Lors d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de M. Hervé Morin, ministre de la défense, sur les conséquences de la crise économique et financière en matière de sécurité et de défense.
a rappelé que la commission avait procédé à une série d'auditions sur les conséquences de la crise en matière de sécurité et de défense et s'intéressait notamment à ses effets sur le financement de la défense.
Soulignant que les travaux de la commission du Livre blanc n'avaient pu anticiper l'ampleur de la crise, il s'est interrogé sur les évolutions qu'elle pourrait susciter sur les forces prépositionnées et les opérations extérieures, ainsi que sur les hypothèses fondatrices des lois de finances et de la loi de programmation militaire sous l'effet notamment de moindres recettes exceptionnelles. Il a estimé que la nécessité de réduire le déficit budgétaire allait exercer une forte pression sur l'ensemble des missions du budget général et a craint que les difficultés en matière de ressources humaines ne soient à l'origine d'un ralentissement des restructurations. Il a souhaité connaître l'opinion du ministre sur les effets de la crise sur le renouvellement des équipements, l'adaptation des contrats opérationnels, les opérations extérieures et l'industrie de défense. Il a en outre questionné le ministre sur le calendrier d'examen parlementaire de la loi de programmation militaire, sur le programme A400M, sur le calendrier de remise en service du porte-avions Charles de Gaulle et sur la dernière opération menée par les rebelles au Tchad.
a indiqué que la discussion de la loi de programmation militaire était toujours en attente à l'Assemblée nationale, la nouvelle organisation de l'ordre du jour parlementaire limitant les possibilités d'examen de ce texte. Il a estimé que la nouvelle procédure, qui permet une discussion approfondie en commission, ne devrait néanmoins pas permettre de réduire sensiblement la longueur des débats dans l'hémicycle. Il a souhaité que le vote de la loi de programmation puisse intervenir avant l'examen de la loi de finances pour 2010.
Il a confirmé que les discussions sur l'évolution du programme A400M étaient difficiles. Dans l'immédiat, les Etats se sont accordés sur l'ouverture d'une période de trois mois de discussions préliminaires. Dans l'attente de la livraison de cet avion, la France est obligée d'examiner des solutions palliatives. Une réunion devrait avoir lieu au niveau ministériel en marge du sommet de l'OTAN.
En ce qui concerne le porte-avions Charles de Gaulle, les difficultés portent sur le rechange de pièces dont la durée de vie est moins longue que prévu. Toutes les pièces défectueuses vont être changées et le développement de technologies permettant la production de pièces ayant la même durée de vie que le porte-avions est en cours. En outre, un examen du bâtiment sera réalisé afin de s'assurer que sa remise à l'eau, prévue au mois de septembre, est bien définitive.
La situation au Tchad est en cours d'apaisement. Les rebelles ont repassé la frontière avec le Soudan. Cette attaque était prévisible compte tenu de l'effort de réarmement des rebelles. Le président tchadien, qui a lui aussi conduit un effort de réarmement, les a laissés entrer sur le territoire avant de détruire une part significative de leurs moyens. La France a adopté une position de « neutralité positive » dans ce conflit alors que les discussions se poursuivent à Doha en vue de la conclusion d'un nouvel accord de paix.
Evoquant ensuite les conséquences de la crise, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a souligné que cette crise, dont la globalité est sans précédent, était effectivement un facteur d'instabilité.
La France est l'un des seuls pays à y avoir répondu par une augmentation de son effort de défense alors que la plupart des pays européens réduisaient leur budget militaire. Les Britanniques se trouvent dans une situation budgétaire très difficile ; l'Espagne et l'Italie ont réduit leur budget de défense.
Le ministre a souligné que le rythme des restructurations ne devrait pas être remis en cause dans la mesure où l'effort consenti dans le cadre du plan de relance était conditionné par la réalisation d'économies de fonctionnement. Sur la durée de la programmation militaire, ces économies représentent 4 milliards d'euros supplémentaires au bénéfice des équipements. Sans ces économies, la loi de programmation serait immédiatement caduque. Elle est construite sur l'hypothèse d'une réduction des effectifs de 54 000 personnes à laquelle s'ajoutent les externalisations.
