La commission examine le rapport pour avis de M. David Assouline sur les crédits des programmes « Audiovisuel » et « Presse » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2013.
En 2009, j'étais l'orateur de l'opposition sur la loi du 5 mars 2009 qui a supprimé la publicité sur France Télévisions. A l'époque, je n'étais pas opposé à la réforme par idéologie, ou parce que je croyais que la publicité était inhérente à notre service public audiovisuel.
Non, je savais que Radio France ou Arte diffusaient des programmes sans messages publicitaires et que c'était plutôt susceptible de favoriser leur succès. Mais j'étais inquiet. Inquiet pour France Télévisions si une crise survenait. Inquiet pour son périmètre, pour la qualité des programmes, et le sort des personnels. J'étais inquiet car le financement alternatif proposé était bancal et devenait dépendant de la dotation budgétaire de l'État, déjà surendetté. Il était donc aléatoire et remis en question chaque année. Je pensais donc que la suppression de la publicité sur France Télévisions était irresponsable du point de vue financier et que le budget du groupe en serait affecté au premier coup de grisou économique.
Le budget 2012 de la mission « Médias » m'a confirmé cette impression, mais le précédent gouvernement a préféré le creusement du déficit plutôt que d'assumer ses choix.
Le rapport que j'ai produit avec notre collègue Jacques Legendre depuis m'a conduit à dire que la réforme n'avait pas abouti aux effets positifs escomptés mais qu'en revanche les effets pervers s'étaient bien réalisés. Le rapport établit que le groupe a été fragilisé et bousculé par cette réforme.
Cette année, le choix du Gouvernement a été celui de présenter un budget de responsabilité avec l'héritage de cette réforme passée. Il faut faire attention car le financement de l'audiovisuel public repose sur un pilier central : la redevance. Mais depuis 2009, il y a aussi une dotation budgétaire.
La priorité est donc à la réduction du déficit avec une baisse de 42 % des crédits budgétaires consacrés à l'audiovisuel public, qui passent de 603 millions d'euros en 2012 à 434,7 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances (PLF). Conscient de l'intérêt et de l'importance de notre politique culturelle audiovisuelle, il a en revanche mis l'accent sur la ressource naturelle de l'audiovisuel public qu'est la contribution à l'audiovisuel public (CAP). Avec son indexation et la majoration de 2 euros de son montant, prévue à l'article 39 du PLF, son produit serait de 3,4 milliards d'euros en 2013, contre 3,3 milliards en 2012. Au total, ce sont donc 3,8 milliards d'euros qui devraient être consacrés à l'audiovisuel public en 2013, contre 3,9 milliards en 2012, soit une baisse de 2 %.
La question se pose donc de savoir si cette diminution de crédits peut être prise en charge sans heurts ni baisse de la qualité de la programmation de notre service public.
Le Gouvernement a fait participer tout le monde à l'effort de redressement des finances publiques tout en garantissant leurs missions essentielles :
- ARTE-France, dans une période de relance éditoriale voit ses crédits stagner en euros courants, et donc diminuer en euros constants. Sa présidente nous a confirmé que le budget serait contraint mais suffisant pour maintenir l'exigence de la programmation ;
- le groupe Radio France, en dépit des charges d'investissement qu'il supporte, et des nouveaux développements géographiques et numériques, devra lui aussi faire avec une dotation reconduite au même niveau. M. Jean-Luc Hees, auditionné par la commission, a confirmé qu'il essaierait de faire mieux avec moins ;
- l'Institut national de l'audiovisuel (INA), qui connaît une baisse des ressources propres, devrait pouvoir continuer à exercer ses missions avec une dotation stable ;
- le fonds d'expression radiophonique locale, qui assure une mission fondamentale pour la diversité de notre paysage radiophonique, voit ses montants stagner une année de plus, mais là encore, ça tiendra pour 2013 ;
- enfin, l'Audiovisuel extérieur de la France bénéficie d'une très légère hausse des crédits, dans un contexte où l'entreprise a été profondément bouleversée, et où l'exercice 2013 relèvera de toute façon de l'équilibrisme budgétaire.
Je tiens, à cet égard, à souligner l'importance d'une coopération renforcée entre l'ensemble des groupes publics dans les prochaines années. L'heure est à la complémentarité et non pas à la concurrence pour offrir les meilleurs programmes possibles aux Français.
Parlons maintenant du groupe France Télévisions, car c'est bien lui le plus gros contributeur, qui paie le prix de la réforme de 2009. Le groupe subit ainsi une baisse de 3,2 % des crédits par rapport à 2012, soit 80 millions d'euros. Avec une baisse de recettes publicitaires évaluée à 67 millions d'euros, l'effort à produire pour 2013 serait ainsi une diminution de 5 % des dépenses, à hauteur de près de 150 millions d'euros au total.
Votre rapporteur estime que France Télévisions est effectivement le groupe de l'audiovisuel public qui est le plus capable de diminuer ses dépenses, notamment en raison de son volume d'activités et de financement. Il n'en reste pas moins qu'une telle baisse entraînera à n'en pas douter un très fort déséquilibre du budget 2013 et une démotivation subséquente des personnels. En un mot : ils n'y parviendront pas et ça risque de les décourager.
