Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Réunion du 8 novembre 2006 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission a procédé à l'audition de M. Pierre Bordry, président de l'Agence française de lutte contre le dopage, accompagné de M. Michel Rieu, conseiller scientifique de l'agence.

Debut de section - Permalien
Pierre Bordry, président de l'Agence française de lutte contre le dopage

a tout d'abord observé que l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), mise en place le 1er octobre dernier, était une structure très jeune, dotée de compétences considérablement élargies par la loi n° 2006-405 du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage. Avant l'adoption de cette loi, le ministère de la jeunesse et des sports était chargé des contrôles, le Laboratoire national de dépistage du dopage, soumis à la tutelle du ministère, effectuait les analyses et le Comité de prévention et de lutte contre le dopage (CPLD), auquel l'Agence française de lutte contre le dopage s'est substituée, exerçait un pouvoir de sanction. L'AFLD, dotée de la personnalité morale, dispose dorénavant de pouvoirs de contrôle, d'analyse et disciplinaires, dans des conditions prévues par le récent décret n° 2006-1204 du 29 septembre 2006.

S'agissant des pouvoirs de contrôle, il a souligné que le directeur des contrôles de l'agence exécutait en toute indépendance le programme fixé par l'agence, avec le soutien de correspondants dans les directions régionales de la jeunesse et des sports, selon des modalités fixées par une convention conclue le 3 octobre dernier entre l'Agence française de lutte contre le dopage et le ministère. Il a signalé que les présidents des fédérations sportives reçus par l'agence s'étaient déclarés très satisfaits de disposer d'un interlocuteur unique dans le domaine des contrôles, et qu'ils étaient prêts à le soutenir dans ses démarches.

Il a regretté que le décret sur les procédures de contrôle n'ait pas encore été publié et a déploré, dans ce domaine, certaines pratiques des directions régionales des sports qui nuisent à l'efficacité des contrôles.

Il a ensuite évoqué la question des autorisations à usage thérapeutique (AUT), appelée à devenir un enjeu important pour l'agence. En effet, 60 % des sportifs contrôlés pendant le dernier Tour de France disposaient de ces autorisations délivrées par l'Union cycliste internationale, après un simple examen administratif.

Puis il a présenté le nouveau régime des autorisations à usage thérapeutique, tel que prévu par la loi du 5 avril 2006, alors qu'auparavant les justifications thérapeutiques étaient présentées après le contrôle positif du sportif, la demande d'une AUT est désormais préalable à la pratique d'une activité sportive. Deux procédures sont prévues pour sa délivrance : d'une part, l'AUT dite « abrégée » est réputée acquise dès que l'agence reçoit la demande, si le dossier est complet ; d'autre part, l'AUT dite « standard » est soumise à une autorisation expresse de l'agence après avis conforme de trois médecins. 15 millions de sportifs seraient donc aujourd'hui potentiellement concernés par ces procédures. Tel est le cas des nombreux seniors qui prennent des traitements et exercent des activités sportives, et qui sont donc amenés à envoyer massivement des demandes à l'agence.

s'est inquiété de la probable multiplication des demandes d'AUT, qui représente un risque financier important pour l'agence, largement sous-estimé par le ministère de la jeunesse et des sports dans le budget prévu pour 2007. La rémunération de 12 euros par dossier envisagée pour les médecins ne semble pas de nature à les motiver. C'est pourquoi un projet a été mis à l'étude visant à faire participer financièrement les sportifs demandant des autorisations à usage thérapeutique.

Il a regretté, à ce titre, que le décret sur les autorisations d'usage à des fins thérapeutiques n'ait pas encore été publié.

Il s'est réjoui, enfin, du processus engagé par l'Agence mondiale antidopage de rédaction d'un code mondial antidopage, qui permettra que l'ensemble des sportifs soient traités de la même manière. Il a toutefois tenu à préciser qu'il souhaitait que la distinction entre les manifestations sportives nationales et internationales, existante en droit français, soit confirmée dans ce code.

S'agissant des analyses, il a évoqué le laboratoire de dépistage du dopage de Chatenay-Malabry, pour se féliciter qu'il soit passé d'un statut d'établissement public sous tutelle du ministère à celui de service de l'Agence française de lutte contre le dopage.

Sur le régime des sanctions, il a rappelé que l'Agence française de lutte contre le dopage était compétente pour les compétitions sportives organisées par les fédérations nationales. Il s'est ensuite cependant étonné que le décret sur les sanctions disciplinaires n'ait pas encore été publié.

Tout en se louant de ce que le dopage animal relève du domaine de compétences de l'agence, M. Pierre Bordry a, à nouveau, exprimé sa déception relative à l'absence de décret d'application des mesures législatives adoptées en avril dernier.

Il a enfin abordé le thème de la recherche dans le domaine du dopage, rendue notamment nécessaire par l'évolution rapide des méthodes de dopage. Il a insisté sur le rôle important du comité scientifique de l'agence, confirmé par le décret n° 2006-1204 du 29 septembre 2006. Il a par ailleurs cité un projet de recherche relatif à la détermination du profil métabolique de sportifs, mis en place par l'agence, en coopération avec la Fédération française de cyclisme et l'Institut national de recherche agronomique (INRA), auquel l'Agence mondiale antidopage a financièrement contribué. Il a fait part de son scepticisme quant à la création par le ministère de la jeunesse et des sports d'une structure entièrement dédiée à la recherche sur le dopage, faisant état de sa préférence pour le financement de projets ponctuels avec l'appui de différents centres de recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

s'est, sur ce point, déclaré convaincu que la mise en place de directions de recherche par objectif et sur appels d'offre, conformément aux orientations de la loi de programme pour la recherche adoptée le 18 avril 2006, serait à la fois moins coûteuse et plus performante que la création d'une structure administrative spécifiquement consacrée au dopage, telle que l'envisage le ministre des sports.

