attacher à répondre à trois chantiers en 2020.
Tout d'abord, poursuivre la politique de réduction des coûts. Cela pourrait passer par l'étude de la cession du niveau 2 restant, voire un rapprochement avec les MLP.
Ensuite, il faut restaurer le lien de confiance avec les éditeurs, durement marqués par les mouvements sociaux et les prélèvements sur leur chiffre d'affaires. La perspective de l'ouverture à la concurrence pourrait les inciter à une position attentiste néfaste pour l'entreprise.
Enfin, je suis comme toujours très surpris que nul ne s'intéresse réellement aux fonds propres négatifs à hauteur de 420 millions d'euros, un sujet qui semble ne concerner personne mais finira bien par s'imposer.
Comme vous le voyez, il reste encore bien des hypothèques sur l'avenir de Presstalis, et il faudra au nouveau Président beaucoup de résolution pour mener à bien cette difficile mission.
Je vais maintenant avant de conclure évoquer l'AFP.
L'année dernière, j'avais souligné l'existence d'un « effet de ciseau mortifère », avec des dépenses en hausse et des revenus en baisse, ce qui fragilisait considérablement l'Agence.
La nouvelle impulsion donnée à l'AFP par son nouveau Président, mais également par son prédécesseur, semble cependant commencer à produire des résultats. L'État a accepté d'accompagner l'Agence à hauteur de 17 millions d'euros, dont 6 millions d'euros cette année. Cette somme est destinée à accompagner le plan social et surtout à renforcer l'AFP, confrontée à une forte concurrence au niveau mondial.
Les premiers résultats commencent à apparaitre, avec des charges contenues et une amélioration des revenus commerciaux. Le nouveau président a fait le choix d'investir massivement dans la vidéo, ce qui semble correspondre aux nouveaux usages. Il a par ailleurs lancé des initiatives de fact checking rémunératrices, dont une avec la société Facebook au niveau mondial.
L'AFP doit d'ici la fin de l'année signer son nouveau contrat d'objectif et de moyen. Force est de constater que, par rapport à l'année dernière, la situation semble plus apaisée et que l'Agence apparait comme sur de bons rails. Il n'en reste pas moins que cela repose en partie sur le soutien exceptionnel de l'Etat, qui ne devrait pas être reconduit en 2021.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose, monsieur le Président, mes chers collègues, d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 180 du projet de loi de finances pour 2020.
Je remercie le rapporteur pour la clarté de son exposé dont j'approuve les conclusions. Il nous faudrait cependant travailler de manière approfondie sur la question des aides directes à la presse. Depuis 2013, elles ont certes gagné en transparence mais il pourrait être opportun de mieux les cibler sur la plus-value réelle des titres, par exemple, en utilisant le nombre de journalistes. Je souhaite également qu'une attention particulière soit accordée à la diffusion de la presse française à l'étranger. Nous pouvons tous constater que la presse francophone est presque absente dans certains pays, à la différence de la presse anglo-saxonne. Cela est préoccupant car cet état de fait traduit une perte d'influence pour notre pays.
En ce qui concerne la distribution de la presse, mais également du livre, il me semble que le système occasionne l'impression et le transport de quantités déraisonnables de papier. Il faudrait étudier la possibilité d'évolutions technologiques permettant par exemple d'imprimer directement les livres et les titres à la demande des lecteurs.
Globalement nous constatons la stagnation des aides. Par exemple, les crédits destinés au soutien à l'expression radiophonique restent constants alors même que les radios constituent un réel vecteur d'information dans les territoires.
Nous sommes dans une période intermédiaire après l'adoption de deux lois importantes sur les droits voisins et sur la modernisation de la distribution. Il est manifestement trop tôt pour en tirer les conséquences. Presstalis me paraît porter les principaux enjeux financiers pour les années à venir et je déplore que l'Etat tarde à définir clairement sa position. À cet égard, envisage-t-il de favoriser l'adossement de l'entreprise à un autre opérateur ? Enfin, je m'interroge sur les conséquences en région de la contraction des aides versées à La Poste.
