Mission commune d'information sur les conséquences de la tempête Xynthia

Réunion du 28 avril 2010 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • PPR
  • barnier
  • digue
  • inondation
  • noire
  • phénomène
  • renforcement
  • submersion
  • submersion marine

La réunion

Source

La mission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Gérard Andreck et Mme Catherine Traca, président et secrétaire générale adjointe du groupement des entreprises mutuelles d'assurances (GEMA).

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'est interrogé sur l'existence de nouvelles données relatives au nombre de sinistres résultant de la tempête Xynthia ainsi qu'à leur coût, suite aux annonces faites le 8 avril dernier par M. Bernard Spitz, président de la fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), lors de son audition par la mission. Ce coût était ainsi évalué à 1,5 milliard d'euros.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

a confirmé cette estimation. Il a toutefois précisé que le nombre total de déclarations de sinistres provoqués par la tempête Xynthia serait plutôt de l'ordre de 400 000 et non de 500 000 comme annoncé précédemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En réponse à une question de M. Bruno Retailleau, président, il a indiqué que le délai pour la transmission de dossiers de sinistrés, exceptionnellement rallongé du 5 au 31 mars 2010, fait l'objet d'une interprétation très souple puisque les sociétés d'assurance continuent d'accepter de nouvelles demandes d'indemnisation.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a confirmé l'inapplication de coefficients de vétusté dans le cas des biens immobiliers situés dans les zones noires. S'agissant des biens mobiliers, ce seront les clauses des contrats qui permettront de déterminer les règles d'indemnisation. Elle a toutefois précisé qu'une part croissante des contrats prévoit un remboursement égal à la valeur de remplacement à neuf des biens.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, Mme Catherine Traca a ensuite fait état de difficultés à établir la valeur moyenne du coût des sinistres provoqués par la tempête Xynthia. Elle a cependant indiqué la référence d'une indemnisation moyenne de 1 000 euros par assuré s'agissant des dommages faisant suite à une tempête. Ce précédent n'apparaît pas suffisant pour déterminer l'indemnisation moyenne des victimes de Xynthia.

a souhaité connaître les délais d'indemnisation envisagés par les sociétés d'assurance.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

a souligné l'existence de deux cas de figure distincts :

- pour les sinistres d'une valeur inférieure à 2 000 euros, le délai de moins de trois mois sera de rigueur, dans la mesure où les expertises ne posent pas de difficultés ;

- les sinistres d'un montant plus important nécessiteront des expertises plus longues, qui auront des conséquences certaines sur les délais d'indemnisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a fait part des interrogations des sinistrés sur le nombre d'expertises nécessaires ainsi que sur la demande de production de factures dans certains cas. Ces deux éléments pourraient être de nature à ralentir les procédures d'indemnisation.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

a observé que les premières visites d'experts étaient justifiées pour distinguer rapidement les sinistres d'une valeur inférieure à 2 000 euros des autres dossiers : il s'agissait surtout d'effectuer un premier tri dans les dossiers. De plus, de nouvelles visites sont nécessaires puisque l'indemnisation des biens immobiliers doit s'accompagner d'une expertise spécifique, en recourant le cas échéant à des architectes.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

est convenue que des factures et des devis, y compris dans les zones noires, avaient été demandés dans les jours qui ont suivi la tempête. Les zones noires n'ayant pas encore été annoncées, les sociétés d'assurance ont en effet appliqué les règles en vigueur. La production de tels documents n'apparaît plus nécessaire, ce qui devrait accélérer les procédures d'indemnisation.

Le calendrier devrait être le suivant : avant la fin du mois de mai 2010, l'ensemble des habitations classées en zones noires utilisées en tant que résidence principale doit avoir été expertisé. Les autres habitations, y compris les résidences secondaires, et l'ensemble des biens mobiliers seront, pour leur part, expertisés d'ici à la fin du mois d'août 2010.

a souligné la rapidité avec laquelle les sociétés d'assurance indemnisent dès lors que les sinistrés sont favorables aux propositions faites par celles-ci. Ainsi, dans un délai de quinze jours après la transmission des informations par les experts, les assureurs sont en mesure de formuler leurs offres. Si ces dernières font l'objet d'un accord, le paiement peut être effectué sans délai.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

a précisé qu'à côté des zones noires les autres dossiers feront également l'objet d'un traitement accéléré. Il a observé qu'au 16 avril 2010, 40 000 habitations ont déjà été expertisées, sur un total de 58 000.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

s'est interrogé sur la présence dans les zones noires de maisons n'ayant pas enregistré de dégâts.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a reconnu l'existence de telles situations et précisé que, pour ces cas précis, les sociétés d'assurance n'ont pas vocation à intervenir. Ces habitations seront en revanche l'objet de visites par les Domaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a souhaité connaître le régime fiscal des indemnités versées par les assurances.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a observé que ces sommes échappent à la fiscalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

a souhaité connaître l'état des indemnisations concernant les exploitations agricoles, ostréicoles et conchylicoles.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a indiqué que les sociétés adhérentes du GEMA sont principalement liées aux sinistrés par des contrats d'habitation : elles ne traitent donc que très marginalement des professionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'est interrogé sur les zones noires, l'évolution de leur dénomination et leur cadre juridique.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

