Usant du privilège du président d'âge, je commencerai par vous livrer quelques réflexions personnelles. La création de cette commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois me paraît tout à fait opportune. Nous sommes appelés - parfois jusqu'au harcèlement - à voter des lois à la hâte et nous passons d'un texte à l'autre sans avoir le loisir d'examiner s'ils sont tous adaptés à la situation, et si leur application ne pose pas problème.
Le Bureau du Sénat a décidé, le 16 novembre, de créer cette commission, composée de 39 membres désignés par le Sénat de manière à assurer une représentation proportionnelle des groupes et une représentation équilibrée des commissions permanentes. Son régime relève de l'Instruction générale du Bureau, dont le chapitre X bis précise que lors de la première réunion qui suit chaque renouvellement, la commission sénatoriale élit son président et les autres membres de son bureau en tenant compte de la représentation proportionnelle des groupes. La répartition des sièges a été communiquée par la direction de la législation et du contrôle aux secrétariats des groupes en vue de la présente réunion.
Notre ordre du jour appelle donc en premier lieu l'élection du président de la commission. L'alinéa 2 ter de l'article 13 du Règlement prévoit que cette élection se déroule au scrutin secret. Les deux plus jeunes commissaires présents procèdent dépouillement. La majorité absolue des suffrages exprimés est requise aux deux premiers tours, la majorité relative suffit au troisième tour.
J'ai d'ores et déjà reçu la candidature de M. David Assouline.
Je comptais vous la présenter au nom des groupes de la majorité sénatoriale, mais vous m'avez devancé...
S'il n'y a pas d'autres candidatures et si vous n'avez pas d'objections, je vous propose de voter à main levée. (Assentiment)
M. David Assouline est élu président de la commission, les commissaires des groupes UCR et UMP s'abstenant.
- Présidence de M. David Assouline, président -
Applaudissements à gauche) M. Jean-Jacques Hyest souhaitant s'exprimer, je lui cède immédiatement la parole.
Je tenais à rappeler que toutes les commissions permanentes s'occupent de contrôle et d'évaluation. A la commission des lois, nous vérifions naturellement que les décrets d'application des lois paraissent en temps voulu, mais nous évaluons aussi les effets des textes votés, en proposant le cas échéant des modifications.
Je note également que cette commission a été créée par l'Instruction générale du Bureau et non par le Règlement du Sénat : la Constitution limite, en effet, le nombre des commissions parlementaires. Souvenez-vous de la révision constitutionnelle de 2008 : la transformation en commission de l'ancienne délégation aux affaires européennes avait fait débat.
Nous aurons l'occasion de discuter de la nature et du rôle de notre commission. Pour l'heure, je souhaite vous remercier de votre confiance : je ferai tout pour en être digne, et pour faire rayonner cette commission. Merci aussi à M. François Trucy de nous avoir fait l'honneur de présider le début de cette première séance.
Il nous faut à présent désigner les autres membres du bureau, et d'abord les vice-présidents. Le chapitre X bis de l'Instruction générale du Bureau requiert de tenir compte de la représentation proportionnelle des groupes, sans autre précision. Je vous propose de retenir les règles applicables aux six commissions permanentes ainsi qu'à la commission des affaires européennes, fixées à l'article 13 du Règlement du Sénat. Le bureau de notre commission comportera donc, outre le président, treize membres dont dix vice-présidents et trois secrétaires. Le groupe socialiste-EELV comptera trois vice-présidents, le groupe UMP quatre, les groupes CRC, UCR et RDSE un chacun. Les secrétariats des groupes m'ont communiqué les candidatures suivantes : pour le groupe socialiste-EELV, Mme Claire-Lise Campion et MM. Claude Dilain et Gaëtan Gorce ; pour le groupe UMP, M. Philippe Bas, Mme Isabelle Debré, MM. Ambroise Dupont et Louis Nègre ; pour l'UCR, Mme Muguette Dini ; pour le groupe CRC, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ; pour le RDSE, Mme Anne-Marie Escoffier. S'il n'y a pas d'autres candidats, je vous propose de voter à main levée. (Assentiment)
Mme Claire-Lise Campion, MM. Claude Dilain, Gaëtan Gorce, Philippe Bas, Mme Isabelle Debré, MM. Ambroise Dupont et Louis Nègre, Mmes Muguette Dini, Nicole Borvo Cohen-Seat et Anne-Marie Escoffier sont élus vice-présidents.
En vertu du principe de proportionnalité, les trois postes de secrétaire se répartissent de la manière suivante : deux pour le groupe socialiste-EELV et un pour le groupe UMP. J'ai reçu les candidatures de Mme Corinne Bouchoux, MM. Luc Carvounas et Yann Gaillard.
Je suis heureux que mon groupe ait pensé à moi.
Mme Corinne Bouchoux et MM. Luc Carvounas et Yann Gaillard sont élus secrétaires.
Nous aurions pu avoir dès aujourd'hui un premier échange de vues sur l'avenir de notre commission, mais puisque nous sommes appelés en séance par le vote du projet de loi de finances, je vous propose d'attendre notre prochaine réunion, le jeudi 15 décembre.
Je me contenterai de vous dire en quelques mots dans quel état d'esprit je souhaite présider cette commission. Sa création est un acte parlementaire fort et novateur. Elle répond à une conception ambitieuse du rôle des assemblées législatives qui n'est pas seulement de voter les lois ou d'évaluer les politiques publiques, mais d'agir concrètement sur la vie de nos concitoyens. Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, le Parlement est expressément chargé de contrôler l'action du Gouvernement. Or l'arrêté du Bureau du 16 novembre 2011 confie à notre commission un double rôle : informer le Sénat sur la mise en oeuvre des lois ; assurer une veille normative sur la publication des textes règlementaires nécessaires à l'application des lois.
Notre commission disposera pour cela de larges pouvoirs : elle établira des rapports comportant des recommandations, présentera un rapport public annuel dressant un bilan complet de ses activités, elle pourra demander l'organisation de débats en séance publique et même bénéficier des prérogatives d'une commission d'enquête et des règles financières applicables aux commissions permanentes.
Mais nous ne réussirons que si nous travaillons en synergie avec les autres commissions permanentes. Nous ne partons pas de rien : comme l'a rappelé M. Jean-Jacques Hyest, chaque commission effectue, dans son domaine de compétences, un relevé minutieux des mesures d'application, synthétisé dans un rapport annuel. Ce recensement quantitatif est indispensable, mais doit être mis au service d'un travail qualitatif. Il faudra nous appuyer sur l'expertise des commissions permanentes pour analyser les retards, lacunes et difficultés de toute nature dans l'application concrète des textes que nous adoptons.
En amont, lorsque nous légiférons, nous devrons nous interroger sur les conséquences pratiques de telle ou telle disposition, ses modalités d'application, et pas seulement sur les objectifs poursuivis. Les études d'impact sont utiles, mais ne suffisent pas. En aval, il faudra veiller à la bonne application des textes. M. le Premier ministre a fixé à six mois le délai normal entre le vote d'une loi et la publication des décrets ; je salue les efforts de M. Patrick Ollier, ministre chargé des relations avec le Parlement, qui, depuis peu, réunit chaque semaine les directeurs de cabinet des ministres pour faire le point sur l'application des lois. Peut-être l'annonce de la création de notre commission a-t-elle servi d'aiguillon...
Pour qu'une loi soit correctement appliquée, il ne suffit pas que les décrets paraissent : il y faut aussi des moyens humains, financiers et institutionnels. Lorsque nous assignons à nos concitoyens des droits et des devoirs, nous devons nous assurer de leur effectivité. Il y va de légitimité de la loi, de la reconnaissance du Parlement, de la crédibilité du politique, autrement dit du bon fonctionnement de la démocratie.
Nous discuterons la semaine prochaine de nos méthodes de travail. Certains s'interrogent sur la nature exacte de cette nouvelle commission. A nous de démontrer son utilité par notre travail. Il sera temps alors de rouvrir les débats institutionnels. Je proposerai aux commissions permanentes de faire savoir très rapidement quelles lois elles veulent soumettre à notre attention. Ainsi nous pourrons nouer d'emblée avec elles des liens étroits. Sur chaque sujet seront désignés un ou deux rapporteurs. Nous procéderons à des auditions, éventuellement publiques. Je souhaite que, lors de la semaine sénatoriale de contrôle, notre commission demande l'organisation de débats en séance publique : ce sera l'un des horizons de notre travail. Nous ferons d'ici le mois de juillet le bilan du travail accompli : nous aurons alors démontré notre utilité, et pourrons passer à une autre vitesse.
Chaque commission permanente continuera à recenser les textes réglementaires publiés dans les domaines de sa compétence. Notre commission remettra en janvier le rapport d'ensemble à la Conférence des Présidents, et je demanderai qu'il soit débattu en séance au mois de février.
Chers collègues, c'est en marchant que nous ferons une partie du chemin. Je suis animé par l'enthousiasme du pionnier, et je mettrai toute mon énergie au service de notre réussite. Dans le contrôle de l'exécutif, le Parlement français est en retard, notamment sur les parlements anglo-saxons. Il est temps de redresser la barre.
Comme premier président de cette nouvelle commission, c'est avec l'enthousiasme d'innover pour renforcer le rôle du Parlement et la volonté d'approfondir le travail législatif au service direct de la vie de nos concitoyens, que j'honorerai la mission que vous m'avez confiée.
Je vous donne rendez-vous jeudi 15 décembre. Les membres du bureau sont conviés à 9 h 15 en salle 263 - à partir du mois de janvier, la commission aura de nouveaux locaux - puis la commission se réunira à 10 heures, dans la même salle, pour dresser un plan de travail et attribuer les premiers rapports.