La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Bruno Retailleau et a établi le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 121 (2009-2010), modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la lutte contre la fracture numérique.
après avoir rappelé que la proposition de loi déposée par le sénateur Xavier Pintat a été discutée en première lecture devant le Sénat en juillet 2009 et par l'Assemblée nationale en novembre, a indiqué que le texte est structuré autour de deux axes.
Le premier, relatif au réseau à très haut débit, a pour but de compléter les dispositions de la loi de modernisation de l'économie et vise à développer ce réseau, notamment dans les zones moyennement et peu denses. Soulignant la possibilité désormais offertes aux collectivités territoriales d'intervenir comme investisseur minoritaire dans des réseaux ouverts de communication électronique, elle s'est félicitée du maintien du fonds d'aménagement numérique des territoires, qu'elle a indiqué avoir défendu face aux critiques des députés comme elle s'y était engagée devant les sénateurs. Elle a ajouté que ce fonds pourrait bénéficier de l'affectation d'une enveloppe de deux milliards d'euros au titre du grand emprunt national.
S'agissant du second axe, qui a trait au basculement vers la télévision numérique terrestre (TNT), elle a rappelé que la ligne budgétaire initiale de 277 millions d'euros consacrée à l'accompagnement des particuliers lors de l'abandon de la télévision analogique, sera augmentée suite aux arbitrages du Premier ministre. En premier lieu, le Gouvernement a présenté un amendement, adopté par l'Assemblée nationale, permettant, sous le contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), de doubler la puissance apparente rayonnée des émetteurs hertziens afin d'augmenter de 3 à 4 points la couverture dans certains départements mal desservis. En deuxième lieu, un amendement gouvernemental a été adopté pour aider financièrement, et sans condition de ressources, tous les ménages qui, malgré les efforts pour améliorer le taux de couverture numérique, ne bénéficieront pas d'une réception TNT et seront obligés d'acheter une parabole. Enfin, le Gouvernement a fait adopter à l'Assemblée nationale, suite aux observations du sénateur Pierre Hérisson, un amendement instaurant, dans les trois mois suivant la promulgation de la loi, une commission de transition vers la télévision numérique dans chaque département réunissant notamment le Groupement d'intérêt public (GIP) France Télé Numérique, les élus et le préfet. Ces commissions départementales de suivi déclineront au niveau local les engagements nationaux et pourront en particulier élaborer des conventions entre les maires de communes mal desservies par la TNT et les entreprises d'installation de paraboles.
Commentant le basculement vers la télévision numérique intervenu dans le Nord Cotentin le 18 novembre 2009, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet a constaté que les demandes d'accompagnement financier ont été moins nombreuses que prévu, tandis que les appels téléphoniques pour obtenir une assistance technique ont dépassé les prévisions. L'expérience normande permettra au ministère d'ajuster ses priorités d'action lors du basculement vers la télévision numérique pour les autres territoires. En outre, elle a indiqué qu'un fascicule est en cours d'élaboration au ministère afin d'informer les personnes peu familières du mode de fonctionnement des télécommandes de téléviseurs.
après avoir rappelé que l'économie générale du texte adopté au Sénat en première lecture n'est pas remise en cause par les apports de l'Assemblée nationale, a précisé les trois points adoptés sans modification par les députés :
- désormais, un opérateur tiers, lors de l'installation de la fibre optique dans un immeuble, pourra demander la mise à disposition d'installations et d'éléments de réseau spécifiques ;
- en outre, les collectivités territoriales auront la faculté d'intervenir comme investisseurs minoritaires dans des réseaux ouverts de communication électronique ;
- enfin, l'appel d'offres pour l'octroi des fréquences télécom du dividende numérique sera arrêté par le ministre compétent, sur proposition de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et après avis de la commission du dividende numérique, en prenant en compte notamment l'impératif d'aménagement numérique du territoire.
Puis, M. Bruno Retailleau, rapporteur, a indiqué que les députés avaient utilement complété le dispositif voté par le Sénat en décidant :
- l'instauration des commissions départementales de transition vers la télévision numérique ;
- le doublement de la puissance apparente rayonnée des émetteurs hertziens sous le contrôle du CSA ;
- la création du fonds d'aide financière à l'équipement en moyens de réception alternatifs de la TNT.
