La délégation a procédé à l'audition de Mme Marie-Jo Zimmermann, rapporteure générale de l'Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, sur les propositions de loi relatives à la parité en politique, dont la délégation a été saisie pour avis par la commission des lois.
Après que Mme Gisèle Gautier, présidente, eut accueilli l'intervenante, Mme Catherine Troendle, rapporteure, a rappelé que la délégation avait été saisie pour avis par la commission des lois de dix propositions de loi déposées par des sénateurs appartenant à différents groupes politiques et visant à introduire des mesures en faveur de la parité pour l'ensemble des élections politiques, qu'elles soient locales ou nationales. Elle a également évoqué l'existence d'un avant-projet de loi, annoncé le 8 mars dernier par Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, destiné à mettre en oeuvre les annonces faites en la matière par le président de la République lors de ses voeux en début d'année et actuellement en attente d'arbitrage à Matignon. Elle a cependant fait observer que le calendrier d'examen parlementaire de ce texte demeurait aujourd'hui très incertain. Enfin, elle a noté que le ministère de l'intérieur souhaiterait que ces nouvelles dispositions puissent être appliquées aux prochaines élections municipales.
s'est félicitée de ce que ces dix propositions de loi sénatoriales se soient inspirées de certaines recommandations de l'Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, en particulier en ce qui concerne la place des femmes dans les exécutifs locaux. Elle a rappelé les engagements pris par le Président de la République en faveur de la parité lors de ses voeux, début janvier, ainsi que les annonces du président de l'Union pour un mouvement populaire (UMP), à l'occasion de la convention de ce parti intitulée « Femmes, libres et égales », le 7 mars dernier.
Elle a noté que certaines propositions de loi visaient à instituer un véritable statut de l'élu, qui, seul, permettrait aux femmes de concilier leur vie de famille et leur vie professionnelle avec l'exercice de leur mandat. Elle a regretté que le statut de l'élu, qui fait l'objet de recommandations régulières de l'Observatoire de la parité, ait toujours jusqu'à présent été négligé et a indiqué qu'elle déposerait un amendement sur ce sujet si l'avant-projet de loi annoncé ne l'abordait pas. Par ailleurs, elle s'est étonnée de ce que ni les délégations aux droits des femmes du Parlement, ni l'Observatoire de la parité n'aient encore été consultés sur cet avant-projet de loi.
Faisant observer que les propositions de loi couvraient l'ensemble des élections, elle a constaté que la situation de la parité était satisfaisante dans les communes de plus de 3 500 habitants et dans les conseils régionaux, mais qu'il n'y avait que 12,4 % de femmes à l'Assemblée nationale. Elle a d'ailleurs exprimé ses doutes sur la possibilité, pour l'UMP, de dépasser l'objectif de 20 % de femmes élues à l'occasion des élections législatives de 2007.
Elle a estimé, en revanche, que les exécutifs des conseils municipaux et des conseils régionaux étaient encore loin de la parité et que seule une loi permettrait d'introduire la parité à ce niveau de responsabilité politique. Elle a également évoqué la situation des structures intercommunales, dans lesquelles les décisions de portée locale les plus importantes sont désormais prises, mais qui constituent le « dernier bastion » du pouvoir des hommes en politique, citant des cas où les femmes ne constituent que 3 % des représentants des communes.
a indiqué que la proposition de loi n° 51 rectifiée (2004-2005) de Mme Valérie Létard allait plus loin que les recommandations de l'Observatoire de la parité, qui revendique la parité seulement pour les adjoints au maire, mais non pour les conseillers municipaux bénéficiant de délégations. Elle s'est montrée dubitative sur le caractère réaliste de la mise en place de la parité dans les communes de moins de 3 500 habitants. Elle s'est réjouie de ce que cette proposition de loi prévoie un statut de l'élu, dont l'absence est surtout préjudiciable aux conseillers municipaux de base, et favorise la formation, tout en notant que celle-ci ne devait pas s'adresser uniquement aux femmes, mais concerner l'ensemble des conseillers municipaux.
S'agissant de la proposition de loi n° 147 (2004-2005) de Mme Gisèle Gautier, elle a estimé que, dans la pratique, l'introduction de la parité dans les instances exécutives des conseils régionaux (commission permanente et bureau) était souvent déjà réalisée.
et Muguette Dini ont alors précisé qu'il ne s'agissait aucunement d'une obligation juridique et que les fonctions exécutives régionales étaient souvent exercées par des hommes.
abordant la proposition de loi n° 226 (2004-2005) de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, s'est interrogée sur l'opportunité de modifier le mode de scrutin dans les communes de moins de 3 500 habitants en y introduisant la représentation proportionnelle assortie d'une prime majoritaire. Elle a considéré qu'un changement de mode de scrutin n'était pas nécessaire, mais qu'il conviendrait peut-être d'imposer une proportion de femmes candidates lorsque des listes sont déposées.
