La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Patrick Courtois et a établi le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 63 (2008-2009), organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux.
Ayant rappelé que le présent projet de loi était partie intégrante de la réforme des collectivités territoriales engagée par le Gouvernement dans la mesure où il était un préalable indispensable à la création des conseillers territoriaux, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur, a indiqué que ce texte réduisait de deux ans les mandats des membres des conseils régionaux et des membres de l'Assemblée de Corse qui seraient élus en mars 2010, et de trois ans les mandats des conseillers généraux à élire en mars 2011. Il a précisé que, conformément aux dispositions du code général des collectivités territoriales, l'Assemblée de Corse avait été consultée par le Gouvernement et avait émis, par une délibération en date du 12 octobre 2009, un avis favorable sur le texte.
Il a ensuite souligné que ce projet de loi était le seul des quatre textes déposés devant le Sénat à être soumis à la procédure accélérée, le recours à ce procédé étant justifié car la jurisprudence du Conseil constitutionnel impose au législateur :
- de respecter le principe de sincérité du scrutin et, en conséquence, de garantir que les électeurs connaissent, au moment de leur vote, les caractéristiques -et notamment la durée- des mandats sur lesquels ils se prononcent. Il a précisé que, dans ce contexte, il était indispensable que la réduction des mandats des conseillers régionaux élus en mars 2010 soit décidée avant le déclenchement des opérations électorales, c'est-à-dire avant le mois de février 2010 ;
- de tenir compte du principe de libre administration des collectivités territoriales : celui-ci semble en effet interdire de réduire la durée de mandats en cours, cette pratique s'apparentant à l'exercice par le Parlement d'un pouvoir de dissolution des assemblées locales, sauf en cas de circonstances exceptionnelles.
a ensuite fait valoir que, bien que l'adoption du présent projet de loi soit nécessaire à la mise en place des conseillers territoriaux, elle ne l'impliquait pas nécessairement. À cet égard, il a rappelé que la création de cette nouvelle catégorie d'élus locaux découlerait du projet de loi n° 60 (2009-2010) de réforme des collectivités territoriales, et que le mode de scrutin applicable à leur élection résulterait, quant à lui, du projet de loi n° 61 (2009-2010). Dès lors, constatant que le législateur ne pouvait se lier lui-même, il a affirmé que l'adoption du présent projet de loi ne préjugerait en rien des débats futurs des Assemblées et que celles-ci conserveraient une entière souveraineté pour décider ultérieurement de créer, ou non, les conseillers territoriaux.
En outre, ayant relevé que des élections simultanées des conseillers généraux et des conseillers régionaux avaient été instituées par la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 et avaient eu lieu en mars 1992, en dehors de toute réforme annexe, il a souligné qu'une telle concomitance présentait en elle-même de nombreux avantages :
- tout d'abord, elle est un facteur de dynamisation de la démocratie locale, dans la mesure où elle renforce la lisibilité du calendrier électoral local pour les citoyens et favorise l'augmentation de la participation électorale. Sur ce point, il a fait remarquer que des records de mobilisation avaient été atteints en 1992, le taux d'abstention aux élections cantonales au premier tour ayant chuté de plus de 20 % par rapport aux élections de 1988 ;
- elle permettrait également de mettre fin au renouvellement triennal par moitié des conseils généraux. Cette réforme, qui fait l'objet d'un large consensus, a été demandée par l'assemblée des départements de France (ADF) et préconisée par le rapport d'étape de la mission sénatoriale présidée par M. Claude Belot ;
- troisièmement, si les conseillers territoriaux n'étaient finalement pas mis en place, elle affermirait la complémentarité et la solidarité entre les conseillers généraux et les conseillers régionaux en synchronisant leurs mandats ;
- enfin, elle serait en cohérence avec la mission constitutionnelle du Sénat, en garantissant que ses membres soient désignés par des conseillers municipaux, généraux et régionaux élus récemment, confortant la légitimité de la Haute Assemblée en tant que représentante des collectivités territoriales.
En conséquence, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur, a estimé que le présent projet de loi pouvait être adopté tant par les partisans de la création des conseillers territoriaux que par ses adversaires puisque, dans ces deux cas, il était un gage de modernisation de la vie publique locale. Il a donc proposé à la commission des lois d'adopter ce texte sans modification.