Il a ensuite approfondi les questions relatives à la TNT.
Premièrement, le développement de la télévision mobile personnelle (TMP), au point mort depuis un an, pourrait rapidement s'accélérer. Après avoir rappelé que le Gouvernement avait justement diligenté une mission sur ce sujet, M. Bruno Retailleau, rapporteur, a indiqué que Télédiffusion de France (TDF), opérateur technique, aura un rôle essentiel à jouer pour relancer ce projet.
Deuxièmement, l'ARCEP sera informée des projets de schémas directeurs d'aménagement numérique avant de les diffuser auprès de l'ensemble des opérateurs et collectivités concernés.
Troisièmement, le fonds d'aménagement numérique des territoires pourrait recevoir deux milliards d'euros issus du grand emprunt national, si le Président de la République suit les recommandations de la commission présidée par Alain Juppé et Michel Rocard. A cet égard, M. Bruno Retailleau, rapporteur, a salué les modifications suivantes apportées par les députés :
- l'abonnement au très haut débit devra proposer des tarifs raisonnables ;
- il revient désormais au ministère, par décret et non plus sous l'autorité de l'ARCEP, de déterminer les territoires dans lesquels il existe une carence des opérateurs privés ;
- les dispositions relatives à l'accès aux tranchées, issues d'un amendement de M. Hervé Maurey, et obscurcies par l'adoption de plusieurs sous-amendements sénatoriaux, ont été clarifiées.
Puis M. Bruno Retailleau, rapporteur, a abordé la question de l'enfouissement des réseaux et du financement des fourreaux, des chambres de tirage et des câbles. A cette occasion, il a défendu la position du Sénat : soit France Télécom, opérateur historique, finance ces équipements et en devient légitimement propriétaire, soit le coût est pris en charge par les collectivités territoriales, qui en deviennent alors propriétaires.
Enfin, il a indiqué que la proposition de loi telle qu'adoptée par l'Assemblée nationale prévoyait la remise de cinq rapports au Parlement sur des thèmes aussi variés que la portabilité de l'adresse électronique en cas de changement de fournisseur d'accès Internet, les enjeux du fossé numérique ou encore le stockage des données personnelles.
Constatant que le texte avait été profondément modifié au cours de son examen parlementaire, M. Michel Teston a souhaité savoir si l'aide financière en faveur des collectivités territoriales qui ont mis en place des émetteurs secondaires pour améliorer la couverture TNT sera suffisante. Puis il s'est demandé si l'aide de 250 euros destinée à l'acquisition d'une parabole couvre intégralement les dépenses engagées par les ménages. Il a ensuite plaidé pour une nouvelle définition du service universel en matière de communication électronique à haut et très haut débit. Abordant la question des ressources du fonds d'aménagement numérique des territoires, il a craint que les sommes collectées par le grand emprunt national soient insuffisantes et a annoncé que le groupe socialiste présentera des amendements en séance publique à ce sujet. Par ailleurs, il a fait part de son étonnement quant aux taux de couverture analogique par région, présentés par le Gouvernement devant la commission en charge de l'économie, constatant que certains taux sont anormalement bas. S'agissant de l'augmentation de la puissance des émetteurs hertziens, il a considéré qu'elle peut engendrer des perturbations dans les réceptions de signaux et n'apportera pas de solution dans les territoires au relief accidenté. Il a conclu en indiquant que le groupe socialiste ne participerait pas au vote sur les deux amendements présentés en commission.
dans l'hypothèse où le rapporteur appelle à un vote conforme sur le texte, a déploré l'absence de marge de manoeuvre du Sénat par rapport au texte voté par l'Assemblée nationale. Toutefois, il a considéré que la proposition de loi respecte globalement les orientations des sénateurs et améliore de manière pertinente les autres dispositions. Concernant le fonds d'aménagement numérique des territoires, il a souhaité que le Président de la République augmente significativement l'enveloppe de 2 milliards d'euros et que ce fonds bénéficie de recettes pérennes. Dans cette perspective, il a exhorté le Gouvernement et ses collègues à imposer aux opérateurs de financer ce dernier plutôt que de compenser la disparition des recettes publicitaires sur les chaînes publiques comme l'a prévu la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Il a d'ailleurs annoncé qu'il déposera sans doute des amendements en ce sens en séance publique. Enfin, il a regretté l'absence d'un amendement gouvernemental sur la redéfinition du service universel pour les communications électroniques à haut et très haut débit.