Il a considéré que, en l'absence même de la question budgétaire, l'interarmisation et la mutualisation des moyens des armées étaient indispensables. La France consacre en effet 60 % de ses effectifs militaires à l'administration et au soutien et 40 % à l'opérationnel alors que la proportion inverse s'observe au Royame-Uni. Les seuls systèmes d'information et de communication présentent des marges de manoeuvre évidentes puisqu'ils ne bénéficient d'aucune centralisation des achats, ni de réel pouvoir d'arbitrage budgétaire ni même de compatibilité entre les systèmes développés par les différentes armées ou services.
Pour ce qui concerne les évolutions en matière de ressources humaines, une agence de reconversion unique a été créée pour faciliter le reclassement des quelque 20 000 personnes qui quittent l'institution chaque année. Malgré la crise, seules les contraintes budgétaires empêchent le ministère de répondre à des demandes de pécules plus importantes que prévu. Les ressources humaines militaires sont très appréciées des entreprises et près de vingt-cinq conventions ont été passées avec des grandes groupes afin que les départs puissent être organisés et préparés par des formations. Ainsi, le taux de chômage des militaires sortant d'activité est relativement faible.
Dans le cadre du plan de relance, 1,5 milliard d'euros supplémentaires a été accordé à l'industrie de défense sous forme, soit d'anticipation de dépenses prévues, soit de dépenses nouvelles. Ces dépenses ont porté prioritairement sur des secteurs où l'activité est duale, comme les chantiers navals ou l'aéronautique. La commande du troisième bâtiment de projection et de commandement représente ainsi un quart du plan de charge des chantiers de Saint-Nazaire. Afin de préserver le capital industriel et technologique, 110 millions d'euros supplémentaires ont été investis dans des plans d'études amont. Le plan « RAPID », régime d'appui à l'innovation duale, est un instrument nouveau destiné à soutenir la recherche et développement d'entreprises civiles mais dont les recherches présentent un intérêt pour la défense. Il est doté de 10 millions d'euros en 2009. Enfin, 240 millions d'euros ont été consacrés aux infrastructures en accélérant des commandes aux industries du bâtiment et des travaux publics.
A la date du 30 avril 2009, 1 milliard d'euros avait été engagé dans le cadre du plan de relance. L'objectif est d'engager 1,7 milliard d'euros avant le 31 décembre pour des dépenses qui bénéficient très majoritairement aux industries nationales.
Pour ce qui concerne l'immobilier, le contrat avec la SNI a été renégocié, ce qui a permis au ministère de la défense de bénéficier du versement d'une soulte de 220 millions d'euros. Des discussions sont en cours avec la mairie de Paris qui reprendrait certaines emprises aux fins de réalisation de logements sociaux. D'autres emprises seront vendues selon les procédures classiques. Quant aux plus importantes, des discussions sont en cours avec la Caisse des dépôts en vue de la réalisation d'opérations à l'automne.
La vente de fréquences soulève des difficultés plus importantes. Si les cessions ne sont pas achevées avant la fin de l'année, il faudra trouver des solutions de trésorerie, ce qui devrait être réalisable compte tenu des arbitrages du Président de la République.
Puis un débat s'est ouvert au sein de la commission.
s'est enquis du calendrier de dépenses en crédits de paiement des 1,7 milliards d'euros inscrits dans le plan de relance au bénéfice du secteur de la défense. Il a souligné que ces crédits figuraient dans une ligne budgétaire spécifique, distincte du budget du ministère de la défense, et s'est interrogé sur la prolongation de ce dispositif en 2010.
En réponse, le ministre a rappelé qu'un milliard d'euros d'autorisations d'engagement avait été dépensé au 30 avril 2009 au titre du plan de relance, avec l'objectif que la totalité des 1,7 milliard soit engagée avant la fin de l'année en cours. Fin mai, 340 millions d'euros de crédits de paiement auront été consommés, avec un objectif de 954 millions d'euros avant la fin 2009. Le reliquat de ces crédits continuera à être inscrit sur une ligne spécifique en 2010.
a évoqué la mise en place des bases de défense. Il a exprimé la crainte que leur coût ne soit bien plus élevé qu'initialement prévu.