Ayant jugé discutable de justifier l'adoption du présent projet de loi avant les autres textes déposés devant le Sénat par la nécessité d'informer les électeurs sur la durée des mandats qu'ils confient, alors même que les Assemblées devaient, quant à elles, se prononcer sur la création des conseillers territoriaux sans connaître le mode de scrutin qui serait retenu pour l'élection de ces derniers, M. Pierre-Yves Collombat a souligné que de nombreux problèmes restaient en suspens et observé que le nombre de conseillers territoriaux attribué à chaque département n'était toujours pas fixé. En outre, confirmant que le rapport établi par la mission présidée par M. Claude Belot avait proposé la mise en place d'un renouvellement intégral des conseils généraux, il a marqué son accord avec cette proposition.
a estimé que, contrairement aux affirmations du rapporteur, l'unique objet du projet de loi était de permettre la création des conseillers territoriaux et que l'exposé des motifs de ce texte, ainsi que l'engagement de la procédure accélérée, en attestaient.
Ayant affirmé que la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux était nécessaire à la création des conseillers territoriaux, mais demeurerait une réforme opportune même si ces derniers n'étaient pas institués, M. Jean-René Lecerf s'est déclaré favorable à la suppression du renouvellement triennal par moitié des conseils généraux. Toutefois, il s'est inquiété que, sous l'effet du calendrier électoral mis en place par le présent texte, l'ensemble des élections locales (à savoir les élections municipales, cantonales et régionales) aient systématiquement lieu en même temps. Ainsi, il a craint que cette accumulation d'un grand nombre de scrutins sur une seule journée ne soit impossible à gérer pour les pouvoirs publics chargés de l'organisation et du contrôle des opérations électorales, et il a interrogé le rapporteur afin de savoir quelles mesures le Gouvernement envisageait de prendre pour répondre à ce problème.
a estimé que le calendrier choisi par le Gouvernement obligeait le Parlement à anticiper indûment les réformes à venir, dans la mesure où il engageait les Assemblées à se prononcer d'abord sur la fiscalité locale, avec la transformation de la taxe professionnelle prévue par l'article 2 du projet de loi de finances pour 2010, puis sur la concomitance des élections cantonales et régionales, avant même que les projets de loi portant sur les institutions locales et sur les compétences de chaque catégorie de collectivités territoriales n'aient été examinés par elles.
Ayant souligné que, bien que son nom ne figure pas dans le présent texte, le conseiller territorial en était le centre, M. Jean-Claude Peyronnet a marqué son accord avec les propos tenus par M. Pierre-Yves Collombat. Il a déclaré que, bien qu'opposé à la création des conseillers territoriaux, il était relativement favorable à l'instauration d'une concomitance des élections régionales et cantonales. Néanmoins, il a exposé que, dans ce cas, d'importants problèmes se poseraient dans les années où devaient se tenir non seulement les élections locales, mais aussi les élections nationales, et que le Parlement devait être attentif à cette question pour éviter que certaines années électorales ne soient excessivement chargées.
S'étant déclaré d'accord avec M. Yves Détraigne, M. Bernard Frimat a relevé que l'étude d'impact jointe au texte concernait exclusivement les conseillers territoriaux et était commune aux projets de loi n° 63, 62 et 61 (2009-2010). Il a estimé que le présent projet de loi imposait aux Assemblées de se prononcer sur une catégorie d'élus locaux dont le mandat n'était pas créé et dont le mode de scrutin était inconnu et qu'il était, en conséquence, dépourvu des éléments de sincérité, de lisibilité et de clarté qui auraient dû permettre au Parlement de délibérer librement.
S'étant déclarée favorable à un renouvellement intégral des conseils généraux, Mme Josiane Mathon-Poinat a estimé que la concomitance des élections locales n'était pas forcément un gage de plus forte participation : elle a ainsi cité l'exemple des élections cantonales et municipales de 2001, lors desquelles le taux de participation aux élections cantonales est demeuré sensiblement inférieur à celui des élections municipales.
En réponse à cette remarque, M. Jean-Patrick Courtois a indiqué qu'il convenait de comparer non pas les taux de mobilisation pour différents types d'élections pour une même échéance, mais les taux de participation pour une même catégorie d'élections au cours des scrutins successifs et que, ainsi, il apparaissait que les élections cantonales de 1992 avaient eu un taux d'abstention particulièrement bas par rapport aux autres scrutins départementaux organisés depuis 1976.
après s'être déclaré favorable à la création des conseillers territoriaux, a émis le souhait que les futures élections territoriales n'aient pas lieu en même temps que les élections municipales. Affirmant que ces scrutins étaient porteurs d'enjeux différents, il a estimé qu'ils devaient faire l'objet de campagnes électorales distinctes et que leur concomitance pouvait être une source de confusion pour les électeurs.
Puis, après que le rapporteur a donné un avis défavorable à deux amendements de M. Yvon Collin et plusieurs de ses collègues, prévoyant respectivement la suppression des articles premier et 2 du présent texte, la commission ne les a pas retenus et a adopté le projet de loi sans modification.