Commission d'enquête Autorités administratives indépendantes

Réunion du 17 septembre 2015 à 13h40

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • HAS

La réunion

Source

La réunion est ouverte à 13 h 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Nous recevons M. Jean-Luc Harousseau, président, M. Dominique Maigne, directeur, et Mme Véronique Chenail, secrétaire générale, de la Haute autorité de santé (HAS). Créée en 2004, la HAS est une autorité publique indépendante à caractère scientifique. Sa vocation est d'assurer un accès pérenne et équitable aux soins grâce à l'évaluation des produits de santé, des pratiques professionnelles et de l'organisation des soins. Ses trois missions sont l'évaluation médicale, l'amélioration de la qualité des soins et l'information des publics. Depuis 2005, plus de dix modifications législatives ont élargi ces missions. Le projet de loi de modernisation de notre système de santé, en cours d'examen, apporte de nouveaux élargissements. La HAS dispose de l'autonomie financière et son budget est arrêté par le collège. Ses dépenses ont été, en 2014, de 50,7 millions d'euros, contre 61,6 millions d'euros en 2010. L'origine de ses ressources a également été modifiée.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Jean-Luc Harousseau et M. Dominique Maigne prêtent serment.

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Vous avez bien résumé nos missions et rappelé notre statut d'autorité publique indépendante à caractère scientifique. Ce statut nous impose une exigence de rigueur scientifique, qui se traduit par une méthodologie bien précise : nous nous entourons d'experts pour prendre nos décisions. Notre indépendance est fondamentale, vis-à-vis de l'industrie pharmaceutique comme des différents ministères de notre secteur, qu'il s'agisse du ministère de la Santé ou des Finances et des représentants des professionnels de santé et des malades.

Rigueur scientifique et indépendance, donc, constituent notre code génétique. Avec la crise du Mediator, notre fonctionnement est devenu plus difficile, car nous devons choisir des experts à la fois compétents et n'ayant pas de liens d'intérêt avec l'industrie pharmaceutique. Cela a pu nous exposer à des critiques de la part de scientifiques. Certaines sociétés savantes refusent de collaborer avec nous car elles estiment que nos critères de sélection sont trop rigides. À l'inverse, certains conflits d'intérêts peuvent nous échapper, ce qui nous expose à des recours devant le Conseil d'État, comme ce fut le cas en 2011. Nos procédures méthodologiques ralentissent notre travail, aussi.

Nous sommes très attachés à notre statut d'autorité publique indépendante à caractère scientifique. Nous présentons chaque année notre rapport d'activité aux commissions des affaires sociales du Sénat et de l'Assemblée nationale. Presque chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) confie une nouvelle mission à la HAS : c'est que vous savez que vous pouvez compter sur notre avis. Beaucoup de professionnels cherchent aussi à recueillir notre validation.

Depuis le début de mon mandat, en 2011, nous faisons des efforts pour contrôler nos dépenses, en particulier les frais de fonctionnement. Ainsi, nous préservons nos capacités d'investissement, à dotation budgétaire constante. Nous avons toutefois demandé que son niveau ne baisse pas, car cela menacerait à terme notre activité. Outre la limitation des personnels, nous avons regroupé nos activités, qui étaient réparties entre deux sites, sur un seul emplacement, toujours à Saint-Denis. Le déménagement, qui aura lieu en novembre, sera source d'économies substantielles sur notre loyer. Pour autant, notre dotation ne doit pas diminuer, sans quoi l'avenir de notre institution serait menacé.

