La commission examine les rapports pour avis de M. Jean-Pierre Plancade sur les crédits « Recherche » et de Mme Dominique Gillot sur les crédits « Enseignement supérieur » du projet de loi de finances pour 2013.
Mme Fioraso nous l'a dit hier, les crédits consacrés à la recherche progresseront de 1,2 % en crédits de paiement, afin de faire face aux dépenses des pensions. Cette évolution stabilisera, hors pensions et en euros courants, des crédits en baisse de 0,79 % l'année précédente. Un effort plus soutenu eût certes été souhaitable - nos dépenses intérieures de recherche-développement stagnaient à 2,24 % du PIB en 2010. Il convient toutefois de prendre en compte d'autres mesures comme les investissements d'avenir et le crédit d'impôt recherche.
Inscrit dans le cadre des priorités du Président de la République pour une politique de l'innovation, levier d'une économie compétitive, ce budget amorce un rééquilibrage des crédits entre subventions directes aux organismes et allocation de moyens sur projet - nous en avons parlé longuement hier. De nombreux laboratoires connaissent des difficultés : tous n'ont pas pu compenser la baisse de leurs crédits récurrents par des crédits sur projets de l'Agence nationale de la recherche (ANR) ou de l'Europe. Ils ont été fragilisés par la multiplication des guichets, la complexité administrative et le faible taux de sélection de l'ANR.
Il faut néanmoins parvenir à un équilibre, car le renforcement de la politique de recherche sur projet engagé depuis 2006 était indispensable : elle oriente une partie de la recherche vers des questions sociétales prioritaires comme l'environnement, l'énergie ou la santé, favorise la pluridisciplinarité et promeut de jeunes chercheurs talentueux. Elle a un effet levier sur les financements et le fait que la moitié des programmes de l'ANR soit blancs, c'est-à-dire non fléchés, profite à la recherche fondamentale. Mais le balancier risque d'être renvoyé trop loin, les crédits de l'ANR devant baisser de 9,6 % en 2013 et de 26,3 % entre 2013 et 2015. En outre, seulement 76 % des crédits enlevés à l'ANR en 2013 seront reversés aux organismes, la ministre ayant précisé hier que le solde serait supprimé pour contribuer à la maîtrise des finances publiques. Je propose de conjuguer, sur cette période de trois ans, baisse des crédits de l'ANR et hausse du taux de préciput, en portant à 20 % la part des subventions sur projet revenant à l'organisme de rattachement de l'équipe de chercheurs concernée.
Je me réjouis de l'inflexion donnée aux grandes orientations de l'ANR : stabilisation des taux de sélection, simplification des procédures, réduction de la précarité au titre des critères. Interrogée sur le préciput, Mme la ministre ne m'a pas répondu hier mais elle s'est engagée à le faire par écrit et n'a pas semblé hostile aux 20 %.
La politique menée préserve l'emploi, ce qui marque une inflexion par rapport aux années passées où l'emploi scientifique était précarisé et les contrats à durée déterminée (CDD) de courte durée la règle. Il convient de prendre garde à d'éventuelles dérives et de mieux accompagner les chercheurs en fin de contrat. L'application de la loi Sauvadet du 12 mars 2012 devrait limiter les problèmes. D'ailleurs, le 21 novembre, le ministère a obtenu les moyens de titulariser 2 000 personnes en 2013. L'objectif est de conduire le plan de titularisation en quatre ans et la ministre nous a dit hier que tous les départs à la retraite seraient compensés.
