Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 2 octobre 2007 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • arabe
  • israël
  • palestinien
  • palestinienne

La réunion

Source

La commission a procédé à l'audition de M. Marc Otte, représentant spécial de l'Union européenne pour le processus de paix au Moyen-Orient.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Accueillant M. Marc Otte, M. Robert del Picchia, président, a rappelé la préoccupation constante de la commission sur le dossier israélo-palestinien. Il a considéré que la situation sur le terrain n'invitait pas à l'optimisme, les deux parties rejetant, aujourd'hui, pour des raisons diverses, l'héritage d'Oslo et la perspective de deux Etats vivant côte à côte, dans des frontières sûres et reconnues semblant chaque jour s'éloigner davantage sous l'effet des progrès de la colonisation et du délitement des structures internes de l'Autorité et de la société palestinienne.

Il a souligné que, dans ce contexte, les Etats-Unis, et avec eux la communauté internationale, s'efforçaient de redonner un élan aux négociations entre les deux gouvernements et de retrouver un horizon politique.

Il s'est interrogé sur les perspectives politiques d'une reprise des négociations et sur les bases concrètes sur lesquelles elles pourraient s'appuyer, ainsi que sur la place de la bande de Gaza, gouvernée de facto par le Hamas, dans ce processus.

Il a souhaité un éclairage sur ce que pourrait être la contribution spécifique de l'Union européenne à la réunion annoncée en novembre 2007 et sur les formes que prenait son assistance financière et technique dans les territoires palestiniens. Il s'est enfin interrogé sur les attentes à l'égard de la France.

Debut de section - Permalien
Marc Otte, représentant spécial de l'Union européenne pour le processus de paix au Moyen-Orient

a tout d'abord souligné le rôle majeur joué par la France au Moyen-Orient, entendu dans un sens très large, de l'Afrique du Nord au golfe arabo-persique. Il a rappelé les engagements français non seulement dans le dossier israélo-palestinien, mais encore en faveur de la stabilisation du Liban ou encore sur le terrain financier. Le projet d'Union méditerranéenne montre à l'évidence que la France continue à jouer un rôle central.

Il a mis l'accent sur le fait que cette région appartenait à la sphère des intérêts européens fondamentaux et que ses fractures rencontraient des échos au sein de certaines franges des sociétés européennes. Il a souligné l'interconnexion croissante entre les différentes crises de la région, le fait que les occidentaux ne déployaient qu'une stratégie réactive d'endiguement et n'avaient pas trouvé le moyen de reprendre l'avantage et noté que les autorités des pays de la région, affaiblies, étaient affectées par le manque d'adhésion de leur opinion.

Evoquant le processus de paix, il a constaté que les problèmes fondamentaux n'avaient pas évolué depuis 1967, que les paramètres de la solution étaient connus, mais que le contexte, notamment le désastre irakien, qui influence les positions des parties et les stratégies des acteurs régionaux, avait accéléré les problèmes latents de la région. La guerre d'Irak avait gravement affecté le crédit des Etats-Unis dans la région, ce qui rejaillit sur celui des Européens, divisés, incapables de proposer une véritable alternative et de toute façon impliqués dans la crise. Elle a aussi accéléré l'émergence de l'Iran comme puissance régionale ainsi que celle d'acteurs non étatiques érigés en menaces stratégiques (Hamas, Hezbollah...) et devenus des « sous-traitants » des puissances régionales. Aux risques accrus de prolifération des armes de destruction massive s'est ajouté l'affrontement, séculaire mais de nouveau entré dans une phase violente, entre sunnites et chiites.

a considéré que ce contexte conduisait à une convergence d'intérêts pour faire évoluer la situation. Parmi celles-ci, on peut citer le fait que les régimes sunnites de la région ne considéraient plus Israël, mais plutôt l'Iran comme leur ennemi principal. Leur préoccupation première était la guerre civile irakienne. Bien que restant un « ennemi » pour les opinions publiques, Israël devenait de facto un allié. Le gage de leur soutien aux Etats-Unis dans la crise irakienne résidait dans l'accélération d'une solution au conflit israélo-palestinien. Dans ce cadre, le secrétaire d'Etat américain, Mme Condoleeza Rice, a signifié un engagement des Etats-Unis qui avait fait défaut jusqu'alors. Il s'agit de recréer un climat de confiance en mettant l'accent sur la négociation bilatérale israélo-palestinienne, engagée et approfondie depuis la fin de l'année 2006, comme première étape vers une solution globale.

a insisté sur le fait que la négociation politique portant sur le statut final devait s'accompagner de changements réels sur le terrain, notamment par l'arrêt de la colonisation et des entraves à la liberté de circulation des Palestiniens et de la perspective d'un Etat palestinien qui soit un voisin acceptable pour Israel. Le problème de Gaza et des affrontements interpalestiniens devront être affrontés : le tiers de la population palestinienne ne peut être exclue d'une relance politique et économique.

a estimé que l'annonce de la convocation d'une réunion internationale sous l'égide du Quartet constituait le moteur d'une attitude plus constructive des parties, en focalisant l'attention des acteurs sur une échéance. Sans garantie de succès, cette réunion peut néanmoins jouer un rôle de catalyseur du processus bilatéral. Le lancement d'une négociation sur le statut final s'appuierait sur le principe des « territoires contre la paix », sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies, sur l'initiative de paix arabe de Beyrouth, sur la feuille de route et sur les accords passés.