Je souhaite revenir sur la problématique des droits voisins déjà évoquée lors de l'adoption de la proposition de loi de notre collègue David Assouline. Je suis sans illusion sur l'attitude de Google devant ce nouveau cadre législatif et la capacité d'évitement de ces entreprises vis-à-vis de ses obligations en la matière. Il me semble important d'examiner l'évolution de l'attitude de Google et de demeurer attentif et combattif face aux géants d'internet peu soucieux de se plier aux réglementations nationales.
Je voudrais également souligner l'intérêt de la dernière enquête du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) sur les algorithmes des plateformes en ligne. Elle a montré notamment l'absence de pluralité dans la mise à disposition de l'information. L'idée avancée de la création de « tiers de confiance » capables d'examiner de manière impartiale ces algorithmes semble une piste législative intéressante.
Pour répondre à notre collègue André Gattolin, je souhaite lui préciser que mon rapport met l'accent sur les aides à la presse, avec des données pour chaque titre. Il pourra donc, dans celui-ci, prendre connaissance de l'ensemble des chiffres en ce domaine.
Les aides les plus importantes destinées au passage au numérique, rassemblées dans le Fonds Stratégique pour le développement de la Presse (FDPS), ont été largement détournées au seul profit d'un renflouement financier de Presstalis, comme je l'ai exposé l'année dernière. J'ai d'ailleurs interrogé le ministre la semaine dernière sur cette question, et sur l'extension des aides au pluralisme à la presse en ligne, sans obtenir à ce stade de réponse claire.
Mme Vérien a évoqué le passage pour la presse à une version dématérialisée avec vente des titres par les dépositaires de presse. Il est évident que tant la livraison que le retour de la presse « papier » pose actuellement un problème de manutention et de coût, y compris pour le retour des invendus. La mise à disposition d'une impression ponctuelle par les revendeurs de presse de ces titres est une évolution qui nécessite une étude préalable au regard des aides accordées tout en sachant que la vente au numéro est en perte de vitesse sur ce type de publication.
Mme Sylvie Robert évoque les aides pour la radiophonie, qui sont stables cette année à environ 30 millions d'euros. Il pourrait effectivement être intéressant de connaitre l'évolution du nombre de radios aidées sur plus longue période.
Pour répondre à M. Laurent Lafon, l'ancienne présidente de Presstalis a mené une action ambitieuse mais inachevée afin de restaurer l'équilibre financier de l'entreprise. Il n'a par ailleurs pas été possible d'adosser Presstalis à un autre opérateur, ce que je regrette car j'avais milité pour cette formule. Je déplore donc également le manque de clarté sur le futur de l'opérateur.
Les industries culturelles rassemblées dans le programme 334 regroupent un grand nombre de secteurs.
Le cinéma, la musique, le jeu vidéo, la lecture sont autant de domaines qui contribuent au bien être de la population, mais sont également des acteurs économiques de premier plan, avec un chiffre d'affaires supérieur à 15 milliards d'euros et des dizaines de milliers d'emplois.
Le programme 334 comporte 306,3 millions d'euros, en hausse de 2,32 % notamment en raison de la dotation accordée au Centre national de la musique (CNM).
Il convient d'y ajouter les 673 millions d'euros de taxes affectées au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), et près de 400 millions d'euros de crédits d'impôt, soit plus de 1,3 milliard d'euros de soutien.
Tout d'abord, j'évoquerai les dangers qui pèsent sur le financement du cinéma, puis je ferai un point sur la question, toujours « tendue » au moment de la loi de finances, des crédits d'impôt « culture ». Je parlerai du développement du streaming musical et de « l'an I » du Centre national de la musique. J'évoquerai ensuite la question du statut des auteurs à travers le prisme du rapport remis en janvier sur la bande dessinée, et je terminerai par les équilibres budgétaires complexes de la Bibliothèque Nationale de France.
Nous avons entendu il y a deux semaines le nouveau Président du CNC, M. Dominique Boutonnat, qui a exposé sa vision du renforcement des moyens au service de la création. Le moins que l'on puisse dire cependant est que le contexte est particulièrement complexe et mouvant. Le nouveau Président devra faire des choix et faire preuve d'initiative.