La hausse des crédits récurrents aux organismes de recherche variera selon les programmes, les subventions pour charge de service public augmentant d'environ 2 %. Les crédits du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) enregistrent une hausse de 2,9 %, pour s'établir à 2,6 milliards d'euros ; avec 72,8 millions de moyens supplémentaires, il est le principal bénéficiaire de la diminution des crédits de l'ANR. Le budget de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) bénéficie d'une hausse de 22 millions d'euros. Les dotations du Centre national d'études spatiales (CNES), au titre du programme de recherche civile, progressent d'environ 1 % soit 14,5 millions de plus ; cette hausse est cependant inférieure au budget prévu dans le contrat État-CNES 2011-2015, alors que la France doit à la fois satisfaire à ses engagements à l'égard de l'Agence spatiale européenne et lancer le programme Ariane 6. Ce dernier est essentiel pour assurer l'indépendance et la souveraineté européenne. Mme la ministre nous a apporté quelques motifs d'apaisement hier. Je l'ai également interrogée sur le montant de la réserve de précaution et je me félicite que le taux de mise en réserve sur les crédits de la recherche reste de la moitié du droit commun, soit 0,25 % de la masse salariale et 3 % des crédits de fonctionnement.
Quid des investissements d'avenir ? Avec 21,9 milliards d'euros sur 35 milliards, la MIRES est la principale bénéficiaire du programme des investissements d'avenir (PIA), dont 70,3 % sont non consomptibles, c'est-à-dire que les organismes ne pourront utiliser que les revenus issus du dépôt de ces sommes au Trésor. Enfin, 7,5 milliards, non encore affectés, iront au Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi présenté le 6 novembre par le Premier ministre qui a fixé deux priorités : le meilleur accès des petites et moyennes entreprises (PME) à ces ressources grâce à la Banque publique d'investissement (BPI) et l'accompagnement de filières existantes, dont la filière agronomique, et de filières d'avenir, comme les technologies génériques, la santé et l'économie du vivant, la transition énergétique ou la sécurisation des informations et des transactions.
Le coût du crédit d'impôt recherche (CIR) s'élève à 3,35 milliards d'euros et devrait s'établir de 5 à 6 milliards dès 2014. Son efficacité a été reconnue par de nombreux rapports. Si la stabilité juridique et fiscale est primordiale pour les acteurs économiques, le CIR appelle néanmoins certains correctifs, en particulier pour renforcer l'accès des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Il conviendrait d'encadrer son utilisation par de grandes entreprises comme Sanofi - les chiffres sur le laboratoire qu'elle a liquidé à Toulouse sont impressionnants. L'article 55 du projet de loi de finances prévoit d'ailleurs d'élargir le bénéfice du CIR à certaines dépenses d'innovation des PME pour un montant de 300 millions d'euros.
Mon rapport écrit évoque l'évolution de la politique européenne de recherche, présente le bilan du septième programme-cadre de recherche et développement (PCRD) et les perspectives du nouveau programme Horizon 2020, auquel la Commission européenne propose de consacrer 80 milliards et qui a fait l'objet d'un excellent rapport d'information de la commission des affaires européennes, présenté par André Gattolin. Je traite aussi des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche, dont la ministre nous a parlé hier.
Le bouleversement de notre système de recherche a parfois favorisé une meilleure coordination et un partenariat plus soutenu entre les différents acteurs. Tel est notamment le cas des Alliances et des pôles de compétitivité. Reste qu'un tel millefeuille manque de lisibilité et d'efficacité. La concertation engagée préparera la réforme. Je me réjouis de l'implication de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) dans ce processus.
Comme nous l'avons dit hier, Dominique Gillot et moi-même partageons le même avis sur l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES). J'ai été à la fois surpris et préoccupé par la prise de position brutale de l'Académie des sciences sur cette agence, dont elle avait initialement proposé la suppression. Or, l'Agence a su s'imposer comme une autorité suffisamment indépendante, suivant les standards européens et internationaux d'évaluation et elle a été capable de s'auto-réformer. Les dernières propositions d'amélioration émises par l'AERES devraient renforcer la confiance des chercheurs. La suppression de l'AERES, que demandent les contrôlés, marquerait un retour au mandarinat. Le conservatisme des chercheurs m'inquiète. Une lutte d'influence se développe auprès de la ministre même si l'Académie des sciences semble avoir fait un peu marche arrière - après tout, n'avait-elle pas décrété que le nuage de Tchernobyl s'était arrêté à nos frontières, en 1986 ? Il ne faut pas que Mme la ministre lâche du lest en matière d'évaluation.