En réponse, le ministre a précisé que :
- la mise en oeuvre des bases de défense constitue le pivot de la réforme en cours au sein du ministère de la défense ; comme tout changement de grande ampleur, cette évolution peut susciter des réticences et des interrogations ;
- il s'agit d'une expérimentation procédant par ajustements successifs, et non d'une réforme théorique décidée d'en haut. Ce caractère pragmatique se traduit par certains ajustements progressifs, qui sont des gages de réussite. Ainsi, l'année 2009 est consacrée à la mise en place de onze bases expérimentales ; en 2010, ce nombre sera porté à vingt-et-un, en même temps que sera analysé le « retour d'expérience » des premières bases. Puis, la totalité des bases seront mises en place en 2011 ;
- ses fréquentes visites effectuées dans les bases en cours d'expérimentation illustrent le caractère très hétérogène des problèmes rencontrés ; ainsi, la base de défense de Marseille regroupe vingt-quatre unités différentes issues des trois armées, et un service de la délégation générale pour l'armement. Les difficultés de mise en oeuvre sont très différentes à Nancy où sont basées trois grosses unités de l'armée de l'air et de l'armée de terre, et qui est également une base aérienne. Des ajustements parfois délicats sont requis. Enfin, une base comme celle de Valence se révèle probablement trop petite pour dégager des économies d'échelle ;
- les coûts d'installation de la mise en oeuvre de ces bases sont à peu près nuls à ce stade, puisque les services des bases expérimentales, compte tenu du faible préavis de leur lancement, sont regroupés dans des locaux qui étaient disponibles et qui pourront être ultérieurement complétés par des infrastructures nouvelles, si nécessaire. Au total, les coûts de cette réorganisation en base de défense seront très inférieurs aux économies dégagées par la réforme qui s'élèveront à 4 milliards d'euros nets.
a souhaité obtenir des précisions sur la future organisation des forces prépositionnées.
En réponse, le ministre a indiqué que :
- le théâtre ivoirien va faire l'objet d'une réduction des effectifs français ;
- une seule base sera conservée sur la façade atlantique africaine, mais quelques éléments seront maintenus au Gabon ;
- sur ce continent resteront également la base de Djibouti, ainsi que des éléments français au Tchad, en dehors de l'EUFOR ;
- la nouveauté sera constituée par la base d'Abu Dhabi, qui ouvrira prochainement avec un effectif de 300 hommes, portés à 600 à partir de 2011. Cette base constituera une vitrine des savoir-faire et des technologies françaises comme les forces spéciales, l'école du désert et les matériels de pointe. La création de cette base a eu un impact politique fort dans toute la région, dont les pays se sont réjouis du retour de la France, conçu comme un gage de stabilité.
a rappelé que la commission projetait de se rendre prochainement sur la base d'Abu Dhabi ainsi qu'à Djibouti.
a évoqué le dispositif RAPID (régime d'appui aux PME pour l'innovation duale) annoncé hier par le ministre pour le soutien des PME, et a souhaité obtenir des précisions sur l'état de la recherche nucléaire française.
En réponse, le ministre a précisé qu'aucune réduction d'effectif n'était envisagée au sein du Commissariat à l'énergie atomique (CEA).
a souhaité connaître la date de discussion de la loi de programmation 2009-2014 par le Parlement, et s'est inquiété de l'état du programme A400M ; il a manifesté sa surprise face à la déclaration du ministre, estimant que la crise en cours n'affecterait en rien le futur budget de son ministère.
En réponse, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a précisé que :
- pour la première fois depuis le début de la Ve République, les crédits d'équipement du ministère de la défense ont augmenté de 20 % de 2008 à 2009 ;
- les autorités militaires examinent actuellement les solutions palliatives permettant de faire face à un retard important de l'arrivée de l'A400M. Plusieurs options sont possibles, comme l'achat de C-17, la location de C-17 à l'OTAN, une anticipation du programme de l'avion multirôle de ravitaillement en vol et de transport (MRTT), l'augmentation des heures d'Antonov loués dans le cadre du programme SALIS (solution intérimaire pour le transport aérien stratégique), le recours accru aux CASA pour les transports inter-théâtres et l'entraînement des troupes parachutistes, le renforcement de la voilure des TRANSALL les plus récents, grâce aux interventions des ateliers industriels aéronautiques (AIA), ou encore le recours au C-130-J ;
- s'agissant du programme A400M, des discussions sont en cours avec EADS, qui souligne l'augmentation du coût des facteurs due au retard du programme, et qui demande un partage des risques financiers. A cela s'ajoute une augmentation du coût unitaire des appareils dans le cas où le Royaume-Uni se retirerait de ce programme.