En effet, dès 2018, et comme cela était déjà prévisible l'année dernière, le financement du cinéma a baissé de 15,2 %. Les deux principaux responsables sont les chaînes de télévision, dont le chiffre d'affaires souffre de la concurrence des nouveaux acteurs en ligne, mais également les producteurs, qui investissent sensiblement moins que les années précédentes.
Dans ce contexte, le financement public devient de plus en plus important, par le biais du fonds de soutien du CNC ou des crédits d'impôt.
Or, comme je l'avais évoqué l'année dernière, les réserves financières que le CNC avait constituées entre 2008 et 2012 sont maintenant épuisées. Les dépenses du fonds vont donc baisser d'environ 50 millions d'euros à partir de 2019.
Il n'est pas prévu à ce stade d'augmenter le produit des taxes affectées. Comme nous le verrons, la tendance serait plutôt à en maintenir le niveau, et la tentation existe toujours de les plafonner.
Le CNC aurait dû réaliser ces 50 millions d'euros d'économie en 2019. Elles devaient porter sur l'audiovisuel. Le gouvernement a cependant demandé au CNC d'étaler cette baisse sur deux ans, ce que j'approuve globalement, même si le fonds de roulement a dû être ponctionné d'autant.
Les années à venir devraient donc conduire à une diminution des dépenses.
On assiste cependant aux prémisses d'un bouleversement du modèle de financement du cinéma et de l'audiovisuel français.
L'article 62 du projet de loi de finances procède en effet à une révision de la taxe sur les éditeurs (la TST-E). Jusqu'à présent, les chaines l'acquittent au taux de 5,65 %. De leur côté, les services de vidéo à la demande, principalement les plateformes, sont imposées à hauteur de 2 %. L'article 62 propose une convergence à 5,15 %. Le taux a été choisi afin de conserver un rendement constant de la taxe.
Cet alignement emporte trois conséquences :
- d'une part, il constitue pour les chaines un gain net de 37 millions d'euros reporté sur les plateformes ;
- d'autre part, une égalité de traitement serait établie entre des services en concurrence ;
- enfin, les plateformes seraient ainsi appelées à contribuer plus fortement à la création française via le fonds de soutien.
On ne peut que juger favorablement cette disposition qui constitue la première étape d'un rééquilibrage des obligations entre les chaines et les plateformes, rééquilibrage qui sera poursuivi en 2020 avec la loi audiovisuelle.
Cette réforme de la taxe sur les éditeurs s'inscrit cependant dans un contexte de grande incertitude pour le cinéma français.
Dominique Boutonnat a ainsi évoqué les conclusions de son rapport devant nous, qui font état d'un nombre de films que certains jugent trop important. 300 oeuvres sont en effet produites chaque année, avec des financements qui déclinent.
Entre 2011 et 2017, années pourtant fastes, le budget moyen par film a baissé de 6 %. Je ne veux pas opposer ici les tenants de « l'orthodoxie », qui estiment qu'il ne faut pas chercher à limiter ce qui constitue après tout un des succès remarquables de notre cinéma et les critiques qui dénoncent une véritable crise de surproduction que les spectateurs et les exploitants ne pourraient tout simplement pas absorber. Je note cependant que le débat a rebondi cette semaine avec l'attribution du Prix Renaudot pour l'essai de Eric Neuhoff, « Très cher cinéma français », dont le titre seul suffit à comprendre de quel côté il se situe...
Toujours est-il que le rapport de Dominique Boutonnat était plutôt centré sur les leviers permettant d'attirer les capitaux privés, et qu'il faut évidemment que cette réflexion soit menée.
Cependant, dès 2020, et en plus de ce chantier de long terme, le nouveau Président du CNC sera confronté à trois défis.
Le premier de ces défis est la nécessité d'examiner les quelques 150 dispositifs de soutien différents du CNC. Si l'objectif premier n'est pas, comme il l'a souligné devant nous, de réaliser des économies, on peut cependant penser que des « arrières pensées » budgétaires ne seront pas absentes de cette revue générale des dépenses.