J'émets donc le souhait qu'un consensus se dégage pour que l'on puisse lisser l'effort budgétaire de France Télévisions sur plusieurs années. Le moyen est simple : il s'agit d'un coup de pouce sur la redevance (+ 2 euros sur le territoire métropolitain et + 1 euro en outre-mer), qui permettrait d'augmenter la dotation de 50 millions d'euros et de limiter l'effort à faire à 30 millions d'euros d'économies plutôt que 80. Je vous proposerai donc un amendement allant dans ce sens.
En ce qui concerne les crédits consacrés à la presse, le soutien public en faveur du secteur se maintient à un niveau relativement stable avoisinant le milliard d'euros si l'on tient compte des aides fiscales indirectes. Les aides publiques directes hors abonnements à l'Agence France-Presse (AFP), d'un montant de 396 millions d'euros, diminuent par rapport à leur niveau de 2012 en raison d'ajustements budgétaires dans un contexte contraint, mais, en leur sein, les aides au pluralisme, bénéficiant aux journaux d'opinion à faibles ressources publicitaires, sont rigoureusement préservées.
Si le fonds d'aide au portage subit une baisse de ses crédits, de l'ordre de 16 %, l'effort portant sur l'exonération des charges patronales des porteurs de presse augmente de 9 %. Le chef de l'État s'est engagé auprès de la presse quotidienne, nationale et régionale, à poursuivre une politique active de soutien au portage.
J'invite les représentants de l'État et de l'ensemble des familles de presse à se concerter sur une réforme des aides à la presse, en étudiant les modalités d'un ciblage en faveur de la presse d'information politique et générale. Qu'il s'agisse de l'aide au transport postal ou du taux de TVA super-réduit de 2,1 %, ces avantages bénéficient de façon disproportionnée à un nombre important de publications consacrées au divertissement et aux loisirs. N'ayons pas peur de remettre le système tout entier à plat et de conditionner le soutien public à la réalisation de missions d'intérêt général.
Il nous faudra également nous poser la question de l'opportunité, au regard de l'indépendance des médias, de verser des liquidités aussi importantes à la presse. Gardons à l'esprit que la fiscalité modulée en fonction des contenus, d'application neutre, peut constituer un mode d'intervention peut-être plus compatible avec le respect de l'indépendance de la presse, car elle ne contraint pas l'État à opérer une sélection subjective, en préférant certains titres à d'autres au sein d'une même famille.
Poursuivons inlassablement notre intervention auprès des institutions européennes pour réclamer une fiscalité neutre quel que soit le support de diffusion : les rédactions bi- ou multimédias se généralisent, plusieurs titres célèbres ont basculé vers le tout numérique. Soyons clairs, l'application d'un taux de TVA de 19,6 % aux services de presse en ligne est devenue un non-sens économique et philosophique.
Intéressons-nous également à une modulation du taux de TVA en fonction des contenus. S'il est indispensable de conserver le taux de TVA super-réduit de 2,1 % pour la presse d'information politique et générale, pourquoi ne pas envisager, en revanche, d'appliquer aux publications ne présentant pas ce caractère d'information politique et générale un taux de TVA intermédiaire plus élevé, de 5,5 % ou 7 %. Je n'ai pas d'a priori sur la question : aux acteurs du secteur de s'entendre sur une répartition plus équitable du soutien public qui ne menace pas l'équilibre global du secteur.
En ce qui concerne la distribution de la presse, la réforme que nous avons votée l'année dernière porte ses fruits : le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) et l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) ont travaillé main dans la main pour répondre au plus urgent. Des décisions fondamentales ont été prises pour préserver les équilibres coopératifs du système, notamment le délai de préavis de retrait d'un titre d'une coopérative ou la péréquation inter-coopératives.
Pour autant, une organisation bicéphale a ses limites. Le CSMP continue de souffrir du procès en légitimité qui lui est adressé en tant qu'instance exclusivement professionnelle. L'ARDP, en raison de l'indépendance reconnue des magistrats qui la composent et de l'absence de conflits d'intérêts en son sein, pourrait à terme apparaître comme l'instance en mesure de faire prévaloir l'intérêt général du secteur sur les intérêts particuliers.
L'accord tripartite conclu, le mois dernier, entre la direction de Presstalis, les éditeurs des coopératives et l'État permet de garantir la poursuite de l'exploitation de la messagerie. La contrepartie des efforts consentis par l'État et les éditeurs appelle des économies qui seraient à trouver dans la restructuration de centres de distribution.
L'angoisse est palpable. On entend parler de plus de 1 200 salariés potentiellement concernés par un plan social. Soyons honnêtes, il n'est pas possible de renvoyer les organisations syndicales dos au mur, en les réduisant à choisir entre un plan social conventionnel ou la mort de Presstalis. Le blocage qui en résulterait pourrait accélérer la descente aux enfers de la vente au numéro et l'éclatement anarchique du système de distribution. Elle aurait, de plus, des conséquences particulièrement néfastes sur l'équilibre psychologique de nombre d'employés qui se retrouveraient, du jour au lendemain, plongés dans la précarité. Par conséquent, des solutions de reclassement ou d'accompagnement et de réinsertion doivent pouvoir être trouvées.
Enfin, en ce qui concerne l'AFP, la clarification intervenue cette année dans la définition de ses ressources d'origine publique (120 millions d'euros en 2013) devrait permettre de convaincre la Commission européenne de la nécessaire compensation des missions d'intérêt général assumées par l'Agence. Le calme semble revenu au sein de l'entreprise, ses performances commerciales démontrent une bonne tenue dans un contexte international pourtant récessif.
Compte tenu de ces analyses, et sous réserve des observations que j'ai émises, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'audiovisuel et de la presse au sein de la mission « Médias ».