Mme Fioraso a évoqué la politique en matière de transfert de la recherche publique dont je fais état dans mon rapport. Je m'inquiète aussi de l'évolution de la politique de valorisation et de diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle.
Le programme 186 de la MIRES, intitulé « Recherche culturelle et culture scientifique », voit ses crédits diminuer de 6,2 % en autorisations d'engagement et de 4,2 % en crédits de paiement. L'essentiel des économies porte sur la subvention pour charges de service public d'Universcience. Des acteurs locaux de la valorisation et de la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle s'interrogent sur sa réforme, notamment en raison du manque de financement des acteurs institutionnels dans les régions Bretagne, Languedoc-Roussillon, Aquitaine. En outre, les associations et les réseaux d'éducation populaire sont largement ignorés alors que leurs actions sont essentielles. La ministre nous a rassurés sur ce point hier, estimant que la définition claire des compétences dans l'acte III de la décentralisation règlerait cette question en toute transparence.
Enfin, mon rapport écrit revient sur la proposition de loi de Mme Marie-Christine Blandin, que le Sénat a adoptée la semaine dernière, pour renforcer l'indépendance de l'expertise scientifique et de l'alerte en matière de santé et d'environnement.
Compte tenu de la sanctuarisation des crédits en faveur de la recherche et d'une politique encourageant l'emploi et la croissance par l'innovation, je vous propose de donner un avis favorable aux crédits de la recherche.
Les crédits des programmes 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 231 « Vie étudiante » font l'objet d'une progression (+ 2,72 %) d'autant plus inattendue qu'elle intervient dans un contexte budgétaire contraint qui avait initialement conduit le Premier ministre, dans sa lettre de cadrage, à solliciter une réduction de 3,5 %. L'augmentation du budget s'inscrit dans le cadre des priorités affirmées par le Président de la République pour la jeunesse, et favorisera l'innovation, levier d'une économie compétitive.
Premier motif de satisfaction, la création à partir de la rentrée 2013 de 1 000 postes supplémentaires dans l'enseignement supérieur, ce qui coûtera 28 millions d'euros en 2013 et 61 millions en année pleine. L'objectif est de répondre au sous-encadrement des étudiants en premier cycle, souligné par les indicateurs de performance sensiblement dégradés malgré le plan « Réussite en licence » brandi par le précédent gouvernement. Afin que ces emplois soient bien affectés à la réussite des étudiants en premier cycle, ce ciblage sera intégré par voie d'amendements dans les contrats quinquennaux entre l'État et les établissements. Responsabilisées dans le cadre d'un contrat pédagogique établi avec la direction générale pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle (DGESIP) et les recteurs, les universités bénéficiaires pourront utiliser ces postes en fonction de leurs besoins spécifiques pour l'appui à la réussite des étudiants : élargissement de l'amplitude horaire des bibliothèques, tutorat ou travail en petits groupes, renforcement de l'enseignement des langues vivantes, y compris le français.
Vingt-trois universités sont déficitaires pour la deuxième année consécutive, et le fonds de roulement de vingt autres est inférieur au seuil prudentiel de 30 jours de fonctionnement. Le précédent gouvernement n'avait créé aucun outil de suivi et de support pour accompagner les établissements. Or la gestion de leur masse salariale représente parfois jusqu'à 80 % du total des moyens récurrents attribués, ce qui a contribué à rigidifier les budgets des universités. Face à cette situation anxiogène et potentiellement explosive, la ministre a décidé d'accompagner les universités exposées à de lourdes difficultés budgétaires.
Le ministère a déployé, dès l'été, un système très fin de diagnostic et d'accompagnement. Un tableau de bord de la situation financière des établissements a été mis en place pour analyser l'origine des déficits, qu'elle soit comptable, conjoncturelle ou structurelle. Des diagnostics-flash sont établis pour proposer des mesures d'urgence afin de revenir à l'équilibre dès l'exercice suivant. C'est la première fois qu'un gouvernement analyse et anticipe les coûts et les risques du passage à l'autonomie. Que de temps perdu et d'universités fragilisées depuis 2009, pendant que les services centraux observaient, passivement, l'accession à l'autonomie ! Il était temps de redonner confiance aux universités, de reconnaître qu'elles ne pouvaient pas relever seules les défis de l'autonomie. La rhétorique stigmatisante qui pointait du doigt les mauvais élèves de l'autonomie en les plaçant sous tutelle a été abandonnée : on est enfin passé au dialogue et à l'analyse partagée.