Le deuxième défi est la réforme de la fiscalité affectée, qui devrait être présentée dans le prochain projet de loi de finances. Là encore, il s'agit de mieux équilibrer les contributions des anciens et des nouveaux acteurs à la création. Il y aurait ainsi une taxe pour la production de contenu et une taxe sur l'accès. L'objectif est de conserver un niveau de ressource inchangé, ce qui justifie le délai nécessaire pour bien calibrer la réforme.
Dernier chantier qui occupera non seulement le CNC, mais également notre commission, la loi « audiovisuelle ». Elle comporte de nombreuses dispositions qui affecteront le paysage de la production en France. Je veux notamment évoquer :
- les obligations de production d'oeuvres françaises, qui seraient étendues aux plateformes ;
- les relations entre les producteurs et les éditeurs, qui pourraient être amenées à évoluer ;
- et enfin les conditions de diffusion des oeuvres, sur l'ensemble des canaux, ce qui suppose une réforme de l'exposition à la télévision, mais également probablement, et comme l'a laissé entendre Dominique Boutonnat, une nouvelle réforme de la chronologie des médias.
Ces trois réformes devront être menées de front, et notre commission y sera étroitement associée.
J'en viens au deuxième point de ma présentation, les crédits d'impôt « culture ».
Chaque année, ces crédits sont remis en question, notamment par les commissions des finances.
Ils représentent effectivement un montant important d'environ 400 millions d'euros. Suite à la réforme de 2016, ils ont plus que doublé.
Les crédits d'impôt recouvrent trois secteurs :
- le cinéma et l'audiovisuel, avec trois dispositifs distincts ;
- la production phonographique ;
- le jeu vidéo.
Ils ont été prorogés l'année dernière jusqu'en 2022.
Plus de 80 % de l'enveloppe est destinée au soutien à la production cinématographique et audiovisuelle, pour environ 350 millions d'euros chaque année. Quatre crédits d'impôt sont concernés : le crédit d'impôt cinéma (CIC), audiovisuel (CIA), international (CII) et les SOFICA.
De nombreuses études depuis 2016 ont montré l'efficacité de ces dispositifs, qui expliquent une bonne partie de l'attractivité du territoire. Les dépenses de film en France ont progressé de 36 % et 537 millions d'euros entre 2015 et 2018. Tous les indicateurs soulignent le grand intérêt de ces dispositifs, qui assurent à la France, avec le soutien qu'il faut souligner des régions, une place très enviable comme lieu de tournages.
Le crédit d'impôt phonographique est pour sa part d'un montant relativement modeste et stable, autour de 10 millions d'euros. Il est très apprécié d'une profession fragilisée, pour laquelle il est le seul soutien public. Là encore, les études sont convergentes pour montrer son utilité et sa pertinence. Des évaluations complémentaires pourront cependant être prochainement menées sous l'égide du Centre national de la musique (CNM) qui en récupère la gestion au 1er janvier 2020.
Le crédit d'impôt jeu vidéo, enfin, a connu une croissance « explosive » depuis 2017, suite à une réforme visant précisément à le rendre plus attractif.
L'importance du montant, près de 50 millions d'euros, est à mettre au regard de deux éléments :
- l'importance de cette industrie culturelle, désormais la première au monde en termes de chiffre d'affaires ;
- l'impact économique reconnu du dispositif. Le secteur du jeu vidéo apporte de nombreux emplois qualifiés, en général bien rémunérés, et génère selon une étude 5,3 euros de revenu fiscal par euro investi.
Il faut, je crois, éviter en la matière les postures dogmatiques. Il n'y a rien de honteux à chercher à évaluer l'efficacité des crédits d'impôt et éventuellement à les réformer, il faut également reconnaitre l'efficacité de ces mesures qui font l'objet d'évaluations très régulières.
J'identifie cependant trois risques majeurs à la fréquente remise en cause des crédits d'impôt.
Tout d'abord, la France est placée dans une compétition internationale très vive. Les autres pays, Canada, États-Unis en tête ont très bien identifié l'intérêt stratégique de ces secteurs, et proposent tous des avantages fiscaux au moins équivalents, parfois supérieurs. La France ne peut pas se permettre de perdre aussi cette bataille.