Ne faudrait-il pas se diriger vers un transfert de la dotation de l'État vers la contribution à l'audiovisuel public dès cette année ? On pourrait pérenniser le principe d'une indexation de la redevance sur l'inflation à laquelle s'ajouterait une part supplémentaire fixe, ce qui permettrait à la télévision publique de devenir moins dépendante de la dotation. Le rapport de la mission d'information de notre commission à Londres montre que dans un certain nombre de pays européens c'est la CAP qui rend libre l'audiovisuel public.
Lors de l'audition du président de France Télévisions, il avait été évoqué de remettre des écrans publicitaires entre 20 heures 30 et 20 heures 40. C'est dans cette tranche horaire que la rentabilité de la publicité est la plus forte. Bien entendu, il faudrait l'exclure après 20 heures 40.
La proposition d'une augmentation automatique de la redevance est intéressante car son taux est relativement peu élevé en France par rapport à d'autres pays. Je ne peux que l'approuver.
Cependant, la redevance, ça se mérite. Nous devons demander à France Télévisions de réaliser de vrais efforts de gestion. Il n'existe pas aujourd'hui de système sérieux de contrôle des coûts, notamment vis-à-vis des producteurs extérieurs. Leurs taux de marge peuvent donc être particulièrement élevés, ou alors ils ne sont pas connus. Certaines entreprises se mettent en situation de dépendance. De fait lorsqu'une émission doit être supprimée, le producteur animateur argue qu'il se trouve dans une position de quasi-salariat et donc l'émission est reconduite.
La ministre a évoqué la question de remettre à jour un nouveau contrat d'objectifs et de moyens (COM). Les relations avec les producteurs ont été négligées par le précédent COM. 4 à 5 % du budget de France Télévisions partent dans une gestion discutable, selon les spécialistes des médias.
S'agissant de la réforme des aides à la presse, il faut se fixer des objectifs en termes de nature de titres participant au pluralisme. Le premier critère devrait être aujourd'hui la défense et la protection du métier de journaliste. Depuis deux ans, dans notre pays, le nombre de journalistes titulaires de la carte de presse diminue. C'est une tendance globale dans tous les pays d'Europe et développés, alors que les titres se multiplient. Il faut trouver le moyen d'aider les titres papier et ceux en ligne, sachant que, pour ces derniers, certains personnels ne traitent pas l'information mais font uniquement du « repiquage ». Je regrette que ce projet de loi de finances ne réforme pas en profondeur les aides à la presse.
Je partage votre analyse sur la neutralité fiscale entre papier et numérique, mais il faut l'approfondir au regard des positions de Bruxelles. D'autres pays l'opèrent déjà.
Nous sommes favorables à l'augmentation de la redevance et donc à l'amendement proposé. Cet amendement ne répond pas cependant au problème du déséquilibre structurel du budget de France Télévisions. Il ne sera pas possible de le résoudre de la même manière l'année prochaine.
Une loi sur l'audiovisuel est envisagée pour 2013. J'ai une question sur le champ de cette loi. Une réflexion doit être conduite sur le rapport aux producteurs extérieurs, sur le problème des droits pour permettre de dégager d'autres types de ressources pour France Télévisions. Si nous ne nous attaquons pas à ces problèmes, l'augmentation de la redevance sera un cache-misère face aux difficultés structurelles et croissantes.
La redevance constitue une ressource pérenne qui aurait dû être revalorisée plus régulièrement. Il faut se pencher aussi sur l'environnement du paysage audiovisuel français qui a été profondément bouleversé.
Il faut exiger des évolutions des méthodes de travail de France Télévisions. Entre l'évolution du travail des rédactions et la réalité des annonces à l'interne, notamment sur l'avenir des rédactions nationales et régionales de France 3, les écarts sont parfois très importants. On doit s'interroger sur la manière dont France Télévisions envisage la rationalisation des moyens. Cela peut aussi conduire à des mesures qui mettraient en cause le potentiel rédactionnel de la chaîne, alors qu'il pourrait déboucher sur une dynamique du service public compte tenu de son importance. Je remarque, par ailleurs, que la direction de France Télévisions a annoncé, après l'échec de la renégociation de la convention collective, qu'elle appliquerait sans accord les objectifs de sa refonte.
Beaucoup de problèmes sont soulevés. Notre vote positif sur l'amendement n'est en aucun cas un quitus à la trajectoire donnée.
La réforme des aides à la presse doit avancer plus rapidement. La distribution des aides à la modernisation profite, en raison des critères établis, aux entreprises les plus riches car elles sont proportionnelles au volume des investissements. Aujourd'hui, le système ne fait qu'amplifier les inégalités existantes. Le système de distribution reste profondément en danger malgré les propos optimistes du rapporteur pour avis. S'il était profondément déstabilisé, inévitablement, même avec une réforme des aides à la presse, ce serait la disparition de nouveaux titres de la presse nationale et régionale. Tous ces chantiers doivent être traités dans la première partie de l'année 2013.
Vous avez évoqué la question de l'héritage. Ce texte a été largement débattu au sein de notre assemblée pour lequel il y a eu des positions nuancées. Il y a aussi l'héritage de la crise et des déficits publics qui n'est pas nouveau. Il faut être mesuré par rapport à cette question.