Je souhaite que ce travail d'accompagnement débouche sur une méthodologie d'analyse prospective, de nature à clarifier les modalités de gestion des établissements, à renforcer la lisibilité et la sincérité des dotations budgétaires et à responsabiliser les choix de gestion des universités. Celles-ci devront mieux encadrer leur masse salariale tout en procédant à une affectation raisonnée de leurs moyens aux ouvertures de postes. Elles devront tenir compte des contraintes qui pèsent sur les finances publiques, comme des possibilités qui s'offrent à elles pour élargir leurs sources de financement ou promouvoir des méthodes de formation moins consommatrices de postes, en s'appuyant sur les nouvelles technologies de l'information et de la communication pour l'enseignement (TICE). Notre pays mise encore trop peu sur la formation à distance et sur le développement d'outils numériques d'apprentissage.
En contrepartie, les universités souhaitent avoir des relations de confiance avec la tutelle de l'État et des moyens récurrents sincères, alloués sur la base de critères transparents et d'équité. Cela suppose que les deux parties s'entendent sur un cadre de responsabilités partagées en matière de financement, notamment du fameux glissement vieillesse-technicité (GVT), qui ne représente que 35 à 40 millions d'euros sur un budget global de 12,5 milliards. Que n'avons-nous entendu sur le GVT ! Lorsque l'État avait la maîtrise des ressources humaines des universités, il pouvait neutraliser à l'échelle nationale le GVT solde des universités, en jouant sur l'impact des entrées-sorties sur tout le territoire. Cela n'est plus possible avec une masse salariale fractionnée entre plus de 80 universités autonomes : neutraliser le GVT au Havre, ce n'est pas la même chose que de le neutraliser à Montpellier, car la pyramide des âges et les enjeux stratégiques diffèrent. Reste que l'État doit assumer sa part de responsabilité dans l'évolution de la masse salariale en raison de l'augmentation de la valeur du point d'indice, du taux du compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », des mesures catégorielles, des titularisations par la loi Sauvadet, des conditions de déroulement des carrières affectant le GVT...
Au titre du financement du GVT solde positif des universités, la ministre dégèlera 30 millions en fin d'année. Toutefois, faute d'un mécanisme de financement par anticipation de l'évolution du GVT solde des universités, le problème se reposera l'année prochaine. L'État et les universités doivent travailler ensemble pour actualiser la masse salariale. La ministre nous a assurés hier qu'à la suite à un arbitrage ministériel récent, la couverture de l'évolution du taux du CAS « Pensions » serait prise en charge à 100 %.
Je m'inquiète de voir la dotation par élève des établissements d'enseignement supérieur privés non lucratifs diminuer de 15 %. Depuis plusieurs années, ces établissements se sont rapprochés des universités afin de développer et de mutualiser leurs outils de recherche. La proximité qu'ils entretiennent avec les milieux économiques et industriels constitue un atout pour nos universités, à l'heure où, selon le rapport Gallois, l'insuffisante articulation de notre système de formation avec l'industrie handicape notre économie.
À ceux qui réclament la suppression de l'AERES, faut-il rappeler que sa création répond à une exigence européenne ? Un espace européen de l'enseignement supérieur suppose la confiance réciproque des États membres vis-à-vis des systèmes d'enseignement supérieur de leurs voisins, sur la base d'une évaluation indépendante. L'AERES offre une garantie d'évaluation collégiale, indépendante et impartiale des activités et des performances de l'enseignement supérieur et de la recherche. L'évaluation a pu provoquer, notamment en 2007, lors de sa création, une lourdeur bureaucratique à laquelle il convenait de remédier. Le président de l'AERES a ainsi renforcé l'autoévaluation et allégé les procédures. Les rapports d'évaluation de l'AERES sont précieux dans le processus de négociation contractuelle qui est le pendant de l'autonomie, notamment pour l'attribution des financements par le ministère comme par les régions et les partenaires associatifs ou industriels. En outre, ces rapports aident les établissements à améliorer leur propre allocation interne des moyens.