Il a précisé qu'aucune invitation à cette réunion n'avait encore été lancée, mais que le Quartet, dont le rôle exact dans la préparation de la réunion restait à définir, ainsi que le comité de suivi de la Ligue arabe, dont la Syrie et le Liban font partie, y participeraient.

Dans l'immédiat, l'état d'avancement des négociations entre le premier ministre israélien et le président de l'Autorité palestinienne n'est pas connu avec précision et une importante réunion qui devait produire un document comme base de discussions vient d'être reportée.

a considéré que l'Union européenne, encouragée par les parrains du processus de paix, avait joué récemment un rôle plus politique et que ce rôle devait constituer l'objectif des programmes d'assistance. Il a indiqué que la réunion internationale de novembre serait suivie d'une réunion des bailleurs de fonds. Il a rappelé que l'Union européenne tentait de relancer une approche globale de la réforme des services de sécurité palestiniens et qu'elle avait engagé quelque 800 millions d'euros en 2007 en faveur de l'Autorité palestinienne. Il serait difficile d'aller au delà de ces montants et l'Union européenne devait rechercher un meilleur partage du fardeau, notamment de la part des Etats-Unis ou des pays du Golfe.

Il a estimé en conclusion que les obstacles à la relance du processus de paix étaient nombreux, mais que les différents acteurs devaient mesurer le coût de l'échec et considérer que le statu quo rendrait une solution ultérieure encore plus difficile à obtenir.

Un débat avec les commissaires s'est instauré à la suite de l'exposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

a souhaité savoir si Israël considérait que le coût de l'échec des négociations était important.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

a souhaité obtenir des précisions sur les engagements et les ambitions de l'Union européenne dans la perspective de la réunion internationale de novembre et sur le rôle que devrait jouer le représentant spécial du Quartet, M. Tony Blair. Il a souhaité savoir si l'arrêt de la colonisation constituait un préalable à la participation de la Ligue arabe à la réunion. Il a souligné la nécessité d'apporter une réponse globale aux problèmes du Proche-orient et a souhaité que l'Union européenne tire les leçons de ses expériences passées, notamment de la destruction par Israël, sans indemnisation, des infrastructures de l'Autorité palestinienne qu'elle avait financées.

Debut de section - Permalien
Marc Otte, représentant spécial de l'Union européenne pour le processus de paix au Moyen-Orient

a souligné que si Israël avait pu penser gérer la situation, notamment sous la protection américaine, les choses avaient évolué. Il a noté que ce n'était pas la menace militaire, mais l'argument démographique qui avait modifié les positions de la droite israélienne. La guerre du Liban de l'été 2006 et l'émergence de l'Iran, perçue comme une menace stratégique, ont fait apparaître l'opportunité d'un accord avec les Etats arabes, qui nécessite le règlement de la question palestinienne.

Il reste que le coût politique pour le premier ministre israélien augmente en proportion du nombre de colons qui seraient affectés par un compromis territorial, mais que l'idée de deux Etats dans l'intérêt d'Israël progresse. Il importe de ne pas laisser seuls les partenaires de la négociation et de leur offrir des garanties de sécurité. La fin de la colonisation n'est pas seulement une exigence arabe ; elle est la condition du retour à un compromis territorial acceptable. Le président américain a rappelé que sa conception de l'Etat palestinien supposait une continuité territoriale. Tout en acceptant que les évolutions soient progressives, il faut que les intentions se manifestent concrètement sur le terrain, au moins par le gel de la colonisation et une plus grande liberté de mouvement pour les Palestiniens, comme prélude d'une solution globale. Il a souligné la nécessité de prendre en compte la Syrie dans un processus que ce pays est en mesure de bloquer s'il n'y est pas impliqué.

Parallèlement, l'appui à la capacité de l'Autorité palestinienne de maintenir l'ordre public est une demande palestinienne. La seconde priorité est le soutien budgétaire, qui ne doit pas seulement peser sur les contribuables européens. La troisième priorité est le développement, qui suppose de s'éloigner d'un modèle reposant sur la fonction publique, au profit du développement du secteur privé.

Evoquant la destruction par Israël des infrastructures érigées sur fonds communautaires, M. Marc Otte a estimé que l'Union européenne ne devait s'en prendre qu'à elle-même si son manque de fermeté avait encouragé la désinvolture israélienne à cet égard. Il a également rappelé qu'il revenait à la puissance occupante, en application du droit international, d'assurer la prise en charge d'un certain nombre de services publics. Il a exprimé ses doutes quant à la capacité de l'Union européenne à maintenir ses engagements financiers au niveau actuel de façon durable, dans un contexte de maîtrise du budget communautaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

En réponse à M. Robert del Picchia, président, qui l'interrogeait sur les résultats envisageables à brève échéance, M. Marc Otte a rappelé que pour des raisons différentes mais convergentes, les parties avaient exprimé leur volonté d'aboutir, de résoudre le conflit et pas seulement de le gérer. La réunion internationale serait donc un test de crédibilité pour Israël, les Etats-Unis, les pays arabes, mais aussi pour les Européens et la politique étrangère européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vantomme

A M. André Vantomme, qui l'interrogeait sur le réarmement du Hezbollah, M. Marc Otte a répondu que le Liban constituait une bonne illustration de ce que tous les conflits de la région n'étaient pas strictement liés à la question palestinienne, mais devaient trouver une réponse dans un règlement global.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

A M. Robert Bret, M. Marc Otte a indiqué que la Russie et l'Union européenne partageaient les mêmes vues sur ce dossier et que la Russie, soucieuse d'être reconnue comme un acteur responsable, se montrerait pragmatique et réaliste si elle était associée au règlement du conflit.