a souligné que le Livre blanc sur lequel était fondée la LPM 2009-2014 avait été rédigé il y a plus d'un an, dans une période antérieure à l'éclatement de la crise économique, et il s'est interrogé sur la crédibilité de la LPM dans un contexte budgétaire où l'équipement pourrait être la variable d'ajustement d'une diminution de l'impasse budgétaire. Il a donc estimé opportun d'engager, dès maintenant, une réflexion sur les nécessaires modifications à y apporter pour que la LPM puisse être correctement appliquée, et s'est interrogé sur l'existence de réflexions en ce sens.
En réponse, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a précisé que :
- du fait de son ambition mondiale, la France a décidé de « sanctuariser » son outil militaire ;
- les 377 milliards d'euros contenus par les deux lois de programmation successives 2009-2020, constituent un effort considérable pour notre pays. Il s'agit d'une décision stratégique dont les éléments n'ont pas changé à ce jour ;
- le ministère de la défense participe au rétablissement de l'équilibre budgétaire par les restructurations en cours ;
- les analyses contenues dans le Livre blanc sur l'arc de crise et la nécessité de renforcer les moyens d'analyse des risques et des menaces sont renforcées par la crise économique. Ces éléments soulignent la nécessité pour la France de disposer d'une armée plus flexible, plus réactive et plus mobile.
- Présidence commune de M. Josselin de Rohan, président, et de M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles -
Lors d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé, conjointement avec la commission des affaires culturelles, à l'audition de M. Christian Masset, directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats du ministère des affaires étrangères et européennes.
Accueillant M. Christian Masset, M. Josselin de Rohan, président, a rappelé que cette audition s'inscrivait dans le cadre des auditions conjointes des deux commissions portant sur l'action culturelle extérieure de la France. Il a souhaité revenir sur la réforme du ministère des affaires étrangères et européennes, présentée par le ministre M. Bernard Kouchner, le 25 mars dernier, et sur ses implications en matière de diplomatie culturelle, concernant notamment la création prochaine d'une nouvelle agence, dénommée « Institut français », chargée de l'action culturelle extérieure.
a indiqué, en préambule, que la crise économique mondiale avait à la fois pour conséquence une reconfiguration de la planète autour d'un monde multipolaire mais également une forte volonté d'affirmation des identités nationales et un retour aux racines, comme l'illustrait le fait que la culture soit le secteur le plus épargné par cette crise.
Estimant que la question essentielle était de savoir si cette reconfiguration du système international serait conflictuelle ou bien facteur de progrès, il a considéré que la culture avait un rôle essentiel à jouer pour favoriser la seconde solution et que la France avait une carte à jouer dans ce domaine, comme en témoignait son action au service de la diversité culturelle, consacrée par la convention adoptée dans le cadre de l'UNESCO.
Il a souligné que la création, au sein du ministère des affaires étrangères et européennes, d'une direction générale chargée de la mondialisation, du développement et des partenariats avait pour double objectif, d'une part, d'encourager une mondialisation mieux régulée et plus solidaire et, d'autre part, de faire en sorte que la France soit une référence dans ce nouveau monde multipolaire, non pas en imposant son propre modèle, mais en offrant une réelle alternative, qu'il s'agisse de la culture, de la création artistique, du cinéma et de l'audiovisuel, du livre ou encore de la langue française.
Pour ce faire, il a estimé indispensable de croiser différentes dimensions, comme la culture et le développement, par exemple en apportant un soutien au cinéma africain, la culture et l'économie, comme l'illustrent les saisons culturelles croisées, la culture et l'enseignement ou encore la culture et les enjeux globaux, tels que l'environnement ou les migrations.