Vous avez parlé d'un budget de responsabilité. La responsabilité est aussi, dans le cadre de la continuité républicaine, d'assumer ce qui est inscrit dans la loi, à savoir que la suppression de la publicité devait être compensée à l'euro près. Le retour de la publicité après 20 heures est un faux débat puisque les recettes publicitaires sont en forte baisse sur l'ensemble des chaînes de l'audiovisuel.
Le consensus sur la proposition d'amendement dépend du périmètre du débat. Le plan d'économies pour France Télévisions est plus que drastique. 30 millions d'euros d'économies ont déjà été réalisés en 2012. Il me semble plus difficile d'absorber les 150 millions d'euros. J'ai l'impression que vous n'aviez pas la même exigence sous la précédente mandature. Quelles pistes d'économies proposez-vous ?
Le deuxième préalable du consensus est la discussion sur la redevance considérée dans son ensemble. Une des propositions est de l'augmenter. Nous n'y sommes pas forcément opposés puisque notre groupe a toujours milité en ce sens. Si on veut être stratégique et dégager très rapidement l'audiovisuel des dotations de l'État, il faut accélérer les recettes fournies par la redevance. Mais c'est sur l'assiette qu'il faut travailler.
J'ai été surprise de la réponse de la ministre, lors de son audition, sur la taxation des résidences secondaires. Je n'ai pas eu de réponse claire lors de l'examen de la loi de 2009. Notre commission a souvent réclamé l'instauration d'un groupe de travail sur la redevance. Elle n'a jamais été mise en place. Les deux euros supplémentaires rapportent 50 millions d'euros, et une demi-contribution assise sur les résidences secondaires 100 millions d'euros. Il faut plaider pour l'élargissement de l'assiette à l'ensemble des terminaux qui permettent de recevoir la télévision. C'est un principe de justice et de neutralité technologique, de même que, pour les résidences secondaires, c'est une question de justice fiscale. Je plaiderai volontiers pour ces deux mesures. C'est à l'aune de cet ensemble de mesures qu'il faut examiner le budget 2013.
Cette augmentation devrait être autonome et fixée par une autorité indépendante pour que le montant de la redevance puisse couvrir les justes besoins de financement de l'audiovisuel public, comme nous l'avions proposé avec M. Michel Thiollière, mon co-rapporteur, lors des débats sur la loi de 2009.
La vigilance s'impose pour les autres acteurs de l'audiovisuel public dans les années à venir car les budgets sont très tendus.
Je partage le principe d'un alignement du taux de TVA entre la presse papier et la presse en ligne, qui permet l'émergence du secteur.
Il est à souligner, comme le disait Jean Jaurès, que « seul l'optimisme était républicain ». Vous avez souligné tous les problèmes qui se posent. L'effort maximal est demandé à France Télévisions. Vous avez raison de proposer 2 euros supplémentaires même si ce n'est pas suffisant. C'est un moyen d'assurer l'indépendance de l'audiovisuel public. Sur l'élargissement de l'assiette, nous devons y réfléchir.
La grande victime de ce budget 2013 est France Télévisions, qui affrontera la situation la plus difficile.
J'ai des interrogations sur la fragilité des COM. Celui de France Télévisions a volé en éclat face à la difficulté budgétaire. Se pose la question de la solidité et la validité de toute réflexion pluriannuelle. En Allemagne, le respect du COM est de valeur constitutionnelle. Une crise permet de réfléchir sur de nombreuses orientations, comme c'est le cas pour France Télévisions, tant en termes de dépenses que de ressources. Le groupe a réalisé de nombreux efforts. Il devra les poursuivre. Il y a matière, même si les obstacles sont nombreux.
Avoir une position claire sur la publicité sur les chaînes publiques de télévision est indispensable. Notre attitude est trop influencée par des considérations financières. La publicité à la télévision est un élément fondamental de la différenciation entre service public et chaînes privées. Dans le contexte de la baisse sensible des ressources publicitaires à la télévision en général, aggravé par la situation du marché et l'arrivée le 12 décembre de six nouvelles chaînes, nous devrions faire un choix. Je pense qu'il faut la supprimer complètement. Comment financer ?
Le Sénat a toujours été assez unanime sur l'augmentation de la redevance toutes tendances confondues pour pérenniser le financement de France Télévisions sans le rendre trop tributaire d'une dotation plus ou moins importante de l'État. Son montant étant assez faible en France, elle mérite d'être augmentée.
Il faut d'abord commencer par les résidences secondaires, plus que d'en augmenter le montant pour l'ensemble de la population. Il faut réfléchir à la redevance à l'écran avec l'arrivée de la télévision connectée et les mutations profondes que cela entraîne.
La contribution à l'audiovisuel public est déjà indexée. Chaque année, est prévue une indexation de 2 euros supplémentaires, qui rapportera 50 millions d'euros. Cette année, le gouvernement propose une augmentation supplémentaire de 2 euros, ce qui veut dire encore 50 millions d'euros. Je propose que la commission présente un autre amendement pour l'augmenter encore de 2 euros, soit au total une enveloppe de 150 millions d'euros. Cela veut dire au moins 300 millions d'euros sur trois ans.
L'année dernière, malgré la crise, on nous a proposé une baisse des crédits sans désendettement de l'État. Aujourd'hui, nous voulons réduire le déficit de l'État. Cela touche forcément tous les programmes.