saluant les efforts du Gouvernement et du rapporteur, a néanmoins souligné la forte inquiétude des élus, qui doutent des moyens mis en oeuvre par l'Etat pour résorber la fracture numérique. Il a souhaité que le fonds d'aménagement numérique précité dispose de ressources pérennes et que les petites communes puissent profiter des réseaux de fibre optique installés le long des infrastructures de lignes à grande vitesse ou des autoroutes. Par ailleurs, il s'est interrogé sur les frais couverts par l'enveloppe de 250 euros évoquée pour l'achat d'une parabole. Enfin, il a déploré que l'on n'utilise pas davantage les poteaux électriques pour développer l'accès à Internet.
a apporté les éléments de réponse suivants :
- l'assistance technique pour les personnes fragiles lors du basculement vers la TNT ne doit pas se confondre avec l'aide financière de 250 euros qui couvrira en théorie l'achat d'une parabole standard, du décodeur et les frais d'installation ;
- le service universel est une notion d'origine communautaire, mais le Gouvernement a souhaité d'ores et déjà revoir sa définition, en attendant un accord au niveau européen ;
- les deux milliards d'euros qui seraient issus du grand emprunt national pour abonder le fonds d'aménagement numérique constituent indéniablement un progrès majeur dans la mesure où l'Etat a largement confié aux collectivités territoriales le soin de financer les infrastructures nécessaires ;
- le taux de couverture hertzien actuel avoisine, en mode analogique, les 99 % si l'on ajoute aux 95,9 % de réception en qualité standard les 3 % en qualité dégradée. Le taux de couverture numérique devrait s'établir, quant à lui, aux alentours de 95 à 96 %, étant précisé qu'il ne subsistera pas de mode de réception dégradée pour ce type de technologie ;
- le département est l'échelon pertinent pour l'élaboration des schémas directeurs d'aménagement numérique ;
- l'alimentation du fonds d'aménagement numérique par des recettes pérennes ne pourra se faire que dans quelques années, une fois le réseau développé, performant et viable ;
- la technique dite « du courant porteur en ligne » (CPL) est efficace pour relier deux lieux peu espacés l'un de l'autre, comme dans un immeuble ou dans un appartement par exemple, mais n'est pas pertinente pour relier entre elles des communes isolées.
Abordant ensuite les amendements présentés sur cette proposition de loi, la commission, sur proposition du rapporteur, a rejeté l'amendement n° 1 présenté par M. Jean-François Le Grand et apportant des précisions sur le régime de servitude des points hauts d'émission radioélectrique.
La commission, sur proposition du rapporteur, a également rejeté l'amendement n° 2 présenté par M. Jean-Paul Virapoullé, relatif aux délégations de service public pour les câbles sous-marins reliant les régions d'outre-mer. M. Bruno Retailleau, rapporteur, a en effet considéré que cet amendement n'est pas recevable en deuxième lecture car il n'est pas en lien direct avec les dispositions restant en discussion. En outre, le sujet évoqué pose de réelles difficultés de fond et mérite une réflexion approfondie.
Puis, il a indiqué ne pas proposer d'amendement à la commission sur cette proposition de loi, considérant qu'une adoption rapide de celle-ci est indispensable pour accélérer certains projets, notamment le basculement vers la télévision numérique, et débloquer des situations actuellement au « point mort ».
a indiqué que le groupe socialiste ne prendra pas part au vote sur les deux amendements et sur le texte de la proposition de loi et réserve sa position pour le vote en séance publique.
a également indiqué que le groupe de l'Union centriste ne participera pas au vote sur les amendements et sur le texte de la proposition de loi.
Puis la commission a adopté la proposition de loi dans sa version transmise par l'Assemblée nationale.