Il a également souligné que la mise en place d'une direction générale chargée de la mondialisation, du développement et des partenariats, aux côtés d'une direction générale chargée des affaires politiques et stratégiques et d'une direction générale chargée de l'administration, reposait sur l'idée que l'action culturelle faisait pleinement partie du coeur de métier des diplomates du Quai d'Orsay, au même titre que le service des relations internationales.
Il a indiqué que, si le terme de culture ne figurait pas dans la dénomination de cette nouvelle direction générale, comme c'était d'ailleurs déjà le cas dans l'appellation de l'ancienne direction générale de la coopération internationale et du développement, une des quatre directions de la direction générale chargée de la mondialisation, du développement et des partenariats était spécifiquement chargée de la culture et du français.
a ensuite rappelé que la création de cette nouvelle direction générale, qui s'inscrivait dans le cadre de la réforme globale du ministère des affaires étrangères et européennes, issue du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France et des travaux de la révision générale des politiques publiques et présentée par le ministre, M. Bernard Kouchner, le 25 mars dernier, constituait une première étape et qu'une seconde étape serait réalisée avec la mise en place de nouveaux opérateurs, parmi lesquels un nouvel opérateur chargé de la mobilité et de l'expertise internationale, issu du rapprochement entre CampusFrance, Egide et France Coopération Internationale, et une agence dénommée « Institut français » chargée de l'action culturelle extérieure, qui seraient regroupés au sein d'une « maison des opérateurs ».
Il a indiqué qu'un comité de préfiguration de cette future agence, regroupant différentes personnalités du monde de la culture, des représentants des administrations concernées et des parlementaires avait été institué et qu'il devrait remettre ses conclusions en juin, dans la perspective de la réunion des Etats généraux de l'action culturelle extérieure, qui devraient se dérouler en juillet.
Il a également précisé qu'un projet de loi relatif à la création de cette agence, serait déposé au Parlement, vraisemblablement à l'automne, afin que celle-ci puisse commencer à fonctionner l'an prochain.
a estimé que les trois principaux sujets sur lesquels devraient se prononcer les membres du comité de préfiguration seraient le périmètre de la future agence, étant entendu qu'un autre opérateur serait chargé de la mobilité et de l'expertise internationale, les liens de l'agence avec le réseau culturel et la question de la tutelle ministérielle sur cet organisme.
Il a considéré également que, en dehors de ces trois sujets importants, quatre autres questions essentielles mériteraient d'être évoquées.
La première question porte sur les relations avec le ministère de la culture et de la communication. Quelle que soit la formule retenue pour la tutelle de la future agence chargée de l'action culturelle, avec notamment la question d'une tutelle unique ou d'une co-tutelle, il est, bien entendu, indispensable que le ministère des affaires étrangères et européennes entretienne des relations étroites avec le ministère de la culture et de la communication, notamment afin d'assurer une cohérence entre l'action culturelle nationale et internationale. Il est donc nécessaire de trouver la bonne manière de renforcer la coopération avec le ministère de la culture et de la communication.
La seconde interrogation concerne le réseau culturel.
A cet égard, le débat ne porte pas tant sur l'intérêt de conserver les centres ou instituts culturels et une action culturelle « hors les murs », étant donné que cela dépend largement de la situation de chaque pays, le continent européen se prêtant davantage à une action culturelle « hors les murs » que le continent africain, où le centre culturel français représente souvent le seul accès à la culture. Il s'agit plutôt de renforcer la visibilité et la lisibilité du réseau, notamment en fusionnant, au sein d'un établissement unique, les services de coopération et d'action culturelle des ambassades et les centres ou instituts culturels, et, à cet égard, l'idée d'un label unique, sur le modèle de l'Institut Goethe ou du British Council va dans le bon sens. Il s'agit également de trouver la bonne articulation avec le réseau des Alliances françaises, qui ont vocation à demeurer autonomes et qui, par leur nature même, témoignent de la forte attente étrangère à l'égard de la France. Sur ce point, il convient de préciser qu'il n'y a plus aujourd'hui de « doublons » entre les alliances françaises et les centres ou instituts culturels. Enfin, le réseau doit « respirer », avec à la fois des fermetures et des ouvertures, comme en Irak, en Chine, dans les territoires palestiniens ou les pays d'Europe orientale.
