Amendement N° 3 3ème rectif. (Rejeté)

Clôture du scrutin pour l'élection d'un juge suppléant à la cour de justice de la république

Discuté en séance le 21 janvier 2021
Avis de la Commission : Défavorable — Avis du Gouvernement : Défavorable
( amendements identiques : )

Déposé le 21 janvier 2021 par : Mme Valérie Boyer, MM. Daniel Laurent, Frassa, Mmes Thomas, Drexler, M. Cuypers, Mme Herzog, MM. Le Rudulier, Boré, Chasseing, Longeot, Henri Leroy, Alain Marc, Panunzi, Laménie, Mmes Noël, Dumas, MM. Longuet, Bernard Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Nougein, Pellevat, Houpert.

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Rédiger ainsi cet article :

Le code pénal est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa de l’article 222-22-1 est ainsi rédigé :

« Lorsque les faits sont commis sur la personne d'un mineur de quinze ans par une personne majeure, la contrainte est présumée sans qu’il soit possible d’apporter la preuve contraire lorsque l’auteur des faits connaissait ou ne pouvait ignorer l’âge de la victime. » ;

2° À l’article 227-25, après les mots : « agression sexuelle », sont insérés les mots : « et hors les cas prévus à l’article 222-22-1 ».

Exposé Sommaire :

Sur les 300 000 victimes de viol estimées chaque année, 60% sont des enfants. Parmi les appels reçus par le Collectif féministe contre le viol, 30% ont pour objet des violences sexuelles commises contre des enfants de moins de 11 ans.

Le roman autobiographique de Vanessa Springora « Le consentement » a relancé le débat sur l’âge de consentement sexuel des enfants. Paru le 2 janvier 2020, l’ouvrage raconte sa relation « sous emprise », à 14 ans, avec l’écrivain Gabriel Matzneff, alors quinquagénaire.

« Comment admettre qu’on a été abusé quand on ne peut nier qu’on a été consentant ? Quand, en l’occurrence, on a ressenti du désir pour cet adulte qui s’est empressé d’en profiter ? », pouvons-nous lire dans le livre de Vanessa Springora.

Plusieurs affaires de « viols » sur des mineures ont particulièrement ont ému les Français.

Par exemple, le jeudi 12 novembre 2020 la cour d’appel de Versailles a rejeté la demande de requalification en « viol » des faits présumés « d’atteinte sexuelle » commis par des pompiers sur une jeune fille mineure au moment des faits (de 13 à 15 ans).

Dans une autre affaire, la victime âgée de seulement 11 ans est tombée enceinte après un rapport sexuel avec un homme de 22 ans qu’elle ne connaissait pas. Poursuivi pour viol sur mineure de moins de 15 ans, l’accusé a pourtant été acquitté mardi 7 novembre 2017 par les jurés de la cour d’assises de Seine-et-Marne.

En effet, dans les motivations du jugement, la cour explique qu’aucun des éléments constitutifs du viol, à savoir « la menace, la violence, la contrainte ou la surprise », n’est établi et qu’un doute existe quant à savoir si l’accusé avait conscience de contraindre celle avec qui il a eu une relation sexuelle.

Le parquet général de la cour d’appel de Paris qui a fait appel de ce verdict a considéré à juste titre que « jusqu’à 15 ans, un enfant doit être préservé » et qu’ « on ne peut pas obtenir de lui des relations sexuelles car son consentement n’est pas éclairé. ».

Quelques semaines plus tôt, le parquet de Pontoise (Val-d’Oise) a poursuivi pour « atteinte sexuelle », et non pour « viol », un homme de 28 ans qui a eu une relation sexuelle avec une enfant de 11 ans. Il a été considéré que alors que la relation était consentie, car aucune contrainte physique n’a été exercée sur la mineure.

Rappelons-le en droit français le viol est défini comme « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. »[1].

Ces trois éléments : la violence, la contrainte et la surprise, auxquels il faut ajouter la menace, caractérisent l’absence de l’expression du consentement de la victime, mineure ou majeure.

C’est pourquoi le 25 novembre 2017, le Président de la République s’est déclaré en faveur d’un âge minimum de consentement fixé à 15 ans « par souci de cohérence et de protection de mineurs. ».

Dans le cadre du projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles, notamment sur les mineurs, la secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et la garde des Sceaux de l’époque, décident, d’intégrer dans le texte, un âge de non-consentement sexuel, seuil en dessous duquel un enfant est automatiquement considéré comme non consentant à un acte sexuel.

En mars 2018 le Conseil d’Etat a estimé qu’un âge minimum pourrait « porter atteinte à la présomption d’innocence » et donc être jugé inconstitutionnel.

Suivant cet avis, le Gouvernement abandonne cette mesure dans le projet de loi définitif [2].

Les jugements se feront au cas par cas. Pour prouver le non-consentement de la victime, il faudra toujours préciser les notions de menace, surprise ou contrainte, mais la loi intègre désormais la notion « d’abus de vulnérabilité ». La personne majeure devrait prouver que la victime avait la maturité ou le discernement pour donner son consentement.