Je préside notre collège, constitué de huit membres : deux sont nommés par le Président de la République, deux par le Président du Sénat, deux par celui de l'Assemblée nationale et deux par celui du Conseil économique, social et environnemental. Il est renouvelé par moitié tous les trois ans. Les mandats sont de six ans. Le prochain renouvellement doit intervenir en 2017, sauf si la loi Santé en décide autrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Votre financement est assuré presque entièrement par l'assurance maladie. Cela vous donne-t-il vraiment l'autonomie financière prévue par la loi ? Comment négociez-vous votre budget ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Nos ressources provenaient aussi d'une taxe sur la promotion de l'industrie pharmaceutique, ce qui posait quelques problèmes éthiques. De plus, le produit de cette taxe était très variable et non prévisible. La crise du Mediator a eu le mérite de conduire à une clarification : la dotation actuelle, plus simple, regroupe les dotations de l'État et de l'assurance maladie. Notre fonds de roulement, abondé il y a quelques années par un produit exceptionnel de la taxe, est encore important, mais il ne suffira pas plus de deux ou trois ans - et ceci à condition que la dotation ne baisse pas. En effet, aujourd'hui, nous dépensons plus que la dotation qui nous est attribuée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous êtes assis sur un tas d'or, ce qui facilite vos négociations. Lorsque vous aurez mangé vos économies, comment ferez-vous ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute autorité de santé

La question se pose dès à présent. Avec 400 collaborateurs, un budget de 55 à 60 millions d'euros, nous prenons des engagements dans la durée qui se traduisent par des perspectives triennales. Nous avons saisi le ministre de la santé, via la direction de la sécurité sociale et la direction générale de l'offre de soins, qui ont avec nous un dialogue en lien avec Bercy. Notre dotation est mentionnée (sans être individualisée) dans le cadre plus large de l'ONDAM. Il n'y a donc pas de négociation. Nous avons alerté nos directions techniques sur le fait que les engagements pris cette année peuvent avoir des conséquences jusqu'en 2018.

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Nous avons assumé de nouvelles missions à effectifs constants, voire en diminution, et sans dotation budgétaire supplémentaire : tout s'est fait par redéploiement interne. Ainsi, la mise en place d'un site d'information sur la qualité des soins dans les hôpitaux, ou encore l'évaluation médico-économique des produits de santé, qui nous a été confiée par le PLFSS de 2012, ont nécessité une réorganisation complète de nos services.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Estimez-vous avoir les moyens d'accomplir correctement vos missions ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Nous avons accepté des missions supplémentaires sans moyens supplémentaires. Le projet de loi Santé en discussion nous confiera celle d'évaluer les stratégies diagnostiques et thérapeutiques efficientes, ce qui accroîtra encore notre charge de travail. Nous sommes donc inquiets. Il faut chercher des mutualisations avec d'autres institutions sanitaires. Ainsi, nous nous rapprochons de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, que nous allons héberger. À l'expiration de son groupement d'intérêt public (GIP), nous souhaitons que nos personnels soient mutualisés. Suite à une enquête de l'Inspection générale des finances (IGF) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), certains rapprochements ont aussi été envisagés, par exemple avec des institutions telles que l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, l'Institut national du cancer ou le Haut conseil de la santé publique, qui travaillent sur des sujets proches.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute autorité de santé

Le projet de loi Santé en cours d'examen prévoit treize nouvelles occurrences de saisine de la HAS, parfois pour des missions lourdes. Avec le big data, les capacités à interroger les bases de données médico-administratives deviennent de plus en plus importantes. Nous n'avons donc pas les moyens, actuellement, d'assumer toutes les missions que le législateur souhaite nous confier. La réduction des dépenses effectuées depuis 2011 a été de 12 %, et a porté, par exemple, sur la communication mais aussi sur la recherche ou le soutien à des sociétés savantes et des collèges professionnels. Nous avons donc besoin d'un socle budgétaire revu et de financements pour les missions nouvelles. Une rebudgétisation s'impose.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J'ai été rapporteur d'une commission d'enquête qui se penchait notamment sur les dérives des thérapeutiques alternatives. Pourquoi certaines thérapies, ou pseudo-thérapies, n'étaient-elles pas évaluées par la HAS ? Par manque de moyens, d'experts, ou par volonté de ne pas y mettre le nez ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Notre programme de travail annuel émane essentiellement des directions du ministère, de l'assurance maladie, des sociétés savantes et des industriels. Nous offrons aussi aux associations de patients la possibilité de nous saisir. Enfin, nous pouvons nous autosaisir. Les choix sont donc difficiles. Nous avons traité en priorité la médecine conventionnelle classique, qui évolue très vite et fait courir plus de risques aux patients.