est convenu de l'absence de base juridique claire pour ce zonage. Il a déploré que les variations dans les déclarations successives des membres du Gouvernement aient pu susciter de plus grandes interrogations chez les sinistrés, voire accroître leurs inquiétudes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a observé que l'indemnisation des habitations classées en zone noire conduirait à un versement par les assurances privées, d'une part, et par l'Etat via le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), ou fonds « Barnier », d'autre part. Il a souhaité savoir si l'évaluation par les Domaines serait postérieure à la fixation des indemnités par les sociétés d'assurance.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a confirmé le recours à ces deux instruments d'indemnisation. Elle a ensuite précisé que le travail des assureurs est conduit indépendamment de l'évaluation objective par les Domaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, qui a souhaité connaître la part prise en charge par les assureurs au sein d'une indemnisation moyenne estimée à 250.000 euros, Mme Catherine Traca a indiqué que le montant moyen pour une remise en état ou une reconstruction suite à une inondation s'élève à 20.000 euros. Elle a observé que l'indemnisation par l'Etat sera bien plus élevée puisqu'elle portera sur l'intégralité de la valeur vénale du bien immobilier, y compris son terrain.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

s'est félicité de l'existence du régime « catastrophes naturelles » (catnat), dispositif efficace qui permet d'associer les assurances privées à un mécanisme de réassurance publique avec la garantie de l'Etat. Il a estimé peu utile le débat sur l'estimation des indemnisations par habitation dans les zones noires dans la mesure où cette indemnisation couvrira la valeur totale du bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'est interrogé sur le degré de sollicitation du fonds Barnier, qui traduit le recours à la solidarité nationale.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a observé que les assureurs conduisent ce travail en relation avec les préfectures de Vendée et de Charente-Maritime, mais que le montant des indemnisations par les assureurs ne serait connu qu'à la fin du mois de mai pour les résidences principales et à la fin du mois d'août pour les résidences secondaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Merceron

s'est interrogé sur l'existence de freins aux procédures d'indemnisation.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

n'a pas relevé de blocage en cette matière. A l'inverse, les factures et devis ne sont pas exigés, de manière à accélérer les délais d'indemnisation. En outre, elle a précisé que les sinistrés conserveront la possibilité de contester les propositions faites par les sociétés d'assurance.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, elle a relevé le caractère provisoire des arrêtés de péril. Ceux-ci présentent l'intérêt d'empêcher à ce stade le retour des sinistrés dans les habitations classées en zone noire, mais il convient d'observer que ces mesures ne conduisent pas à interrompre les procédures d'indemnisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

a souligné la difficulté à solliciter le fonds Barnier à hauteur de 300 millions d'euros au minimum, alors que les réserves disponibles ne sont pas de cet ordre de grandeur.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

a rappelé le mode de financement du fonds, qui conduit à dégager un produit d'environ 150 millions d'euros par an. Une telle somme peut donc être utilisée pour les indemnisations à la condition qu'elle soit étalée sur plusieurs années. Il a déploré que l'usage du fonds se destine parfois à des fins plus contestables, telles que des études. Il a plaidé pour un accroissement des mises en réserve vouées à l'indemnisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a fait état d'une réserve de trésorerie du fonds estimée à 80 millions d'euros environ. Il a indiqué que l'examen du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, dit « Grenelle II », est l'occasion d'une adaptation du cadre législatif du fonds Barnier. Il doit ainsi s'agir de prévoir son intervention pour les cas de submersion marine et de relever son plafond en matière d'indemnisation.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a rappelé que le fonds Barnier a été mis en place pour l'indemnisation de personnes soumises à des risques naturels graves, tels que le risque d'éboulement du massif de la Séchilienne. Différents aménagements législatifs ont ensuite conduit à élargir progressivement les missions de ce fonds.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'est interrogé sur l'opportunité de prévoir la constitution de réserves obligatoires pour le fonds Barnier, selon un ratio à déterminer. Il a ensuite abordé la question du régime « catnat », en faisant part de l'existence de différentes propositions de réforme.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

s'est félicité du modèle français d'assurance des catastrophes naturelles. Ce dernier représente l'un des systèmes les plus performants au monde. Il bénéficie en effet d'une large mutualisation, d'une présence dans la plupart des contrats d'assurance et de la garantie de l'Etat via la Caisse centrale de réassurance (CCR). Ce modèle pourrait toutefois être amélioré sur deux points : l'indemnisation des victimes de sécheresse et les procédures de zonage, notamment les zones d'expansion des crues. Les plans de prévention des risques constituent en revanche la principale faiblesse du régime actuel sur laquelle les pouvoirs publics doivent agir prioritairement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'est interrogé sur les intentions des assureurs quant à leur participation au débat public sur l'amélioration des régimes d'assurance.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

a fait part de la volonté affirmée des sociétés d'assurance de contribuer à l'ensemble des réflexions en cours, y compris s'agissant des franchises.

Debut de section - Permalien
Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

a pour sa part exprimé son désaccord pour ce qui concerne la modulation des primes d'assurance en fonction du niveau de risque de la zone considérée. Elle a plaidé pour une conservation d'un mécanisme de solidarité et relevé le caractère modeste de la surprime induite par la tempête Xynthia, de l'ordre de deux à trois euros par contrat d'habitation. Le dispositif existant n'empêche pas la responsabilisation des assurés. Il appelle surtout un renforcement des politiques de prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a observé le montant relativement conséquent des franchises : 380 euros pour les habitations, les véhicules à moteur et les autres biens à usage privé, d'une part, et 10 % du montant des dommages avec un minimum de 1.140 euros pour les biens à usage professionnel, sachant que les contrats peuvent prévoir une franchise supérieure. En outre, il s'est interrogé sur les limites de la culture du risque en France et sur les perspectives envisageables en matière de prévention.