évoquant son expérience personnelle de maire d'une commune d'environ 700 habitants, a souligné la difficulté de trouver des candidates et s'est dès lors interrogée sur les conséquences que pourrait entraîner l'arrivée de femmes élues malgré elles, qui siégeraient au conseil municipal sans s'y investir. Elle a estimé qu'il existait là un risque de décrédibiliser les femmes en politique.
a indiqué que les femmes pressenties pour être candidates aux élections municipales subissaient souvent des pressions de leur mari, qui souhaitaient parfois les remplacer. Elle a également fait observer qu'il existait toujours des conseillers municipaux, hommes ou femmes, qui ne s'impliquaient pas dans les activités municipales.
a elle aussi noté que les maris étaient souvent réticents à l'idée que leurs femmes puissent s'engager dans un mandat électif. Elle a toutefois considéré qu'une femme s'investissant dans un mandat accomplissait un travail considérable et que ce constat rendait indispensable l'instauration d'un statut de l'élu.
a constaté que beaucoup de femmes élues dans un conseil municipal étaient souvent découragées de ne se voir confier aucune responsabilité.
a estimé que l'essentiel était de donner aux femmes la possibilité d'oser se présenter aux élections dans toutes les communes.
En ce qui concerne la proposition de loi n° 269 (2004-2005) de M. Jean-Louis Masson, Mme Marie-Jo Zimmermann a rappelé que le conseil général était l'assemblée où la présence des femmes était la plus faible. Elle a considéré que, pour améliorer cette situation, deux solutions étaient envisageables, la première consistant à instituer un « ticket paritaire » constitué d'un titulaire et d'un suppléant de sexe opposé. Elle a estimé que cette solution permettrait d'éviter l'organisation, coûteuse, de très nombreuses élections partielles, mais s'est interrogée sur le risque que les femmes ne restent cantonnées à la fonction de suppléant.
a cependant estimé que cette solution permettrait à un certain nombre de femmes d'accéder au mandat de conseiller général, constatant que celui-ci constituait le mandat le plus fréquemment abandonné en cas de cumul des mandats.
a ensuite évoqué la seconde solution consistant, comme le propose M. Jean-Louis Masson, à remplacer les cantons par des circonscriptions cantonales calquées sur les intercommunalités à fiscalité propre. Elle a en effet expliqué qu'il convenait d'engager une large réflexion sur la place respective du département et de l'intercommunalité, faisant observer que le conseil général ne reflétait pas la réalité de l'intercommunalité. Elle a suggéré que les conseils généraux soient élus, soit par scrutin de liste pour les cantons urbains, ce qui permettrait d'introduire la parité, soit par scrutin uninominal avec ticket paritaire pour les cantons ruraux.
Elle a estimé que la proposition de loi n° 323 (2004-2005) de Mme Gisèle Gautier tendant à accroître la place des femmes dans le collège électoral des sénateurs était très intéressante et que, d'une manière générale, les élections sénatoriales devraient également faire davantage de place aux femmes.
a précisé que la mise en oeuvre de cette proposition de loi aurait permis à 151 femmes déléguées supplémentaires de prendre part aux élections sénatoriales dans le département de la Loire-Atlantique.
Abordant plusieurs propositions de loi de M. Jean-Louis Masson, en particulier la proposition de loi n° 505 (2004-2005) qui tend à rétablir le scrutin proportionnel avec obligation de parité dans les départements élisant trois sénateurs, Mme Marie-Jo Zimmermann, a estimé que, si cette mesure n'était pas adoptée, le renouvellement de la série élue en 2001 risquait de se traduire par une diminution du nombre de femmes élues sénateur en 2011. Elle a vivement critiqué la réforme du mode de scrutin des élections sénatoriales intervenue sur ce point en juillet 2003 et a indiqué qu'elle ne ménagerait pas sa peine pour revenir au statu quo ante.
S'agissant de la proposition de loi n° 153 (2005-2006) de Mme Muguette Dini, elle a constaté qu'elle tendait à renforcer la parité dans l'ensemble des élections politiques et que sa principale disposition consistait à présenter au suffrage des électeurs un « ticket paritaire » pour les élections législatives. Notant le caractère original de cette proposition, qui permet de désigner le candidat dont le nom est conservé sur le plus grand nombre de bulletins comme titulaire et l'autre candidat comme suppléant, elle s'est toutefois interrogée sur les conséquences de sa mise en oeuvre effective, estimant que sa complexité comportait le risque d'un important contentieux électoral.
a considéré qu'un tel dispositif, qu'elle a qualifié de « parité offerte », lui paraissait la meilleure solution pour rendre la parité véritablement effective. Estimant qu'il ne semblait pas réaliste de modifier le mode de scrutin et de renforcer la parité de façon concomitante, elle a indiqué avoir opté pour la seconde branche de l'alternative.