Nous sommes une autorité scientifique, qui travaille sur la foi de preuves. Il nous est difficile d'évaluer des thérapies qui ne reposent pas sur des concepts ou des publications scientifiques. Les dirigeants des sociétés d'homéopathie, par exemple, ne nous ont jamais fourni de données scientifiques probantes. La HAS ne s'est donc pas prononcée, même si les membres du collège peuvent avoir, bien sûr, leur avis personnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il serait déjà bon de faire savoir que vous ne considérez pas ces thérapies comme scientifiques.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute autorité de santé

La sécurité sanitaire peut être un angle d'attaque. Nous avons recommandé, par exemple, l'encadrement ou l'interdiction de certains actes de médecine esthétique, ou des échographies à visée non médicale. Mais en l'absence de données, il est difficile de rendre un avis. Ainsi en matière de médecine esthétique, notre avis a-t-il été censuré par le juge administratif, au motif qu'il était davantage fondé sur une conviction que sur des données.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J'en déduis que ce ne sont pas les préoccupations premières du ministère. Cela ne m'étonne pas. Vous dites qu'il est difficile de trouver des experts compétents qui n'aient pas de liens avec des laboratoires pharmaceutiques. C'est compréhensible. Comment faites-vous ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

La question se pose depuis le début. En arrivant, j'ai souhaité qu'on s'y penche de nouveau. Tous les experts doivent nous remettre une déclaration publique d'intérêts. Pour en encadrer l'évaluation, nous avons produit il y a un an un guide, précis et souvent sévère. Cela génère des difficultés et prend du temps. Aussi souhaitons-nous renforcer notre collaboration avec les sociétés savantes, qui pourraient nous aider à sélectionner des experts. Une structure interne, présidée par un professeur d'université d'une grande rigueur morale, supervise les questions d'éthique dans l'expertise. Un comité de déontologie et de gestion des conflits d'intérêts, présidée par un conseiller d'État, réunit des juristes, des représentants des patients et des médecins ; il est interrogé en cas de difficultés. Enfin, si un membre de la commission est en conflit d'intérêts, il doit se déporter. La sévérité de nos règles peut blesser certaines sociétés savantes : tel grand professeur s'étonne de se voir suspecter de conflit d'intérêts... Pour nous, c'est un poids considérable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Les contentieux en matière de certification font-ils peser un risque financier sur la HAS ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute autorité de santé

Il y en a très peu. Je n'en vois qu'un, à vrai dire, concernant un grand centre hospitalier universitaire (CHU), et qui n'a pas prospéré. Souvent, un recours gracieux suffit à dissiper les malentendus. Nous certifions 2 650 établissements de santé en France. Nos décisions ne doivent pas télescoper les procédures devant les tribunaux de commerce. Au besoin, nous suspendons notre certification.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Les rémunérations des membres du collège ne sont pas négligeables, cela peut se comprendre. Continuent-ils à avoir d'autres activités ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Le président l'est à plein temps. Au départ, certains membres ont conservé quelques activités cliniques, surtout des consultations. Il n'y en a plus qu'un dans ce cas, qui travaille énormément, le week-end notamment, pour préparer les réunions de sa commission.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute autorité de santé

Les fonctionnaires peuvent être mis à disposition, par l'Éducation nationale s'ils sont professeurs d'université, ou par l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP). Évidemment, leur rémunération est proportionnée : ils ne perçoivent que 600 euros par mois de la HAS.

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Je conserve, pour ma part, quelques patients au centre anticancéreux de Nantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Quels sont les buts et les méthodes de l'évaluation médico-économique ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Dès le PLFSS pour 2008, elles ont porté sur les grandes stratégies de santé publique, notamment concernant le dépistage. Il s'agit d'évaluer le rapport entre le coût et l'efficacité.