Il a également déploré que le retard pris dans la publication des décrets d'application de la loi relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs empêche l'agence récemment mise en place d'exercer l'ensemble de ses missions.

Il a enfin rappelé que la visite du laboratoire de Chatenay-Malabry par la commission avait laissé un souvenir mitigé, notamment quant à l'état des locaux et a souligné l'importance de la sécurisation des données informatiques.

Un large débat a suivi l'intervention de l'orateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Dufaut

s'appuyant sur le rapport public 2005 du CPLD, s'est étonné du fait que le nombre de sportifs contrôlés positifs diminue alors que le nombre de contrôles augmente et a souhaité connaître les raisons de ce décalage. Il s'est ensuite interrogé sur les modalités du renforcement des capacités du laboratoire d'analyse et sur la participation de l'Agence française de lutte contre le dopage à la rédaction du code mondial antidopage. Il a également souhaité que M. Pierre Bordry donne son avis sur l'impact des procès du dopage, comme celui concernant les anciens membres de l'équipe Cofidis. Il a marqué tout son intérêt pour l'idée de la contribution financière des demandeurs d'AUT.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Murat

a tenu à rappeler que le sport jouait un rôle de lien social important dans les communes. Il s'est ensuite étonné de la faible sensibilisation des populations aux questions du dopage. Evoquant à son tour le mauvais état du Laboratoire de dépistage du dopage constaté lors de la visite de la commission, il a souhaité savoir si la réforme de l'organisation de la lutte antidopage allait entraîner des économies d'échelle, quelles étaient les priorités budgétaires de l'agence et si les sponsors privés allaient être associés à certaines actions de l'agence.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Martin

a souligné qu'une réflexion devait être menée sur la charge du calendrier des sportifs de haut niveau, qui incite les joueurs à utiliser des produits dopants. Il a ensuite proposé que soient instaurées des sanctions pécuniaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

a observé que cette étude sur les rythmes sportifs devait être menée à l'échelle internationale. En effet, dans certains sports, comme le rugby, les joueurs jouent toute l'année en passant d'un championnat de l'hémisphère sud à un de l'hémisphère nord, alourdissant ainsi considérablement leur calendrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Lagauche

a insisté sur le rôle d'information et de prévention que devait jouer l'Agence française de lutte contre le dopage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Émin

s'est interrogé sur la coopération internationale en matière de lutte contre le dopage et a évoqué le problème de la publicité faite autour des sportifs soupçonnés de dopage, puis innocentés par les contre-expertises.

Debut de section - Permalien
Pierre Bordry, président de l'Agence française de lutte contre le dopage

En réponse aux différents intervenants, M. Pierre Bordry a apporté les précisions suivantes :

- deux raisons semblent expliquer le paradoxe apparent entre l'augmentation des contrôles et la baisse du nombre des sportifs contrôlés positifs. La première est que l'Agence mondiale a élevé certains seuils au-delà desquels des substances sont interdites. La seconde est administrative et tient au fait que certaines directions régionales de la jeunesse et des sports ont une pratique dévoyée du contrôle inopiné des sportifs. Une note a été adressée au ministre sur ce thème ;

- l'implication de la France dans la rédaction des textes internationaux est un enjeu d'importance. L'Agence française de lutte contre le dopage a ainsi fait des propositions à l'agence mondiale antidopage sur le code mondial antidopage. Le Gouvernement va par ailleurs prochainement déposer au Parlement un projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage de l'UNESCO, qui pose quelques problèmes sur le plan juridique ;

- il existe deux types de réponses face au dopage, l'une judiciaire, comme en Italie, l'autre administrative, comme en France, cette dernière voie ayant le mérite d'associer les fédérations à la lutte contre le dopage ;

- la mise en place du site Internet de l'Agence française de lutte contre le dopage permettra d'assurer une meilleure information sur les enjeux du dopage. S'agissant de la prévention, l'agence mène notamment une discussion avec les éditeurs du dictionnaire médical Vidal afin que la présence de substances dopantes soit signalée dans leurs fiches sur les médicaments ;

- l'engagement loyal des fédérations est un élément fondamental de la lutte contre le dopage. La collaboration avec l'AFLD se révèle être plus aisée qu'avec le ministère des sports, dans la mesure où les relations sont univoques et concernent uniquement les questions de dopage ;

- l'adhésion de l'agence à l'association des agences de lutte contre le dopage lui permet de se nourrir des expériences étrangères.

Debut de section - Permalien
Michel Rieu, conseiller scientifique de l'Agence française de lutte contre le dopage

est ensuite intervenu afin d'apporter les précisions suivantes :

- afin de sensibiliser le grand public à l'utilisation de certaines substances dans le cadre d'une pratique sportive, l'agence a organisé deux séries de 300 contrôles en 2006 sur des coureurs anonymes et volontaires, au marathon de Paris et à la « grande étape », organisée avant le Tour de France ;

- la médecine du sport doit s'interroger sur les cadences des compétitions, qui incitent effectivement les sportifs à utiliser des produits interdits et qui posent en outre des problèmes de santé importants. Les demandes d'autorisations à usage thérapeutique devraient permettre d'avoir une meilleure vision de l'évolution de la santé des sportifs ;

- une enquête réalisée par le CPLD auprès de 6.000 jeunes a révélé que 10 % d'entre eux avaient été confrontés au problème du dopage dans le cadre du sport scolaire ;

- s'agissant des contrôles, les méthodes se diversifient et les prélèvements capillaires et sanguins sont devenus plus courants. Par ailleurs, des marqueurs indirects du dopage doivent également être utilisés.