Une troisième question essentielle concerne la gestion des ressources humaines. Le principal enseignement de l'étude comparative menée par M. Bernard Faivre d'Arcier tient, en effet, à la mise en lumière des insuffisances du système français en matière de formation. On peut penser, d'autre part, que la future agence aura un rôle important à jouer dans ce domaine. Il est également nécessaire de trouver le juste équilibre en ce qui concerne la durée d'affectation, afin qu'elle ne soit ni trop courte ni trop longue. Enfin, se pose aussi la question du statut des personnels et de l'égalité de traitement avec les autres personnels détachés du ministère des affaires étrangères et européennes ou de l'Etat.
Enfin, la dernière interrogation porte sur le financement. A cet égard, malgré une relative stabilité des crédits du ministère des affaires étrangères et européennes, on constate toutefois un déséquilibre entre les contributions multilatérales, qui sont en progression, au détriment des actions bilatérales, ce qui se traduit par d'importantes baisses de subventions dans certains postes. Or, la question du financement est essentielle au moment où il est question d'engager une réforme ayant pour objectif de constituer une agence et un réseau culturels ambitieux.
A cet égard, le ministre des affaires étrangères et européennes a obtenu du Président de la République et du Premier ministre un financement supplémentaire de 40 millions d'euros spécifiquement destiné à l'action culturelle extérieure, dont 20 millions d'euros pour 2009 et 20 millions d'euros pour 2010, ce qui permettra de financer certaines actions conduites par les postes et de leur offrir une meilleur visibilité à moyen terme.
Sur ce point, il n'existe pas de véritable corrélation entre l'existence d'une agence et les financements consacrés à l'action culturelle extérieure, puisque, si on se réfère aux modèles étrangers, tels que le British Council, l'Institut Goethe ou l'Institut Cervantes, on constate que les financements versés à ces organismes dépendent surtout de la situation des finances publiques des pays concernés. A cet égard, le rôle de l'ambassadeur est souvent fondamental concernant la levée de fonds privés pour financer des actions culturelles, comme on peut le constater à Rome, aux Etats-Unis d'Amérique ou à Singapour.
En conclusion, se référant au dernier numéro du magazine « The Economist », qui vante les mérites du modèle français par rapport aux modèles allemand ou britannique, M. Christian Masset a indiqué que la France n'avait pas à rougir de son propre modèle culturel, qui est d'une valeur exceptionnelle et qui doit être préservé même s'il nécessite d'être réformé, chaque modèle national ayant par ailleurs ses qualités et la diversité étant dans ce domaine une richesse.
a rappelé que la France avait été à l'origine de l'invention de la diplomatie culturelle, avec la création, à la fin du XIXe siècle, des Alliances françaises, qui avaient servi de modèles au British Council et à l'Institut Goethe, et qu'il ne fallait donc pas nourrir de complexes.
Il a également estimé que, avant d'étudier les structures, il fallait au préalable s'interroger sur les objectifs assignés à l'action culturelle extérieure.
Rappelant les nombreux travaux déjà réalisés et l'intérêt manifesté de longue date par les sénateurs, il a indiqué que le Sénat serait très vigilant et actif dans ce débat.
Relevant que M. Christian Masset était plutôt favorable à l'idée d'une tutelle unique du ministère des affaires étrangères et européennes sur la future agence chargée de l'action culturelle extérieure, mais qu'il souhaitait dans le même temps associer davantage le ministère de la culture et de la communication, il s'est interrogé sur la manière de renforcer la place du ministère de la culture et de la communication et celle des autres ministères, comme celui de l'enseignement supérieur et de la recherche.
a répondu que le ministère des affaires étrangères et européennes avait la volonté d'établir un véritable partenariat avec l'ensemble des ministères intéressés, et, en premier lieu, avec le ministère de la culture et de la communication, en matière d'action culturelle extérieure, mais que la question se posait sur le moyen de concilier ce souhait avec le souci de garantir l'efficacité du dispositif.
A cet égard, il a estimé que la co-tutelle était un système qui fonctionnait moins bien qu'une tutelle unique, mais que cela ne voulait pas dire pour autant que les autres ministères ne devaient pas être associés, par exemple en étant représentés au sein du conseil d'administration ou bien en créant un conseil d'orientation stratégique, qui associerait différents ministères, sur le modèle de ce qui existe pour l'aide publique au développement.