Selon ce texte, le fait pour un majeur d’avoir une relation sexuelle avec un mineur de moins de quinze ans est passible de sept ans d’emprisonnement, contre cinq auparavant. Il allonge le délai de prescription de vingt à trente ans pour les crimes sexuels commis sur les mineurs.

Mais il est important de prévoir un seuil de consentement comme le réclament de nombreuses associations. Muriel Salmona, psychiatre, présidente de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie estime que « cet âge minimal est un progrès dans la protection de l’enfance dont on ne peut pas faire l’économie. Il est nécessaire que cela revienne dans le débat. ».

Maître Rodolphe Constantino, avocat de l'association Enfance et Partage, parle d'une affaire absolument scandaleuse : « Aujourd'hui, on est dans cette situation absolument extraordinaire, qui est dénoncée depuis très longtemps par les associations de protection de l'enfance, à savoir que la définition du viol ou d'une agression sexuelle est exactement la même selon que l'on soit en présence d'un majeur ou d'un mineur. Quel que soit l'âge de la victime, en gros, elle est toujours mise en situation par la justice d'avoir à faire la démonstration qu'elle n'était pas consentante. Je crois qu'il est grand temps qu'on change cela. J'avais moi-même porté des propositions à des parlementaires, mais ça n'a jamais été entendu. Cette affaire est peut-être l'occasion de remettre ce débat sur le tapis. ».

Concernant les mineurs, il existe dans notre droits français différents seuils d’âge : 6 ans, 13 ans, 15 ans, 18 ans.

Nous pouvons prendre les exemples suivants :

- l'âge de la majorité civile fixé à 18 ans depuis la loi n° 74-631 du 5 juillet 1974, âge auquel notre société considère l'être humain civilement capable et responsable de ses actes ;

- l'âge de la majorité pénale, soit celui à partir duquel un délinquant est soumis au droit pénal commun et ne bénéficie plus de l'excuse de minorité, qui s'établit également à dix-huit ans. Certains mineurs de plus de 16 anspeuvent être assimilés à des majeurs sur le plan pénal dans certaines circonstances particulières au regard de la gravité des faits reprochés et/ou de récidive (article 20-2 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, loi n° 2007-297 du 5 mars 2007). Le Gouvernement envisage dans sa réforme de la justice des mineurs une présomption de non-discernement pour les moins de 13 ans. En clair : en-dessous de cet âge, un jeune ne pourra pas être poursuivi pénalement.

- l'âge de la majorité sexuelle, considéré comme celui à partir duquel une personne majeure peut avoir un rapport sexuel avec un mineur civil sans commettre une infraction pénale. Il est de 15 ans, bien qu'aucun texte ne le définisse précisément comme tel hormis sous l'angle de l'aggravation des peines applicables en cas d'infraction (articles 227-22, 227-23, 227-25, 227-26 et 227-28 du code pénal). Il conviendrait donc de fixer une présomption irréfragable de non consentement pour les mineurs de 15 ans pour être cohérence avec cela.

Par ailleurs, ailleurs nous devons parler de « contrainte » et non « d’absence de consentement » car seul l’auteur est responsable de ses actes.

Le nouveau dispositif proposait par cet amendement serait conforme à deux principes constitutionnels :

- Le principe de présomption d’innocence proclamé par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme. En effet, l’infraction ne sera pas systématique dès lors qu’il faudra prouver l’acte, la nature de l’acte et démontrer que l’auteur connaissait ou ne pouvait ignorer l’âge de la victime

- Le principe d’égalité devant la loi prévu par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme. En effet, ce nouveau dispositif est exclu du champ d’application de l’atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans (article 227-25 du code pénal).

Aussi ce texte suit les recommandations de l’avis du Conseil d’Etat du 21 Mars 2018[3].

Il appartiendra au législateur de s’interroger une fois ce dispositif adopté sur l’efficacité des autres mesures existantes afin d’envisager, éventuellement de nouvelles réformes.

Cet amendement :

- permettra de sanctuariser la protection des mineurs de moins de 15 ans. Selon le juge Edouard Durand[4]: « le passage à l’acte de l’adulte est une perversion du besoin affectif de l’enfant ». En aucun cas un enfant peut être consentant à une relation sexuelle. Nous devons y mettre un terme ;

- ne crée pas une infraction autonome qui aurait tendance à complexifier notre droit. Que la victime soit majeure ou mineure, le viol est un crime déjà inscrit dans le code pénal de 1791.

Il est donc proposé de fixer une présomption de contrainte pour protéger les mineurs de moins de 15 ans lorsque l’auteur des faits connaissait ou ne pouvait ignorer l’âge de la victime.

[1]Article 222-23 du code pénal

[2]Loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes

[3]Avis du Conseil d’Etat du 21 mars 2018 sur le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes commises contre les mineurs et les majeurs

[4]Édouard Durand est un juge pour enfants, au tribunal de grande instance de Bobigny et membre du HCE, il est expert sur les questions des violences intrafamiliales et des droits des enfants qu'il lie étroitement à la protection des droits des mères

NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.

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