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Il y a deux stratégies possibles pour le dépistage du cancer du sein, par exemple : dépistage organisé ou individuel. Nous avons trouvé que le dépistage organisé était plus efficient. Depuis 2012, nous évaluons aussi les produits de santé. Un médicament nouveau est généralement plus cher que l'ancien. Le surcoût est-il justifié par un meilleur résultat ? C'est ce que nous évaluons. Les techniques viennent d'Angleterre. Parfois, elles servent à fixer le prix du médicament. Elles n'interviennent pas, toutefois, comme en Angleterre, pour limiter le remboursement. Ce travail, débuté en 2014, est de très grande qualité. Nous devons le rendre plus lisible et publier les avis de la commission aussitôt après son vote définitif.

L'impact budgétaire doit être aussi pris en compte. Ainsi, le Sovaldi, un nouveau traitement de l'hépatite C, a coûté des centaines de millions d'euros à l'assurance maladie, au point que les parlementaires ont décidé, dans le PLFSS pour 2015, de plafonner certaines dépenses si les entreprises n'y participaient pas. Mais il est si efficace que ce coût peut sembler acceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

C'est le noeud du problème. Comment arbitrer entre efficacité et coût ? Le choix est de nature éthique. Je pense en particulier aux maladies rares. Quels sont les critères de décision ? Sont-ils économiques ? En fait, il s'agit d'un choix politique.

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Cancérologue, j'ai été amené à prescrire des médicaments très chers qui ont bouleversé le pronostic des malades. Ce qui compte le plus, c'est l'intérêt du malade. Mais certains médicaments sont très chers et peu efficaces. Vous avez fait allusion à des maladies rares mais potentiellement très graves. Le rôle de la commission de transparence de la HAS est de savoir quel service rend le médicament, si son prix élevé est justifié : si le médicament sauve des vies, la réponse est oui.

Début septembre, le National Health Service (NHS) britannique a supprimé du Fonds spécial pour le cancer une vingtaine de médicaments dont certains sont très utiles, en raison de leur coût. En France, on ne pratique pas un tel rationnement pour des raisons budgétaires. En revanche, l'évaluation médico-économique sert à fixer le juste prix et à dire aux laboratoires pharmaceutiques qu'ils vont parfois trop loin. Il faut réfléchir à l'utilisation qui est faite de ces médicaments : l'essentiel, c'est que tous les malades qui en ont besoin aient accès aux médicaments adaptés. Il faut parfois faire des choix. En raison du coût du Sovaldi, il a fallu hiérarchiser les urgences, faute de pouvoir traiter tous les malades tout de suite. Le rôle de la HAS est de développer les paramètres les plus précis possibles pour quantifier les faits cliniques et définir le rapport coût-efficacité. Si les firmes ne sont pas raisonnables sur les prix, on peut aboutir à une impasse. Il faut aussi déterminer des critères de choix des médicaments pour sélectionner les malades qui en ont véritablement besoin. Plus la recherche progresse, plus les médicaments coûtent cher : c'est une vraie question, notamment en cancérologie et en virologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Jean de Nicolay

Quel est le statut des 400 personnels de la HAS : fonctionnaires détachés ou contractuels ? Comment vous situez-vous au niveau européen ou mondial, par rapport à vos homologues ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute autorité de santé

La HAS a pour spécificité d'avoir favorisé la logique professionnelle et d'avoir recruté des professionnels issus des secteurs dans lesquels elle a des missions. Tous ont des contrats de travail, comme le prévoit un décret de 2003 relatif aux agences sanitaires, ce qui n'empêche pas que certains soient détachés en tant que fonctionnaires.

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Nous sommes l'institution qui a le champ de missions le plus large dans le monde. Le National Institute for Health and Care Excellence (NICE) britannique exerce des missions proches des nôtres, mais nous sommes les seuls à certifier les établissements de santé. Notons que le NICE dispose d'un budget bien plus élevé que le nôtre, et sous-traite en outre une partie de ses évaluations à des structures académiques.