Debut de section - Permalien
Gérard Andreck, président du GEMA

En conclusion, M. Gérard Andreck, président du GEMA, a rappelé qu'environ 90 % des sinistrés seraient indemnisés dans le cadre de leur contrat d'assurance de droit commun. En effet, seuls 10 % des dossiers devraient relever du régime « catnat ». Il a souligné que l'aggravation prévisible des catastrophes naturelles, tant dans leur ampleur que dans leur fréquence, plaide pour des réponses adaptées, à l'instar de politiques de prévention plus ambitieuses.

La mission a ensuite procédé à l'audition de Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a d'abord dressé un bilan des actions menées par les gouvernements successifs en termes de prévention des inondations, citant la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, dite « loi Barnier », ainsi que la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, dite « loi Bachelot ». Elle a également évoqué les débats sur les submersions marines dans le « Grenelle de la mer » ainsi que l'actuelle transposition de la directive européenne sur les inondations dans le projet de loi portant engagement national pour l'environnement.

Elle a ensuite rappelé le lancement, en 1995, des plans de préventions des risques naturels (PPRN), tendant à limiter l'urbanisation en zones à risques et à l'encadrer dans des zones de moindre risque. 7 750 communes avaient un tel PPR approuvé fin 2009, dont 6 600 pour le risque inondations. Par ailleurs, a-t-elle poursuivi, la prévision et l'alerte ont été renforcées avec l'instauration, depuis une dizaine d'années, de la vigilance météo, de la vigilance pluie-inondations et de la surveillance et la prévision des crues sur 20 000 km de cours d'eau, des travaux étant en cours depuis 2009 sur la submersion marine.

Les ressources financières, en particulier celles du fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », ont été renforcées, tandis qu'une cinquantaine de plans d'actions de prévention des risques d'inondations (PAPI) et cinq plans « grands fleuves » ont concouru, entre autres, au renforcement des digues. Dans certaines zones à très fort risque de crue rapide, la délocalisation d'habitations, voire d'activités excessivement exposées ont été financées.

Restent cependant, a reconnu Mme Chantal Jouanno, certains points de faiblesse à traiter :

- les PPR sont contestés, étant accusés soit de trop contraindre le développement des territoires, soit de ne pas être totalement pertinents au regard du degré d'aléa retenu. L'adoption de nombre d'entre eux reste par ailleurs enlisée dans des procédures trop longues et complexes ;

- il convient de progresser pour intégrer en amont prévention des risques et organisation du territoire, par exemple au niveau des schémas de cohérence territoriale (SCOT) et des plans locaux d'urbanisme (PLU) ;

- le lien entre la surveillance des phénomènes, l'alerte et la gestion de la crise doit être renforcé, tout comme la performance des dispositifs, la capacité à couvrir un maximum de territoires à risques et l'aptitude à prendre en compte l'ensemble des phénomènes, qu'il s'agisse de submersion marine comme de ruissellement urbain ou rural ;

- 48 PAPI ont été conventionnés entre les collectivités locales et l'Etat depuis 2003, pour un total de 900 millions d'euros, dont un tiers pris en charge par l'Etat et deux tiers par les collectivités locales. Il convient à présent pour certains de dépasser la phase d'études et de lancer les travaux ;

- le renforcement et la gestion des digues doivent être revus. Nombre d'entre elles sont sans responsable actif, voire identifié, ce qui inévitablement retentit sur leur état. Les responsables privés ou publics ne sont pas forcément à la hauteur des enjeux techniques et financiers induits. Dans le même temps, les collectivités qui se lancent dans l'entretien des digues, par exemple sous forme de syndicats mixtes, s'interrogent sur leurs responsabilités à la fois financières et pénales, alors même qu'elles prennent une compétence non obligatoire.

Les 250 km de digues appartenant à l'Etat méritent d'être confortés en priorité ;

- si d'importantes avancées ont été enregistrées sur les crues fluviales, le bilan est moins bon sur les risques de submersion marine. Ainsi, sur 864 communes littorales, seuls 46 PPR ont été approuvés et 71 prescrits.

a appelé à développer des actions de terrain intégrant les sept piliers de la prévention : connaître les risques ; exercer la surveillance, la vigilance et alerte ; informer de façon préventive les citoyens ; aménager et urbaniser en intégrant le risque ; réduire la vulnérabilité ; préparer à la gestion de crise et intégrer le retour d'expérience. A cet égard, la transposition de la directive « inondations » implique tout à la fois d'identifier les territoires à risques importants, d'élaborer au niveau des grands bassins des plans de gestion des risques d'inondations et d'intégrer tous les types d'inondations, de la submersion marine au ruissellement urbain, en passant par les crues torrentielles ou de cours d'eau.

Evoquant ensuite les règles d'urbanisme et le droit des sols dans les zones dangereuses, Mme Chantal Jouanno a rappelé les objectifs fixés par le président de la République : arrêter de construire dans les zones à fort risque et réaliser les PPR inondations les plus importants d'ici trois ans. C'est dans cette optique que seront proposées, à l'occasion de l'examen du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, des modifications de la législation visant :

- à prévoir la définition par décret des grandes règles d'élaboration des PPR, notamment la détermination du niveau d'aléa, et des règles de constructibilité en fonction de l'ampleur du risque, de la nature urbanisée ou non de la zone et de l'existence de protections de qualité ;

- d'améliorer diverses procédures, comme le renforcement de la validité des PPR approuvés par anticipation et la simplification des processus de modification ;

- de réaffirmer la possibilité de limiter ou d'interdire les constructions dans les zones à risques, ainsi que l'impossibilité de tirer prétexte de l'existence d'ouvrages de protection pour construire dans des zones non urbanisées.

a par ailleurs souhaité améliorer la mise en oeuvre des mesures existantes, et ce par un renforcement des capacités de cartographie des territoires et des risques, mais aussi par une meilleure concertation avec les élus en vue de les inciter à introduire le plus en amont possible la prévention des risques dans les documents d'urbanisme. Elle a aussi souligné la nécessité d'une stratégie nationale de gestion du trait de côte, du fait notamment de la hausse prévisible du niveau de la mer, qui pourrait atteindre jusqu'à un mètre d'ici 2100, selon certains scénarios.