Les crédits du programme 231 « Vie étudiante » progressent de 7,3 %. Le Gouvernement met ainsi un terme à l'impéritie de ses prédécesseurs. Le dixième mois de bourse est enfin budgétisé et les prévisions tiennent compte du nombre de boursiers. Une dotation de 20 millions est prévue pour le centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) afin de participer à la construction de 8 000 logements étudiants par an. Le CNOUS, discrédité et malmené ces dernières années au profit d'une « agenciarisation » de ses activités, est véritablement plébiscité par ses partenaires.
Une réflexion sur l'évolution de l'accueil des étudiants étrangers en France est indispensable. Campus France, grand vainqueur de tous les arbitrages interministériels du précédent gouvernement, s'est vu attribuer des financements supérieurs à la masse salariale qui lui a été transférée. Le transfert des activités internationales du CNOUS vers cet établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) a été particulièrement coûteux pour le réseau des oeuvres puisque sa subvention est amputée de 2,4 millions tandis que ses ressources propres diminuaient de 1,5 million d'euros qui provenaient de la gestion des bourses des gouvernements étrangers.
Pour quels résultats ? Seulement 52 conventions de bourses ont été reprises, plusieurs gouvernements étrangers préférant ne pas renouveler leur coopération. Des étudiants risquent de ne pas percevoir de bourse en l'absence de reprise de leur convention, et l'accueil sur le sol français est assez froid, voire inexistant, l'objectif étant une dématérialisation maximale. Nombreux sont ceux qui s'émeuvent du peu d'égards manifestés par Campus France aux étudiants étrangers, qui substitue une gestion commerciale à l'esprit de mission de service public qui présidait à nos relations avec nos partenaires étrangers. Un article de l'édition en ligne du Monde titrait : « Campus France fait fuir les étudiants étrangers qu'elle est censée attirer », et dénonçait la perte de la dimension humaine de l'accueil assuré autrefois par le CNOUS. Hier, le président de l'établissement a démissionné, dénonçant de façon très précise des dysfonctionnements. Les ministères de tutelle doivent demander des comptes à Campus France.
Je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur au sein de la MIRES et de soutenir la ministre qui souhaite accompagner l'évolution des universités et favoriser la réussite de tous les étudiants.
Je rejoins très largement les conclusions de ces rapports très complets. Dans le contexte budgétaire actuel, la progression des crédits est très positive. Pour avoir assisté à une partie des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche, je souhaite attirer votre attention sur des problèmes récurrents : pourquoi les étudiants en médecine qui échouent après leur redoublement en première année ne bénéficieraient-ils pas de plus de passerelles ? Cela éviterait une déperdition de talents. Ne faudrait-il pas proposer de payer les études des étudiants proches du numerus clausus et leur demander en contrepartie de s'installer dans les déserts médicaux ?
Depuis vingt ans, nous ne parvenons pas à orienter les titulaires de bacs techniques et professionnels dans les sections de techniciens supérieurs ou en instituts universitaires de technologie (IUT) où ils pourraient s'épanouir. Faute de mieux, ces jeunes s'inscrivent dans des filières généralistes où leur taux d'échec est préoccupant.
Première préoccupation : 23 universités sont en difficulté, 9 en grande difficulté et 5 connaissent une situation inquiétante. Quelle qu'ait été la gestion passée, il est indispensable d'accompagner les nouvelles équipes.
Nonobstant les progrès de l'AERES, les enseignants-chercheurs continuent à passer plus de temps à remplir des dossiers, à courir après les appels d'offre et à procéder à des évaluations qu'à faire de la recherche. Aux États-Unis, les chercheurs ont également connu une hyper-bureaucratisation. Il conviendrait de surveiller le ratio du temps consacré à la recherche par rapport aux tâches administratives qui finissent par appauvrir la recherche. Cela dit nous voterons les rapports.