En réponse à une interrogation de Mme Gisèle Gautier, présidente, Mme Marie-Jo Zimmermann a noté que s'il était envisageable d'instiller une dose de représentation proportionnelle dans le scrutin majoritaire pour les élections législatives, elle souhaitait le maintien du scrutin majoritaire dans la mesure où, contrairement à la représentation proportionnelle, il oblige le candidat à convaincre les électeurs de voter pour lui. Elle a néanmoins constaté que le panachage, qui est pratiqué dans les communes de moins de 3 500 habitants, était généralement apprécié par les électeurs.
a estimé que le candidat suppléant devait soutenir le candidat titulaire et que des problèmes risquaient d'apparaître si le titulaire et le suppléant se trouvaient en concurrence au cours de la campagne électorale.
a jugé qu'une réflexion d'ensemble sur le mode de scrutin appliqué lors les élections législatives était indispensable, notant également que certains partis politiques attirant de nombreux suffrages n'étaient actuellement pas représentés au Parlement.
a ajouté que la proposition qu'elle avait faite pour les élections législatives serait également applicable aux départements qui élisent deux sénateurs et moins, ainsi que lors des élections cantonales.
a estimé qu'il convenait de s'attacher prioritairement à faire respecter la législation en vigueur, en faisant observer que la constitution de listes séparées avait permis à certains candidats aux élections sénatoriales de contourner l'obligation de parité des listes.
a noté que certaines femmes politiques, face à ce type de pratiques, avaient pu constituer des listes séparées avec succès, ou bien encore refuser de démissionner de leur mandat après avoir été élues.
a, quant à elle, estimé anormal, de la part de certains candidats, de déroger aux règles édictées par leur parti en matière de parité politique et de continuer, néanmoins, de se prévaloir de l'appartenance à cette même formation politique.
Puis Mme Marie-Jo Zimmermann a souligné que, de manière générale, les partis politiques étaient les mieux à même d'assurer la mise en oeuvre de la parité politique. Elle a rappelé que le Président de la République avait manifesté avec fermeté sa volonté de faire appliquer l'article 4 de la Constitution. Puis elle a souligné l'anachronisme de la situation actuelle, en rappelant, notamment, la sous-représentation des femmes dans les assemblées parlementaires, alors que celles-ci constituent plus de 50 % du corps électoral.
a indiqué que semblaient par ailleurs avoir été évoquées l'idée d'un « bonus financier » pour les formations politiques respectueuses de la parité en politique, ainsi que la proposition, pour les élections municipales, d'un abaissement à 2 500 au lieu de 3 500 habitants du seuil d'application du scrutin de liste, avec alternance stricte des candidats de chaque sexe.
Elle a estimé que les propositions de loi dont la délégation était saisie ne pourraient vraisemblablement être discutées que sous forme d'amendements à un éventuel projet de loi qui pourrait être examiné, vraisemblablement selon une procédure d'urgence, au cours des prochains mois.
Interrogée par Mme Gisèle Printz, sur l'actualité des propositions formulées en 2005 par l'Observatoire de la parité en matière de parité politique, Mme Marie-Jo Zimmermann a précisé que, de son point de vue, la réflexion devrait évoluer afin de prendre en compte la nécessité de mieux articuler la configuration des cantons avec le périmètre des intercommunalités.
a insisté sur la nécessité de faire preuve de volontarisme pour promouvoir le statut de l'élu, qu'elle a considéré comme une priorité.
a cependant fait observer que la moyenne d'âge des conseillers municipaux étant relativement élevée (entre cinquante et soixante ans), les difficultés rencontrées pour trouver des candidatures féminines ne pouvaient s'expliquer uniquement par le problème de la conciliation de l'engagement politique avec la vie familiale et, notamment, l'éducation des jeunes enfants.
a évoqué des travaux de l'Observatoire de la parité, en cours d'élaboration, sur le profil des femmes élues, en soulignant l'importance de ne pas décourager les élues en ne leur confiant pas suffisamment de responsabilités, ce qui pouvait les conduire à préférer un engagement au sein des associations.
Elle s'est enfin félicitée du nombre important de propositions de loi déposées par des membres du Sénat en matière de parité politique, Mme Muguette Dini faisant néanmoins observer qu'un seul sénateur homme avait déposé des propositions de loi en la matière.