Elle a rapporté avoir demandé aux préfets et aux services déconcentrés, par une circulaire signée début avril, d'entamer les travaux sur le littoral en veillant à être intransigeants sur les constructions en zone à fort risque, y compris en l'absence de PPR ; d'identifier les territoires prioritaires nécessitant des PPR et de se préparer à les prescrire ; et d'évaluer les PPR prêts ou en voie de l'être et, s'ils sont de bonne qualité, de les appliquer par anticipation et de les mener rapidement au stade de l'enquête publique et à l'approbation. Elle a également dit avoir demandé aux 60 préfets n'ayant pas encore prescrit les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) qui les concernent de le faire dans les meilleurs délais, avec pour objectif l'intégralité des PPRT prescrits d'ici fin 2010. Seront diffusées par ailleurs des cartes des zones basses, tandis que la connaissance fine de la topographie du littoral sera renforcée.

S'agissant ensuite du plan de reconstruction et de renforcement des défenses contre la mer, Mme Chantal Jouanno en a rappelé les grands objectifs :

- renforcer les digues dans la durée, par rapport à leur destination actuelle. Ainsi, une digue n'ayant pas pour objet de protéger des zones occupées par des activités humaines ne pourra changer de destination ;

- prendre en compte, sauf exception dûment justifiée, le niveau de protection actuel visé par la digue qui, s'il est rehaussé au regard des enjeux à protéger, ne devra pas servir à augmenter l'exposition aux risques des populations ;

- ne pas créer de nouvelles digues destinées à ouvrir à l'urbanisation des zones exposées à un risque important ou perturbant l'expansion des crues ;

- interdire les constructions nouvelles derrière les digues dans les zones d'aléa fort, sauf certains bâtiments spécifiques et sauf les exceptions prévues par la future réglementation des PPR ;

- abandonner les digues protégeant des enjeux faibles ou bien se trouvant en déshérence ;

- inscrire le renforcement des digues dans une vision globale de la prévention du risque inondations, du type des PAPI ;

- renforcer les moyens de contrôle du respect de la réglementation relative à la sécurité des ouvrages ;

- prendre en considération les digues tant fluviales que maritimes ;

- créer les conditions de l'émergence et de la pérennité d'une maîtrise d'ouvrage compétente techniquement, solide financièrement et ayant les moyens de s'engager dans la durée.

Sur ce dernier point, a indiqué Mme Chantal Jouanno, des questions complexes restent à traiter, comme le caractère facultatif ou obligatoire de la compétence, son niveau communal ou départemental, la possibilité de lever une ressource pérenne et, enfin, l'appui de l'Etat au titre de la solidarité nationale et au regard de l'ampleur de l'enjeu. Aussi ce sujet sera t-il articulé avec la réforme des collectivités territoriales, en concertation avec la représentation nationale.

Sur le volet incitatif en revanche, des amendements seront examinés en urgence, s'agissant :

- d'élever le taux d'intervention du fonds Barnier, aujourd'hui au plus de 25 %, à 40 % si besoin, dans les communes couvertes par un PPR approuvé. Le FEDER pourra le compléter jusqu'à 50 %, cette demande devant être défendue au plus haut niveau communautaire ;

- de donner une compétence facultative aux communes et conseils généraux.

Puis elle a indiqué que sur 7 500 à 8 000 km de digues, 3 500 à 4 000 sont à conforter, pour un coût de l'ordre de 3,5 à 4 milliards d'euros. L'Etat doit, a-t-elle estimé, renforcer assez vite 250 km de digues fluviales, et mieux cerner les digues maritimes qui sont sous sa responsabilité. Le schéma théorique pourrait être, avec les ressources actuelles auxquelles serait adjoint un complément de l'ordre de 500 à 600 millions d'euros :

- 250 millions d'euros pour les digues d'Etat ;

- 550 millions d'euros d'aides aux collectivités.

Il conviendra de mobiliser des aides du Feder, en vue de lancer le renforcement de 1 600 km de digues prioritaires sur six ans, puis 150 à 175 km par an selon un programme s'étendant sur 18 à 20 ans.

a enfin souhaité augmenter les moyens humains dans les services de contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques, digues et barrages. Ceux-ci sont passés de 20 équivalents temps plein (ETP) à 60 en deux ans, chiffre qu'il faudrait porter à 110 ou 120. Un renforcement des moyens sera par ailleurs également requis pour accélérer les PPR et améliorer la prévision des crues.

