La commission examine, en nouvelle lecture, le rapport et le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 684 (2012-2013) relatif à la représentation des Français établis hors de France.
En mars dernier, notre commission a examiné deux textes : l'un sur la prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger, l'autre sur la représentation des Français établis hors de France. Le premier a été adopté conforme par l'Assemblée nationale et validé par le Conseil constitutionnel. Nous sommes saisis à nouveau du second, car les divergences étaient trop nombreuses et les délais trop contraints pour arriver en commission mixte paritaire à un compromis entre les deux assemblées.
Les échanges qui se sont multipliés entre députés et sénateurs ont fait converger les points de vue. Les premiers souhaitaient faire de l'Assemblée des Français de l'étranger un Haut conseil des Français de l'étranger ; pour des raisons symboliques et afin de préserver le droit de ses membres de parrainer un candidat à l'élection présidentielle, le nom actuel a été conservé. Les sénateurs ont en revanche accepté de supprimer la possibilité initialement offerte aux associations de participer au financement des campagnes.
En première lecture, alors que nous avions adopté un mode de scrutin direct, l'Assemblée nationale est revenue au projet initial du Gouvernement, les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger étant élus par les conseillers consulaires. Nous pouvons y consentir, en échange d'un découpage à quinze circonscriptions, contre cinq prévues initialement par l'Assemblée nationale
Autre modification : la date d'élection des représentants des Français de l'étranger a été maintenue au mois de mai, conformément au souhait de l'Assemblée nationale et du ministère des affaires étrangères, de ne pas avoir de concomitance avec les élections municipales. Le Sénat était partisan de les faire coïncider, mais le vote électronique aurait exigé que les listes électorales soient établies plusieurs semaines avant le scrutin, ce qui n'est pas possible techniquement aujourd'hui. Il faudra éventuellement y revenir d'ici 2020 ; la réflexion ne doit pas s'arrêter.
Le délai séparant l'élection des conseillers consulaires et celle des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger a en outre été raccourci, afin que la seconde procède véritablement de la première et n'ouvre pas une nouvelle campagne électorale. Quant aux modalités de vote, l'Assemblée nationale a repris pour les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger les dispositions plus sûres que nous avions introduites dans le mécanisme d'élection des sénateurs représentants les Français établis hors de France.
Le découpage des circonscriptions relevait de la quadrature du cercle. Il fallait pouvoir constituer au moins trois listes dans chaque circonscription. Or le découpage du Gouvernement ne réunissait pas assez de personnes éligibles pour cela. Désormais, avec ce découpage à quinze circonscriptions, trois listes peuvent théoriquement être présentées dans chaque circonscription.
Lors de la nouvelle lecture, les députés ont adopté deux amendements en séance : le premier concerne le rapport remis à l'Assemblée des Français de l'étranger, auquel il ajoute l'action des pouvoirs publics en matière de commerce extérieur. Si cette nouvelle obligation, qui ne relève pas de la logique de ce rapport, ne pose pas de problème de fond, pourquoi avoir supprimé, en première lecture, le sujet de l'action culturelle ? Le second amendement limite à trois le nombre de mandats consécutifs de conseiller consulaire ou de conseiller à l'Assemblée des Français de l'étranger. C'est la première fois, Présidence de la République mise à part, qu'on limite dans le temps le nombre des mandats électifs, mais l'Assemblée nationale l'a voté et je vous propose de faire de même. Je vous propose donc d'adopter ce texte, qui est un bon compromis.
Vous avez excellemment exposé le parcours du texte. Je veux saluer l'efficacité du dialogue entre l'Assemblée nationale et le Sénat, qui n'est pas toujours si remarquable et qui est à mettre au crédit en particulier de nos rapporteurs. Ici, un vrai travail commun a été effectué sur un texte non partisan, puisqu'il s'agit d'améliorer la représentation des Français vivant à l'étranger. Plus démocratique que le précédent, le système que vous nous présentez instaure une vraie proximité entre les Français de l'étranger et leurs représentants.
La future Assemblée des Français de l'étranger est en outre investie de responsabilités nouvelles. Espérons qu'elle s'en servira. Elle disposera d'une information plus complète de la part du Gouvernement sur les politiques qui concernent nos concitoyens établis hors de France.
L'élection des conseillers consulaires marque une véritable innovation. Leur collège portera l'élection sénatoriale, ce qui, dans cette enceinte, est un motif d'attention tout particulier.
Si la procédure accélérée n'avait pas été décidée, les deux chambres auraient dialogué plus précocement. Le dialogue de sourds par lequel elles ont commencé l'examen de ce texte nous a fait perdre beaucoup de temps.
La nouvelle version sortie de l'Assemblée nationale est certes meilleure que la précédente avec ses cinq circonscriptions. Cela étant, je ne partage pas l'enthousiasme du rapporteur : je doute que trois listes émergent dans chaque circonscription, puisqu'il faut le nombre de candidats plus deux pour en constituer une.
Alors, en prenant tout le monde.... On aurait pu regrouper certaines circonscriptions pour mieux panacher les tendances politiques.
Faire de l'Assemblée des Français de l'étranger un Haut conseil des Français de l'étranger devait procéder d'un mouvement d'humeur : sous-entendre que les conseils consulaires étaient de « bas conseils », n'était pas très flatteur pour nos compatriotes établis hors de France - on a connu dialectique plus habile.
Si les prérogatives des élus sont opportunément augmentées, je regrette que la formulation ne retienne pas l'indicatif et se contente d'offrir aux conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger la possibilité d'agir. Par exemple, le budget donne lieu à un débat qui peut être suivi d'un avis. Ne pas acter cet avis dans la loi rend la chose bancale.