Ensuite, toute annonce un tant soit peu tonitruante ne contribue pas à créer la confiance et à inciter à des investissements de long terme. Qui viendra créer un studio de jeu vidéo ou tourner un « blockbuster » si son plan économique se retrouve menacé chaque année ?
Enfin, n'oublions pas que les industries culturelles sont pourvoyeuses de « soft power », et que là encore la France brille par sa création, son cinéma et ses oeuvres. Il y a donc un réel intérêt stratégique à défendre nos industries culturelles.
Pour résumer, je resterai très attachée dans les années à venir à une défense non pas aveugle, mais raisonnée et réfléchie de ces dispositifs fiscaux.
Je vais maintenant évoquer le marché de la musique enregistrée.
La musique enregistrée a failli disparaitre, emportée par la révolution numérique. Elle a cependant su se réinventer à travers les offres légales de streaming.
Ces dernières représentent aujourd'hui 57 % du marché et progressent de près de 20 % par an. Le streaming payant, en particulier, a été adopté par près de 6 millions de français, ce qui est une belle satisfaction si on considère qu'au tournant des années 2000, l'habitude avait été prise de ne plus payer du tout pour sa consommation musicale.
Cependant, des anomalies demeurent.
Ainsi, YouTube, la première plateforme de diffusion de la musique, rémunère très mal les créateurs. Songez que les revenus versés par ce service sont égaux à ceux du marché du disque vinyle ! Les dispositions contenues dans la loi audiovisuelle destinées à lutter contre le « value gap » devraient permettre de revenir à une situation plus normale.
J'attire également votre attention sur les modes de rémunération du streaming. Actuellement, Spotify et Deezer rémunèrent mieux les musiques écoutés un très grand nombre de fois par un petit nombre d'utilisateurs. Des réflexions sont en cours pour basculer sur un modèle dit « User Centric » qui rend mieux justice au nombre d'écoutes par usager, et pourrait permettre d'équilibrer les revenus au profit d'autres esthétiques. Comme il s'agit de contrats passés entre personnes privées, nous ne pouvons intervenir qu'en dernier recours, mais j'avoue être très intéressée par les études réalisées notamment par Deezer pour faire évoluer le mode de rémunération des artistes.
2020 sera également « l'an I » du Centre national de la musique. La loi a été promulguée le 30 octobre dernier, et notre commission, à travers notre collègue Jean-Raymond Hugonet, a joué un grand rôle dans son adoption.
Le Centre va rassembler en son sein les forces jusqu'à présent éparses de la musique, pour créer l'équivalent d'un CNC. C'est l'aboutissement d'un projet porté depuis 2012.
Notre Rapporteur avait identifié deux problématiques :
- la première est la question des moyens. 7,5 millions d'euros ont été inscrits dans le projet de loi de finances, ce qui constitue une première étape, satisfaisante, mais une première étape. Il faut maintenant que cet engagement de l'Etat s'inscrive dans le long terme et converge vers les 20 millions d'euros évoqués. Mais il faut également que les acteurs privés s'emparent du dossier et apportent leur contribution financière. L'Etat a montré le chemin, j'espère que la profession saura suivre le mouvement et l'amplifier ;
- elle le fera d'autant mieux que sera résolue la seconde problématique identifiée par Jean-Raymond Hugonet, à savoir la gouvernance. Nous attendons avec impatience le décret qui fixera la composition du conseil d'administration et du conseil professionnel. Des réactions de la profession dépendra le succès du CNM, et nous savons que l'équilibre sera difficile à trouver.
Je passe maintenant à la question du statut des auteurs à travers le prisme de la bande dessinée.
Pierre Lungheretti, Président de la Cité internationale d'Angoulême, a remis un rapport au mois de janvier 2019 qui appelle à une politique spécifique sur la bande dessinée, un « 9ème art » qui a acquis ses lettres de noblesse. J'ai interrogé le ministre lors de son audition devant notre commission sur ce sujet, et il a réservé un accueil très favorable aux principales propositions du rapport. Nous attendons donc de voir comment se traduira « 2020, année de la bande dessinée ».
La bande dessinée permet également de revenir sur la question que nous avions longuement évoquée l'année dernière du statut des auteurs. La création d'une BD a été qualifiée « d'artisanat furieux », ce qui témoigne je crois assez bien de l'intensité du travail nécessaire, mais également du statut ambigu des auteurs.
L'année dernière, avec la Présidente de notre commission et Sylvie Robert, nous avions mené un combat pour que les auteurs soient compensés de la hausse de la CSG, qui pour eux constituait une perte nette. Après 3 ans d'atermoiement, je suis heureuse de pouvoir dire que, sur ce point-là, nous avons été entendus et que, à partir de 2020, un mécanisme pérenne de compensation sera mis en place.
C'est une grande satisfaction, mais qui ne doit pas dissimuler le fait que le statut des auteurs reste encore aujourd'hui trop peu assuré. Leur spécificité n'intéresse pas assez le ministère des affaires sociales, et la culture parait bien démunie, sur des sujets comme le prélèvement à la source ou la retraite. Une évolution positive se dessine cependant cette année, avec une mission de réflexion globale confiée à Bruno Racine, qui doit rendre ses conclusions d'ici la fin de l'année. Nous espérons que les auteurs, si essentiels à la création, recevront enfin toute l'attention qu'ils méritent.
Pour finir, un dernier mot sur la BNF. Ses crédits représentent 70 % du programme, pour 210 millions d'euros.
S'ils augmentent de 2,5 millions d'euros en 2020, cela n'est cependant pas suffisant pour couvrir les coûts liés à la fin des travaux de Richelieu, ni à l'ouverture du site. Les recettes de mécénat ne suffiront pas à combler l'écart. Dès lors, ce navire amiral de la culture française va devoir dans les prochaines années faire face à une équation budgétaire complexe, qu'il nous appartiendra de surveiller.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles ».
Merci d'avoir fait un point précis sur le crédit d'impôt. On mesure en effet que l'on perdrait beaucoup à trop vouloir toucher à ce dispositif fiscal. Cela étant, il ne faudrait pas se priver d'une réflexion visant à le rendre plus efficient. Notre commission pourrait être force de proposition sur ce sujet et montrer que ce crédit est aussi un outil en faveur de la diversité culturelle, qui nous protège des phénomènes de concentration.
Le mécénat joue un rôle important dans le financement des industries culturelles, même si on mesure mal l'impact des nouvelles règles proposées par le projet de loi de finances.
Parmi les arts ludiques dont font partie la bande dessinée et les jeux vidéo, on oublie souvent l'animation qui représente un véritable atout pour le cinéma français, notamment à l'export, mais aussi pour les territoires du fait de l'implantation de nombreux studios d'animation en région. Votre rapport comporte-t-il des éléments à ce sujet ?
En période de crise économique, la culture est toujours le premier secteur affecté par des restrictions. Il est du devoir de notre commission de rappeler à nos collègues de la commission des finances de ne pas délaisser la culture, car plus que jamais aujourd'hui nous en avons besoin.
Le mode de consommation de la musique est depuis plusieurs années en plein bouleversement. Les plateformes de streaming se sont aujourd'hui imposées. Le fait qu'un artiste tel que Jean-Jacques Goldman autorise la mise à disposition de son oeuvre sur ce support numérique en est un témoignage. La France demeure un ardent défenseur des droits d'auteur mais les pratiques de rémunération issues du streaming rebattent les cartes. À cet égard, que pouvez-vous nous dire de la notion de « User Centric » qui propose une rémunération plus équitable entre les artistes ? Respecterait-elle davantage l'esprit du droit d'auteur ?
En ce qui concerne le Centre national de la musique, je considère que l'octroi de 7,5 millions d'euros dans le cadre du projet de loi de finances est une première avancée satisfaisante, même si ce sont 20 millions d'euros qui sont évoqués à terme. Il est parfois préférable d'avancer doucement mais à pas certains.