L'essentiel est de pérenniser le financement de l'audiovisuel public pour que tout le périmètre soit maintenu. S'il y a une baisse de la dotation, avec les augmentations envisagées de la redevance, elle est moindre. Au final, ce seront 30 millions d'euros de moins, c'est-à-dire le même effort demandé l'année dernière par le précédent gouvernement. Après le vote de cet amendement, on ne pourra plus dire que l'effort budgétaire demandé à France Télévisions est beaucoup plus important qu'ailleurs. Il permet de ramener cet effort à un niveau soutenable.
Il est indispensable, dans le cadre de la prochaine loi audiovisuelle et de la préparation du prochain budget, de revoir complètement le financement de l'audiovisuel public.
On est face à un rendez-vous puisque la taxe qui rapporte le plus et qui permet de compenser la perte de publicité est contestée par la Commission européenne. En 2013, la Commission devrait définitivement nous condamner à ne plus percevoir la taxe. Il s'agit d'un manque à gagner de 300 millions d'euros. Il faut déjà envisager le financement pour l'année prochaine. L'élargissement de l'assiette aux résidences secondaires et la réouverture du débat sur la publicité après 20 heures, même de façon restreinte, seront la panoplie de ce que nous devrons étudier ensemble pour répondre aux besoins de financement. Ce consensus, je ne l'ai jamais eu avec les députés. Je ne sais si, en cumulant toutes ces propositions d'augmentation de la redevance, l'UMP nous aurait soutenus. Faisons les réformes de façon échelonnée pour qu'elles soient comprises.
La section 2 du fonds stratégique pour le développement de la presse est consacrée au développement des services de presse en ligne. Je suis d'accord avec M. André Gattolin pour que l'attribution de ces crédits se fasse sous conditions. Aujourd'hui, le dispositif n'étant basé que sur les investissements dans les innovations technologiques, ce sont uniquement les groupes puissants qui bénéficient des aides. La refonte des aides à la presse n'était pas possible en quelques mois.
Nous maintenons les aides au pluralisme à leur niveau de 2012. Les quotidiens à faible revenu publicitaire continueront de bénéficier d'une aide de plus de 9 millions d'euros.
Je ne demande pas un consensus sur tous les points mais il existe pour dégager 2 euros supplémentaires pour aider France Télévisions.
Je mets aux voix le vote sur l'amendement présenté par M. David Assouline.
Pour ma part, il n'y a pas de consensus sur ce vote. A titre personnel, je voterai contre cet amendement. Une seule augmentation de 2 euros est largement suffisante.
Je me rallie à la position de Mme Catherine Morin-Desailly. Je m'abstiendrai. Il importe de ne pas être négatif, ni de bloquer les projets. Je pense qu'en matière de télévision, les consommateurs que nous sommes devront être plus des décideurs. Dans le domaine du sport, la télévision française n'est plus maîtresse de ses programmes. Elle est liée à tel ou tel sponsor. Il est facile de critiquer, il est plus difficile de construire.
Nous aurons cette discussion en séance. L'augmentation généralisée de la redevance, nous l'avons eue à l'Assemblée nationale. C'est une question de justice fiscale. Il est nécessaire d'élargir l'assiette.
L'augmentation de la redevance est inéluctable. Dans quel calendrier ? En fonction de quelle assiette ? Je suis davantage partisan de remettre en place une demi-redevance sur les résidences secondaires pour des raisons d'équité fiscale. Je m'abstiendrai donc sur cet amendement.
L'amendement présenté par M. David Assouline est adopté.
Puis la commission examine le rapport pour avis de M. Jean-Pierre Leleux sur les crédits « Cinéma » de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2013.
Le secteur du cinéma, et surtout le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), ont fait couler beaucoup d'encre cette année. Je commencerai par quelques bonnes nouvelles avant d'évoquer la délicate question du financement du CNC, ainsi que quelques autres sujets d'actualité.
Quelles sont ces bonnes nouvelles ?
- la production cinématographique bat un nouveau record historique : avec 272 films agréés en 2011 (4,2 % de plus qu'en 2010) ;
- la fréquentation des salles : un nouveau record aussi, en 2011. Pour la quatrième année consécutive, le seuil des 200 millions a été franchi, avec 216 millions de spectateurs. Néanmoins, 2012 devrait être une année un peu moins favorable ;
- la part du cinéma français s'accroît : elle est de 40,9 % en 2011, même si l'effet du film Intouchables contribue à expliquer cette performance ;
- le nombre de salles se stabilise (à 5 464), essentiellement en raison du développement des multiplexes. Les investissements des exploitants (en termes de confort, d'accès, de numérisation...) concourent à renforcer l'attractivité des salles et, par conséquent, leur fréquentation.
En revanche, le nombre d'exploitations continue à diminuer. C'est pourquoi nous devons être particulièrement attentifs au soutien à la modernisation des petites exploitations, notamment classées « art et essai ». A cet égard, en tant que membre du comité de suivi parlementaire chargé d'évaluer l'application de la loi du 30 septembre 2010 relative à l'équipement numérique des salles, je suis satisfait de son bilan. 86,3 % des établissements cinématographiques français et 8 salles sur 10 sont désormais numérisés. Si quelques difficultés ont pu être exprimées, les négociations entre distributeurs et exploitants ont néanmoins été facilitées par les recommandations de bonnes pratiques émises par le comité professionnel de concertation instauré par la loi.
Cinenum, le dispositif du CNC d'aide à la numérisation des salles n'étant pas susceptibles de recueillir suffisamment de contributions des distributeurs pour financer leur transition, fonctionne de façon satisfaisante. Au total, le CNC a déjà soutenu la numérisation de près de 1 000 écrans répartis dans environ 750 établissements. A terme, près de 1 800 écrans, répartis dans plus de 1 200 établissements, auront eu recours à l'aide du CNC et à celles des collectivités territoriales pour pouvoir faire face à cette révolution.
Depuis juin 2012, le dispositif est ouvert aux salles dites « peu actives » (organisant moins de cinq séances hebdomadaires), c'est-à-dire aux salles saisonnières et aux salles rurales. Le cas spécifique des 131 cinémas itinérants est aussi en voie de résolution. Il a été difficile de trouver un équipement de projection adapté à leurs spécificités et contraintes. C'est chose faite. Le CNC va désormais soutenir, pour chaque circuit, autant de projecteurs numériques que de projecteurs 35 millimètres utilisés, dans la limite de quatre par circuit. Je m'en réjouis car les circuits itinérants constituaient jusqu'ici en quelque sorte le talon d'Achille du dispositif d'aide. Or, s'ils ne représentent qu'une faible part de la fréquentation cinématographique annuelle, ils jouent un rôle indispensable d'aménagement culturel du territoire. Je suis moins optimiste s'agissant de la numérisation des films de patrimoine. En effet, le CNC pourrait être contraint de « réduire la voilure » du plan initialement envisagé. En effet, un prélèvement exceptionnel de 150 millions d'euros sera opéré sur son fonds de roulement en 2013, afin qu'il contribue à la maîtrise des finances publiques. Toutefois, ce fonds comporte une « réserve numérique » dédiée pour partie au plan de numérisation des oeuvres. Cette réserve sera donc entamée. Par conséquent, le calendrier et l'ampleur du plan de numérisation devront être révisés. Or l'inventaire, la restauration puis la numérisation des films sont importants pour plusieurs raisons. J'y vois :
- un enjeu patrimonial : il s'agit de sauver dès que possible des oeuvres souvent en mauvais état ;
- un enjeu économique, social et culturel : il s'agit de contribuer à l'activité d'industries techniques fragilisées par la révolution numérique, et donc aussi de maintenir des compétences nécessaires en leur sein. On risque sinon de voir la filière chimique disparaître et des entreprises fermer, avec parfois d'ailleurs les bobines de films qu'elles détiennent ;
- enfin, je souligne l'enjeu en termes de développement de l'offre légale en ligne.
Quid de l'évolution des ressources du CNC ? Je vous rappelle qu'elles proviennent pour l'essentiel du produit de taxes affectées, prélevées sur les diffuseurs de films - exploitants de cinéma, chaînes de télévision, fournisseurs d'accès à Internet, diffuseurs de vidéo...- en vue d'alimenter le compte de soutien aux professionnels du secteur. Ces taxes ont été créées et adaptées (dans leur assiette et leur taux) au fur et à mesure des évolutions technologiques et des marchés concernés, et encore l'an dernier pour ce qui concerne le volet « distributeurs » de la taxe sur les services de télévision (la TST).
Cette réforme avait pour but de mettre fin à des comportements d'optimisation fiscale tendant à contourner le dispositif. L'objectif était donc de sécuriser cette taxe, tout en modérant son rendement très dynamique. Elle a été notifiée à la Commission européenne mais celle-ci s'est interrogée sur sa compatibilité avec le « paquet télécoms ». Commission et Gouvernement n'ont pas pu trouver d'accord, alors que le délai de négociation arrivait à échéance le 21 octobre 2012, après deux prorogations. Il a donc été décidé de retirer la notification en cours et de proposer un nouveau texte dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2013. La nouvelle taxe doit renforcer le lien avec l'activité audiovisuelle du distributeur et prévoir, à cette fin, un abattement tenant compte de sa densité audiovisuelle, afin de ne pas encourir les critiques de Bruxelles. Nous serons donc attentifs au projet qui sera soumis au Parlement en décembre.
Le CNC a fait l'objet de deux rapports d'audit sévères, l'un de l'Inspection générale des finances (IGF), l'autre de la Cour des comptes. Dans son rapport sur les agences de l'État de septembre 2012, l'Inspection estime que : « le statut atypique du centre, qui cumule à la fois le statut d'établissement public et celui d'administration centrale, crée une situation dans laquelle les grandes orientations de la politique en faveur du cinéma, impulsées par le CNC, ne peuvent être réellement discutées et contre-expertisées au sein de l'État. »
Dans son rapport sur la gestion et le financement du CNC entre 2007 et 2011, demandé par notre commission des finances et présenté le 3 octobre dernier, la Cour des comptes critique les instruments d'évaluation des actions menées par le CNC ainsi que son système de financement. Elle souligne « la faiblesse de la démarche d'évaluation conduite par le CNC quant à la performance de ces dispositifs d'aides », notant que « l'augmentation du nombre de films produits ne saurait constituer le seul critère d'analyse de la réussite du soutien public ». La Cour des comptes recommande le passage d'un dispositif de pilotage autonome par la recette à un pilotage par la dépense, dans le cadre d'une concertation entre l'État et son opérateur. Ceci suppose une hiérarchisation préalable et aussi précise que possible des besoins du CNC.
S'il est sans doute perfectible, notre système a aussi bien des mérites. Il est performant. Certaines améliorations peuvent être nécessaires mais il faut encourager les systèmes qui marchent bien. Il me semble que toute réforme devra consolider un dispositif à la fois efficace, cohérent et vertueux de soutien public au cinéma, dont il conviendra en effet d'assurer les moyens d'un meilleur suivi. De quoi conforter, et réconforter, le CNC !