Nous avions durement bataillé en séance pour le vote direct. Les arguments en faveur du vote indirect ne tiennent pas la route. Les motifs d'inconstitutionnalité soulevés sur le scrutin direct par les uns ou les autres témoignent d'une mauvaise lecture du texte. Il faut évoluer sur ce point : on ne peut à la fois défendre un principe de proximité et prôner un suffrage indirect.
Nous avions l'opportunité de donner un nouvel élan à la représentation des Français établis hors de France, et nous manquons ce rendez-vous. Je suis extrêmement déçu. En 1982, j'avais soutenu Claude Cheysson lorsqu'il a imposé, sous l'autorité de Pierre Mauroy et de François Mitterrand, l'élection des représentants des Français de l'étranger au suffrage universel direct, pour en faire des Français comme les autres. Et aujourd'hui, on leur supprime le droit d'être représentés auprès des autorités de la République par des élus au suffrage direct ! Je tiens à la démocratie de proximité, j'approuve les dispositions relatives au collège électoral des sénateurs, qui corrigent une anomalie. Pour le reste, le projet remet en cause l'avancée majeure réalisée par François Mitterrand. Bien qu'UMP, je défendrai Claude Cheysson et François Mitterrand : je ne pourrai voter le texte.
Si l'on veut que la représentation des Français de l'étranger ait un sens, il faut de la proximité. Les conseillers consulaires n'y suffiront pas, car ce sont des comités sans pouvoir, placés auprès du consul, qui représente certes l'autorité de la France, non la France elle-même. L'AFE peut bien garder sa dénomination - cela me fait d'autant plus plaisir que je suis à l'origine de l'amendement qui l'avait proposé -, ce n'est plus une assemblée dès lors qu'elle est élue au suffrage indirect. Ce n'est pas par hasard que les députés ont souhaité l'appeler Haut conseil : c'en est un désormais. Des amendements seront présentés en séance pour revenir au suffrage direct, tout en respectant le lien entre les élections consulaires et l'AFE, car le Gouvernement a raison sur ce point.
Nous sommes en plein débat sur l'intercommunalité : rappelez-vous que la droite avait instauré l'élection des conseillers communautaires par les conseils municipaux, alors que la gauche défendait le suffrage universel direct. Et vous défendez le contraire pour les Français de l'étranger ? C'est incohérent !
Je le sais bien. En l'occurrence, le souci de commodité prime l'idéologie. Or vous le verrez à la lecture de nos amendements : organiser les deux élections simultanément est très simple : il suffit de prévoir deux types de bulletins et deux urnes différentes. L'élection simultanée des conseillers généraux et régionaux, ou encore au Parlement européen et à l'Assemblée des Français de l'étranger, témoigne de la faisabilité d'un tel système. Si ces amendements passent, je serai le premier à défendre le texte, car il aura sauvé l'esprit de la réforme de François Mitterrand tout en allant de l'avant.
Plus de quatre cents conseillers consulaires seront élus au suffrage universel direct. Il y aura plus d'élus au suffrage universel que maintenant.
Pour le reste, à nouveau, il s'agit d'un texte de compromis, fruit d'analyses juridiques pointues, destiné à recueillir le plus large accord des députés et des sénateurs. Je suis étonné d'entendre M. Frassa défendre un découpage plus large des circonscriptions qui distendrait le lien entre les électeurs et leurs représentants. Je le répète : il sera possible de constituer trois listes dans chaque circonscription. Le système fonctionnera donc.
L'Assemblée des Français de l'étranger est libre. Elle pourra émettre un avis sur le rapport relatif à la situation des Français de l'étranger, et formuler des observations sur le budget.
La question du nom n'est pas négligeable. Monsieur Cointat, les maires qui parrainent les candidats à la présidentielle sont élus par les conseillers municipaux. En conservant son nom à l'assemblée, nous maintenons à ses membres la possibilité de parrainage, dont ils font un large usage.
Ne demeurent que deux enjeux : garantir la participation aux élections de l'année prochaine, et finaliser les détails relatifs aux compétences des conseils consulaires et à l'organisation de l'Assemblée des Français de l'étranger, qui sont du domaine réglementaire. La réforme aurait pu être plus audacieuse, mais entre la loi de 1982 et celle-ci, nul ne peut nier que des progrès démocratiques sont accomplis.
Il est vrai que ce texte poursuit deux objectifs, pluralisme et proximité, qu'il n'est pas toujours aisé de concilier. Il propose néanmoins un compromis en découpant les circonscriptions selon ces deux principes, tout en tenant compte de la remarquable diversité des communautés françaises à l'étranger. Le groupe socialiste le votera. Il importe de tenir le calendrier.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article 29 quinquies
Reprenant un amendement déjà présenté, l'amendement n° 1 relève de la loi organique.
L'amendement n° 1 est rejeté.
Article 29 decies
L'amendement n° 2 rouvre le débat sur le vote par correspondance. Mis en place pour les législatives l'année dernière, il s'est révélé très coûteux ; moins de 1% des électeurs y ont eu recours, et la moitié des votes exprimés n'ont pu être validés. Par conséquent, il n'y a aucune raison d'accepter cet amendement.
L'amendement n° 2 est rejeté.
Nous en venons au vote du texte, dont le rapporteur a démontré qu'il comporte des concessions non négligeables des députés.
Ce texte pourra être adopté en séance sous une forme qui, j'en suis sûr, conviendra davantage au rapporteur...
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :