Déposé le 13 novembre 2017 par : MM. Savary, Milon, Mme Deroche, MM. Bizet, Bonhomme, Chaize, de Nicolay, Détraigne, Mme Férat, M. Gremillet, Mme Imbert, M. Lefèvre, Mme Lopez, MM. Mandelli, Paccaud, Panunzi, Pellevat, Perrin, Raison, Reichardt, Vial.
Après l’article 35
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5121-12 du code de la santé publique, est complété par treize alinéas ainsi rédigés :
« VII. – En dehors des situations visées à l’article L. 5121-8, L. 5121-9-1 et au présent article du présent code, un médicament peut, à titre exceptionnel et de manière temporaire, être mis à disposition à un stade précoce de développement pour des patients incurables volontaires, dès l’issue de la phase I des essais cliniques, dans le cadre d’une utilisation testimoniale éclairée et surveillée du médicament, non investigatoire et ne se substituant pas aux essais cliniques, sous les conditions suivantes :
« a) Différer le traitement exposerait le patient à des conséquences graves, dégradantes ou invalidantes ;
« b) Il n’existe pas, pour la pathologie dont souffre le patient, d’alternative thérapeutique appropriée et le patient n’est pas susceptible d’être inclus dans un essai clinique, notamment pour des raisons géographiques, de calendrier de l’essai ou de non-satisfaction des critères d’inclusion ;
« c) Un comité indépendant institué sur demande du titulaire des droits sur le médicament et dans des conditions déterminées par un décret qui en précise la composition et les modalités de fonctionnement, fournit aux médecins traitants, à la demande de leurs patients volontaires, et sur la sollicitation préalable du titulaire des droits, la preuve de l’existence d’éléments scientifiques, pré-cliniques ou cliniques, démontrant le potentiel intérêt thérapeutique chez l’homme et permettant de présumer sa sécurité ;
« d) Le patient pris en charge ou son représentant légal reçoit une information appropriée délivrée par son médecin prescripteur, le cas échéant à l’aide de la personne de confiance mentionnée à l’article L. 1111-6 du présent code, et a une pleine connaissance du risque thérapeutique potentiellement associé à l’utilisation du médicament auquel il doit exprimer un consentement exprès et éclairé ;
« e) L’utilisation du médicament fait l’objet d’une surveillance médicale étroite dans des conditions définies par l’opérateur titulaire des droits sur le médicament et validées par le comité indépendant mentionné au c du présent VII ;
« VIII. – L’utilisation du médicament dans les conditions qui précèdent est sous le contrôle d’une personne responsable, résidant en France et rattachée à l’opérateur titulaire des droits sur le médicament, présentant les compétences scientifiques, toxicologiques, pharmacologiques, industrielles et médicales appropriées.
« IX. – Le médecin traitant, à la demande du patient volontaire, soumet au titulaire des droits sur le médicament, une demande de communication d’information des données portant sur le médicament. Le titulaire des droits peut, sans motif, s’y opposer. Dans le cas contraire, il sollicite expressément le comité mentionné au c du VII aux fins de transmission au médecin traitant des données sollicitées.
« Le médecin traitant, à la demande du patient volontaire et après avoir reçu les éléments sollicités mentionnés au VIII, peut soumettre une demande pour une utilisation testimoniale éclairée et surveillée, auprès du titulaire des droits sur le médicament. À réception de cette demande, le titulaire des droits lui transmet l’identité de la personne responsable mentionnée au VIII. Cette personne peut, dans des conditions définies par décret, s’opposer à la demande d’utilisation testimoniale, si elle estime cet usage inapproprié. En l’absence de réponse de la société titulaire des droits dans le mois à compter de la réception de la demande, celle-ci est réputée refusée.
« En cas d’acceptation par la société titulaire des droits, l’utilisation du médicament fait l’objet, dans des conditions précisées par décret, d’une déclaration préalable auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, adressée par le médecin prescripteur et visée par le patient volontaire. Cette déclaration précise l’identité de la personne responsable mentionnée au VIII.
« Si le prix du produit est librement déterminé par le titulaire des droits, celui-ci s’engage à examiner, au cas par cas, des demandes d’accès à titre gratuit, qui pourraient lui être présentées de manière motivée. En tout état de cause, si le produit est fourni à titre onéreux, son coût ne fait en aucun cas l’objet d’une prise en charge ou d’un remboursement par l’assurance maladie.
« L’opérateur titulaire des droits sur le médicament dépose chaque année auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et du comité indépendant mentionné au c du VII, un bilan de l’état d’avancement du développement de son médicament et des données collectées à partir des patients ayant reçu le produit de manière testimoniale, dans des conditions définies par décret.
« XI. – L’utilisation testimoniale éclairée et surveillée du médicament, telle que prévue au présent article, cesse de produire ses effets dès lors que le médicament obtient, dans l’indication concernée, soit une autorisation de mise sur le marché, soit une autorisation temporaire d’utilisation mentionnée au même article. Il peut également y être mis fin à tout moment, soit par l’Agence nationale de sécurité sanitaire des produits de santé, soit par la société titulaire des droits en cas d’impossibilité matérielle de fourniture ou de remise en cause du bénéfice prévisible du médicament au regard des informations disponibles. »
Le passage d’une molécule innovante des premiers essais cliniques à la commercialisation nécessite couramment un délai de dix ans, pouvant dépasser quinze ans notamment dans le traitement des troubles neurodégénératifs dont l’évolution est très lente.
Ces lenteurs induisent des pertes de chance pour les patients et mettent également en danger des sociétés de biotechnologies innovantes qui se retrouvent à cours de financement, cela même après l’obtention de résultats prometteurs.
La mise à disposition de médicaments contenant certaines molécules ayant démontré leur potentiel thérapeutique se retrouve freinée par un cadre juridique contraignant applicable aux demandes d'autorisations de mise sur le marché visées à l'article L. 5121-8 du Code de la santé publique mais également aux demandes d’autorisations temporaires d’utilisation des médicaments mentionnées à l’article à l’article L.5121-12 du même Code, au-delà des incontournables difficultés associées à la prise en charge par l’assurance maladie de ces modes d’accès au médicament.
Or, certains patients faisant face à une maladie incurable souhaitent pouvoir bénéficier de ces médicaments innovants en prenant, de manière éclairée et donc en toute connaissance de cause, le risque thérapeutique associé à leur utilisation.
La solution pour répondre à l’attente de ces patients résiderait dans l’utilisation testimoniale éclairée et surveillée du médicament (UTES), en permettant la mise à disposition très précoce de médicaments innovants auprès de patients incurables volontaires, même si ces médicaments sont à un stade d’évaluation clinique précoce et dès lors que la preuve de l’existence d’éléments scientifiques, pré-cliniques ou cliniques, démontrant le potentiel intérêt thérapeutique chez l’homme et permettant de présumer de sa sécurité, pourrait être fournie.
L’UTES serait déclarative et non soumise à autorisation préalable, et l’expression d’une décision médicale éclairée et conjointe d’un patient et de son médecin
Elle n’en serait pas moins sous la surveillance de l’ANSM qui serait destinataire de bilans réguliers concernant cet usage et serait bien évidemment mise en œuvre dans un cadre médicalisé et sécurisé, propre à assurer une surveillance étroite des patients concernés.
L’UTES, qui serait donc un nouveau mode d’accès au médicament, à côté de l’essai clinique, de l’AMM et de l’ATU, permettrait ainsi de réduire dans des proportions considérables les délais imposés aujourd’hui de fait par ces procédures existantes de mise à disposition des médicaments, permettant en outre de récolter des données indispensables à l’évaluation des thérapeutiques concernées, accélérant ainsi leur possible mise sur le marché.
L’UTES semble particulièrement adaptée et nécessaire dans le domaine neurodégénératif, non seulement en ce que les essais cliniques y sont les plus longs, à cause de l’évolution très lente des neurodégénérescences, mais également parce que les médications neuroprotectrices présentent par nature un profil de sécurité encourageant.
Ne faisant pas l’objet d’une prise en charge par l’assurance maladie, l’UTES ne doit pas être un dispositif d’accès précoce qui induirait une prise en charge à deux vitesses, qui serait ouverte aux seuls patients pouvant en assumer le coût. Aussi, si les patients pourront soutenir les sociétés de biotechnologies via une participation financière, cela permettra de contribuer aux efforts de ces sociétés et de favoriser une accélération de la recherche et donc de la mise sur le marché des innovations thérapeutiques dans l’intérêt du plus grand nombre. L’UTES pourra également être mise à disposition par la société titulaire des droits à titre gratuit pour les cas spécifiques démontrant des circonstances de fait déplaçant l'équilibre des motifs d’une utilisation testimoniale en faveur d’un recours compassionnel, et en particulier pour les patients démontrant ne pouvoir en assumer le coût.
Un décret permettra de compléter le cadre juridique prévu par la loi, en particulier pour préciser la composition et les modalités de fonctionnement du comité indépendant, dans un souci de sécurité des patients, ainsi que les éléments et renseignements minimaux à fournir dans la déclaration à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et le cas échéant la procédure applicable.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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