J'évoque par ailleurs, dans mon rapport écrit, d'autres sources de financement public en faveur du cinéma :
- les aides des régions, essentielles pour soutenir la diversité de la création ;
- les sociétés pour le financement du cinéma et de l'audiovisuel (SOFICA), qui contribuent au financement de près de la moitié des films agréés et dont l'efficacité a été soulignée par l'IGF. Depuis deux ans, les « coups de rabot » ont réduit cependant l'avantage fiscal de 48 % à 36 %, limitant la rentabilité de cet investissement.
J'ajoute qu'un amendement du rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, adopté à l'article 56 du projet de loi de finances (PLF), contre l'avis du Gouvernement (et contre celui du président de la commission des affaires culturelles), n'emporte pas mon adhésion. Il tend à soumettre les SOFICA à un plafonnement global de 18 000 euros et 4 % du revenu imposable, à l'instar des investissements en outre-mer du dispositif Girardin. Le risque serait de faire entrer ces deux dispositifs dans une concurrence peu avantageuse pour les SOFICA. C'est pourquoi, je vous proposerai d'adopter un amendement tendant à revenir au projet de loi de finances initial sur ce point et, par conséquent, d'exclure les SOFICA du plafonnement des dépenses fiscales, sachant que le montant maximal déductible à ce titre par un contribuable est en tout état de cause fixé à 6 480 euros ;
- j'évoque aussi dans mon rapport écrit les crédits d'impôt, national et international, à la production cinématographique, qui favorisent la localisation des tournages sur notre territoire. Ils sont devenus beaucoup moins attractifs que certains autres pays voisins et méritent d'être renforcés. Je l'avais déjà souligné l'an dernier. Je suis donc satisfait de l'inscription, dans le Pacte pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, présenté par le Premier ministre le 6 novembre 2012, de mesures destinées à « renforcer l'attractivité du territoire en matière de tournages de films et de productions audiovisuelles ». Je propose de demander à la ministre des précisions sur les projets de réformes en cours dans ces domaines ;
- je m'inquiète en revanche des annonces du Gouvernement concernant la TVA. Le secteur cinématographique, en particulier les salles, sera en effet impacté si la hausse du taux intermédiaire de TVA s'appliquait à lui. Alors que le livre et le spectacle vivant seront soumis au taux de 5 %, le cinéma subirait une TVA de 10 % ! Or le cinéma fait tout autant partie du secteur culturel que le livre ou le spectacle vivant. Il serait très dommageable que cette mesure, alourdissant de manière conséquente les dépenses des consommateurs, provoque une rupture d'égalité de l'accès de tous à la culture, principe auquel nous sommes tous fortement attachés.
Ne pouvant prolonger davantage mon propos, je vous renvoie à mon rapport écrit qui présente un bilan d'activité de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI). L'impact de la réponse graduée m'apparaît positif, même si nous savons que certaines pratiques permettent de contourner la loi. Ces avancées en termes de pédagogie méritent néanmoins d'être saluées.
La mission confiée à Pierre Lescure examinera la question. Je considère que le dispositif peut sans doute être amélioré sur certains points, mais j'appelle à la vigilance : attention de ne pas « jeter le bébé - c'est-à-dire le respect des droits d'auteur - avec l'eau du bain » ! Il convient bien sûr d'encourager le développement de l'offre légale, ce qui pose la question d'une éventuelle révision de la chronologie des médias. La mission Lescure fera sans doute d'intéressantes propositions dans ce domaine. Il me semble cependant nécessaire de préserver l'exclusivité de la salle, sachant qu'un film peut parfaitement être diffusé sans passer par une salle. Enfin, mon rapport écrit fait le point sur l'accès des salles de cinéma aux handicapés et sur l'évolution du marché de la vidéo.
Merci monsieur le rapporteur. La parole est à Mme Morin-Desailly pour le groupe UC-UDI.
Je voudrais tout d'abord remercier notre collègue pour son excellent rapport. Je crois qu'on peut se réjouir dans ces temps de crise de voir un secteur aussi vivant et qui produit d'aussi bons résultats, mais surtout de voir que les salles, malgré les nouveaux outils technologiques, continuent à être pleines et à être des lieux de rencontres et d'échanges... comme quoi les innovations technologiques ne tuent pas forcément les lieux de culture et de rassemblement.
Il faut souligner que c'est lié à un excellent système de financement qu'on nous envie dans l'Europe toute entière : comme nombre d'entre vous, j'étais à Avignon au Forum Économie et Culture en fin de semaine dernière, et les nombreuses personnalités du monde du cinéma, tant les distributeurs que les producteurs et les réalisateurs, se félicitaient encore de ce mode de financement. Aussi, je soutiendrai d'amendement proposé par Jean-Pierre Leleux à propos du plafonnement des SOFICA car je pense légitime de revenir sur ce qui a été proposé par M. Eckert.
Au rang des satisfactions - parce que je pense que c'est aussi l'heure de dire ce qui est positif -, je voudrais mettre en avant la numérisation qui a été faite très rapidement de nos salles puisque l'on a approche 90 % aujourd'hui. Je trouve cela très impressionnant d'avoir pu aller aussi vite. On nous disait au Forum d'Avignon que beaucoup de salles ont fermé, a contrario, dans des pays voisins : en Allemagne, en Italie, en Espagne... Nous avons pu enrayer sinon anticiper un mouvement qui aurait pu être inverse.