Je serai moins enthousiaste. Certes, les crédits progressent dans un budget contraint, mais le Gouvernement a refusé d'examiner nos propositions sur la première partie pour desserrer la contrainte que nous nous sommes imposée. Du fait de l'inflation, il ne s'agit que d'un budget de reconduction qui ne suffira pas pour réorienter les politiques précédentes.
Le CIR profite davantage aux grands groupes qu'aux PME. M. Plancade a parlé de Sanofi, mais il y a, hélas !, bien d'autres exemples, qui pénalisent le redressement productif. En outre, cette loi de finances accentue cela, puisqu'une nouvelle ligne sera dédiée à l'innovation et aux PME.
Autre sujet de préoccupation : l'appel à projet reste la règle. Or, il a des conséquences négatives sur l'emploi et il accentue la précarisation. En outre, comme je l'ai dit hier à la ministre, les 1 000 emplois pour la réussite licence sont en danger car la provision budgétaire apparaît insuffisante.
Enfin, le plan campus me laisse très sceptique : en quoi l'entrée des collectivités territoriales va-t-elle mettre un terme aux effets pervers des partenariats public-privé (PPP) ?
Pour toutes ces raisons, notre avis est plus que réservé sur cette mission.
Je suis un peu gêné, car je n'ai pas pu assister à l'intégralité de l'audition de Mme Fioraso. Certes, je partage son souhait de voir le plus possible de jeunes accéder à l'enseignement supérieur. Si les bourses sont importantes, la proximité des premiers cycles l'est tout autant. Les antennes universitaires se sont développées dans les villes moyennes à un moment où le nombre d'étudiants augmentait fortement. La démographie des effectifs s'étant stabilisée, les universités remettent parfois en cause ces antennes, ce qui va à l'encontre de la démocratisation de l'accès aux études supérieures, car les jeunes de familles modestes ont du mal à s'installer dans une ville lointaine. Revenir sur ce maillage de notre territoire serait négatif.
Bien que le baccalauréat constitue le premier grade de l'enseignement supérieur, c'est l'inspection générale de l'enseignement secondaire qui s'en occupe. Les bacs technologiques devraient être prioritaires dans l'enseignement supérieur technologique. Les bacs pro, eux, ouvrent sur la vie professionnelle avec une qualification et un niveau d'enseignement corrects, quitte à reprendre ensuite des études grâce à la validation des acquis de l'expérience. Dans mon rapport sur le baccalauréat, j'avais d'ailleurs souhaité que l'État garantisse une reprise de formation pour les bacs pro qui sont allés dans l'enseignement supérieur. Le laxisme aboutit à des résultats catastrophiques, alors qu'une formation supplémentaire favorise la réussite.
Je partage les préoccupations de Mme Gillot sur l'accueil des étudiants étrangers. Il ne faut pas entrer dans la désagréable querelle entre le CNOUS, longtemps crispé, et Campus France. En revanche, nous devrions faire comme les Anglais, les Allemands et les Canadiens qui facilitent l'insertion et qui règlent les problèmes pratiques de ces étudiants. Campus France est utile, mais il doit jouer tout son rôle, sinon nous aurons mauvaise réputation à l'étranger.
Je n'ai pas beaucoup apprécié que vous employiez au sujet de la politique universitaire du précédent gouvernement le terme « impéritie » qui relève de la polémique. Nous ne vous suivrons pas sur ce point et c'est pourquoi je suis réservé sur ce rapport.
Je regrettais simplement le manque d'anticipation des coûts et des conséquences du passage à l'autonomie par le précédent gouvernement. S'il ne s'agit que d'un mot, je le retire bien volontiers pour que vous votiez ce rapport.