Au final, Mme Chantal Jouanno a rappelé qu'il conviendrait de veiller à ne pas suivre une politique du « tout digue », mais au contraire à combiner différents moyens de prévention et protection, ainsi qu'à ne pas chercher à urbaniser derrière les digues restaurées.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Rappelant que le ministre d'État chargé de l'environnement, M. Jean-Louis Borloo, avait annoncé lors de sa venue en Charente-Maritime à la mi-avril que les « zones noires » feraient l'objet d'une relecture, M. Michel Doublet a regretté l'annonce, la veille, de nouvelles zones de ce type dans un climat très tendu, s'interrogeant sur la pertinence du classement dans cette catégorie de maisons n'ayant pas été inondées.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a indiqué que le classement en « zones noires » avait été réalisé très rapidement en vue d'offrir aux personnes démunies de logement du fait de la tempête la faculté de faire racheter leur maison par l'Etat et de financer ainsi une nouvelle acquisition immobilière. Le zonage ayant été fait de manière globale et homogène, il peut englober des propriétés ayant été épargnées par les inondations. Cependant, il fera l'objet d'un travail d'affinement à la parcelle par des experts pour déterminer plus précisément lesquelles des maisons seront appelées à être détruites, après enquête contradictoire et déclaration d'utilité publique, sous le contrôle du juge. Les zonages actuels n'ont certes pas de caractère juridique, seuls ceux découlant des procédures d'expropriation étant appelés à en être dotés.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

a déploré le manque d'information des élus et des populations à l'échelle locale et les effets dévastateurs sur l'opinion publique d'une communication qu'il a qualifiée de cacophonique. Puis il a interrogé la ministre sur le complément de financement des programmes de restauration des digues, l'Etat n'en prenant que la moitié à sa charge. Enfin, il a regretté les avis systématiquement réservés ou négatifs émis par les commissions des sites à l'encontre des projets de construction ou de renforcement de digues, qui bloquent ou retardent leur adoption et leur mise en oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

En réponse, Mme Chantal Jouanno a apporté les éléments de précision suivants :

- l'information a été délivrée par l'intermédiaire de la lettre de M. Jean-Louis Borloo aux maires, ainsi que par les délégués à la solidarité dépêchés sur le terrain ;

- l'intégralité des digues n'appartient pas à l'Etat. Il financera entièrement la restauration de celles dont il est propriétaire, portant pour les autres son soutien à 50 % du montant des travaux ;

- si le Gouvernement n'a pas été particulièrement alerté sur des problèmes liés aux commissions des sites, il reste ouvert à la réflexion sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

a souligné la contradiction du Gouvernement à souhaiter éviter tout mitage dans la détermination des « zones noires », tout en acceptant que celles-ci soient ensuite réétudiées afin éventuellement d'en extraire certaines parcelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a précisé que les « zones noires » avaient été définies de façon à ouvrir un droit à rachat suffisamment large et rapide. Elle a fait observer que le retrait du classement en « zones noires » de propriétés y figurant actuellement permettrait certes leur maintien, mais les fragiliserait davantage du fait de leur isolement et rendrait leur évacuation encore plus difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Tout en rappelant qu'il ne souhaitait absolument pas remettre en cause le classement en « zones noires » des parcelles affectées par un risque mortel, M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur le développement d'un mouvement de contestation chez les populations concernées résultant d'une incompréhension des mesures gouvernementales.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Remarquant que la perception du risque par la population se rapportait au vécu de chacun, qui pouvait être en décalage avec le risque réellement encouru, Mme Chantal Jouanno a insisté sur le danger intrinsèque aux « zones noires » et rappelé les critères présidant au classement : la hauteur d'eau, supérieure à un mètre ; sa vitesse d'écoulement ; la proximité d'un pied de digue ; le positionnement en cuvette et la possibilité d'installer des dispositifs de protection.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, qui souhaitait savoir si le périmètre des « zones noires » serait superposable à celui des zones soumises à enquête d'utilité publique, Mme Chantal Jouanno a tout d'abord rappelé que ces zones étaient affectées d'un risque mortel. Elle a précisé que l'intégralité desdites zones ne figurerait pas dans le périmètre des zones soumises à enquête publique dans la mesure où la détermination de ces dernières serait précédée d'une étude détaillée préalable permettant d'affiner les parcelles situées en « zones noires ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

a souhaité savoir si des maisons à étages pourraient tout de même être classées en « zones noires ». Observant qu'une étude au cas par cas risquait d'entraîner des comparaisons et discussions sans fin, il a souligné la persistance d'une variable inconnue liée au degré de risque. Enfin, il a appelé à ce qu'interviennent rapidement les premières estimations immobilières et rachats subséquents, afin d'infléchir l'opinion publique dans un sens plus favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a indiqué qu'une trentaine d'évaluateurs avait été dépêchée sur le terrain par l'administration, avec pour consigne d'opérer rapidement en veillant à donner la priorité aux résidences principales.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a alors apporté les précisions suivantes sur ce point :

- 34 évaluations sont en cours en Charente-Maritime et 76 en Vendée, la fin de la procédure y étant attendue pour respectivement la mi-juin et la fin mai ;

- 22 millions d'euros ont été délégués à cet effet dans le cadre du « fonds Barnier » ;

- le fait pour une maison en « zone noire » de posséder un étage n'est pas en soi un élément de protection, mais le devient en « zone jaune » ;

- il convient de prendre également en compte la qualité des constructions.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a noté que le fonds Barnier était plafonné à 60 000 euros par dossier et ne prenait pas en compte le risque de submersion marine. Il s'est par ailleurs interrogé sur l'opportunité de modifier son régime pour que le bilan entre le coût d'une expropriation et celui de mesures de protection alternatives ne soit plus le principal élément pris en compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a souligné que la procédure d'expropriation était une mesure ultime. Elle a par ailleurs rappelé que le Gouvernement souhaitait faire adopter, lors de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, deux amendements tendant respectivement à étendre le « fonds Barnier » au risque de submersion et à définir par décret l'aléa de référence pris en compte dans les PPR. Elle a ajouté que le plafond du « fonds Barnier » avait été porté par arrêté de 60 000 à 240 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Répondant à M. Bruno Retailleau, président, Mme Chantal Jouanno a indiqué que le Gouvernement souhaitait aller vite, et clore la phase d'expertise préalable d'ici la fin de l'été.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Merceron