Je suis inquiète de la non-parution des décrets d'application de la loi relative à la création du Centre national de la musique alors que celui-ci doit être créé le 1er janvier 2020, même si la loi a été promulguée tardivement, le 30 octobre dernier. Cela montre que les questions relatives à la gouvernance du CNM ne sont pas encore réglées.
Qu'en est-il par ailleurs de la subvention de 850 000 euros versée auparavant au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV) et dont on ne retrouve que 500 000 euros dans le budget du futur CNM ?
Nous devons rester vigilants en ce qui concerne la situation des auteurs et veiller à ce que la compensation de la hausse de la CSG soit bien inscrite au budget des affaires sociales, comme c'est le cas dans le droit commun.
Je déplore enfin la baisse de plus d'un million d'euros des crédits déconcentrés au profit des librairies indépendantes, alors même que nous redoublons d'efforts pour revitaliser les centres-bourgs.
Le groupe RTLI se félicite de l'augmentation de 2 % des crédits de la Mission Médias, livre et industries culturelles par rapport à la loi de finances de 2019. Nous saluons plus particulièrement la réforme de l'AFP qui a permis d'assainir la situation de l'Agence, ainsi que la création du Centre national de la musique. Enfin, nous resterons très attentifs à la réforme du Centre national du cinéma.
Nous pouvons compter sur le ministre de la culture, Franck Riester, pour défendre les crédits d'impôt. Il les juge bénéfiques pour la diversité culturelle, ce qui ne doit pas nous empêcher d'être vigilants pour nous assurer qu'ils soient maintenus au terme de la discussion budgétaire. Les crédits d'impôt sont toujours les premières dépenses visées quand il est question d'économies.
Je n'ai évoqué le mécénat qu'en ce qui concerne la BNF. L'apport de fonds privés est indispensable pour cet établissement dont la dotation a été calculée au plus juste.
Sur la question du cinéma d'animation, je partage l'opinion selon laquelle il faut plus le soutenir, et il pourrait être utile que la commission se rende à Angoulême, ville dans laquelle un réel écosystème de la bande dessinée et de l'animation s'est développé.
Le streaming a pris une place considérable dans les modalités actuelles de consommation de la musique. C'est pourquoi il faut adapter le mode de rémunération sur les plateformes, afin que celui-ci respecte tous les acteurs de la chaîne musicale, à commencer par les auteurs.
Je vais prendre un exemple pour expliciter le modèle « User centric », ou « centré sur l'utilisateur ». Dans le système actuel, deux utilisateurs acquittent un même montant de 10 euros chacun, soit vingt euros en tout. La plateforme prélève 3 euros par abonnement. Le premier écoute 900 fois les morceaux du groupe « A ». Le second 100 fois les morceaux du groupe « B ». Il y a donc 1 000 écoutes en tout. Sur le revenu de 14 euros, la plateforme détermine que 90 % doit aller au groupe A (900 écoutes sur 1 000), et 10 % au groupe B, soit respectivement 12,6 euros et 1,4 euro.
Dans le système dit « User centric », en prenant le même exemple, on attribue la même valeur aux deux utilisateurs. Ainsi, dans l'exemple précédent, et quel que soit le nombre d'écoutes, le groupe A et le groupe B recevraient 7 euros. Dans ce cas, une écoute de l'utilisateur A est valorisée 0,007 euro, une écoute de l'utilisateur B 0,07 euro, soit dix fois plus.
Nous aurons l'occasion d'en rediscuter, mais je crois important de bien poser d'ores et déjà les termes du débat.
Je partage les interrogations sur le retard pris dans la parution du décret fixant la composition des conseils du CNM.
Pour Sylvie Robert, je précise que 400 000 euros de subvention pour charges de service public du CNV au titre de 2019 restent sur le programme 131 « Création » pour financer des résidences comme le faisait jusqu'ici le CNV.
Il serait effectivement souhaitable que la compensation de la hausse de la CSG pour les artistes auteurs soit prise en charge dans le cadre du régime de droit commun. Je me souviens que nous avons eu des débats similaires au moment de la réforme du régime de l'intermittence.
Je confirme que le budget fait apparaître une baisse d'un million d'euros des crédits pour les libraires, et je pense qu'il serait utile d'en mesurer les conséquences.