Quelques mots sur la HADOPI : je suis prête à parier que l'on va garder le système existant, seulement on va le rhabiller d'un autre nom... Je dis cela parce qu'au Forum, j'ai interrogé beaucoup d'acteurs du secteur : ils sont tous favorables à ce que l'on maintienne ce système de prévention car c'est la réponse graduée qui fait prendre conscience de ce que représente la création.
Concernant la chronologie des médias qui incite au piratage, je pense qu'en effet, suite à la mission Lescure, il va falloir affiner et toujours progresser sur ce sujet : on avait déjà été, dans cette Commission, à l'époque de la loi DADVSI, auteurs d'amendements visant à la réduire. Cela n'avait d'ailleurs pas été un combat très simple mais, finalement, le temps nous a donné raison. Je crois plutôt qu'il faut travailler sur l'offre légale, sa richesse, sa diversité, son accessibilité en termes de prix et puis aussi et surtout sur la chronologie des médias, même s'il faut bien prendre conscience que chaque élément du segment produit des financements pour la culture.
Voilà les quelques éléments que je tenais à souligner mais je ne suis pas plus bavarde, tout ou presque ayant été dit dans le rapport.
Oui, cela semble être un amendement de bon sens, à une nuance près néanmoins : le secteur du cinéma, dynamique en France, fait partie des secteurs de la culture les plus aidés. Quand on regarde au niveau des aides directes pour le cinéma, elles représentent pratiquement deux fois les aides directes à la presse : je pense donc qu'il faut faire attention à conserver un équilibre dans les fonctions culturelles et citoyennes du pays.
Personnellement, je suis favorable comme tout le monde à un cinéma français riche et développé. Certes les salles se sont numérisées, certes nous avons encore un nombre d'entrées particulièrement important puisqu'il est équivalent à ce que l'on avait au début des années soixante-dix et c'est une grosse performance. En revanche, il faut noter que tout le réseau des salles dites d'art et d'essai a diminué et qu'on est, en termes de présentation dans les salles aujourd'hui, sur une offre de plus en plus formatée sur un certain nombre de films et de sorties. Il serait important, là aussi, de repenser le pluralisme : le CNC, au cours de ces dernières années, a peut-être un petit peu manqué à ses fonctions de développement d'oeuvres plus spécifiques et, en tous les cas, manqué d'équilibre dans la répartition et le niveau de ses aides.
Je n'ai donc pas d'avis particulier sur cet amendement parce qu'il est toujours intéressant de développer un des secteurs de la culture et des médias... Je dis simplement qu'on en fait déjà beaucoup pour le cinéma et qu'il ne faut pas oublier les autres industries culturelles et le secteur des médias qui est, à mon avis, essentiel à la démocratie.
Merci. Autres interventions ? Je vous propose d'en arrêter là et d'examiner l'amendement. Néanmoins, je vais demander une précision à M. Leleux, que je vous rappellerai demain au moment du vote sur les crédits de la culture : votre rapport est-il suivi d'un avis plutôt favorable, défavorable ou de sagesse ?
Personnellement, je demande que l'on donne un avis favorable à la politique conduite en faveur du cinéma. Au fond, quel est le problème qui pourrait nous diviser mais qui ne doit pas le faire ? C'est la ponction des 150 millions sur le fonds de roulement du CNC. Néanmoins, on ne peut pas les refuser... Mais il faut tout de même rappeler que cela doit rester exceptionnel.
Pour répondre maintenant à ma collègue Catherine Morin-Desailly : effectivement, l'ensemble de la profession reconnait dans la loi de septembre 2010, une loi excellente qui a dynamisé considérablement et accéléré, parallèlement aux dispositifs du CNC (Cinenum), la numérisation des salles, ce qui fait de nous les premiers en Europe et les deuxièmes dans le monde.
Et pour répondre à notre éminent collègue Gattolin : on ne peut pas comparer les aides du CNC à celles octroyées à la presse. On ne peut pas dire que le CNC est davantage aidé ou deux fois plus aidé que la presse, parce que les financements du CNC sont injectés par la profession elle-même. D'ailleurs, les professionnels appellent cela des avances sur investissements puisqu'ils contribuent eux-mêmes à un retour sur investissements ; et c'est d'ailleurs cela toute l'intelligence du dispositif du CNC. On ne peut donc pas tout à fait le comparer aux financements d'autres secteurs, même si j'admets que les taxes que nous avons votées se sont avérées plus dynamiques que prévu... Ce qui, par ailleurs, nous permet de dire aujourd'hui qu'il est possible de prélever 150 millions d'euros sur le fonds de roulement du CNC. Mais on ne pourra pas le faire éternellement sans mettre en péril le programme de numérisation.
Concernant l'amendement, il s'agit de revenir au projet de loi de finances initial afin d'exclure les SOFICA du plafonnement des dépenses fiscales instituées à cet article, sachant que le montant maximal déductible à ce titre par un contribuable est, en tout état de cause, fixé à 6 480 euros. Comme je l'ai dit dans ma présentation tout à l'heure, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement et contre l'avis de sa commission des affaires culturelles, mettait les SOFICA au même niveau de « niche » que les investissements outre-mer. Or, si l'on met ces deux dispositifs en concurrence, celui des SOFICA sera fragilisé.
Merci de cette présentation monsieur Leleux. Je mets au vote cet amendement. Il est adopté et devient un amendement porté par la commission.