Répondant ensuite à M. Jean-Claude Merceron, qui regrettait par ailleurs que le Sénat ne puisse se prononcer sur les modifications introduites dans le projet de loi portant engagement national pour l'environnement, Mme Chantal Jouanno a annoncé que les amendements du Gouvernement sur ce texte, qui avaient un caractère d'urgence, étaient d'ores et déjà consultables. Précisant que le Gouvernement consultait le Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, elle a ajouté que les adaptations de fond de la législation pourraient faire l'objet ultérieurement d'une proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a convenu de la nécessité d'utiliser rapidement un véhicule législatif pour les mesures les plus urgentes, soit le projet de loi portant engagement national pour l'environnement, dont la commission mixte paritaire est prévue pour le 16 juin. En revanche, il a insisté sur la volonté de la Haute assemblée d'examiner les mesures dépourvues de caractère d'urgence, et s'est enquis de savoir si un amendement imposerait des délais pour l'adoption des PPR.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a rappelé les cinq mesures portées par les amendements du Gouvernement dans le projet de loi, et précisé que n'y figurait pas la question des délais d'adoption des PPR.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'étant inquiété de ce que le « fonds Barnier » ne permette pas de financer à la fois l'indemnisation des victimes de la tempête et les programmes de renforcement des digues, Mme Chantal Jouanno a rappelé que ce fonds disposait, au début de l'année, d'un reliquat de 75 millions d'euros, que l'Etat pourrait l'abonder et, en tout état de cause, que des ressources nouvelles resteraient à dégager, principalement pour le financement des digues.

l'ayant interrogée sur les facteurs humains de responsabilité auxquels faisait allusion le président de la République dans le discours qu'il a prononcé suite à la tempête Xynthia, Mme Chantal Jouanno a évoqué des responsabilités diffuses et partagées découlant de constructions dans les zones à risque. Se félicitant du bon fonctionnement du dispositif de prévision et d'alerte, elle a noté que l'expérience de la tempête de 1999 avait permis de mieux se préparer et que le processus d'apprentissage était continuel.

Convenant avec M. Bruno Retailleau, président, qu'il s'agissait davantage d'un problème lié davantage à l'application des normes qu'à leur contenu, Mme Chantal Jouanno a répondu à ce dernier, qui l'interrogeait sur le conflit d'intérêt relevé par la mission en Charente-Maritime pour la construction ou le renforcement de digues entre sécurisation des personnes d'un côté, et préservation de l'environnement de l'autre, que le principe de sécurité primait systématiquement. Estimant que le droit de l'environnement n'empêchait en rien l'entretien des digues existantes, elle a convenu qu'il pouvait s'opposer à la construction de nouveaux ouvrages de protection, surtout s'ils avaient pour but de protéger des opérations immobilières de nature spéculative.

ayant attiré son attention sur les problèmes de gouvernance liés à la multiplicité des propriétaires de digues, Mme Chantal Jouanno a dit attendre les conclusions de la mission travaillant actuellement sur le sujet.

Rapportant l'hostilité des propriétaires privés des digues à leur transmission à un opérateur public centralisé, M. Bruno Retailleau, président, s'est prononcé en faveur d'une gestion de proximité, faisant remarquer que l'Etat n'aurait pas les moyens d'entretenir des centaines de kilomètres d'ouvrages.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

s'est dite ouverte sur la question, pointant les difficultés d'ingénierie existant en ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Jugeant que cette dernière pouvait être mutualisée, M. Bruno Retailleau, président, a préconisé une meilleure prise en compte du trait côtier et du cordon dunaire, faisant état du recul de 5 à 22 mètres de ce dernier relevé par le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM).

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a indiqué que ces problématiques, étroitement liées, étaient au coeur du « Grenelle de la mer ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Anticipant une montée du niveau de la mer de 20 à 50 cm d'ici cinquante ans, et faisant état d'un tassement des digues existantes, M. Bruno Retailleau, président, a interrogé la ministre sur l'opportunité d'un rehaussement de ces dernières.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

s'y est montrée favorable, s'agissant de la protection du bâti existant, estimant en revanche que la préservation des activités économiques, par exemple ostréicoles, n'était pas prioritaire. Elle a par ailleurs fait observer que le risque résultant d'une surverse était d'autant plus grand que la digue était haute.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Notant que le financement de la restauration des digues était facilement assuré lorsque l'Etat en prenait en charge une moitié, M. Bruno Retailleau, président, s'est inquiété de savoir si celui-ci continuerait de s'engager ainsi dans la durée.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a indiqué que l'amendement portant l'intervention du « fonds Barnier » à 50 % des dossiers était dépourvu de date-butoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'étant dit sceptique sur la capacité du « fonds Barnier » à porter durablement le financement des opérations de restauration attendues, Mme Chantal Jouanno a estimé celui-ci opérationnel pour les deux prochaines années, tout en reconnaissant la nécessité d'un complément de financement à hauteur de 500 ou 600 millions d'euros pour le « plan digues ». Elle a par ailleurs confirmé le soutien de l'Etat à hauteur de 50 %, sans qu'il soit restreint aux travaux d'urgence.