Il a également jugé qu'il serait souhaitable d'associer les professionnels et d'autres personnalités du monde de la culture, par exemple au sein d'un Conseil scientifique.
Soulignant que toute réforme imposée d'en haut serait vouée à l'échec si elle n'associait pas étroitement les personnels du réseau culturel, M. Louis Duvernois s'est interrogé sur le choix de la dénomination de la future agence.
Estimant que la question de la gestion des ressources humaines était un point clef, il s'est également interrogé sur les responsabilités qui pourraient être confiées à la future agence en ce qui concerne le recrutement et la formation des agents ou la gestion des carrières.
En réponse, M. Christian Masset a indiqué que la réforme du ministère des affaires étrangères avait fait l'objet d'une vaste consultation des personnels, notamment dans le cadre des travaux préparatoires du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France.
Il a précisé que la consultation des agents du réseau avait conduit le ministre à proposer de dénommer « institut français » la future agence, alors que, au départ, ce dernier avait plutôt exprimé sa préférence pour le nom d'un grand écrivain français. Il a indiqué que la décision finale quant au choix de la dénomination de l'agence serait prise par le ministre, sur la base des propositions qui seront formulées par le comité de préfiguration.
Convenant que la gestion des ressources humaines était un point essentiel, il a estimé que la question de savoir si cette tâche devait être confiée à la future agence dépendait étroitement du contrôle qu'elle exercerait ou non sur le réseau culturel.
Il a indiqué qu'il avait personnellement le sentiment que les inconvénients d'un rattachement du réseau culturel à l'agence l'emportaient sur ses avantages. Le réseau est celui de tous les opérateurs et non d'un seul.
Il a donc jugé personnellement préférable de conserver une distinction entre l'agence, d'une part, et le réseau, d'autre part, qui serait rationalisé par la création d'un établissement unique, sous l'autorité de l'ambassadeur, issu du regroupement des services de coopération et d'action culturelle et des centres ou instituts culturels.
s'est demandé si la tutelle unique du ministère des affaires étrangères et européennes, le périmètre réduit à l'action culturelle proprement dite de la future agence et l'absence de contrôle de l'agence sur le réseau n'aboutiraient pas à vider de sa substance la réforme et même à un recul par rapport à la création de CulturesFrance. Il s'est interrogé sur l'avenir de CampusFrance, dans l'hypothèse où la future agence ne serait pas chargée de la mobilité des étudiants et des professeurs.
Il a estimé indispensable, y compris dans l'hypothèse où le ministère des affaires étrangères conserverait la tutelle sur la future agence, de renforcer la place du ministère de la culture et celle du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, de développer des partenariats avec les grands établissements culturels français et avec les collectivités territoriales.
Rappelant que l'action culturelle extérieure avait fait l'objet d'une forte baisse de ses crédits, de l'ordre de 10 % en 2009, et que, selon le document de programmation triennale, cette diminution devrait se poursuivre en 2010 et en 2011, ce qui avait été unanimement dénoncé par le Sénat lors de la discussion de la dernière loi de finances, M. Yves Dauge a fait part de ses préoccupations au sujet du calendrier de la réforme et de son articulation avec la discussion de la prochaine loi de finances.
Il a également rendu hommage à l'action des agents du ministère et du réseau culturel qui, malgré cette diminution drastique des financements et du manque de soutien de leur administration, réalisent un travail remarquable et s'efforcent de maintenir une présence culturelle de la France à l'étranger.
Enfin, au sujet de la convention sur la diversité culturelle adoptée dans le cadre de l'UNESCO, il a regretté que la France, après avoir joué un rôle majeur lors de son adoption, ne soit pas assez impliquée dans sa mise en oeuvre concrète.
a indiqué qu'il était sensible à l'hommage rendu aux agents du ministère et du réseau culturel, qui réalisent un travail remarquable malgré des conditions souvent difficiles, avec une forte diminution des crédits dans certains postes.