Nous reconnaissons les réserves exprimées par la communauté universitaire sur l'AERES relayées par Mme Bouchoux sur l'AERES mais après cinq ans d'existence, les contrôlés ne crient plus au loup et le nouveau président s'applique à alléger toutes les procédures. Lorsque nous avons demandé aux trois principaux organismes de recherche s'ils souhaitaient la disparition de l'agence, ils ont répondu par la négative, car ils ont progressé grâce à l'évaluation, même si les dossiers restent très lourds. Le 12 décembre, lors de l'audition des responsables de celle-ci, nous leur demanderons de faire le point. Avec Mme Gillot, mais aussi avec MM. Adnot et Berson, nous estimons que s'il faut réformer l'AERES, sa suppression constituerait une régression.
Certes, certaines grandes entreprises ont profité du CIR, mais le rapport de M. Berson estime à 2 % le nombre de dossiers litigieux. Même si c'est encore trop, les dérapages ne sont pas si nombreux que cela. Les grandes entreprises perçoivent 65 % des crédits. Enfin, l'Inspection générale des finances a attribué un 3, la note maximale à la gestion du CIR. Il convient donc de réduire ou de supprimer les crédits versés aux grandes entreprises et de réorienter les CIR vers les PME et les très petites entreprises (TPE), comme le prévoit l'article 55 du projet de loi de finances.
Notre réflexion s'est inspirée des Assises de l'enseignement supérieur et des nouvelles orientations de Mme la ministre.
La situation des étudiants en médecine ayant échoué en première année n'est pas satisfaisante : ils devraient être réorientés dans d'autres secteurs de la santé. Il nous faudra réfléchir ainsi à des formations universitaires dans le secteur du médico-social. L'augmentation du numerus clausus aiderait-elle à traiter des déserts médicaux ? La ministre a été sollicitée, et une évaluation précise des besoins est nécessaire avant d'aller plus avant.
La conclusion des Assises, de même que les rapports de la Conférence des présidents d'université (CPU), souligne combien la situation des bacheliers professionnels est préoccupante. L'arbre ne doit pas cacher la forêt : il faut viser la réussite de tous les bacheliers. Or un étudiant sur deux échoue en première année. Il convient d'étudier la question de près ; les ateliers des Assises de l'enseignement supérieur feront des propositions. D'ores et déjà, les universités se préoccupent de ces étudiants, et ne les considèrent plus comme un moyen d'augmenter le nombre d'inscrits en première année : il y a une vraie volonté d'accompagnement et d'appui.
La procédure de diagnostic et d'accompagnement qui est mise en place révèle bien la grande diversité des universités. Une grosse université, pourvue de capacités de développement et d'alliance, voire de fusion, ne saurait être comparée à une petite qui s'attache à développer des formations de niche - même si c'est parfois cette dernière qui a le moins de difficultés. Le travail mis en oeuvre par des équipes de pairs sous la houlette de la direction générale pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle (DGESIP) consiste à rechercher un diagnostic partagé et des solutions viables pour tous. Il ne s'agit ni d'une mise sous tutelle, ni d'une libéralisation sauvage, mais d'une démarche sur le chemin de l'équilibre, voire de la croissance, dont le coût ne compromettra pas la croissance : pas question d'engager des moyens sans les assortir de contrats d'utilisation.
Les mille postes sont accordés, après une évaluation de la situation des universités, dans le cadre d'un contrat pédagogique et sont correctement budgétés. Les universités s'engagent dans une révision de leur pédagogie : dans plusieurs secteurs le déficit de pédagogie est patent, alors que le statut d'étudiant n'exonère pas d'une attention particulière à la transmission des connaissances. Les écoles supérieures de formation des enseignants contribueront à cette amélioration.
La ministre a remis dans le droit commun les commandes passées par les équipes universitaires : le PPP n'est pas la seule méthode pour construire un bâtiment utile, mais plutôt le dernier recours : la maîtrise d'ouvrage publique doit idéalement rester la règle. En particulier, pour des projets de petite taille, un PPP n'est nullement nécessaire, comme l'a bien mis en lumière la mission conduite par Roland Peylet. La programmation des investissements immobiliers des universités a ainsi pu être réorientée pour partie vers des maîtrises d'ouvrage publiques.
Suivant ses rapporteurs, la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».