Convenant à son tour du bon fonctionnement global du dispositif d'alerte, M. Bruno Retailleau, président, a toutefois noté une carence, dans la modélisation de la tempête, s'agissant de son impact sur les côtes.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

a souligné les importants progrès réalisés en matière de prévision, notamment dans l'évaluation du niveau des vagues en mer. Elle a reconnu que des progrès restaient à réaliser dans leur modélisation sur terre, du fait de la difficulté à prendre en compte la topographie des sites. Il s'agit là d'un sujet de recherche actuel, qui rejoint les travaux menés sur l'impact d'un tsunami en Méditerranée, et qu'il faudra croiser avec ceux réalisés sur les crues des principaux fleuves français. Les éléments de faiblesse concernent aujourd'hui la modélisation des crues sur les fleuves moins importants, ainsi que la submersion marine dans les zones littorales basses.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

a relevé l'existence d'un dispositif de modélisation très abouti en Gironde, du fait de l'implantation d'une centrale nucléaire. Il a par ailleurs fait état de points de faiblesse dans le Nord de la France et dans le bassin méditerranéen.

La mission commune d'information a ensuite procédé à l'audition de M. François Démarcq, directeur général délégué du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), Thierry Winter, adjoint au chef de service « risques naturels », M. Manuel Garcin et M. Rodrigo Pedreros, co-auteurs du compte rendu de mission préliminaire du BRGM sur la tempête Xynthia.

Debut de section - Permalien
François Démarcq, directeur général délégué du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)

a présenté le BRGM, établissement public de recherche qui se consacre aux phénomènes et ressources liés au sous-sol, avec une mission d'appui aux politiques publiques dans ses domaines de compétence. Le BRGM compte 1 000 personnes environ dont 25 personnes travaillant sur les risques littoraux. Il travaille sur les risques naturels (séismes, volcanisme, mouvements de terrain, risques liés aux cavités souterraines et risques côtiers) ainsi que sur l'eau, la géologie et les ressources minérales. Ainsi, le BRGM a pu mener ces dernières années, sur financement du « fonds Barnier », un grand programme de recherche lié à la problématique de la sécheresse (gonflement des argiles). Sa spécialité est la cartographie des aléas. Dans le domaine spécifique des risques littoraux (érosion, submersion marine), le BRGM travaille dans le cadre de programmes européens. Avec l'Office national des forêts (ONF) et l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), le BRGM a travaillé sur l'évolution du trait de côte en Aquitaine. Il a également conduit des recherches sur l'impact des houles, des tempêtes et phénomènes cycloniques dans plusieurs régions françaises métropolitaines et d'outre-mer.

Debut de section - Permalien
Manuel Garcin, co-auteur du compte rendu de mission préliminaire du BRGM sur la tempête Xynthia

avec M. Rodrigo Pedreros, a présenté, à l'aide d'une vidéo-projection, les principaux éléments de conclusions de la mission conduite du 8 au 12 mars 2010. Menée en collaboration avec l'ONF pour la gestion des dunes domaniales, la mission avait pour objectif de mesurer les phénomènes d'érosion, les niveaux d'inondation, et les dégâts induits par la tempête sur une côte de 240 kilomètres, à dominante sableuse, avec quelques secteurs à dominante vaseuse. Les principales constatations sont l'érosion de l'ensemble du cordon dunaire, de 3 mètres à 22 mètres, avec un phénomène de « falaisage » des dunes, une submersion marine très importante avec un cote absolue dépassant 4,5 mètres NGF (nivellement général de la France) et des dommages très importants aux habitations (érosion et affouillement des fondations, destructions par l'action directe des vagues) ainsi qu'aux infrastructures portuaires et routières. Les digues ont été fortement endommagées.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé des précisions sur la brèche du cordon dunaire dans le secteur de la Belle Henriette à la Faute-sur-Mer, sur la norme de référence NGF et la définition de la cote absolue.

Debut de section - Permalien
Manuel Garcin, co-auteur du compte rendu de mission préliminaire du BRGM sur la tempête Xynthia

a répondu que la brèche s'était produite dans le bas de la dune dans le secteur de la Belle Henriette, la mer retrouvant ainsi le cours de la rivière Le Lay.

Debut de section - Permalien
Rodrigo Pedreros

a précisé que la norme NGF correspondait au nivellement moyen du territoire métropolitain et que la cote absolue était le niveau d'eau maximal atteint lors de la submersion marine.

a présenté les apports de modélisation numérique du BRGM. Il a détaillé le phénomène de la tempête Xynthia, caractérisée par une marée haute, des vents sud/sud-ouest créant des vagues au large, et une « surcote atmosphérique ». Au marnage (différence entre les niveaux haut et bas de la marée) se sont ajoutées la surcote atmosphérique et la surcote liée aux vagues (« set-up ») entraînant un jet de rive (« run up »), le tout atteignant la cote de 4,506 mètres NGF. L'état des recherches permet de modéliser avec une grande précision l'ensemble du phénomène, à l'exception de la phase de déferlement, dont l'effet dépend de facteurs qui ne sont pas toujours connus, comme la réaction de la roche sédimentaire. Pour ces travaux, le BRGM a utilisé les données du Service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM) de La Rochelle.

M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur la mention dans le rapport de mission du BRGM selon laquelle, « si l'on extrapole le niveau de 4,5 mètres NGF atteint à La Rochelle, cela correspondrait à une période de retour proche de 10 000 ans ».