Nous avons peu de relations avec les institutions américaines, étant donné la différence de nos systèmes sanitaires, mais des rapports privilégiés avec nos homologues anglais et allemands, avec des réunions annuelles. Surtout, nous sommes les plus actifs dans le réseau européen d'évaluation des produits de santé, qui associe toutes ces institutions. La HAS a été à l'initiative d'un regroupement destiné à homogénéiser les méthodes d'évaluation - sachant que nous n'intervenons pas sur l'autorisation de mise sur le marché, qui relève de l'Agence européenne des médicaments. Enfin, nous avons développé, avec succès, grâce à une dotation budgétaire européenne, les évaluations précoces qui consistent à travailler avec les industriels pour leur indiquer comment développer leur médicament pour aboutir à une mise à disposition rapide. Il y a également un réseau européen de la qualité des soins ; là aussi, nous avons été leader.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Les dialogues précoces figurent dans le projet de loi Santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

En tant que médecin, vous pensez avant tout aux patients, avez-vous dit, ce qui est tout naturel. Nous aussi, nous pensons avant tout à nos concitoyens. Mais la position de la France me semble curieuse. Nous avons tous intérêt à avoir le meilleur médicament possible pour apporter le meilleur soin possible au patient, or la prescription étant libre, on n'avancera guère si l'on se contente de renégocier le prix quand un médicament est jugé moins bon. Il continuera à être prescrit, et à être remboursé !

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Vous prêchez un convaincu, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

Inspirons-nous donc, avec intelligence, du système anglais.

En Bretagne, je préside un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), comme beaucoup d'élus locaux. Nous avons un réel problème de sur-médication des personnes âgées. Cela relève-t-il de votre autorité ?

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Je ne suis pas sûr que le système anglais soit un exemple à suivre, quand il aboutit au rationnement et à priver les malades de médicaments très efficaces. La collectivité n'a pas à rembourser un médicament qui est moins bon que d'autres qui existent : en théorie, dans le code de la sécurité sociale, un produit qui n'apporte pas d'amélioration par rapport à ce qui existe doit être moins cher, mais il est admis. Je milite pour une évaluation purement comparative des médicaments : si le nouveau médicament est meilleur, on le prend ; s'il est égal, il doit être moins cher ; s'il est moins bon, on le refuse. La ministre a confié une réflexion sur ces sujets à Dominique Polton, économiste de la santé ; nous verrons ce qui sera proposé.

Nous ne sommes pas les seuls à faire un usage excessif des médicaments, et notamment des somnifères, dans les EHPAD. La HAS s'est penchée depuis 2007 sur le problème de la consommation de benzodiazépines chez les personnes âgées, car le mauvais usage des médicaments entraine deux conséquences : des dépenses de santé injustifiées et des effets secondaires qui peuvent être graves, comme des troubles de la conscience ou des chutes. Nous produisons des recommandations, des fiches de bon usage des médicaments, nous certifions les logiciels d'aide à la prescription et à la dispensation. Nous travaillons notamment sur la conciliation pharmaceutique, pour éviter qu'un patient ne se voie prescrire des médicaments antagonistes. Ces recommandations sont-elles suivies d'effet ? Malgré notre rapport de 2007, la consommation de benzodiazépines n'a que très peu diminué...

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé

Nous avons des relations privilégiées avec les associations de patients agréées. Outre la rédaction d'ouvrages destinés aux usagers et le site d'information sur la certification des établissements de santé, nous allons créer une commission d'information des usagers. Nous menons une réflexion sur la décision partagée, qui vise à mieux associer le patient aux décisions le concernant. Enfin, siègent dans nos commissions des usagers qui sont considérés comme des experts à part entière : même défraiement, mêmes contraintes en termes de déclaration d'intérêts, sachant que certaines associations de patients sont financées par l'industrie pharmaceutique. La commission de la transparence, qui évalue les médicaments, et celle qui évalue les dispositifs médicaux vont désormais comporter elles aussi des représentants des patients ; le décret vient de paraître, nous nous en réjouissons.

La réunion est levée à 14 h 50.