Il a ensuite précisé que le ministre des affaires étrangères et européennes, M. Bernard Kouchner, avait depuis longtemps manifesté son vif intérêt pour l'action culturelle extérieure, qu'il s'était personnellement beaucoup investi sur ce volet dans le cadre de la réforme du ministère, la plus importante engagée au cours de ces vingt dernières années, et qu'il avait réussi à obtenir du Président de la République et du Premier ministre une enveloppe supplémentaire de 40 millions d'euros spécifiquement destinée à la coopération culturelle extérieure.
Ces 40 millions d'euros supplémentaires, dont une moitié sera versée en 2009 et l'autre en 2010, devraient servir à financer quelques grands projets sélectionnés à partir des propositions des différents postes, en particulier dans le domaine de la numérisation, où la France accuse un retard par rapport à ses partenaires, notamment l'Espagne, ou encore pour la formation des agents.
S'agissant du périmètre de la future agence, il a rappelé que les conseils de modernisation, à l'issue des travaux de la révision générale des politiques publiques, avaient décidé la création d'un nouvel opérateur chargé de la mobilité internationale, à partir du rapprochement entre CampusFrance, Egide et le GIP France coopération internationale (FCI). Il a jugé nécessaire de centrer l'action de chaque opérateur sur son coeur de métier.
Dans le prolongement des propos de M. Yves Dauge, Mme Catherine Tasca a également fait part de sa préoccupation au sujet du calendrier de cette réforme et insisté sur la nécessité d'accélérer sa mise en oeuvre, compte tenu de l'inquiétude qui pèse sur les agents du réseau culturel à propos du contenu précis de cette réforme.
Elle a également fait part de son étonnement, à la lecture des documents de présentation de la réforme, quant à l'absence de référence à la politique culturelle dans les missions du ministère des affaires étrangères et européennes et dans la définition des attributions de la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats.
Relevant que le nom d'« Institut français » provenait sans doute de la transposition de l'« Institut Goethe », alors que le terme d'« institut » n'a pas la même signification en français et en allemand, elle a fait par de ses doutes sur le choix de cette appellation.
En réponse, M. Christian Masset a confirmé que le terme d'« Institut français » était celui utilisé en Allemagne pour qualifier les instituts ou centres culturels français, tout en précisant qu'aucune décision définitive n'avait été prise à ce stade.
Il a indiqué que, si la direction générale chargée de la mondialisation, de la culture et des partenariats regroupait des services et des agents d'horizons très variés, puisqu'ils étaient issus à la fois de l'ancienne direction générale de la coopération internationale et du développement et de la direction des affaires économiques et financières, la culture y occupait une place à part entière, au sein d'une direction autonome, dont il avait d'ailleurs souhaité qu'elle soit située à proximité immédiate du directeur général dans le nouveau bâtiment situé dans le quartier de la Convention.
a évoqué son récent déplacement en Bosnie-Herzégovine, avec le groupe interparlementaire d'amitié du Sénat, et a dit avoir été frappé à cette occasion par le cas du centre culturel André Malraux, situé à Sarajevo, dont les crédits seraient en diminution et qui semble faire l'objet d'un conflit entre son directeur et les services de l'ambassade. Il a estimé que cette situation pouvait porter préjudice à la présence culturelle de la France dans ce pays, qui tente, non sans difficultés, de se rapprocher de l'Union européenne.
Il a également fait part de son extrême préoccupation au sujet de la négociation par la Commission européenne des accords économiques avec certains partenaires, comme la Corée, l'Inde et le Canada, pour lesquels la direction générale du commerce se substitue à celle chargée de la culture pour négocier certains aspects de ces accords qui relèvent pourtant de la culture.
En réponse, M. Christian Masset a déclaré partager l'inquiétude de M. Jack Ralite au sujet de la prise en compte des aspects relatifs à la culture dans les négociations sur les accords commerciaux de l'Union européenne et il a précisé qu'il avait saisi la directrice générale de la culture de la Commission européenne de cette question.
Concernant le centre André Malraux, il a précisé qu'il s'agissait d'un centre privé, mais que le ministère des affaires étrangères et européennes lui apportait un soutien et qu'il avait même décidé récemment de mettre à sa disposition un assistant technique. Il a indiqué ne pas avoir connaissance d'un éventuel conflit entre la direction du centre et les services de l'ambassade, mais qu'il demanderait à ses services d'étudier plus attentivement la situation sur place.