Debut de section - Permalien
Mm. Manuel Garcin et Thierry Winter, adjoint au chef de service « risques naturels »

ont souligné la mauvaise interprétation de cette observation par certains médias : il ne s'agissait pas d'affirmer qu'un phénomène comme la tempête Xynthia ne pourrait se reproduire que tous les 10 000 ans, mais de souligner qu'en extrapolant les hypothèses actuelles de « retour centennal », on aboutissait à cette probabilité statistique aberrante. Il s'agissait de mettre en valeur le fait que les extrapolations statistiques actuelles se fondent sur des données récoltées sur quelques dizaines d'années, ce qui en limite la validité.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé comment le BRGM pouvait intervenir en prévision des risques naturels et la manière dont il travaillait avec d'autres établissements comme Météo-France ou l'IFREMER.

Debut de section - Permalien
Rodrigo Pedreros

a répondu que le BRGM pouvait réaliser des simulations très précises, approchant la réalité, sur les niveaux d'eau en fonction de certaines données, mais qu'il ne jouait encore aucun rôle en matière de prévision des effets d'un phénomène naturel sur le point de survenir, Météo-France et l'IFREMER développant leurs propres modèles. Le BRGM fait des calculs a posteriori, il ne participe pas au dispositif d'alerte et se situe dans une logique de prévention plutôt que dans une logique opérationnelle face à un phénomène climatique.

a conclu sa présentation par des perspectives, notamment confier au BRGM la prévision des niveaux d'eau au rivage à l'échelle régionale et si possible locale grâce à une connaissance topographique fine et à la modélisation des phénomènes de submersion. Il a évoqué des projets de recherches qui ont été conduits au Sri Lanka dans le cadre d'une aide de la France après le tsunami, et un projet en Languedoc-Roussillon et à Tahiti en Polynésie.

Debut de section - Permalien
Manuel Garcin, co-auteur du compte rendu de mission préliminaire du BRGM sur la tempête Xynthia

a indiqué que ces modélisations très précises des effets de submersion sur des zones côtières ne pouvaient être réalisées que sur des zones restreintes, qui ne pouvaient aller jusqu'au plan régional ou national.

Debut de section - Permalien
Thierry Winter

a expliqué que le BRGM commençait cependant à disposer d'outils qui permettraient une hiérarchisation des zones à risques à une échelle régionale, et qui seraient utiles dans la préparation des plans de prévention des risques d'inondations (PPRI).

M. François Démarcq a ajouté que le BRGM pouvait procéder à des recherches qui se fonderaient sur les niveaux d'eau extrêmes enregistrés par le SHOM, en appliquant des formules semi-empiriques permettant de caractériser le phénomène de « jet de rive » zone par zone, et en intégrant ces données à un modèle numérique de terrain pour mesurer les effets de la submersion marine sur les terres.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En réponse à une question de M. Bruno Retailleau, président, sur le coût de telles recherches, M. Thierry Winter a répondu que celui-ci pouvait être estimé entre 500 000 euros et un million d'euros pour couvrir l'ensemble du territoire métropolitain sur une durée de deux ans. Cela permettrait de hiérarchiser les secteurs les plus exposés aux risques d'inondation et de faciliter les travaux de prévention. Dans un second temps, il serait possible de réaliser une modélisation à une échelle locale, grâce à un modèle numérique de terrain de très haute résolution (litto3D).

a demandé aux chercheurs du BRGM ce qu'ils pensaient de la fiabilité de la définition des « zones noires » et s'il fallait, selon eux, rehausser les digues.

Debut de section - Permalien
Thierry Winter

a répondu que les critères de définition des zones noires n'étaient pas seulement liés à des données scientifiques mais également à des considérations telles que le degré de protection des habitations ou les facilités d'évacuation, ce qui ne permettait pas de porter un jugement technique. Par ailleurs, il a souligné que la tempête Xynthia constituait la vraie référence puisque c'était bien là l'évènement qui s'était déroulé, et que les modèles scientifiques ne pouvaient pas remplacer l'expérience réelle. Pour les digues, il a indiqué que tout dépendait du niveau de protection que l'Etat souhaitait apporter aux habitants : les constatations du BRGM ont montré que les digues en Vendée et en Charente-Maritime étaient sous-dimensionnées pour un phénomène de retour centennal, mais on ne peut construire des digues qui résistent à tout et il y a des arbitrages, notamment financiers, à réaliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

s'est ensuite interrogé sur l'élévation générale du niveau de la mer.

M. François Démarcq a confirmé que l'on se situait dans une dynamique d'élévation du niveau des mers.

Debut de section - Permalien
Mm. Manuel Garcin et Rodrigo Pedreros

ont ajouté que le GIEC estimait que le niveau des mers s'élèverait de soixante-cinq centimètres à l'horizon 2100, d'autres estimations faisant désormais état d'une hausse d'un mètre à un mètre et vingt centimètres, en prenant en compte la fonte des calottes glacières. Les observations satellitaires permettent aujourd'hui d'enregistrer une hausse de deux millimètres par an.

Debut de section - Permalien
Thierry Winter

A la question de M. Bruno Retailleau, président, sur la dégradation du cordon dunaire suite à la tempête Xynthia, M. Thierry Winter a confirmé que le recul et le falaisage des dunes étaient source d'une aggravation des risques de submersion marine.

Debut de section - Permalien
François Démarcq, directeur général délégué du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)

a souligné l'importance de disposer de données de terrain fiables et actualisées qui permettent de connaître l'évolution morphologique de l'ensemble du trait de côte.

En conclusion, M. François Démarcq a indiqué que, pour les missions dans le champ de compétence du BRGM, la priorité devait être accordée à la définition des zones à risques de submersion marine au plan national, ce qui permettra de mieux préparer les plans de prévention des risques.